Chapitre 21- Mensonges
Le samedi suivant, après le contrôle de potions, Hector, Hermès, Léto, Euryclée et Calypso déjeunent ensemble au réfectoire.
Hector : "Tu ne rentres pas chez tes parents ce week-end, Euryclée?"
Euryclée : "Non, c'est trop fatiguant, avec le trajet, le décalage horaire, et les contrôles le samedi matin. En plus ..."
Elle jette un coup d'œil vers Calypso. Cette dernière a le nez dans son assiette, le teint pâle, et les cheveux mal coiffés. Depuis son arrivée à l'internat, Léto, Euryclée et Marie ont pris soin de rester le plus souvent possible avec elle pour lui éviter de déprimer, apparemment sans grand succès.
Léto : "Je reste aussi. Mais Marie devait rentrer. Ses parents ont insisté pour qu'elle rentre, je crois qu'ils ont un truc à lui dire."
Hermès : "Un truc qu'ils ne veulent pas dire au téléphone?"
Léto : "On verra bien. En attendant, c'est mon premier week-end à Sortnettes! Je pensais en profiter pour aller visiter les coins où on ne peut pas aller en semaine."
Hector : "Les endroits interdits aux élèves la semaine sont aussi interdits le week-end."
Léto : "Mais c'est beaucoup moins surveillé! La plupart des adultes rentrent chez eux le week-end!"
Hermès : "Pas l'infirmier. On s'est fait collés avec Hector le week-end juste avant les vacances."
Euryclée : "Il va falloir préparer le petit-déjeuner pour ma marraine! J'y avais pas pensé! Vous savez ce que vous allez faire?"
Hector : "Euh ..."
Calypso : "Mon parrain n'est pas interne, donc je suis dispensée de ramener le petit-déjeuner au lit."
Léto : "Mais tu vas nous aider! Tu peux pas nous laisser faire tout le boulot toutes seules! J'ai plein d'idées formidables, je suis sûre que ça va être très drôle."
Hector : "À faire valider par M. Tuebor, je te rappelle."
Léto : "Ouais ... T'as raison, il vaut mieux commencer par ça, ça risque de prendre un moment pour obtenir le droit de faire tout ce que je veux. On y va?"
À l'infirmerie, Hector admire l'ingéniosité de Léto, et les centaines d'idées toutes plus originales les unes que les autres qu'elle a à proposer pour le petit-déjeuner du lendemain. Mais il doit bien convenir que la plupart de ces idées sont dangereuses.
M. Tuebor : "Non! Mademoiselle Cambiabo, vos idées sont beaucoup trop dangereuses! Je ne vous autorise absolument pas à faire quoi que ce soit de tout cela. Demain, vous prendrez un plateau à la cantine, et vous le porterez à votre marraine tel quel, sans rien modifier. Jamais je n'approuverais un projet susceptible de mettre en danger des élèves!"
Calypso : "Ah, vous n'approuveriez jamais un projet susceptible de mettre en danger des élèves?"
M. Tuebor : "Jamais!"
Calypso : "Sauf si ce projet était proposé par des adultes?"
M. Tuebor : "Mais de quoi parlez vous, mademoiselle ...?"
Calyspo : "Sapiam. Je suis Calypso Sapiam. Alors, vous n'avez jamais approuvé un projet qui a mis des élèves en danger?"
M. Tuebor : "Non, je n'ai jamais donné mon aval pour un tel projet. Vous avez une imagination trop fertile, mademoiselle. Pour en revenir aux petits-déjeuners, j'ai peut-être une idée ..."
500 millimes plus tard, les élèves rentrent au foyer des élèves avec une potion de rythmicité, préparée par M. Tuebor spécialement pour l'occasion.
Calypso : "Donc, vous versez une dose de potion de rythmicité dans le jus d'orange de vos parrains, et pendant un jour, ils ne peuvent plus s'empêcher de danser dès qu'ils entendent de la musique?"
Léto : "Oui, ça va être trop cool! Mais, dis moi, Calypso, M. Tuebor a participé à un projet qui a mis des élèves en danger?"
