Chapitre 21

D'ordinaire, lorsque des personnes, plus au moins normalement constituées, étaient sur le chemin du retour au foyer elles étaient d'humeur assez euphorique.

Mais là, l'ambiance sur le drakkar beurkien avait été tout autre.

À quelques exceptions près, les passagers avaient été angoissés et particulièrement à fleur de peau. Surtout Stoïck qui avait passé la quasi-totalité de ces journées enfermé dans ses quartiers à tellement se ronger les ongles qu'il était fort surprenant qu'il n'eut pas encore attaqué l'os. Il avait dû sévèrement cogiter sur la façon dont il allait annoncer certaines choses au reste de son peuple, dont il semblait un peu craindre les réactions.

Par contre, ce n'était pas le cas de Gueulfor et Astrid qui avaient été des plus détendus et, avaient même déjà bien rit au spectacle qu'ils allaient avoir très prochainement sous les yeux.

Ils avaient également, durant le trajet et à leur propre surprise, sympathisé avec Rakaï qui était parti avec eux. Et son père n'avait rien fait pour l'en dissuader.

De toutes façons, le Chef des Tronchkeks avait dû retourner sur sa propre île pour avertir son peuple de la situation, et voir si d'autres volontaires se présentaient.

D'ailleurs, Harold avait envoyé deux des Cambrioleuses dragonnières voir tout ça de plus près.

Varek avait été aussi survolté qu'un écrevasse en plein orage. Mais pas pour les mêmes raisons que les autres beurkiens cependant. Il s'était de nouveau glué au Manuel du Dragon d'Harold. Et quand il ne lisait pas en prenant des notes, il faisant les cents pas à travers le navire – le livre sous le bras – en marmonnant les Dieux seuls savaient quoi. Lui qui, encore quelques temps auparavant, avait harcelé son chef pour que de nouvelles études sur les Dragons soient faites, avait vu son vœux s'exaucer.

Et puis, il semblait également vraiment impatient d'avoir plus d'explications de la part d'Harold concernant les volontaires qu'il avait demandé. Il avait même questionné Astrid sur le sujet et fut déçu lorsqu'elle lui répondit qu'elle n'en savait pas plus que lui.

Les jumeaux eux : Comment dire ? Ils nageaient en plein dans un univers parallèle depuis la réunion sur Rix.

Apparemment, Erg et Gueulfor n'avaient nullement conscience que comparé Harold à Loki en présence des jumeaux n'était pas l'idée la plus brillante du siècle.

Ils avaient passé ces derniers jours à dessiner les plans du futur autel dédié à Harold qu'ils avaient bien l'intention de construire à côté de celui de Loki dans leur chambre. Et Astrid ne savait pas trop si elle devait rire ou s'inquiéter de leur comportement vis-à-vis de l'Haddock dans les jours à venir.

Quant à Rustik, il s'était montré étonnement boudeur et discret. Mais le fait qu'il avait été prit à parti par son père en privé dans les quartiers de Stoïck n'y était sans doute pas pour rien. Le Jorgenson père n'avait visiblement pas apprécié le dérapage de son fils avec Harold. Surtout avec ce dernier maintenant que tous savaient ce qu'il était.

Fallait reconnaître que le débarquement sur Beurk fut assez cocasse avec les mines souriantes de ceux restés au bercail qui passèrent, en un clin d'œil, à interloquées en constatant les têtes d'enterrement des revenants.

Puis, les visages devinrent inquiets, voire livides pour certains, lorsque leur Chef – ayant de plus l'expression la plus sombre – leur ordonna à tous de se rendre à la Grande Salle car, ils devaient discuter de choses très importantes.

Et la tension ne fut que s'accroître sur le trajet à chaque fois que quelqu'un tenta de se renseigner auprès de ceux qui avaient été du voyage et que, ceux-ci leur répondirent à chaque fois d'attendre les explications du chef.

Stoïck avait toujours été nerveux, malgré les apparences et toutes ses années de chefferie, avant de s'adresser à son peuple. Mais là, au vu de ce qu'il avait à révéler, cela aurait été un euphémisme que de le dire « nerveux ».

