La suite ! C'est dans ce chapitre que se trouvent les scènes qui ont servi d'inspiration de départ à toute l'histoire, mais bizarrement, elles m'ont donné un peu de fil à retordre… J'espère que vous apprécierez quand même !
Au fait, j'ai changé le rating de l'histoire, car je me rends compte que quelques passages assez crus et violents s'en viennent. Les enfants, si vous voulez lire la suite, demandez d'abord à papa et maman. ;)
Autre chose : je me suis demandée si la narration au « je » pouvait ralentir la vitesse de lecture… Qu'est-ce que vous en pensez ? Essayez d'y porter attention dans ce chapitre !
tigrou : Quand le prochain chapitre ? Aujourd'hui. ;) Ces temps-ci, je publie environ une fois par semaine, pour te donner une idée. Je suis contente que l'histoire te plaise même si elle diffère un peu de tes lectures habituelles. =) Merci pour ton commentaire !
mymy : Que de compliments ! Merci ! J'espère que la suite sera fidèle à tes attentes. =)
Merci à tous les autres revieweurs ! Bonne lecture !
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10. Déménagement impromptu
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Lorsque j'entrai d'un pas méfiant dans la classe déserte, talonnée de près par Severus Rogue, je demeurai figée au milieu de la salle, incapable de lui faire face. Mon altercation avec le sous-ministre Adams White rejouait en boucle dans ma tête, insupportable. Jamais je n'avais perdu le contrôle de mes émotions de cette manière, encore moins avec un pur inconnu.
Qu'est-ce que Rogue allait faire ? Me flanquer une retenue ? Ça ne faisait pas partie de mon plan de la journée. Mes parents étaient en danger. Je devais me rendre aussitôt chez eux, maintenant que mes tâches à l'infirmerie étaient terminées. Je n'avais plus une seconde à perdre. Comment allais-je me débarrasser de Rogue ?
La porte claqua derrière moi, me faisant sursauter.
- Assoyez-vous, dit Rogue.
Le ton de sa voix appelait une exécution immédiate. À contrecœur, je m'assis du bout des fesses sur la chaise la plus loin possible de lui, mais il s'approcha de moi avec une lenteur calculée. Je gardai les yeux baissés sur ses chaussures noires.
- Expliquez-vous.
- Je… Je ne sais pas ce qui m'a pris.
Ma voix était tendue à bloc. J'avais de la misère à parler.
- Regardez-moi quand vous m'adressez la parole.
Je levai prudemment les yeux vers lui. Il s'était planté à un mètre de moi, les bras croisés, et attendait des explications.
- J'ai paniqué. Je… Je ne sais pas pourquoi.
J'avais envie de sortir d'ici. J'avais envie de courir. J'avais envie de fuir le visage du mangemort qui hantaient mes pensées, de fuir les mains fantômes que je sentais sur ma gorge. Une bouffée de chaleur me monta à la tête. Craignant une crise d'angoisse, je me levai machinalement, incapable de tenir en place. J'avais les nerfs à fleur de peau, mais le moment était mal choisi pour perdre mon sang-froid. Je devais quitter Poudlard au plus vite.
- Vous ai-je donné la permission de vous lever ?
J'éludai la question.
- Professeur, je ne sais pas ce qui m'a pris, répétai-je. Je n'ai pas d'autre explication à vous donner. Enlevez-moi tous les points que vous voulez, mais je ne vois pas ce que je pourrais encore vous dire, puisque…
- Je vous ai ordonné de vous asseoir, coupa-t-il d'un ton sans réplique.
Le temps presse ! Je dois partir d'ici !
Je le regardai, avec l'impression de plus en plus angoissante d'être une minuscule souris prise au piège devant une panthère affamée. Mes mains tremblaient. Mes genoux étaient flageolants. Je repris place sur la chaise que je venais de quitter. Rogue s'approcha de moi, me surplombant de toute sa hauteur.
- Paniquez-vous chaque fois qu'on critique votre travail, Miss Granger ?
Sa voix avait pris ces inflexions veloutées qui effrayaient même les élèves les plus téméraires.
- Ce n'est pas ça, je…
- Répondez à ma question.
