Chapitre 42 – Partenaires

– D'après Kankuro, il bosse ici certains soirs, dit Ino. Allez, entre.

Elle, Sakura et Hinata se tenaient devant la porte d'une des permanences. Presque aussi nerveuse qu'au début des demi-finales, Hinata regardait la poignée comme si la toucher lui infligerait une brûlure atroce. Comment est-ce que Gaara parvenait à l'angoisser autant qu'un tournoi retransmis en direct devant des milliers de joueurs et dont l'enjeu était de rencontrer celui avec qui elle partageait ses nuits depuis des mois ?

Partageait ses nuits, ça sonnait super bizarre...

– Hinata ?

Elle se secoua.

– Je ne peux pas. J'ai dit que c'était la meilleure idée, mais c'était surtout n'importe quoi. Je vais réviser toute seule.

Le silence de ses amies la fit soupirer et elle ajouta :

– De toute façon, il acceptera jamais.

Silence.

– Écoutez, dit-elle en se retournant, c'est pas que je choisis la facilité, il n'y a aucune... chance...

Gaara la fixait. D'accord. Donc Ino et Sakura ne disaient plus rien parce qu'il était là ? Il était là depuis combien de temps ?!

– Je peux passer ?

Un rapide regard vers Ino et Hinata devina la soirée de souffrance qui l'attendait si elle ne posait pas sa question. Les souffrances estimées quadruplèrent quand elle s'écarta du passage. Écrasée par l'aura menaçante, elle se tordit les mains.

– G-Gaara ?

Et elle bégayait en plus. Parfait.

Par-dessus tout, elle n'avait toujours pas trouvé comment formuler sa demande : « Aide-moi à avoir vingt en maths ? », « Mon père ne me laissera faire ce que je veux que si j'ai vingt au prochain contrôle ! », « Comment est-ce que tu fais pour avoir de bonnes notes en maths ? ».

Comme il attendait la suite, elle fut forcée de se lancer :

– J-J'ai complètement raté le contrôle surprise de maths, s-si j'ai pas vingt au prochain je vais avoir de gros problèmes avec mon père et je ne sais pas comment faire. C'est impossible que j'ai vingt, je suis vraiment nulle en...

– À partir du moment où tu as fait le tour de tous les exercices qu'il peut proposer et que tu sais comment les résoudre, je ne vois pas en quoi c'est impossible.

– Oui, j'ai essayé, j'ai vraiment essayé, mais j'y arrive pas.

– Alors tu n'as pas la bonne méthode.

– Toi, t-tu as la bonne méthode visiblement... Est-ce que tu pourrais, juste une fois, j'ai vraiment besoin de cette note... est-ce que tu pourrais me montrer comment tu fais ?

Gaara ouvrit la porte de la permanence et se tint immobile devant. Hinata mit une demi-seconde à comprendre que c'était une invitation. Ses amies les saluèrent (Ino avec un sourire en coin) puis s'éloignèrent en riant à voix basse. Hinata déglutit. La permanence était plus petite que les salles où se tenaient leurs cours et les tables y étaient regroupées en carrées, ignorant le grand tableau noir décorant le mur. Il n'y avait personne d'autre qu'eux. Un peu inquiète de devenir son centre d'attention, Hinata s'installa face à Gaara.

Le manuel de mathématiques tomba devant elle.

– L'examen est sur les deux derniers chapitres qu'on a faits, c'est pas impossible d'avoir tout couvert d'ici lundi, mais ça va être compliqué si tu ne fais pas ta part.

Elle acquiesça.

– Je suis ici tous les soirs, tu n'as qu'à venir après les cours. On peut aussi réviser ce vendredi après-midi. Pour le reste, ça dépendra de toi.

– Et... et toi ? Ça fait beaucoup de temps...

– Je ne rentre jamais de suite, ça me fera réviser. (Il ouvrit le manuel sur le premier chapitre.) Je t'écoute, on repasse sur le cours et tu vas m'expliquer.

Hinata retira lentement ses gants, pour pouvoir tourner les pages et surtout pour gagner du temps.

– J-Je ne suis pas sûre de...

– Si tu veux mon aide, fais ce que je te dis. Sinon on perd notre temps tous les deux.

