Pour la première fois depuis qu'ils étaient amis, Hermione avait invité Ron chez elle, dans sa chambre. Ses parents étaient sortis pour la journée, partis voir des amis qu'ils n'avaient pas vus depuis leur départ en Australie, pour essayer de rétablir leur vie normale maintenant qu'ils étaient revenus chez eux, alors Hermione en avait profité. Ils allaient souvent au Terrier, mais y étaient rarement seuls. Et pour ce qu'elle prévoyait aujourd'hui, valait mieux être en tête à tête.
— Ça m'aurait fait peur, tous ces yeux qui me regardent pendant que je dors.
Ron examinait la rangée de poupées de porcelaine d'Hermione, qu'elle collectionnait dans sa jeunesse.
— Dit celui qui a des images de gens qui bougent sur les murs de sa chambre, répliqua Hermione avec un sourire en coin.
— Justement, ils bougent, c'est plus naturel !
En riant doucement, Ron vint s'asseoir sur le lit aux côtés de sa copine. Il baissa la tête et se mit à lui embrasser le cou, chatouillant la peau fine avec sa langue comme elle appréciait tout particulièrement. Elle ferma les yeux, mais plaça une main ouverte sur la poitrine du roux et le repoussa. Elle ne voulait pas lui donner une idée fausse de la raison pour laquelle elle l'avait invité, aujourd'hui. Le garçon recula, l'air confus
— Hermione ? Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je crois que…, commença-t-elle en baissant les yeux, avant de secouer la tête. On est allés trop vite.
— Trop vite ? répéta Ron. Trop vite pour quoi ? Sept ans d'amitié, c'est trop vite pour toi ?
Les larmes lui montaient déjà aux yeux, mais Hermione leva la tête pour faire face à Ron.
— C'était la guerre. C'était spontané, impulsif. Je t'aime, Ron, je crois que je t'ai toujours aimé, mais j'ai besoin de temps. J'ai besoin de trouver que je suis, seule, à l'écart de Harry et toi, avant de pouvoir me lancer dans quelque chose de sérieux.
Hermione tendit une main vers lui. Elle avait espéré qu'il comprenne. Elle croyait que sa demande de temps n'était pas déraisonnable. S'ils avaient attendu sept ans l'un pour l'autre, ils pourraient bien attendre quelques mois de plus, non ?
Mais avant qu'elle ne puisse poser une main sur sa cuisse, Ron se leva, la mâchoire crispée et le visage rouge sous ses taches de rousseur.
— Si tu m'aimais vraiment, tu n'aurais pas besoin de temps. Tu n'aurais pas à y penser, à hésiter, à te demander si je suis assez bien pour toi !
— Assez bien pour…
Hermione était estomaquée.
— Ron ! Ça n'a rien à voir du tout ! s'exclama-t-elle en se levant à son tour.
Mais Ron grimaça et recula vers la porte, l'évitant une fois de plus alors qu'elle voulait s'approcher de lui, le toucher, le rassurer.
— Si tu veux rester seule, eh bien, reste seule ! cracha-t-il. Mais ne t'avise pas de me contacter.
Sans un mot de plus, il fit volte-face et sortit de la chambre. Hermione courut derrière lui et cria son nom, mais il ne se retourna pas, dévalant les escaliers sans regarder autour de lui. Quand il sortit de la maison en faisant claquer la porte derrière lui assez fort pour tout faire trembler, Hermione éclata en sanglots et se jeta sur son lit d'enfant. Elle avait cru, vraiment cru, que cette discussion se passerait autrement. Elle aimait Ron, n'avait aucun doute là-dessus, mais elle n'avait que dix-huit ans. Elle voulait se définir elle-même, seule, avant de se lancer dans une relation. Elle n'aurait pas de deuxième chance.
Et après aujourd'hui, elle n'en aurait peut-être même pas de première.