- Non. Je ne panique pas chaque fois qu'on critique mon travail.
- Alors pourquoi cette fois ?
- Je ne sais pas. Il criait, il… J'ai eu peur. Je sais que c'est bête.
- Savez-vous qui était cet homme, Miss Granger ?
- Oui. Le sous-ministre à l'éducation magique.
- Précisément. Et trouvez-vous acceptable qu'une étudiante de Poudlard hurle contre le sous-ministre à l'éducation magique ?
- Non.
- En effet. Vous êtes mon assistante. Vous êtes préfète en chef. Tout geste hystérique et irréfléchi est incompatible avec vos responsabilités. Votre comportement est indéfendable, Miss Granger.
- Je sais.
- Je n'ai pas besoin d'une assistante qui s'en prend à un parent d'un élève, et encore moins à un fonctionnaire haut placé. Ce n'est pas que votre crédibilité qui soit en jeu, c'est aussi la mienne.
- Je suis désolée, professeur. J'ai simplement agi par… réflexe.
- Vos réflexes sont lamentables, Miss Granger. White n'avait même pas sa baguette à la main. C'est ce que vous considérez comme un homme menaçant ?
Le souvenir du mangemort qui m'étranglait à mains nues s'imposa à moi, insoutenable. Je levai dignement le menton et répliquai à Rogue :
- On n'a pas besoin d'une baguette pour faire du mal, professeur. Je n'ai sûrement pas besoin de vous l'apprendre.
Pendant une fraction de seconde, Rogue parut intrigué par ma réponse farouche.
- Pensez-vous à quelque chose en particulier, Miss Granger ?
- Non, répondis-je trop vite.
À nouveau, je piquai du nez vers ses chaussures.
- Il me semble vous avoir dit de me regarder lorsque je vous adresse la parole.
À quoi rimait cette conversation ? À me faire pleurer ? À me faire perdre mon temps ici pendant que mes parents risquaient de mourir ? Pourquoi Rogue ne me donnait-il pas tout de suite une retenue, que nous puissions en finir ? À bout de nerfs, je relevai la tête et essayai d'affronter son regard glacial.
Il fronça soudain les sourcils.
- Vous saignez du nez.
- Oh.
Je plongeai la main dans ma poche et en ressortis un mouchoir que je pressai sur mes narines.
- Pourquoi saignez-vous aussi souvent du nez ?
La question me prit au dépourvu.
- Comment savez-vous que je saigne souvent du nez ? demandai-je d'une voix nasillarde.
- Vous saigniez quand je vous ai trouvée endormie dans mon laboratoire, la nuit dernière.
Je rougis en imaginant Rogue me regarder dormir sur la table de travail. Cette perspective avait quelque chose… d'embarrassant.
- Ce n'est rien, répondis-je, pressée d'échapper à ses yeux trop observateurs.
- Ce n'est pas normal. Et vous avez un comportement des plus bizarres, Miss Granger. Êtes-vous malade ?
- Non !
Il haussa un sourcil.
- À votre place, je n'en serais pas si convaincu. Vous devriez aller voir Mme Pomfresh.
- J'irai, professeur.
- J'apprécierais que vous attendiez le départ d'Adams White avant de remettre les pieds à l'infirmerie. Vous avez suffisamment fait de dégâts comme ça. Ne comptez pas sur moi pour vous sauver la mise une deuxième fois s'il vous prend encore l'envie de vous attaquer à n'importe qui sans raison.
- Ça ne se reproduira plus, professeur.
- Je ne l'aurais pas toléré.
Il me planta sur place et sortit de la classe.
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Une demi-heure plus tard, j'apparaissais dans la cour de mes parents, le souffle erratique et la peur au ventre. Je jetai un coup d'œil aux alentours. Et si le mangemort avait trouvé le moyen d'accéder à la maison malgré mon sortilège de protection ? Je secouai la tête. Pourquoi le mangemort viendrait-il rôder ici alors que mes parents étaient au travail ?
Il n'y avait plus une seconde à perdre. Je m'extirpai tant bien que mal des épaisses haies de cèdre, courus jusqu'à la maison, débarrai la porte et m'y engouffrai. La cuisine était silencieuse. Quelques rayons de soleil matinal filtraient doucement à travers les rideaux fermés. Tout semblait paisible et normal.
