La toréador nous indique la direction du bureau du baron et nous nous y rendons. Le baron est assit dans un grand fauteuil qui semble assez confortable, derrière un immense bureau. Il est légèrement penché, ses coudes sont sur le bureau, et ses mains se tiennent juste devant son visage. L'homme semble assez grand malgré sa position. Il a un visage creux, des yeux brillants d'une lueur rougeâtre surnaturelle, les cheveux argentés et le teint gris. Il semble être relativement âgé.

Deux chaises nous attendent, déjà tournées vers nous. Nous nous asseyons en silence, sous le regard froid et pesant du baron. Il ouvre la conversation :

"Bonsoir. J'ai quelques questions pour vous. Commençons par la plus importante, dit-il en se tournant vers moi et en prenant un ton plus agressif, comment se fait-il que je ne puisse pas lire votre esprit ? Ne vous a-t-on pas dit qu'utiliser l'Occultation pour protéger votre esprit est quelque chose que je n'apprécie guère ? Et quelle est cette présence supplémentaire que je ressens ?

- Je… Je ne sais pas. Je n'y connais rien en Occultation. Mais vous n'êtes pas le premier à être incapable de lire mon esprit, ni à me dire que je ne suis "pas tout seul".

- Si votre amie ne pensait pas si fort au fait que vous n'êtes que des nouveaux nés, et à cette fameuse personne qui vous a dit ça, j'aurais du mal à vous croire.

- Hé ! Je vous permet pas de lire mon esprit ! Répondit Gabrielle. Je croyais que seul le Sabbat était aussi peu sensible à la vie privée.

- Sachez, jeune fille, que tout vampire tenant à la tranquillité apprend Auspex et se moque du côté privé des pensées de tout un chacun. Cela vaut d'autant plus quand ledit vampire doit s'occuper d'une centaine d'autres vampires. Et vous, jeune homme, sachez que, bien que ça ne soit pas votre faute, je ne pourrais jamais vous faire confiance tant que votre esprit me reste verrouillé. Je vous invite à rapidement trouver une solution.

- Vous dîtes ça comme si c'était simple…

- Bon reprenons. Qui êtes-vous ?

- Ah ? Vous ne lisez plus dans les esprits ? Demanda Gabrielle.

- Si, mais je m'assure que vous êtes cohérents avec vos pensées. En d'autre termes, je regarde juste si vous me mentez.

- Bien… Je m'appelle Gabrielle.

- Et moi c'est Robin.

- Que faîtes-vous ici ?

- J'habitais ici, avant de devenir un vampire. Et du coup je voulais juste retourner là où j'habite.

- Et moi, je le suis.

- Vous vous appelez Robin comment, jeune homme ?

- Robin Savine."

Il pianote alors quelques instants sur l'ordinateur se trouvant dans un coin de son bureau, puis reprend :

"Et vous avez disparus il y a combien de temps ? Répondez tout les deux.
- Il y a un peu plus d'un an, dit-on de concert.

- Ça correspond aux informations que j'ai. Vous avez conscience que vous êtes déclarés morts et que vous n'avez plus d'appartements ?

- Et ma société, elle a toujours ses locaux ?

- Quel est son nom ?

- Blue Lion."

Il pianote de nouveau, avant de dire:

"Effectivement, il semblerait que votre société existe toujours, et que vos locaux soient toujours loués à son nom. C'est étonnant, d'ailleurs. Tant mieux pour vous je suppose."

Je ne peux m'empêcher d'émettre un soupir de soulagement. Le baron reprend :

"Bien, je pense que ce sera tout. Je ne vous cache pas que j'ai assez peu envie de vous acceptez ici pour la simple raison que je ne saurais dire ce que vous avez derrière la tête. Mais ! Le fait que vous ayez déjà un endroit où vous loger, que vous connaissiez la ville, au moins la partie des mortels, et que vous ayez déjà de quoi subvenir à vos besoins fait que je vous autorise à rester…

- Ouais ! Nous exclamons nous.

- Mais sachez que vous serez surveiller. Je maintiens un semblant de tranquillité dans Grenoble et ses alentours depuis maintenant plusieurs siècles, et je ne tiens pas à ce que vous réduisiez tout mes efforts à néant.

- Logique, dis-je. Puis-je vous poser une question ?

- Faîtes.

- Je voudrais savoir quelles démarches je devrais faire pour avoir le droit d'avoir une goule.

- Vous ne perdez pas de temps. Dois-je en déduire que vous avez déjà quelqu'un en tête ?

- Une amie, qui, je l'espère, vit encore à Grenoble.
- Et bien, j'autorise tous les vampires vivant à Grenoble la possession d'une goule sans rien demander de plus que le nom et le prénom de la personne. Cependant, pour avoir plus, il vous faudra gagner ma confiance. Et pour vous plus que pour quiconque, cela sera difficile.