L'angoisse qu'il ressentait cette fois-ci était tellement différente des autres, qu'il ne savait pas trop s'il allait exploser ou se liquifier.

D'ailleurs, Gueulfor avait été à la limite de lui mettre une gifle et de lui faire faire de la respiration d'accouchement pour le calmer. Mais avec ce que l'Haddock allait devoir expliquer à son peuple, il opta plutôt pour la compassion, et de lui faire porter quelques chopes d'hydromel dans lesquelles il y trouverait un peu plus de courage.

Il vint aussi d'une autre manière à son secours en prévenant les autres beurkiens de ne surtout pas l'interrompre. De le laisser aller jusqu'au bout.

Ce qu'ils firent, mais avec de plus en plus de mal au fur et à mesure que les révélations sortaient.

Gueulfor eut d'ailleurs beaucoup de mal à garder son sérieux au vu des têtes que tirait l'assemblée. Et en particulier – comme il l'avait prédit – celles des Hofferson. Pas seulement les parents d'Astrid, mais l'intégralité du clan.

Leurs mines étaient même encore plus épiques et tordantes que tout ce qu'il avait pu imaginer ces derniers jours.

L'amputé rit par ailleurs encore plus fort mentalement en tentant de s'imaginer ce qu'il pouvait bien se passer dans leurs boîtes crâniennes.

Il fut aussi, d'une certaine manière, soulagé que Stoïck eut fini son discours, afin de pouvoir faire sortir un peu son hilarité en faisant un léger trait d'humour à l'adresse du reste de la salle.

« C'est bon ! Maintenant que le Chef a terminé, vous pouvez exploser ! » - lâcha t-il avec un sourire crispé à force de se retenir de rire.

Et ce fut encore pire lorsque les Beurkiens le prirent au pied de la lettre en bondissant de leurs sièges en beuglant tout un tas de choses non-identifiables.

De leur côté, Varek et Astrid avaient eu le réflexe de se boucher les oreilles par crainte pour leur tympans.

Les jumeaux, eux par contre, étaient en extase devant un tel capharnaüm.

«IL SUFFIT! » - gronda Stoïck tapant du poing sur la table devant lui, faisant aussi taire tout le monde dard dard.

« Vous pouvez vous exprimer ! Mais par pitié, pas tous en même temps ! » - lança t-il ensuite quelques octaves en-dessous.

« Dans ce cas, je pense parler au nom de tous en te disant que tu es complètement tombé sur la tête Stoïck ! » - s'empressa de cracher avec véhémence la dernière voix que l'Haddock était d'humeur à vouloir entendre.

« C'est toi est tombé sur la tête Mildiou ! Tu sembles oublier à qui tu t'adresses ! Et sache également que tu ne parles pas du tout en mon nom là ! » - répliqua Erfi Ingerman.

« Ah, parce que tu es d'accord avec ses absurdités ! » - s'étrangla à moitié le vieux berger.

« Ce n'est pas ce que j'ai dit ! Mais puisque tu me demandes mon avis : Aussi folle que paraisse toute cette histoire, je pense néanmoins qu'elle mérité réflexion »

« Excuse-moi Erfi. Mais mon clan ainsi que moi-même sommes plutôt d'accord avec Mildiou. Tu ne sembles pas voir, comme lui et nous, l'immense danger que représente désormais Harold » - intervint Siegbert Hodson.

« En voilà du bon sens comme je l'aime ! - psalmodia Mildiou. Qu'est-ce qui nous dit que derrière les pseudos bonnes intentions de ce monstre ne se cache pas quelque chose de beaucoup plus machiavélique ! Car, après tout, il est si j'ai bien compris un dragon dans l'âme ! Donc, il doit forcément être aussi fourbe et vicieux que ses lézards ! »

À peine eut-il terminé sa phrase que l'ambiance s'était grandement alourdie.

La fureur meurtrière qui avait soudainement voilée le regard de Stoïck n'avait échappé à personne.

Varek dû retenir discrètement Astrid par un bras pour l'empêcher d'aller couper le tête de l'autre vieux con.