Vite, Hermione. Dépêche-toi.
À la fin de l'avant-midi, toutes les possessions de mes parents étaient miniaturisées et s'entassaient dans mon sac plein à craquer. Je ne renouvelai pas la protection temporaire en quittant la maison. Mes parents n'y retourneraient pas. Autant garder mes forces plutôt que de les gaspiller avec un sortilège puissant qui serait de toute façon inutile.
Je me rendis ensuite dans un café Internet, où je dénichai une maison à louer en Suisse. Après quelques appels où je me fis passer pour ma mère, je réservai une résidence et annonçai mon arrivée aujourd'hui même. Dans une heure à peine, le propriétaire attendrait mes parents devant leur nouvelle maison.
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Lorsque Severus entra dans son laboratoire, après un cours pénible avec les petits morveux de deuxième année, son regard tomba sur la table où Hermione Granger s'était endormie la veille. Malgré sa fatigue, elle avait réussi à préparer un antibiotique… irréprochable. Il ne pouvait pas le nier. Il repensa à l'altercation farfelue de son assistante avec le sous-ministre White. Quelle idée ! Mais qu'est-ce qui lui avait pris ?
C'est alors que Severus remarqua son oubli : il n'avait ni enlevé de points, ni donné de retenue à Hermione Granger pour la punir de son comportement. Où avait-il la tête ? Cette histoire de saignements de nez l'avait complètement déconcentré. Il serra les dents, suprêmement agacé. Hermione Granger ne perdait rien pour attendre.
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J'étais maintenant planquée dans une petite ruelle, d'où on avait une vue imprenable sur le cabinet de dentistes Granger. J'avais appelé mes parents et leur avais demandé de me rejoindre ici au plus vite, sans leur donner la moindre explication. Au bout d'un moment, je les aperçus traverser la rue en courant et se diriger dans ma direction, l'air aussi décontenancé l'un que l'autre. Ils n'avaient même pas pris la peine d'enfiler un manteau par-dessus leurs blouses blanches.
Mon cœur se serra. C'était le moment que je redoutais. Malgré ma nervosité de plus en plus grande, j'essayai de me composer une expression assurée.
- Mon Dieu, Hermione ! s'exclama ma mère en me repérant. Mais qu'est-ce que tu fais ici ?
- Qu'est-ce qui t'arrive ? renchérit mon père. Es-tu malade ?
- Venez par ici, répondis-je.
Je les tirai par le bras pour les entraîner dans l'ombre de la ruelle, à l'abri des regards.
- Papa, maman, écoutez-moi bien, dis-je en me tournant vers eux. Nous n'avons pas beaucoup de temps. Je ne peux rien vous expliquer pour le moment, mais vous devez absolument faire tout ce que je vous dis.
- De quoi tu parles, Hermione ?
- Fais-tu de la fièvre ? Tu as vraiment l'air malade !
- Je ne délire pas ! Vous êtes en danger à cause de moi. Je suis venue vous mettre à l'abri. Je vous ai loué une maison en Suisse. Je vais immédiatement vous conduire là-bas.
- Mais quel danger ?
- Qu'est-ce que tu racontes ? Qu'est-ce qui se passe ?
- Taisez-vous et écoutez-moi ! m'écriai-je, à bout de nerfs. Un mangemort risque de vous attaquer d'un moment à l'autre pour se venger de moi.
- Un mangemort ? répéta mon père. Ce sont ces espèces de militants néo-nazis dont tu nous as déjà parlé ?
- Quelque chose comme ça.
- Et tu veux qu'on parte en Suisse pour ça ?
- Les mangemorts sont dangereux ! Ce ne sont pas des militants, ce sont des assassins !
- Dans ce cas, c'est hors de question qu'on parte en Suisse pendant que tu es en danger !
La panique me gagna. Avec la pression des derniers jours et les protections temporaires que j'avais lancées à répétition, je me sentais vidée de toute énergie. Je ne réussirais jamais à convaincre mes parents, qui étaient aussi têtus que moi. J'eus soudain envie de pleurer de découragement.
Ton sang-froid, Hermione, garde ton sang-froid !