Comme elle n'avait pas le choix, elle tira le manuel vers elle et entreprit de lui expliquer les pages de cours point par point. À chaque fois qu'elle tombait sur un aspect fumeux et tentait de s'en sortir avec un raccourci, une question la renvoyait dans la fumée et Gaara continuait sans pitié jusqu'à ce qu'elle l'ait complètement dissipée.

Ils arrivaient à la moitié du chapitre quand il posa la main sur les pages.

– Tu n'es pas fatiguée ?

Bloquée sur sa main posée juste à côté de la sienne, Hinata releva les yeux.

– Non, tout va bien. Toi tu es fatigué ?

– Je ne fais qu'écouter, répondit-il, et j'ai l'habitude de rester tard.

Tard ? Elle posa la main sur sa poche à la recherche de son portable avant de se rappeler qu'elle n'en avait plus.

– C'est vrai, marmonna-t-elle. Tu as l'heure ?

Il tourna sa montre vers elle. La petite aiguille était presque sur le 9.

– Vingt-et-une heures ?! s'exclama-t-elle en se levant d'un bond.

Gaara ramassa son manuel pendant qu'elle se préparait à sortir. Dehors, la cour était plongée dans le noir total. Les lumières de la rue atteignaient à peine les branches nues des hauts arbres.

– Ils n'ont pas fermé le portail ? murmura Hinata.

Sa voix paraissait trop forte dans le silence.

– Si, mais une des portes reste ouverte.

Elle le suivit en écoutant le bruit de leur pas sur les graviers. Après avoir trébuché plusieurs fois sur des obstacles invisibles, sa vision finit par s'accoutumer à l'obscurité. Gaara devait effectivement faire ça souvent, car il traçait son chemin sans la moindre hésitation. Comme il l'avait dit, en passant entre le dos d'un bâtiment et une haute haie, ils tombèrent sur une porte aux barreaux blancs restée entrouverte.

Les réverbères brillaient de l'autre côté.

– Tu vas par où ?

Gaara désigna un scooter garé un peu plus loin.

– Ah. J-Je vais rentrer alors. Merci pour ton aide.

Elle prit le chemin de chez elle, les lèvres pincées. « Ah » ? Pourquoi avait-elle répondu ça comme si elle était déçue ?!

– Une seconde.

Elle se retourna. Gaara n'avait pas bougé.

– Tout va bien ? Je t'ai vu ce midi, dit-il.

– Oh, c'est vrai. Non, enfin je veux dire oui, oui tout va bien. J'ai eu... Enfin, c'était encore Karin et les autres, mais j'ai réglé le problème.

Gaara acquiesça, les mains dans les poches. Aucune émotion n'était lisible sur son visage, pourtant elle sentait que la nouvelle le contrariait. Le cœur battant, elle leva une main.

– J'ai perdu mon portable dans l'échange, mais ça m'a permis de mettre une claque à Suigetsu donc je dirais que je suis plutôt gagnante.

Enfin, elle vit le début d'un sourire apparaître.

– Bien, alors, dit-il.

– Rentre bien.

– Toi aussi.

Cette fois, ce fut elle qui le regarda s'éloigner. Lorsqu'elle reprit son chemin, ses pas semblaient si légers. Son scooter passa sur la route à côté d'elle et un immense sourire la réchauffa malgré la nuit froide. Un sourire qui retomba graduellement, alors qu'elle saisissait le tour que son cœur était en train de lui jouer. Elle se battait pour retrouver Kahaen à la finale, Kahaen qui était à ses côtés depuis tant de temps, et qu'elle aimait, peu importe qu'elle ne l'ait jamais vu en vrai. Pourtant, elle était en train de tomber amoureuse de Gaara.

Non, ce n'était pas ça.

Ses sentiments pour Gaara étaient là depuis un moment déjà, seulement elle était toujours parvenue à se mentir, à les étouffer. Et elle allait continuer, même si cette décision était douloureuse. Elle ne savait peut-être rien de ce que Kahaen ressentait pour elle, en revanche elle refusait de trahir ce qu'elle ressentait pour lui.

Aïe aïe aïe.

En partant du principe que Kahaen et Gaara, ne sont pas la même personne, vous pencheriez vers qui à sa place ?

Je trouve ce choix horrible... mais intéressant héhé (Okay je suis curieuse de savoir :D)

Bon, bon, bon, sur ce, bon week-end !

Des bisous !