Quant à Gueulfor, sa bonne humeur avait subi une mort des plus violente pour être remplacée par une colère froide et noire.

« Modère tes paroles. Surtout quant tu ne sais pas de quoi du parles » - siffla t-il dangereusement à l'adresse du berger en lui collant son crochet sous la gorge.

« Et toi, tu devrais faire plus attention à ne pas te laisser dominer et aveugler par tes sentiments ! » - répliqua Mildiou piqué au vif et nullement intimidé.

« Ne te vexe pas Gueulfor mais, je suis toujours d'accord avec lui – intervint une fois de plus Siegbert Hodson. Il n'a pas entièrement tort. Ça m'étonnerait que Harold porte toujours Beurk dans son cœur. Cela pourrait effectivement être une ruse pour pouvoir mieux lâcher ses dragons sur nous »

« On voit bien que tu n'as pas été du voyage pour penser de telles inepties ! » - s'énerva de plus belle le forgeron mais relâchant néanmoins sa proie.

Ce qu'il regretta aussitôt lorsque cette dernière cracha :

« À justement entendre ceux qui ont approché ce démon, on a l'impression que vous êtes complètement envoûtés ! Il me semble d'ailleurs que beaucoup prêtent aux Dragons des pouvoirs d'hypnose ! »

« Des histoires à dormir debout et pour faire peur! Les Dragons ne possèdent nullement ce genre de capacité ! » - s'écria révolté Varek depuis son coin de salle.

À l'immense surprise générale en passant.

Erfi Ingerman regarda même son fils avec un étrange mélange de fierté et d'incertitude.

Stoïck profita par ailleurs de la stupeur provoquée pour déclarer :

« De toutes manières, je ne vous demande pas votre avis ! J'ai déjà pris ma décision ! Cette assemblée générale n'a servi qu'à vous mettre au courant ! C'est tout ! »

Son ton avait été dure et sans appel. Et au vu de l'humeur massacrante dans laquelle Mildiou l'avait mit, tout le monde – probablement dans un soucis de conservation – jugea plus sage de baisser le regard et de garder la bouche fermée pour le moment.


Gueulfor avait réussi à retrouver un semblant de bonne humeur grâce à sa séance de dépoussiérage de l'atelier d'Harold.

Le jeune homme l'avait avertit qu'il aurait besoin de la forge et aussi d'un coup de main de sa part si le vieux forgeron le voulait bien.

Nettoyer le petit coin privé de son ancien apprenti était le truc qu'il avait prévu de faire après l'assemblée générale.

Et puis, qu'aurait dit Harold s'il avait retrouvé son sanctuaire transformé en Royaume de la Poussière.

Le vexé était la dernière chose que l'amputé avait envie de faire. Surtout si on tenait compte du fait que l'Haddock ne frétillait pas particulièrement d'impatience de remettre les pieds sur cette foutue île.

« Gueulfor ? T'es là ? » - entendit-il ce qu'il reconnut comme étant la voix d'Astrid entre deux coups de plumeau.

Il stoppa alors son activité pour s'en retourner dans sa boutique accueillir sa visiteuse qu'il eut la surprise de trouver en compagnie de Varek et Rakaï.

« Et bien ? Qu'est-ce qu'il vous amène les jeunes ? » - leur demanda t-il.

« Comme on fait visiter Beurk à Rakaï, tu dois bien te douter que ta forge fait partie du circuit » - expliqua Varek moitié sérieux moitié ironique.

« Ah, c'est bien ! Et qu'est-ce que tu penses de Beurk pour l'instant ? » - interpella t-il l'Héritier des Tronchkeks.

« À vrai dire, je reconnais volontiers que c'est un très joli village. Et encore plus les paysages d'après le peu que j'en ai vu pour le moment. Mais par contre, au niveau des autochtones : Ne le prenez pas mal mais, je n'aurais jamais cru qu'il existait plus têtu et borné que mon propre clan »

Gueulfor ne prit cette remarque aucunement de travers. Il éclata même de rire.