- Très bien, merci. Mon amie s'appelle Clara Ménard.

- Clara Ménard ? La traductrice ?

- Elle a fini par réussir à le devenir ? Quand j'ai disparu, elle venait de réussir le Capes pour devenir prof de langue et se sécuriser financièrement en même temps de se lancer dans la traduction. Mais… Vous avez l'air d'en parler comme si vous la connaissiez.

- Et bien… Elle est portée disparue depuis ce matin.

- Quoi ?!

- Vous avez bien entendu. Le directeur de son lycée a apprit qu'elle n'a pas assuré ses cours, qu'elle était injoignable, et ses voisins ne l'ont pas vu rentrer chez elle le soir précédent. Le directeur a décidé de prévenir la police. Si vous voulez, vous pouvez essayer de la retrouver, ou chercher quelqu'un d'autre. Enfin… Avez-vous d'autres questions, où pouvons-nous mettre fin à l'entretien ?"

Gabrielle décide de rester un peu avec le baron pour lui poser des questions. Moi, je pars retrouver Clara.

Je me rends chez elle. Peut-être que si j'arrive à reconstruire son chemin, je pourrais la retrouver. Je suis alors les différents chemins qu'elle aurait pu prendre pour se rendre à son lycée. Dans mon enquête, je tombe sur des racailles. J'essaye de les éviter, quand une des racailles, un gars assez typé, m'interpelle, alors que je lui tourne le dos :

" Hé, mais je crois que je te connais, toi !

- J'ai pas le temps, je dois y aller. Répondis-je, faussement calme.

- Retourne-toi, pour voir ? Après on te laisse tranquille."

Je me retourne. Mon interlocuteur s'exclame alors :

" Ah, mais je le savais que je te connaissais. T'es l'un des gars qui restait avec nous quand on était à Paris.

- A Paris ?

- Oui, tu changeais une meuf hideuse qu'on kidnappait en un truc violable. Tu tires toujours autant la gueule d'ailleurs. Comment tu vas ?"

Putain ! Fallait que je tombe sur ce genre de personne. J'ai pas le temps… Et en même temps, je tiens peut-être là quelqu'un qui peut me dire où chercher.

"Et bien je cherche quelqu'un. Une femme qui a disparue il y a peu.

- Faut que tu sois plus précis, avec mon crew, on kidnappe beaucoup de gens qui pourrait correspondre à cette description, tu sais ? Et puis j'y gagne quoi a t'aider ?

- Eh bien… Peut-être que je pourrais mettre mes talents a ton service au nom du bon vieux temps. Elle fait environ 1m70, blonde, les cheveux bouclés, aux yeux bleus, le teint un peu pâle… Et elle est un peu large.

- Elle a disparue depuis combien de temps ?

- Depuis hier de manière officielle, donc peut être depuis quelques jours tout au plus.

- Elle serait pas prof ?

- Euh… Si."

L'homme éclate alors de rire :

" Tu vas rire, ma sœur lui en voulait parce qu'elle lui a mal parlé. Du coup en bon frère, je l'ai kidnappée pour qu'elle puisse lui apprendre la politesse. Elle est dans ma cave.

- Tu pourrais me laisser la récupérer ?

- Normalement j'aurai dit non, mais a quelqu'un comme toi qui peux me permettre de coucher avec n'importe qui, on refuse rien."

Tue-le. Pas tout de suite. Quand Clara sera en sécurité, on le tuera. Lui, sa sœur, et toute sa famille s'il le faut.

Cet enculé m'amène alors dans un HLM, puis nous descendons au sous-sol. Il ouvre une porte, derrière laquelle se trouve Clara, attachée au mur, très peu habillée, couverte de contusions et autres coupures, bâillonnée, en larmes, mais vivante, et une jeune fille qui ne semble pas avoir inventé l'eau chaude, armée d'un couteau. Elle se tourne vers nous, et, en me pointant de son arme, demande : "C'est qui lui ?"

À peine a t'elle le temps de finir sa phrase que je plaque ma main contre son torse, et fait éclore une fleur de sang et d'os de sa cage thoracique, avant d'arracher la gorge de son frère pour me sustenter. Clara émet un cri étouffé par son bâillon, a mi-chemin entre l'horreur et la stupeur. Avant de la libérer, j'utilise Vicissitude pour refermer et effacer ses plaies. Puis, je lui libère la bouche.

"Robin ! Mais qu'est-ce que…

- On en parlera quand tu seras en sécurité. C'est ni le lieu, ni le moment, là.

- Euh… Je… Ok…"

Je la libère alors de ses attaches, puis déshabille l'autre connard. "Met ça,"lui dis-je, "je te ramène chez toi".

