Partie III : Une famille.
À peine quelques jours plus tard, Qolt décidait qu'il était temps d'essayer ce nouveau canon, nettoyé avec le plus grand soin. Tout l'équipage de la Stella semblait trépigner d'impatience, et j'en faisais partie également. J'étais gagnée par l'euphorie qui animait le monde autour de moi. Même Terandeb, si calme et imperturbable, s'était levé tôt ce matin, lui qui avait pour habitude de dormir jusqu'en fin de matinée. Je me réjouissais d'autant plus à l'idée que toute cette excitation était grâce à moi, en quelque sorte. Mais j'étais aussi nerveuse, parce qu'il s'agissait de ma première mission en tant que membre officiel de la Stella, non pas seule cette fois-ci, mais avec mes nouveaux confrères. Je venais d'être acceptée par eux, j'espérais ne pas commettre un impaire qui gâcherait ce nouvel équilibre.
L'objectif de ce jour avait été exposé par Qolt, la veille au soir. Il était simple : une ancienne base séparatiste, dont les droïdes avaient été désactivés et qui était actuellement abandonnée, demeurait pourtant inaccessible, protégée qu'elle était par un gigantesque bouclier qui empêchait toute entrée. Cette base était un véritable bastion qui protégeait, en vérité, un grand nombre de richesses volées par les séparatistes aux mondes qu'ils avaient conquis durant la Guerre. Un beau pactole donc, qui sommeillait sans plus aucun propriétaire – une aubaine pour un pirate, bien évidemment. Ils l'avaient repéré depuis longtemps maintenant, mais le bouclier rendait impossible l'acquisition de ces malheureuses ressources oubliées de tous. Avec ce prototype construit par la République peu de temps avant l'armistice, qui leur avait, disait-on, permis de libérer Dantooine du joug ennemi, l'espoir de récupérer ces richesses avant d'autres était revenu.
Alors que nous arrivions sur la planète, je ne pouvais m'empêcher, comme tant d'autres, de rejoindre une fenêtre pour observer le bâtiment que nous devions assaillir. C'était, en effet, une véritable forteresse, à la position stratégique et aux nombreux canons défensifs tout autour. Cela nous obligeait à poser la frégate plus loin et de la rejoindre à pieds. À cette fenêtre, j'entendais les murmures d'excitation des autres. Loofi, qui était à côté de moi, s'était réjouie en passant un bras autour de mes épaules :
« On va être riches, Vetty ! »
Je lui souriais de mes pâles lèvres, sans répondre. La fortune m'intéressait peu.
Nous marchions donc vers cet immense bâtiment, passant près de tourelles défensives et des canons sol-air désactivés, mais à l'aspect toujours menaçant. Pour faire écho à mes fanfaronnades auprès d'Aurak, j'accompagnais le groupe qui tractait le canon pour bien le positionner. Par chance, Loofi faisait partie de ces ingénieurs capables de tout faire fonctionner, même un appareil lui étant inconnu. Je jouais donc le rôle d'assistante, et je fus donc à côté quand ce gros tas de métal, pour lequel j'avais mis tant d'énergie et de force pour le sortir des profondeurs océaniques, qui m'avait paru si excessivement lourd et imposant, tira une charge si puissante qu'elle fit trembler la terre sous mes pieds et s'envoler les oiseaux dans les tourelles. Quand elle atteignit le bouclier de couleur orangée qui formait un dôme gigantesque, un orage sembla se déclencher. Mes faibles connaissances dans ce domaine ne me permettaient pas de décrire fidèlement le phénomène, on eût dit un court-circuit géant, alors que les zébrures des éclairs fragmentaient le bouclier, rampant sur toute sa surface, pour finir par tout faire disparaître, et les zébrures et le bouclier. En quelques secondes, la muraille imprenable contre laquelle ils s'étaient heurtés avait disparu.
« Ouais ! s'écria Loofi. »
L'euphorie, qui était jusque là latente, éclata soudainement par des exclamations de toutes parts.
Pourtant, je ne parvenais pas à ressentir cette joie, alors même que j'avais eu tant de mal à rendre cela possible. Je ne savais pas pourquoi mais, j'avais la sensation d'un malaise. J'attribuai ces mauvais augures à ma nervosité et je rejoignis Terandeb. Le rythme de marche fut plus rapide, certainement stimulé par l'odeur de l'or qui devait émaner du bastion, et que je ne percevais pas avec mon odorat diminué. Nous rencontrions des droïdes désactivés, repliés sur eux-mêmes ou à terre. Je les trouvai bien inoffensifs, ils paraissaient si fragiles et rares étaient ceux qui étaient bien armés. C'était étonnant que cette guerre (je m'étais renseignée depuis son évocation par mon ami sur Christophsis) eût duré si longtemps, face à ces piètres machines. Malgré mon dédain pour ces droïdes, au plus nous avancions, au plus j'étais mal à l'aise. J'avais l'impression que quelque chose nous échappait, un détail potentiellement très dangereux, comme un regard posé sur nous que nous étions incapables de voir. Alors que mes compagnons se réjouissaient et se moquaient allègrement de ces tas de ferraille, j'étais tendue, et mes yeux survolaient tout le périmètre, allant de droite à gauche, passant par en haut et retournant derrière, à l'affût du moindre danger.
« Vetty ? m'appela Terandeb. »
Je me retournai vers le lasat, qui avait apparemment remarqué mon trouble.
« Qu'y a-t-il ? me demanda-t-il.
_ C'est rien, je... j'ai comme un mauvais pressentiment. Je ne saurais pas l'expliquer. »
Ma réponse me parut bien frivole et naïve, stupide en somme. Je m'attendais à un léger brocard, mais il ne répondit rien. Au contraire, je voyais ses oreilles se redresser, comme attentives, et ses yeux m'accompagnaient dans mon inspection des environs. Je n'en dis rien, mais sa considération me fit plaisir.
Bonjour, bonsoir !
Nous retournons peu à peu à l'action, ce trio de chapitres devrait vous plaire, je pense. Celui de demain apportera aura une grande révélation qui déterminera si oui, ou non, vous avez bien deviné qui était Vetty ! Alors ? Vous êtes prêts à parier ?
À demain,
MlleMau.
