Lorsque le Poudlard Express arriva enfin aux grilles du château, un flot d'élèves surexcités se déversa immédiatement de ses portes rutilantes. Sur le quai, Rubbeus Hagrid surveillait impassiblement le flux de ces jeunes étudiants. Son visage buriné s'illumina lorsqu'il aperçut au loin Harry Potter, Hermione Granger et Ronald Weasley. Ses petits protégés, songea t-il tendrement.
Bonjour, vous trois !
Hagrid...
Hermione le contempla affectueusement.
Comment se fait-il que vous vous chargiez encore de notre accueil ? Vous n'êtes plus garde-chasse depuis longtemps, vous êtes un professeur à part entière, désormais. Je trouve cela injuste et inéquitable. D'ailleurs …
Attention, marmonna Ron, Mademoiselle Je Défends Inlassablement Les Opprimés va se pointer …
Ronald !
Du calme, les enfants, du calme ! Hermione, j'accueille les élèves parce j'y suis habitué, et que j'aime ça. Ne t'en fais pas. Passez plutôt me voir quand vous aurez du temps, histoire de me raconter votre été. Vous allez voir, j'ai une nouvelle recette de rochers à la citrouille du tonnerre.
Merci Hagrid, répondit prudemment Harry. On a hâte de voir ça.
Le géant leur fit un discret signe de la main, et ils s'éloignèrent de lui, peu rassurés à l'idée de devoir expérimenter de nouvelles prouesses culinaires.
« On a hâte de voir ça » ? Vraiment ? Ce n'est pas parce que mes parents sont dentistes que je peux me permettre de faire exploser mes molaires chaque fois qu'Hagrid se sent pousser des ardeurs de pâtissier, Harry…
On aura qu'à y aller après dîner.
Oh, vous n'êtes pas au courant ? Lança une voix désagréablement familière derrière leurs dos. Poudlard ne servira pas à dîner aux Gryffondors, cette année. Restriction budgétaire, on supprime les dépenses inutiles …
Ton sens de l'humour se maintient à un niveau incroyablement bas cette année encore, mon pauvre Malefoy, rétorqua Hermione.
Granger, je ne te souviens pas t'avoir autorisé à m'adresser la parole. Fabuleux ce relooking capillaire, mon bon roi ouistiti, ajouta t-il avant de les dépasser fièrement, flanqué de ses deux acolytes.
Les trois amis demeurèrent un très bref instant interdits par la rapidité de cet échange inattendu.
Bien … il semblerait que Malefoy soit en pleine forme cette année encore, soupira Harry.
Il fera moins le malin demain matin, quand j'aurai teint ses cheveux en rose dans son sommeil, pouffa Hermione. Cet abruti semble oublier que nous allons partager des appartements de préfets, et que je n'ai plus treize ans, et donc nullement l'intention de me laisser marcher dessus une seconde de plus.
Sur ce, elle s'élança d'un pas vif en direction des portes du château. Hermione avait changé, cet été. Elle avait vieilli, mûri,et sa confiance en elle s'était décuplée. Elle avait réalisé qu'elle pouvait être bien plus qu'intelligente. Elle pouvait être tout ce qu'elle voulait. Elle s'était acheté un balai, et s'était initiée au vol. Cela lui procurait des bouffées d'adrénaline transcendantes, sensation que l'on ne trouvait pas entre les pages d'un livre. Elle avait beaucoup nagé, aussi. Cette pratique intensive du sport lui avait fait un bien fou, et avait boosté sa confiance en elle. Elle avait réalisé qu'elle était tout à fait dans la norme physiquement, et qu'elle pouvait également se servir de cela comme un atout. Elle considérerait toujours son intelligence comme sa meilleure alliée, sa principale qualité. Mais une bonne couverture physique aidait toujours. Elle avait fait dons de ses vêtements tristounets et confortables à des œuvres de charité, et s'était offert de jolies pièces, élégantes et de bonne facture. Pas de choses délibérément provocantes : les minis-jupes ne seraient définitivement jamais son style. Mais des jeans de marque, qui la mettaient en valeur. Des chemisiers de bonne qualité, fait dans de belles étoffes, qui exacerbaient son charme. De jolis pulls de cachemire. Des choses qui collaient avec son tempérament, mais qui, en un mot, l'embellissaient en lui permettant de rester fidèle à elle même. Ginny avait été surexcitée de la voir s'ouvrir ainsi au changement, et avait immédiatement cru qu'enfin était arrivé le temps béni où son amie lui donnerait le feu vert pour qu'elle déballe sa panoplie de maquillage. Hermione avait été catégorique : elle détestait les artifices. Lorsqu'elle s'était rendue chez le coiffeur, celui-ci lui avait proposé une couleur, un lissage permanent, une frange, des mèches … elle l'avait recalé, tout comme Ginny. Elle voulait désépaissir ses cheveux un peu trop volumineux, et les démêler. Point barre. Elle arborait toujours fièrement les mêmes boucles volumineuses, seulement elles étaient plus jolies, brillantes et souples. Elle était, et c'était tout ce qui lui importait, toujours elle-même. Naturelle et classique. Elle n'avait pas changé. Elle était simplement devenue une version améliorée de celle qu'elle avait été jusqu'ici. L'adolescente tendait doucement à devenir une vraie femme. Et cette Hermione Granger là ne se laisserait plus jamais marcher sur les pieds par ce crétin pompeux de Drago Malefoy.