- Très bien, dis-je, résignée, en sortant ma baguette. Je suis désolée, mais vous ne me laissez pas le choix. Je ne sais pas quand nous nous reverrons, alors je tiens à vous dire que je vous aime. Vous êtes des parents merveilleux.
- Allons, Hermione !
Les yeux chargés de larmes, je pointai ma baguette sur mon père.
- Bon sang, Hermione, qu'est-ce que tu fais ?!
- Ne t'inquiète pas, ça ne fera pas mal. Stupéfix.
Je me précipitai pour retenir sa chute, mais il était bien trop lourd pour moi.
- Grands dieux ! s'écria ma mère.
- Calme-toi, maman, il est seulement endormi. Aide-moi.
Nous posâmes mon père avec précaution sur l'asphalte humide. Pendant que ma mère se penchait sur lui pour vérifier s'il respirait encore, je la stupéfixai à son tour. Elle s'affaissa mollement sur la poitrine de son mari. Je m'agenouillai auprès d'eux, leur agrippai chacun un poignet et concentrai toutes mes pensées sur la destination où nous devions nous rendre. Puis, le cœur battant à tout rompre, je transplanai.
Aussitôt, un tourbillon de bourrasques, de couleurs et de sons m'aspira. Les corps de mes parents s'écartèrent brutalement de moi. Je les retins de toutes mes forces, mais je me sentis de plus en plus écartelée entre eux. Pendant deux secondes terribles, je fus certaine que j'allais les échapper.
Merlin, de grâce ! S'il-vous-plaît s'il-vous-plaît s'il-vous-pl…
Brusquement, le transplanage prit fin et nous nous écroulâmes pêle-mêle dans une pelouse humide. Le cœur dans la gorge, je repoussai les jambes de ma mère qui m'écrasaient le dos et examinai fébrilement mes parents, l'un après l'autre. Deux bras. Deux mains. Dix doigts. Deux jambes. Aucun membre ne semblait manquer. J'aurais pleuré de soulagement, mais j'étais trop exténuée. Une crampe bizarre me tirailla la poitrine, comme si je venais de courir un marathon.
Les jambes flageolantes, je me mis debout, regardai autour de moi et aperçus la demeure que j'avais louée, encore plus coquette que sur les photos que j'avais vues sur Internet. Un immense jardin fleuri entourait la maison. L'arrière de la cour disparaissait à travers une forêt dense où résonnaient les chants d'oiseaux. L'endroit embaumait l'air pur de la montagne et la végétation humide et foisonnante. Mes parents seraient heureux ici.
Je m'approchai de la maison en essayant de ne pas porter attention à la fatigue écrasante qui ralentissait mes pas. Je sortis la voiture et les bagages miniaturisés de mon sac, les déposai sur l'asphalte et leur redonnai leur taille normale. Il ne restait plus qu'une étape. Je revins vers mes parents et pointai ma baguette sur eux. Dans quelques secondes, j'allais être effacée de leur vie.
- Oubliette.
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Severus était en train de corriger impitoyablement les devoirs de ses élèves de deuxième année lorsqu'on cogna à sa porte. Son visiteur entra avant d'y être invité. C'était Minerva.
- Bonjour Severus. J'ai besoin de parler à Herm…
Elle s'interrompit en jetant un regard circulaire dans le laboratoire. Pour une rare fois, aucune potion ne bouillonnait tranquillement sur le feu et aucun assistant ne s'activait à hacher, mesurer, équeuter, découper et mélanger.
- Hermione Granger ? compléta Severus.
- Oui. Je croyais qu'elle était ici.
- Eh bien non.
- Elle n'est pas non plus à son cours d'histoire de la magie.
Severus haussa les épaules avec indifférence. Puis, le souvenir de son assistante en train d'éponger le sang de son nez lui revint en mémoire.
- Elle est sans doute à l'infirmerie, dit-il.
- Comment savez-vous ça ?
- C'est moi qui lui ai dit de s'y rendre.
- Vraiment ? s'étonna Minerva. Pour quelle raison ?
- Elle est malade, répondit-il laconiquement.