« Oui ! Être une vraie tête de cochon sauvage est une marque de fabrique typiquement beurkienne ! - convint-il, avant d'ajouter : Cependant, j'en déduis à ça que l'ambiance dans le village n'est pas des plus extatique. Mais bon ! En même temps, faillait si attendre ! »

« D'ailleurs, on trouve que la réunion n'a pas été aussi catastrophique que ce que l'on s'était imaginé. Mise à part Mildiou qui a tenté de bien foutre sa merde comme d'habitude » - lança Astrid visiblement agacée par ce dernier fait énoncé.

« Oui ! J'ai cru comprendre que ce vieux croulant était un sacré empêcheur de tourner en rond » - avoua Rakaï.

« Et crois-moi, tu n'as encore rien vu mon petit – lui assura Gueulfor. Et puisqu'on en parle, il va falloir qu'on s'organise pour le tenir à l'œil celui-là ! »

« Je suis de ton avis – convint Varek. Mais je pense que se sera plus pour le protéger au final, parce que je doute que Harold fasse toujours autant preuve de clémence à son égard qu'autrefois »


À la tombée de la nuit, au moment du dîné dans la Grande Salle, l'humeur générale ne sembla guère s'être améliorée de la journée.

Les jumeaux n'avaient d'ailleurs eu cesse de geindre sur l'ambiance plus sombre qu'une veillée funéraire.

Toutefois, ça n'avait pas empêché les conversations de se faire vives. Mais à voix basses cependant.

Ce qui était plutôt étrange car le Chef avait brillé par son absence. Alors, ça avait été à se demander ce qu'ils avaient craint.

Mais Astrid s'était dite qu'elle allait probablement avoir une explication à l'absence du chef au dîné, puisqu'elle avait eu la surprise de se faire transmettre un message de sa part la sommant de venir le voir chez lui de suite.

Et elle ne fut guère la seule à être déboussolée par cette invitation. Tous ceux qui avaient été à portée d'entendre le furent tout autant qu'elle.

Néanmoins, ce ne fut pas cette convocation inopinée qui la choqua le plus.

En effet, une fois qu'elle avait été sur place, elle avait hésité entre s'étrangler de stupeur ou tomber à la renverse en voyant que ses parents étaient également présents.

Qui plus est, la mine encore plus déconfite que durant le reste de la journée.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? » - s'inquiéta t-elle subitement.

« Assied-toi d'abord » - lui répondit Stoïck en lui désignant la chaise vide au bout de la table.

Elle s'exécuta docilement, mais non sans remarqué le malaise croissant dans la pièce.

Elle ne loupa également le fait que le Chef, tout comme ses parents, semblaient vouloir regarder partout sauf dans sa direction.

« Tout d'abord, je vais te poser une question très simple mais aussi très embarrassante – commença Stoïck, avant de faire une pause pour respirer un bon coup comme pour se calmer, puis de poursuivre : Voilà ! Je sais que toi et Harold être vraiment très « proches ». Et ce que nous voudrions savoir c'est jusqu'où a pu aller cette proximité ? »

Astrid avait pendant un moment oublié comment respirer.

Elle avait rêvé ou le Chef et ses parents venaient de subtilement lui demander si elle avait couché avec Harold ?

D'abord Gueulfor ! Et maintenant eux ! Plus les sous-entendus de Kognedur !

Non mais, qu'est-ce qu'ils avaient tous à délirer avec ça ?!

« Vous êtes sérieux ?! - ne put-elle que répondre révoltée. Vous m'avez faite convoqué devant une bonne partie du village pour me demander si j'ai accueilli Harold entre mes jambes ?! »

« ASTRID ! » - houspillèrent ses parents ulcérés par ses propos.

« Pourquoi faites-vous les choqués ?! Alors que c'est bien ce que vous voulez savoir, non ?! » - répliqua t-elle vivement.

« Répond à la question Astrid ! » - lui ordonna son père.

« Non ! Enfin, pas « non » dans le sens que je ne veux pas répondre. « Non » est ma réponse à votre question ! C'est bon ?! Vous êtes contents ?! Je peux retourner finir de dîner maintenant ?! »

Un étrange silence s'ensuivit, et prit fin par le soupir de soulagement d'Eistla Hofferson.

