Chapitre 33 - La commission d'état civil
Le 2 février, Hector trépigne sur son siège en cours de maths.
Sachant qu'il faut 150 mg d'aglaonema pour préparer 20cl de potion d'eu- phorie, quelle quantité d'aglaonema faut-il pour préparer 1 litre de potion d'eu- phorie? Donnez le résultat en mg, puis en nombre de tiges, sachant qu'une tige d'aglaonema mesure en moyenne 15cm de haut, 2cm de large, 8mm d'épaisseur, et a une masse volumique de 0,45 g/cm3.
Impossible de se concentrer, c'est le grand jour! À 8 toquantes, dès que le cours finit, il rejoindra Acamas et ils se rendront ensemble devant la commission d'état civil. Hector est dispensé de cours pour le reste de la journée. Plus que 300 millimes ... 200 ... 100 ... Ça y est! Complètement surexcité, Hector retourne au dortoir pour y chercher Tatouille, et court jusqu'au hall de la tour Est pour rejoindre Acamas.
Acamas : "Inutile de courir, M. Hector, vous êtes convoqué à 9 toquantes, nous sommes plutôt en avance. Vous êtes sûrs que vous n'oubliez rien? "
Hector : "Non, non, c'est bon! J'ai tout vérifié 3 fois ce matin avant d'aller en maths!"
Acamas : "Vous tenez vraiment à emmener cet animal?"
Hector : "Euh ... C'est pour prouver ma maîtrise du pouvoir Loquar."
Acamas a l'air sceptique, mais n'ajoute rien. Accompagné de Hector, il se rend à la cantine pour y prendre deux repas à emporter, et Acamas en profite pour avoir une longue discussion avec M. Vatel. Hector ne tient pas en place. Ils finissent enfin par aller prendre le MEM, et quelques dizaines de millimes plus tard, ils sont au Louvre, dans le couloir menant aux différents bureaux. Il est 8 toquantes 700.
Acamas : "Vous voyez, je vous avais bien dit qu'on serait en avance."
Hector, Acamas et Tatouille s'installent dans la salle d'attente, adjacente à la pièce où se réunit la commission d'état civil.
Acamas : "Ce qui est sûr, c'est qu'ils ne viendront pas nous chercher avant 9 toquantes. Mais il se peut qu'ils soient en retard. Essayez de vous détendre en attendant, vous avez l'air nerveux comme un dragonnet. Il n'y a vraiment aucune raison, vous maîtrisez les pouvoirs Loquar et Ibo à la perfection, cette commission ne pourra que le reconnaître."
Malgré ses paroles rassurantes, Acamas a l'air plutôt nerveux lui aussi.
À 9 toquantes 200, Idoménée, l'employé du bureau d'état civil qui les avait déjà reçu la première fois, vient chercher Hector et Acamas. En arrivant devant les membres de la commission d'état civil, Hector sent son cœur battre à tout rompre. La salle ressemble à un tribunal : assis sur de grandes chaises, derrière une longue table, une dizaine de personnes lui font face. Idoménée laisse Hector et Acamas debout, plantés au milieu de la pièce, et il va s'asseoir en face d'eux. Hector remarque Priam Sapiam assis parmi les membres de la commission. Quand leur regards se croisent, M. Sapiam lui adresse un sourire et un geste rassurant de la main. Hector essaie de sourire à son tour, mais il n'est pas certain d'y réussir : il se sent terrifié.
Idoménée : "Nous sommes réunis aujourd'hui afin de déterminer si Hector, ici présent, possède les pouvoirs Loquar et Ibo. Commençons par le pouvoir Loquar. Jeune homme, vous prétendez détenir ce pouvoir."
Hector : "Euh ... oui!"
Hector se sent ridicule, il ne devrait pas hésiter ni bafouiller, bien sûr qu'il a le pouvoir Loquar!
Tatouille : "Hector, ils sont plus nombreux que nous, et ils sont plus gros. Il vaudrait mieux ne pas nous battre."
