Partie III : Une famille.

Lorsque je me réveillai, le monde autour de moi était flou. Il était vaporeux, les odeurs trop diffuses et les bruits trop étouffés, comme (je connaissais maintenant cette sensation) lorsque l'on s'éveille d'un évanouissement, et pas d'un simple sommeil. Je reconnus instantanément le blanc du plafond de l'infirmerie, auquel j'étais un peu trop habituée à mon goût. Encore étourdie, les paupières difficiles à maintenir ouvertes, je me laissais aller dans cet état léger, laissant venir à moi les sons et les senteurs, mais également les souvenirs. Ils revinrent doucement, peu à peu, le bastion séparatiste, le canon anti-bouclier, le fabuleux trésor, puis le compte à rebours. À cet instant, les souvenirs surgirent tous brutalement l'un après l'autre, la course, les explosions, les flammes, l'effondrement du plafond au-dessus de moi... Et tous mes amis, ces pirates qui étaient devenus ma famille, derrière moi.

Soudainement inquiète, je regagnai pleinement le monde conscient pour baisser la tête et me redresser, pour regarder autour de moi, enlevant le masque à oxygène sur ma bouche. Les sons devinrent clairs, et je percevais plusieurs personnes présentes dans la même pièce. En réalité, je ne vis que Qolt et sa grande carrure qui se tenait à côté de moi. Je m'inquiétai aussitôt :

« Est-ce que tout le monde va bien ? m'écriai-je, alarmée. Terandeb ? Aurakptar ?

_ Doucement, me tempéra Qolt. Tout le monde va bien. »

Tandis qu'il se décalait, je pouvais voir derrière lui le reste de l'infirmerie. Il y avait tous ceux qui étaient présents avec moi, fuyant l'autodestruction. Ils semblaient tous en bonne santé, seulement couverts de poussière et de suie noire. Le droïde médical se contentait de diagnostics. Seul le rattataki avait un bandage autour de la tête, duquel se voyait une petite tâche rouge. J'étais si soulagée de les voir ainsi. Je leur souris, remarquant à peine leurs regards étranges.

« Sortez, leur ordonna la voix ferme et grave de leur capitaine. »

Je regardai Qolt, étonnée. Pourquoi les faire sortir ? Et eux, sans protester, sans dire un seul mot, ils quittèrent tous l'infirmerie (même le droïde médical). Je me sentais gênée par cette situation, parce que je compris bien que le capitaine voulait me parler en privé, ce qui ne me rassurait pas totalement. Avais-je fait quelque chose de mal ? Me reprochait-il de m'être aventurée seule dans la base ? Peut-être pensait-il que j'étais à l'origine de ce programme d'autodestruction ? Je m'installai plus confortablement, comme si cela allait m'aider à affronter cette discussion à venir. Lui aussi s'asseyait sur une chaise à côté de mon lit.

« De quoi te souviens-tu ? m'interroga-t-il. »

Je pris un instant pour rassembler tous mes souvenirs, encore étourdie de mon sommeil forcé. Et, ne sachant ce qu'il attendait, je repris tout, depuis le début :

« Nous nous sommes posés et avons marché jusqu'au bastion. J'ai aidé Loofi à tracter le canon et à le charger, qui a fonctionné et a détruit le bouclier. Nous sommes entrés et avons trouvé le trésor des séparatistes. Puis, je... »

J'hésitais à ce moment, persuadée qu'il allait me reprocher cette faute.

« Je suis partie seule, pour explorer la base. J'avais un très mauvais pressentiment, me défendais-je. Je voulais vérifier ; et j'ai trouvé cet écran, avec un compte à rebours dessus. J'ai couru en sens inverse pour vous trouver et vous dire de fuir, on avait presque réussi à sortir, mais ce n'était pas assez. »

À nouveau, mes mots furent plus hésitants, mais parce qu'il m'était difficile de décrire ces souvenirs.