Calypso : "Non. Enfin, peut-être participé. Il n'a jamais "donné son aval". Mais "il approuverait". Enfin, il pourrait approuver."
Euryclée : "Du coup, c'est plutôt un projet en préparation?"
Calypso : "Peut-être ... Ou peut-être qu'il n'a pas pu "donner son aval" parce que ce n'est pas lui qui décide. Il a peut-être approuvé, même si ce n'était pas lui qui donnait sa permission."
Léto : "On essaie d'interroger d'autres adultes?"
Calypso : "Et comment tu veux faire ça? On va avoir l'air super louches si on demande à des adultes si l'école met les élèves en danger."
Hector : "Susceptible de mettre des élèves en danger ... Peut-être qu'il a autorisé M. Vatel à nous faire des tartines de beurre de cacahuète au petit-déjeuner, ou qu'il a ciré les marches d'un escalier glissant."
Calyspo : "J'ai l'impression que c'est un peu plus sérieux que ça. Il faudrait poser des questions bien choisies aux adultes, mais si c'est moi qui les interroge, ils vont se méfier. Hector, c'est ton rat, là-bas?"
Sur la table à côté d'eux, Tatouille ronge un stylo laissé là par un élève.
Hector : "Hé! Tatouille, arrête ça tout de suite!"
En voyant que Hector le regarde, Tatouille lâche le stylo, et se précipite vers une pile de livre. Il fait semblant de se cogner dessus, et s'effondre sur la table, agitant pitoyablement les pattes tout en poussant des hurlements de rire.
Euryclée : "Il est blessé! Il faut qu'on l'emmène à l'infirmerie. Tu crois que M. Tuebor sait soigner les rats?"
Hector : "Non, il n'est pas blessé, il joue."
Euryclée : "Mais il est allongé sur le dos, il agite les pattes dans le vide, et il crie. Bien sûr qu'il est blessé, Hector!"
Hector : "Euh ... Tu as raison, je vais l'emmener à l'infirmerie, histoire d'être sûr."
Calyspo : "OK, on t'attend là."
Hector ramasse Tatouille et l'emmène dans le couloir en direction de l'infirmerie.
Hector : "Tatouille! Je t'ai déjà dit de ne pas sortir du dortoir! Et d'arrêter de te moquer de moi! C'est bon, je me suis cogné UNE FOIS pendant les vacances, ça arrive à tout le monde, même aux humains, pas la peine de me le rappeler tout le temps! Et ne ronge plus les affaires des autres élèves. je vais avoir des ennuis, moi, si tu fais n'importe quoi!"
Tatouille s'excuse et promet de ne pas recommencer, en tout cas pas tout de suite. Et Hector promet qu'il s'occupera plus de lui. C'est moins pratique de passer du temps à jouer avec Tatouille depuis qu'il a des amis humains et qu'il partage un dortoir avec cinq autres garçons, mais Tatouille mérite mieux que de rester abandonné seul dans le dortoir.
Le lundi matin, M. Flagellabo rend les contrôles de potions. Les livres de magie ne peuvent pas être bouillis, c'est pourquoi il est nécessaire d'apprendre les formules magiques, les recettes de potions, et les propriétés des différents ingrédients par cœur. Malheureusement, Hector n'est pas très bon pour apprendre par cœur. Et il est plutôt inquiet quand M. Flagellabo commence à rendre les copies.
M. Flagellabo : "Alors, dernier ..."
Hermès se tient très droit sur sa chaise, dans son dos il a les doigts croisés. Hector imagine sans difficulté à quel point c'est horrible d'être dernier pendant toute une semaine, le rappel cinglant de sa nullité à chaque fois qu'un prof fait l'appel ... D'ailleurs, Hector n'est pas bien rassuré non plus ... Pourvu que ce ne soit pas moi ...
M. Flagellabo : "Jean. Copie absolument nulle. Aucun travail, à se demander si vous avez seule- ment pris la peine d'ouvrir votre livre. Si vous ne comptez pas étudier la magie, je me demande bien ce que vous faites dans cette école. ΜετεωριζοÈο και νεmοίο "
La copie de Jean s'envole, et atterrit devant lui.