Idoménée : "Si vous avez vraiment le pouvoir Loquar, dites à ce rat de se taire, ses couinements sont insupportables."
Hector (en rat) : "T'inquiètes je compte pas me battre, on va faire ce qu'ils veulent.
Ils n'aiment pas quand tu parles, comme ils comprennent pas, ça les dérange. Tais toi, s'il te plaît."
Tatouille ouvre la gueule pour répondre, mais s'arrête avant de dire quoi que ce soit, et lèche le doigt d'Hector en signe d'approbation au lieu de parler.
Hector (en humain) : "Je pense qu'il ne parlera plus. Mais je ne peux pas le garantir, il ne fait pas toujours ce que je lui dit. Il a particulièrement du mal à retenir longtemps les consignes."
Idoménée : "Je suppose que vous avez amené cet animal pour nous faire croire que vous avez le pouvoir Loquar? Vous avez préparé un petit numéro de dressage pour nous impressionner?"
Hector : "J'ai vraiment le pouvoir Loquar, et j'ai amené Tatouille pour le cas où vous n'auriez rien prévu pour tester mon pouvoir. Mais si vous avez peur qu'on ce soit concertés d'avance, Tatouille et moi, je peux aller chercher un autre rat. Il y en a plein dans le MEM."
Diomède, un des membre de la commission : "Et qu'est-ce que ça changerait? Si vous avez pu dresser un rat, vous avez pu en dresser deux. Nous avons ici un verre de venin de cobram. Vous allez le boire."
M. Sapiam : "Bien sûr, ce verre contient du venin de cobram, et rien d'autre?"
Diomède : "Évidement."
M. Sapiam : "Je propose que l'on fasse analyser ce verre, ce serait quand même dommage d'empoisonner ce jeune homme par accident."
Idoménée : "Vos accusations sont très graves, M. Sapiam. Nous pourrions, bien sûr, faire analyser ce verre. Mais s'il s'avérait que vous avez accusé à tort d'honorables représentants de notre gouvernement, vous en répondrez devant le tribunal."
Hector : "Donnez moi ce verre. Son contenu a peu d'importance, après tout, tant qu'il contient du venin de cobram."
Personne n'a de réponse à cela, et Hector va chercher lui-même le verre posé devant Idoménée.
Tatouille : "Ne bois pas ça, Hector! Ça a l'odeur d'un poison! La même odeur que les bouts de fromage que ton oncle avait déposés dans la cave pour dératiser."
Hector (en rat) : "Ne t'inquiète pas, je sais ce que je fais."
Hector (en humain) : "Mon rat prétend que cette boisson a l'odeur du cyanure."
Hector vide son verre d'un trait. Lors du dernier cours d'histoire, Marie leur a fait lire un livre écrit par un de ses ancêtres Loquarexibo décrivant le goût du venin de cobram. Il paraît que c'est assez perturbant la première fois, mais que c'est très bon quand on a pris l'habitude. Le goût est très fort, plutôt salé, avec avec une certaine âpreté, un goût aride qui donne l'impression de sucer un caillou dans le désert ... et il y a une saveur qui tranche avec le reste. Quelque chose qui n'était pas décrit dans le livre, qui ne devrait pas être là.
Hector : "Et ça a un arrière goût d'amande amère."
Diomède : "Le verre a du être mal rincé, il contenait sûrement une boisson à l'amande avant qu'on y verse du venin de cobram."
Laomédon : "Peut-être. Il serait néanmoins intéressant de savoir exactement ce que contenait ce verre mal rincé. Il ne coûte rien de le faire analyser."
Idoménée : "En effet. Bien, nous allons maintenant passer à l'examen du pouvoir Ibo."
M. Sapiam : "Vous êtes distrait, Idoménée, vous avez oublié d'enregistrer le changement de nom de Hector."
Idoménée : "S'il a aussi le pouvoir Ibo, on aurait aussi bien pu enregistrer les deux d'un coup. Enfin, si vous êtes tatillons ..."