« Les Dieux soient loués ! Finalement, cette histoire sera plus simple à régler » - lâcha t-elle doucement.

« De quoi est-ce que tu parles ? » - l'interrogea aussitôt sa fille interloquée par ses propos.

Mais elle fut royalement ignorée.

« Attendez ! Ne vous emballez pas ! Ça ne va pas être aussi facile que ça en donne l'impression ! » - mit en garde Stoïck le couple.

« Bien sûr que si ! - fit Thrym Hofferson. Dès que tu en as l'occasion, tu prends ton fils entre quatre yeux, et tu exiges que... »

« Houlà ! Stop ! Je t'arrête tout de suite Thrym ! Déjà qu'avant, j'avais du mal à exiger quoique se soit de lui alors qu'aujourd'hui, vu les conditions dans lesquelles on s'est quittés il y a cinq ans, tu dois bien te douter que la météo n'est pas au beau fixe entre nous. Il y a même un vent archi-polaire qui souffle depuis son côté »

« Est-ce que quelqu'un pourrait m'expliquer... » - tenta une nouvelle fois Astrid qui fut une fois de plus ignorée.

« Non mais, tu t'entends Stoïck ! On dirait que tu as peur de ta mauviette de fils ! » - lança avec une pointe de cynisme l'Hofferson père.

« Ce à quoi je répondrais : Attend d'avoir eu, au moins une fois, à faire à l'homme qu'il est aujourd'hui, avant de me jeter à nouveau se genre de remarque à la figure ! »

« EH ! OH ! EST-CE QUE VOUS ALLEZ ARRÊTER DE FAIRE COMME SI JE N'ÉTAIS PAS LÀ ?! ET SURTOUT ME DIRE CE QU'IL SE PASSE À LA FIN ?! » - vociféra Astrid en bondissant de sa chaise.

« Ce ne sera pas nécessaire. Tu peux retourner avec tes amis maintenant. Et ne t'inquiète pas ma chérie, on s'occupe de tout » - se permit de lui répondre sa mère, et en plus de lui parler comme si elle avait dix ans.

« Non mais, tu te fous de ma gueule là ?! » - s'écria t-elle outrée.

« ASTRID ! Comment oses-tu parler comme ça à ta mère?! » - la réprimanda son père.

« Et vous, comment osez-vous me traiter comme une demeurée ?! »

« Comme c'est plutôt délicat à expliquer, je pense que le mieux à faire est que tu lises ces documents » - lui exposa Stoïck en lui tendant effectivement plusieurs parchemins, qu'il était allé récupéré dans un tiroir durant la courte dispute des Hofferson.

« Stoïck ! Non ! » - paniquèrent justement les parents.

« Je regrette ! - leur lança fermement le Chef. Elle est plus que concernée ! Et même si la décision ne revient seulement et uniquement à Harold: elle a le droit de savoir! Et puis, si vous pensez qu'il ne lui dira jamais rien, vous vous fourrez le doigt dans l'œil ! »

Quelques instants plus tard, la quasi-totalité de Beuk s'était précipitée dehors pour voir ce qu'il se passait , lorsque des hurlements furieux s'étaient faits entendre.

Et ils furent très surpris de voir Astrid traverser le village comme une tornade avec ses parents et le Chef lui courir derrière en respectant cependant une certaine distance de sécurité.

« Astrid ! Je t'en prie ! Écoute-nous ! » - tenta désespérément sa mère.

« NON ! JE NE VEUX RIEN SAVOIR DE PLUS ! J'EN AI LARGEMENT EU ASSEZ POUR AUJOURD'HUI ! » - vociféra la fille Hofferson écumant de rage.

D'ailleurs, leur public avait vite percuté qu'il ne valait mieux pas être sur son chemin à l'heure actuelle, et s'étaient empressé de lui faire place nette.

« POUR L'AMOUR DE THOR ! CESSE DE FAIRE L'ENFANT ! » - lui hurla son père n'aimant visiblement guère le fait que leur « dispute » ait une tribune.

« POURTANT ! C'EST BIEN COMME ÇA QUE VOUS ME TRAITIEZ IL N'Y A ENCORE PAS DIX MINUTES ! » - répliqua t-elle du tac au tac , toujours sans s'arrêter ni se retourner.