Il ne voulait surtout pas laisser croire à sa collègue qu'il s'inquiétait pour l'état de santé de son assistante. Pourquoi s'en soucierait-il ?
Parce qu'elle s'est endormie d'épuisement dans ton laboratoire, ce qui est plutôt étrange.
Mais il repoussa bien vite cette idée agaçante. Minerva le regarda en haussant les sourcils, l'air d'attendre des précisions.
- Je ne suis pas médicomage, Minerva. Vous devriez lui demander vous-même ce qu'elle a.
- Très bien, dit-elle sèchement. Merci, Severus.
Elle s'éclipsa.
Severus reporta son attention sur les devoirs, mais le visage blême et tendu de son assistante revint le hanter. Sans savoir précisément pourquoi, il aurait été prêt à parier dix gallions qu'elle n'était jamais allée à l'infirmerie. Mais si elle n'était pas à l'infirmerie ni à son cours, où était-elle ? En train de se reposer dans son dortoir, sans doute. Minerva finirait bien par la trouver.
Il plongea la pointe de sa plume dans le pot d'encre rouge et essaya de ne plus y penser.
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Dissimulée derrière un gros buisson, j'observai mes parents en train de discuter avec le propriétaire de leur nouvelle maison. Ils semblaient bien s'entendre. Tant mieux. J'attendis patiemment qu'ils entrent à l'intérieur, puis je pointai ma baguette sur la demeure.
Cette fois, c'est une protection permanente que j'allais lancer. J'avais lu que ce sortilège se lançait à plusieurs sorciers et que la liste des effets secondaires était longue comme mon bras, mais je n'avais pas le choix. Je ne voulais pas laisser mes parents sans protection et je ne pouvais pas me permettre de venir ici chaque jour pour renouveler un sortilège temporaire, comme je l'avais fait pendant une semaine avec leur ancienne maison. Tout le monde commençait à me poser des questions sur mes disparitions répétées. Je ne pourrais pas inventer des mensonges indéfiniment.
En proie à une anxiété grandissante, je serrai les doigts très fort autour de ma baguette. Je n'avais pas droit à l'erreur. Si je ratais le sort, il se produirait sans doute un vacarme qui alerterait mes parents et le propriétaire. Dès que je prononçai la formule, un immense halo de lumière aveuglante m'obligea à fermer les yeux. Un violent souffle de vent me secoua les cheveux et m'emplit les oreilles, assourdissant. Je me cramponnai à ma baguette et concentrai toutes mes forces sur la protection qui se mettait en place sur la maison. Mon énergie vacilla dangereusement, mais je tins bon.
La tempête de lumière s'évanouit aussi vite qu'elle avait apparu. Pantelante, j'échappai ma baguette et je tombai à genoux dans l'herbe. J'avais réussi. J'eus à peine le temps d'esquisser un petit sourire satisfait. Tout devint noir.
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Hermione Granger brillait par son absence au dîner dans la Grande Salle. Même ses comparses semblaient se questionner à son sujet, d'après ce que Severus pouvait deviner de leurs visages inquiets. L'envie lui démangeait de demander à Miverva si elle avait fini par retrouver son assistante, mais jamais il ne céderait à une curiosité aussi déplacée. Comme par hasard, Minerva aborda elle-même le sujet en s'adressant à Jake Tisdale, le jeune professeur de défense contre les forces du mal. L'air de rien, Severus tendit l'oreille, tout en feignant la plus grande attention aux morceaux de bœuf de son ragoût.
- Elle n'était pas non plus à mon cours cet après-midi, disait Tisdale. Elle est peut-être malade ?
- Elle n'est pas à l'infirmerie, répondit Minerva. Ni à la tour des Gryffondor.
- Peut-être que ses amis Harry et Ron ont une idée ?
- Je leur ai déjà parlé. Ils ne l'ont pas vue depuis le petit-déjeuner.
Minerva tourna la tête vers Severus.
- Ce qui signifie, poursuivit-elle, que vous êtes le dernier à l'avoir vue aujourd'hui, Severus.
Il se composa un air perplexe.
- Je vous demande pardon ? Qui suis-je le dernier à avoir vu ?
- Votre assistante, Severus.
- Je vous l'ai déjà dit, Minerva. Je l'ai envoyée à l'infirmerie.