« J'avais peur pour vous, alors je me suis retournée et, je ne sais pas comment mais, je voulais arrêter l'explosion pour vous protéger et il s'est passé quelque chose de... bizarre. Puis, le plafond s'est effondré sur moi et... plus rien. »

Lorsque mon récit fut fini, j'attendis la sentence. Je sentais la réprimande venir. J'étais désolée et, à la fois, je ne regrettais pas mon escapade solitaire.

« C'est Aurak qui t'a attrapée avant d'être écrasée, et on est parti avant que tout le bâtiment ne s'effondre, dit-il.

_ Ah. »

Je ne m'attendais pas à ce qu'il complète mes souvenirs, m'attendant d'avantage à un éclat de colère soudain. Je notai, cependant, d'aller remercier le rattataki.

Qolt était naturellement intimidant avec ses épaules carrées, sa haute taille et sa voix puissante. Je l'étais, assurément, intimidée. Je ne voulais pas le décevoir, à vrai dire. Son silence était encore plus inquiétant que tout éclat de voix. Je ne pouvais rien faire d'autre que d'attendre ma sentence, comme une pauvre accusée voyant des mains se lever pour voter sa condamnation à mort. Alors, il se pencha, posant ses coudes sur ses genoux et joignant ses mains. D'une voix calme, il dit :

« Ce que tu as fait pour arrêter l'explosion, tu ne dois plus le faire.

_ Pardon ? »

J'étais abasourdie. Pourquoi me parlait-il de cela ? En quoi était-ce important ? Je m'attendais tellement à ce qu'il me sermonne sur ma prise d'initiative d'une part, et de l'autre, comme j'ignorais ce qu'il s'était vraiment passé à ce moment-là, j'étais estomaquée par ces paroles. Je précisai alors :

« Mais, je ne sais même pas ce que j'ai fait !

_ Et c'est très bien comme ça, parce que je t'interdis de le faire.

_ Quoi ? Mais pourquoi ? m'étonnais-je. Je vous ai sauvé la vie ! »

Cette discussion m'était incompréhensible. Tout me semblait illogique. Pourquoi était la question qui emplissait mon esprit. Je vis Qolt froncer les sourcils, lui qui avait déjà des yeux naturellement petits et bridés, son regard me parut alors menaçant. Il se leva lentement pour se rapprocher de moi. Toujours intimidée, toute cette situation commençait à m'angoisser. Que se passait-il ? Il se pencha alors vers moi, posant une de ses mains sur mon épaule. Elle était forte et serrée, elle ne me faisait pas mal mais je sentais sa puissance et sa force. Et je ne savais toujours pas ce que j'avais fait de mal.

« Ne l'utilise plus jamais. »

Je déglutis, silencieuse. Les mots et la voix de Qolt m'imprégnaient. Ses yeux sombres me figeaient sur place. Puis, sa main quitta mon épaule et me remit mon masque à oxygène.

« Repose-toi, maintenant, Vet-Girrim. »

Il s'en alla.

Je me retrouvai seule ou plutôt, en compagnie des milliers d'interrogations qui assaillaient mon esprit. Qu'avait-il voulu dire ? Je ne savais pas s'il s'agissait d'un ordre, d'un conseil ou d'une demande. Qu'est-ce qui le dérangeait chez moi ? Pourquoi ne voulait-il pas que je refasse ça ? Qu'avais-je vraiment fait ? Qu'était-ce que ce « le » que j'avais utilisé ? Ou était-ce un « la » ? Pourquoi ne pourrais-je plus l'utiliser alors qu'il me permettait de sauver ceux que j'aimais ? En quoi était-ce mal d'avoir fait ça ? Toutes ces questions tournaient dans ma tête, toutes si importantes et si quémandeuses de réponses.


Mes chers lecteurs,

Ici se clôt la partie III, qui j'espère, vous aura plu. La prochaine partie, assez courte, dévoilera le mystère autour de Vetty. Avez-vous bien deviné ? Ah ah ! C'est le moment ou jamais de vous prononcer.

Sinon, ce chapitre apporte également une nouvelle question : pourquoi Qolt, qui en sait plus qu'il ne le dit, refuse de l'aider dans sa quête de souvenirs ?

À demain pour en savoir plus,

MlleMau.