J'escorte alors Clara jusque chez elle. Elle regarde à moitié dans le vide tout du long du trajet. Je sais pas si c'est à cause de ce qu'elle a subit, ou de ce que j'ai fait pendant son sauvetage. Probablement les deux, je suppose.

Nous arrivons rapidement à son appartement. Je réalise que j'ai tout envoyé bouler pour la sauver. Heureusement que Gabrielle a une clé de la chambre d'hôtel. Sinon elle aurait été dans la merde sans téléphone pour me contacter, sans abri, et alors que le soleil ne va pas tarder à se lever. Nous entrons dans l'appart.

" Bon maintenant qu'on est chez moi, je veux que tu m'expliques ! T'étais où depuis un an ?! Tout le monde t'as cru mort ! Et c'était quoi tout ça ?! Et… Comment tu m'as retrouvé ?

- Euh… Ok… Bon alors pour commencer, j'ai été kidnappé pendant que j'étais à Paris, je venais de signer un gros contrat. C'est pour ça que j'ai disparu y a un peu plus d'un an, dis-je avant d'émettre un bâillement bestial. Bon je vais faire court, entre temps je suis devenu un vampire, et ma nouvelle nature fait que là je suis en train de tomber de fatigue. Ça te dérange si je dors quelques heures chez toi a l'abri du soleil, et que je finis de t'expl…"

Je ne me souviens pas de la suite. Je me réveille le soir, dans le lit de Clara. Elle se tient sur le côté du lit, l'air inquiète. Voyant que je me suis réveillé, elle me demande :

" Ça va ?

- Il s'est passer quoi ?

- Je sais pas, t'es tombé par terre pendant ta phrase. Vu ce que tu as eu le temps de me dire et ce que t'as fait, j'ai fait en sorte que la lumière du jour te touche pas, et je t'ai foutu dans mon lit, faute de mieux.

- Merde ! J'avais pas prévu de tomber de sommeil si vite, d'habitude j'arrive à contrôler un peu ça…

- T'es sûr que tout va bien ? T'es tomber fort.

- J'en ai vu d'autre, t'inquiète. Bon, j'en étais où déjà ?

- Mec tu viens de te réveiller, alors que t'es tombé super fort, t'es sûr que tu veux qu'on parle de ça ?

- Je vais bien je te dis. Bon, j'en étais où ?

- Tu disais que t'étais un vampire, et que tu voulais te reposer quelques heures chez moi.

- Bon bah au moins ça c'est fait. Du coup, l'explication de "c'était quoi tout ça", c'est que je fais partie du type de vampire qui peut faire ce genre de choses. Voilà.

- Tu peux pas me dire "j'suis un vampire, et je peux faire ça" ! Dis m'en plus !

- Écoute, tu me laisses t'expliquer comment je t'ai trouvé, et ensuite, on verra. En gros, j'ai pu revenir à Grenoble, et j'ai appris que t'avais disparu. J'ai pas cherché, j'ai foncé pour te trouver. Coup de bol, je tombe sur ton kidnappeur, qui me connaissait…

- Comment tu l'as connu ?!

- Tu veux pas savoir.

- Si !

- Non, vraiment.

- Si !

- Après être devenu vampire, j'ai été obligé de bosser pour des tas de connards, et il en a fait partit. Je changeais l'apparence de meuf qu'il kidnappait pour les rendre plus a son goût avant de les violer. C'est bon, t'es contente ?

- Ah… Effectivement, je voulais pas savoir finalement…

- Bref ! Du coup je lui ai dit que je recherchais quelqu'un et que j'avais pas le temps de lui parler, il a fait le forceur, du coup je t'ai décris, en disant que je te cherchais. Il m'a dit que le hasard fait bien les choses car c'est lui qui t'as kidnappé parce que t'as mal parlé a sa sœur. Et du coup je lui ai proposé de reprendre du service s'il me laissait te reprendre. Il a accepté, et la suite tu la connais.

- Heureusement qu'il est con…

- Oui. Enfin bon du coup j'ai laissé seule une amie pour te sauver, et elle a pas moyen de me contacter. Ça te dérange si je la rejoins pour lui dire où je suis ?

- C'est… C'est aussi…

- Une vampire, oui. D'ailleurs est ce que tu peux éviter de parler du fait que je sois de retour ?

- Pourquoi ?

- Je t'explique quand je reviens.

- Bah dépêche-toi, parce que là, tes réponses me font avoir encore plus de questions.

- Ok. Grand max, je retourne te voir demain soir"

Je retourne alors à l'hôtel, où je me fais incendier (métaphoriquement, heureusement) par Gabrielle. Je m'excuse, puis lui explique la situation. Je lui propose de venir avec moi le lendemain pour parler avec Clara.