- Elle n'y est pas allée.
- Alors comment voulez-vous que je sache où elle est ?
Ni Minerva ni Tisdale ne répondirent, l'un et l'autre perdus dans leurs réflexions. Agacé, Severus serra les lèvres. Il n'allait sûrement pas laisser quiconque l'accuser de la disparition d'une élève ! Et puis quoi encore ?
Il se remit à picorer dans son assiette, mais n'avala rien. Toutes ses pensées étaient tournées vers le souvenir d'Hermione Granger, livide, tremblante et bouleversée, quand il avait essayé de lui tirer les vers du nez ce matin. Hermione Granger qui avait bravement répondu à toutes ses questions malgré son apparente faiblesse, alors que lui ne cherchait qu'à la faire craquer. Elle avait semblé au bout du rouleau. Qu'est-ce qui lui arrivait ?
Si elle n'était pas à Poudlard, où donc était-elle ?
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Lorsque je repris conscience, je sentis des brins d'herbe humide contre ma joue. Je relevai brusquement la tête et regardai autour de moi, désorientée. J'étais affalée de tout mon long sur la pelouse. La nuit était presque tombée. Où étais-je donc ?
Je reconnus tout d'un coup la nouvelle maison de mes parents, ensevelie entre les arbustes et les massifs de fleurs. Au loin, la forêt s'était parée d'or et de feu dans la lumière du crépuscule. Soulagée de me retrouver en terrain connu, je me remis debout, mais le sol tangua dangereusement sous mes pieds. Je retombai à genoux. Qu'est-ce qui m'arrivait ?
Du calme, Hermione.
Je savais que les évanouissements et la faiblesse étaient des effets indésirables possibles quand on lançait un sortilège de protection permanente. Mes malaises étaient normaux. Je ramassai ma baguette dans l'herbe. Il était temps de retourner à Poudlard au plus vite.
Lorsque je transplanai, une douleur atroce m'envahit la poitrine, bien pire que la crampe que j'avais ressentie auparavant. Plutôt que d'apparaître debout devant la porte de l'enceinte du parc, je me heurtai brutalement contre les grilles de fer forgé. Je poussai un gémissement, me relevai tant bien que mal et entrai dans le parc. Quand je regagnai enfin l'école, j'entendis les grandes portes se verrouiller bruyamment derrière moi pour la nuit. Il était moins une.
Nauséeuse et tremblante, je descendis un étage plus bas, vers les cachots, pour m'engouffrer dans des toilettes qui étaient toujours désertes. Mon cœur se serra lorsque je vis mon reflet dans le miroir. Avec ma pâleur incroyable et mes cernes bleu foncé, j'avais une mine épouvantable. Si je me dépêchais, je pourrais me réfugier dans mon dortoir avant que le dîner ne se termine et que quelqu'un ne me voie dans cet état.
Mais tout ne se passa pas comme prévu. Quand je quittai les toilettes et me retrouvai dans le couloir obscur, une voix grave retentit quelque part à ma gauche.
- Qui est là ?
Je sursautai et scrutai l'obscurité, incapable de distinguer qui se tenait dans le couloir.
- Lumos, dit la voix.
Le visage illuminé de Severus Rogue fendit l'obscurité.
Pas lui !
- Tiens donc. Miss Granger, l'élève invisible. Quelle surprise. Ainsi donc, vous avez décidé de réapparaître ?
- Qu'est-ce que vous voulez dire ? demandai-je, méfiante.
- Votre directrice vous a cherchée toute la journée. Manifestement, vous étiez introuvable. J'imagine que notre illustre préfète en chef a une excellente raison pour avoir manqué tous ses cours sans en avertir qui que ce soit ?
- J'étais… souffrante.
Il dirigea la lumière de sa baguette vers moi et me dévisagea. Je clignai des yeux, éblouie.
- Vous avez les joues rouges. Êtes-vous allée vous balader dehors ?
- Serait-ce devenu un crime que de sortir dehors ? répliquai-je en me protégeant les yeux d'une main.
- De la part d'une pauvre jeune femme souffrante, c'est une idée plutôt étonnante.
- Vous n'avez jamais entendu parler des vertus de l'air pur ?