M. Flagellabo : "Ensuite ... M. Redibo. Espérons que la persévérance et la ténacité légendaires de la famille Rembobineurs vous aideront à vous améliorer pour les contrôles suivants. ΜετεωριζοÈο και νεmοίο "
La distribution de copies continue, et Hector ne sait trop qu'espérer. Il a hâte que sa copie arrive pour savoir enfin quelle note il a, mais il espère qu'elle arrivera le plus tard possible, puisque plus il attend mieux il sera classé. Il commence à être rassuré quand M. Flagellabo rend la copie de Sarpédon.
M. Flagellabo : "M. Sapiam. C'est bien, vous avez la moyenne, mais je suis certain que vous êtes capable de mieux."
Finalement, Hector a 13, ce que M. Flagellabo qualifie de "médiocre". Fatima a 15. "Pas terrible, pour une Alchim". Et Marie a 18. "On dirait que la Studiôse se débrouille bien pour apprendre par cœur, on verra ce que ça donne quand les contrôles demanderont autre chose que d'ânonner bêtement son cours".
À la pause déjeuner, les internes interrogent Marie sur son week-end.
Euryclée : "Alors, Marie, ton week-end c'est bien passé?"
Marie : "Oui, ça va."
Calypso : "Et donc, qu'est-ce qui ne va pas?"
Marie : "... rien ... C'est mon père, il a un cancer. Mais il va guérir."
Calypso : "C'est un moldu, ton père? Il est soigné par des médecins moldus?"
Marie : "Oui. Tu crois qu'on peut faire quelque chose pour l'aider? Avec de la magie?"
Hermès : "Il a déjà bu de la potion Périclès?"
Marie : "J'en sais rien ... sûrement pas, non, comment il en aurait eu? Mais où on va trouver de la potion Périclès?"
Calypso : "Je ne sais pas, Marie, mais on va y arriver. On ne laissera pas ton père mourir, je te le promet."
L'après-midi, Hector, Hermès, Marie et Calypso sont de nouveau ensemble en TP de botanique. Ils extraient du venin de tarenplante, et Hermès n'est pas très rassuré.
Hermès : "Mais c'est dangereux, ce venin est hyper toxique!"
Marie : "Mais non, les professeurs, ne feraient jamais rien qui risque de mettre les élèves en danger, n'est-ce-pas, madame?"
Mme Rapiam : "Non, bien sûr que non. Tout ce que nous faisons, c'est pour vous protéger."
Hector : "Mais vous faites quelque chose de particulier pour nous protéger, en ce moment?"
Mme Rapiam : "Rien, à part de vous obliger à porter vos gants de protection correctement. Le
venin pourrait passer sous la manche, là. Remettez ça tout de suite."
À la fin du TP de botanique, les internes rentrent à la tour ouest, et Calypso retient Hector au détour d'un couloir pour discuter discrètement.
Hector : " Mme Rapiam mentait, n'est-ce pas? ... Les profs font quelque chose de particulier en ce moment pour protéger les élèves. Ce qui signifie qu'on a un besoin particulier de protection, je suppose?"
Calypso : "Sûrement. Mais ce n'est pas la seule à mentir. Tu n'as pas emmené Tatouille à l'infirmerie, hier. Tu étais certain qu'il ne s'est pas cogné, que c'était un jeu."
Hector : "Oui, euh ... ça fait des années que j'ai ce rat, je le connais bien, je sais reconnaître quand il est malade."
Calypso : "Et tu n'as pas eu envie d'argumenter, alors tu as préféré faire semblant d'aller à l'infirmerie?"
Hector : "Voilà, c'est ça."
Calypso : "Et c'est tout?"
Hector : "Bah oui, c'est tout, qu'est-ce que tu t'imagines? C'est pas poli de poser plein de questions comme ça!"
Calypso : "C'est pas poli non plus de mentir à ses amis."
Hector : "Bon, d'accord ... Mais tu ne le répéteras pas, hein?"
Calypso : "Promis, si tu as un secret, je ne le dirai à personne."
Hector : "Je sais parler aux rats."