« Je comprends que tu sois en colère. Mais aies conscience qu'on ne veut que ce qu'il y a de mieux pour toi » - tenta de nouveau sa mère qui eut un peu d'espoir en voyant sa fille stopper brusquement sa marche.

Mais son optimisme fut très vite étouffé lorsque Astrid s'était retourné pour lui jeter un regard mauvais.

« Ce qu'il y a de mieux pour moi ?! Ne me fais pas rire ?! - lança t-elle froidement. Si vous vous souciez réellement de mon bien-être, vous ne m'auriez pas planté une épée dans le dos ! Oui, parce que ce stade ce n'est plus un couteau mais carrément une épée ! »

Sûr ce, elle reprit sa marche enragée en direction de la forêt en avertissant qu'elle voulait être seule.

Et, sans doute par instinct de survie, personne n'osa la suivre. Pas même ses parents.

Elle attendit aussi d'être suffisamment loin pour commencer à laisser couler ses larmes de rage, et à se défouler sur tout ce qu'il y avait à sa portée.

Et bien qu'elle n'avait pas sa hache à ce moment-là, les arbres s'étaient probablement préparés psychologiquement à souffrir quand même.

Mais ils durent aussi être très soulagés qu'on ne lui laissa guère le temps de s'attaquer à eux car, en effet, entre deux coups de poings dans les fourrés et shoots dans les cailloux, un dragon s'était rapidement posé non loin d'elle.

Elle avait eut très peur sur le moment. Mais se détendit très vite en reconnaissant – malgré qu'il faisait nuit – le dragon en question.

« Oh, Tempête » - pleura t-elle plus fort en allant se réfugier contre la dragonne.

Celle-ci d'ailleurs s'était mise à frotter son museau contre la jeune fille tout en ronronnant. Elle cherchait clairement à le fois la calmer et la consoler.

« Tempête, s'il te plaît – continuait de sangloter Astrid. J'ai besoin de le voir maintenant. C'est très important »

La dragonne saisissant parfaitement ce qu'elle lui demandait lui fit comprendre d'un signe de tête de monter sur son dos. Et l'Hofferson en fut assez surprise car, elle avait plutôt penser que Tempête irait chercher Harold. Mais bon, après tout pourquoi pas.

Elle n'était certes encore jamais montée sur le dos d'un dragon sans Harold mais, elle savait tout au fond d'elle que Tempête ne le ferait pas tomber.

Et elle avait eu raison.

La dragonne avait volé tout en douceur jusqu'à une toute petite île, non loin de Beurk, pour y atterrir tout aussi délicatement au beau milieu d'un campement où se mêlaient humains et dragons.

« Astrid ?! - la héla Kamikazi plus que étonnée. Qu'est-ce que tu viens faire ici ?! »

« Je... » - avait-elle commencé à parler.

Mais elle se stoppa net en voyant Harold se diriger à grands pas dans leur direction. Et elle ne put régir autrement qu'en allant à toute vitesse se réfugier dans ses bras en se remettant à pleurer de plus belles.

« Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ? » - la questionna t-il aussitôt très inquiet.

« Pas ici… En privé » - répondit-elle entre deux sanglots lâchés contre la clavicule du jeune homme.

Ce dernier ne put que s'inquiéter davantage à ces mots. Mais la mena tout de même sous sa tente un peu à l'écart des autres.

« Une idée de ce qu'il se passe ? » - demanda Valka à Kamikazi et visiblement guère en meilleur état que son fils.

« Pas la moindre. Mais pour que Astrid se soit sauvée de Beurk sur le dos d'un dragon en pleine nuit et, au vu de l'état mental dans lequel elle est : ça doit être assez grave »

« Je n'espère pas. Enfin, quoiqu'il se soit passé, je pense que Harold devrait pouvoir gérer ça avec calme »

« QUOI ?! » - entendirent-elles justement la voix du dernier nommé hurler faisant sursauter tout le monde au passage.

« Vous disiez Valka ? » - lâcha ironiquement la Voleuse.

à suivre