- Si, mais je n'aurais jamais imaginé qu'une personne aussi terre-à-terre que vous puisse avoir foi en ce genre de sornettes.
- Lumos, dis-je à mon tour, exaspérée d'être aveuglée par sa baguette allumée.
Aussitôt, une autre crampe douloureuse me coupa le souffle. Ma baguette m'échappa et roula à mes pieds. Encore une fois, j'eus l'impression que le sol se mettait à tanguer sous mes pieds, comme sur une chaloupe en haute mer. Je m'appuyai contre le mur de pierre et me laissai glisser au sol, une main crispée sur ma poitrine.
Rogue s'approcha.
- Qu'est-ce qui vous arrive, encore ?
Je respirai profondément et la douleur se dissipa peu à peu.
- Je suis étourdie, répondis-je d'une voix faiblarde.
- Levez-vous.
- Un instant.
- Miss Granger, je n'ai nullement l'intention de vous porter sur mon dos.
- Je n'avais nullement l'intention de vous le demander.
- Et je ne compte pas non plus poireauter toute la soirée pendant que vous vous prélassez sur le sol.
- Alors laissez-moi ici et allez-vous-en.
- Je vous retire trente points pour votre grossièreté.
- Mais… !
- À moins que vous ne vouliez voir le score de Gryffondor chuter dans le négatif, je vous conseille de vous lever immédiatement !
Pourquoi s'acharnait-il ainsi sur moi ? Chancelante, je glissai ma baguette dans ma poche et me hissai sur mes pieds.
- Suivez-moi, dit-il en partant en direction du laboratoire.
- Je préfèrerais retourner à ma tour.
- Vous n'allez sûrement pas monter sept étages dans cet état. Venez.
- Ça ira, je vous assure.
- Silence !
À contrecœur, je consentis à le suivre. Il me précéda jusqu'à son laboratoire, doucement éclairé par un feu et quelques chandelles qui projetaient leur lueur mouvante sur les murs de pierre. Le soir, cette salle revêtait toujours une atmosphère chaleureuse et paisible. L'odeur familière des herbes me taquina les narines, étrangement réconfortante après cette journée infernale à l'extérieur de Poudlard.
- Assoyez-vous, dit-il en désignant les fauteuils au bord du feu.
- Mais…
- Miss Granger, vous avez déjà mis ma patience à rude épreuve aujourd'hui. Cessez de vous lamenter et faites ce que je vous demande.
- Je ne me lamente p…
Le dernier mot resta coincé dans ma gorge quand il me lança un regard noir. J'étais trop patraque pour envisager de le contredire encore. Résignée, je m'approchai du fauteuil le plus près et m'y laissai choir, les jambes flageolantes. Mes fesses s'y enfoncèrent tellement profondément que je me demandai comment je trouverais la force de m'en extirper ensuite.
J'entendis vaguement Rogue déplacer des objets et faire couler de l'eau, mais je n'essayai pas de regarder ce qu'il faisait. Encore étourdie, je me penchai en avant et appuyai mon front sur mes genoux tremblants. Lorsque j'entendis Rogue revenir vers moi, je relevai la tête avec précautions. Il me tendit un gobelet rempli d'un liquide clair.
- Buvez.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Posez encore une seule question et je vous lance un sort de mutisme.
J'essayai de lui renvoyer un regard aussi noir que le sien, mais en ce moment, c'était au-dessus de mes forces. Je pris le gobelet d'une main tremblante et le calai le plus rapidement possible, convaincue que la mixture serait imbuvable. Mais c'était de l'eau sucrée.
Rogue reprit le verre et me fixa en silence. Au bout de quelques instants, mes tremblements s'apaisèrent et je me sentis un peu mieux.
- Souffrez-vous de diabète ? demanda soudain Rogue.
- De diab… ? Mais non.
- Êtes-vous allée à l'infirmerie comme je vous l'avais demandé ce matin ?
- Je... Non.
- Et pourquoi donc ?
- Je n'ai pas eu le temps, mentis-je. Et je ne suis pas malade. J'avais simplement besoin de repos.
Rogue eut un reniflement ironique.