Idoménée sort sa baguette, et ouvre une fenêtre dans le vide, juste devant lui. Il en sort un registre et un stylo. Puis, il referme la fenêtre, pose le registre devant lui, tourne lentement les pages, et écrit quelque chose.
Idoménée : "Voilà qui est fait. Vous avez un justificatif d'identité?"
Hector : "Euh ..."
Hector sort sa carte d'étudiant. Stupéfait, il constate qu'elle n'indique plus "Hector Potier", mais "Hector Loquar".
Idoménée : "Bien, nous allons pouvoir passer au test du pouvoir Ibo, maintenant? Donnez moi votre baguette, Hector."
Hector n'aime vraiment pas l'idée d'être désarmé, mais il n'a pas le choix.
Idoménée : "Inutile de faire cette tête, ce n'est qu'une baguette d'entraînement. Même si vous veniez à la perdre, il vous suffirait d'en acheter une autre."
Hector répond sans réfléchir, il entend ses mots résonner à ses oreilles avant même de réaliser qu'il a ouvert la bouche.
Hector : "Avec quel argent?"
Idoménée : "Quelle insolence! C'est inadmissible, vous vous tenez devant une commission sérieuse et ..."
M. Sapiam : "Idoménée, arrêtez de menacer ce garçon. Il vous a donné sa baguette magique, procédons maintenant au test du pouvoir Ibo."
Hector se sent particulièrement vulnérable, sans baguette magique. Évidement, même avec, il ne pourrait pas se battre. Il ne connaît aucun sort utile en combat. Idoménée fait apparaître une grande cage en verre.
Idoménée : "Téléportez vous à l'intérieur de cette boîte."
Hector s'exécute. De l'intérieur de la cage, il voit les membres de la commission, l'air sévère, qui le regardent. Hector ne se sent pas bien. Il a l'impression d'étouffer, il commence à avoir mal à la tête, les yeux qui piquent ... Il respire plus fort, mais les symptômes ne disparaissent pas. Il se met à transpirer et à trembler. Il voit de plus en plus flou ... Comme par réflexe, Hector se téléporte hors de la cage, sur le premier endroit qu'il réussit à voir clairement. Et il s'étale en roulant sur le bureau, juste devant Idoménée. Hector redescend du bureau, prend quelques grandes inspirations, et son malaise passe. Tout le monde le regarde avec des yeux écarquillés.
Diomède : "Je suppose que ce jeune homme a le pouvoir Ibo, mais de là à dire qu'il le maîtrise ..."
Laomédon : "Aucune importance, nous sommes une commission d'état civil. Il a les pouvoirs Ibo et Loquar, il peut donc porter le nom Loquarexibo."
Diomède : "Vous voulez dire Loquaribo, bien sûr ?"
Idoménée : "Procédons à l'enregistrement."
Le livre est toujours ouvert sur la table, devant Idoménée. Celui-ci inscrit quelque chose, et la carte d'étudiant d'Hector affiche désormais "Hector Loquaribo".
Diomède : "Vous êtes d'une mauvaise fois consternante. Il y a plus de 1000 ans que personne n'a eu les pouvoirs Loquar et Ibo sans avoir en même temps le pouvoir Rex. Le système d'héritage ne s'est jamais trompé, Hector y est enregistré sous le nom de Loquarexibo."
Idoménée : "Peut-être n'est-ce pas ce Hector-ci qui est enregistré dans le système d'héritage. Sans l'approbation de membres de sa famille, ou une preuve définitive de sa maîtrise du pouvoir Rex, je ne peux pas l'enregistrer comme Loquarexibo. Je vous parais sans doute tatillon, mais vous serez le premier à reconnaître que nous devons nous montrer fermes et exiger des preuves irréfutables avant d'ouvrir le registre des mages de grandes familles à de petits arrivistes nés-moldus."