- Manifestement, votre petite cure à base d'air pur et d'école buissonnière ne vous a pas immensément reposée.
- Professeur, je devrais partir, maintenant, dis-je en me hissant tant bien que mal hors du fauteuil moelleux. Je vous remercie pour le verre d'eau.
Je remarquai que ma baguette était toujours allumée dans la poche de ma robe.
- Nox, murmurai-je.
Aussitôt, les étourdissements reprirent. J'aurais perdu l'équilibre si deux grandes mains fortes ne m'avaient pas fermement retenue par la taille. Je me cognai le nez contre la poitrine de Rogue. Il sentait un mélange de plantes et de forêt humide en automne, exactement comme à la nouvelle maison de mes parents en Suisse. Troublée par notre proximité, je levai les yeux vers lui, mais je ne pus pas distinguer son expression, car une noirceur soudaine avait envahi mon champ de vision.
La dernière chose dont j'eus conscience, c'était que la crampe bizarre avait réapparu, insoutenable, comme une déchirure à l'endroit du cœur.
Je sombrai.
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Lorsque Hermione Granger tourna de l'œil, Severus l'attrapa in extremis par la taille, lui épargnant de se fendre le front en tombant tête première sur le dallage de pierre, mais il faillit l'échapper quand elle devint toute molle. Elle avait beau être un poids plume, rien n'était plus malaisé que de soutenir une personne inconsciente. Il la laissa glisser au sol et la contempla avec colère.
Pourquoi n'était-elle pas allée à l'infirmerie ce matin, comme il le lui avait conseillé ? Mais non, il avait fallu quelle joue les Gryffondor têtues et indépendantes et qu'elle vienne s'affaisser dans un couloir des cachots, puis dans son laboratoire. Il poussa un soupir irrité. Elle avait pourtant déjà amplement mis ses nerfs à l'épreuve aujourd'hui, avec cette altercation sans queue ni tête avec le sous-ministre Adams White. Maintenant, ce serait à Mme Pomfresh de s'occuper de son cas. Une bonne chose.
Severus sortit sa baguette et fit léviter son assistante devant lui en direction de l'antichambre. Pas question de trimballer une élève inconsciente à travers le château, à la vue de tous ces gamins qui propageaient les rumeurs les plus grotesques comme une traînée de poudre ! Il s'arrêta devant la cheminée et lança une pincée de poudre de cheminette dans l'âtre étroit. Impossible pour un homme de sa taille de s'y tenir en compagnie d'un corps suspendu à l'horizontale dans les airs.
Alors Severus s'approcha de son assistante, plaça un bras sous ses genoux et un autre autour de ses épaules, puis mit fin au sortilège de lévitation. Sans grande difficulté, il la maintint solidement contre lui lorsqu'elle lui tomba dans les bras de tout son poids. Décidément, elle était vraiment légère. Les boucles brunes qui s'échappaient de son chignon lui chatouillèrent le cou. Elle exhalait le melon et le thé vert, une odeur fraîche et discrète qui contrastait avec les parfums entêtants dont ses compatriotes de septième année s'aspergeaient allègrement. Pour un maître des potions avec un odorat très fin, c'était infernal. Severus veillait toujours à se tenir à distance de ces filles, ou encore à retenir son souffle quand il n'avait pas le choix d'en approcher une à moins de trois mètres. Heureusement qu'Hermione Granger n'était pas atteinte d'une coquetterie aussi détestable, sinon il ne l'aurait jamais tolérée dans son laboratoire.
Mais pourquoi était-il en train de penser au parfum de son assistante alors qu'elle gisait inconsciente entre ses bras ? Si ça se trouvait, il était en train de devenir aussi bizarre qu'elle. Chassant ses pensées incongrues, il pénétra dans l'âtre en essayant de ne pas lui cogner la tête.
- L'infirmerie, annonça-t-il à travers les flammes douces qui lui léchaient le corps.
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À suivre !
Pour les curieux, le titre provisoire du prochain chapitre est le suivant : « Convalescence et conspirations ». Je mettrai peut-être un peu plus de temps que d'habitude à publier, car je dois faire de l'ordre dans mes idées pour la suite, mais je vous promets de faire de mon mieux. =) À bientôt !
