Chapitre huit, le désir dans la peau.
Quand elle réalisa l'attraction qui la liait à l'homme face à elle, Hermione ne put dire un seul autre mot. Elle était comme paralysée par le désir qu'elle ressentait, ce n'était pas dans ses habitudes d'être attirée de cette manière. Tout commençait à s'embrouiller, il était vrai que physiquement c'était devenu un homme très attirant même si, en vérité, il l'avait toujours un peu été à ses yeux. En terme de personnalité, elle le connaissait à peine, alors pourquoi diable avait-elle une attirance aussi visible pour lui ? C'était comme sorti de nulle part.
Il se rallongea tranquillement en soupirant, regardant un point sur le mur. Les deux restèrent silencieux, sans même oser se regarder. La jeune femme tentait tant bien que mal de remettre ses idées en place, comprendre comment elle avait pu en arriver à cette situation, reconstituant pièce par pièce l'énigme qui s'imposait à elle, qui lui martyrisait les entrailles et qui l'angoissait bien plus que tout le reste.
Leur rencontre s'était faite à la bibliothèque, elle avait un vague souvenir de ce jour-là. Tout ce dont elle se souvenait c'était de l'avoir observé, d'avoir remarqué son nez devenu droit, son air plus mature, plus viril, elle réussit à débloquer les souvenirs de leur conversation, il avait joué à l'enfant, l'insultant comme à l'époque de Poudlard et, c'était à cet instant précis qu'il lui avait paru si humain, comme brisé, la phrase qu'il avait prononcé "simplement me souvenir du bon vieux temps". Et les événements s'étaient enchaînés d'une façon très surprenante, un rendez-professionnel, une confession, un cœur qui s'ouvre, une dispute, une promesse et maintenant une agression, elle avait eu tellement peur qu'elle n'avait même pas pris la peine d'analyser la situation d'un point de vue objectif, calme, elle avait été complètement envahi par cette peur, cette colère irrationnelle qu'elle n'avait même pas demandé à lire les lettres, qu'elle n'avait pas demandé une enquête, qu'elle s'était juste jetée dans la gueule du loup, dénonçant un crime haut et fort alors qu'il y en avait sûrement d'autres qui vivait la même chose, qu'en savait elle ? Qu'étaient devenus Parkinson, Nott, Goyle ou Zabini ? N'étaient-ils pas exactement comme Malfoy ? Elle enfouit son visage dans ses mains, lâcha un soupir. Craquer pour un type qui l'avait insultée était une chose, craquer pour l'homme qu'elle essayait de sauver alors que tout jouer contre eux en était une autre.
Malfoy remarqua son geste et s'approcha à nouveau d'elle, lentement ses doigts s'approchèrent des poignets de sa bienfaitrice pour éloigner ses mains de son visage, pour voir le désespoir assombrir ses traits, la rendant aussi fragile qu'il n'avait dû l'être jusque-là à ses yeux.
- Hermione… Qu'est ce qui se passe ? A quoi tu penses ?
- J'ai fait une erreur, Draco. Une énorme erreur.
Il fronça les sourcils, croyant comprendre qu'elle regrettait de l'avoir aidé avec ce discours. Il crispa la mâchoire et lâcha la jeune femme, avant de baisser les yeux sur les draps de son lit.
- Non ce n'est ce que tu crois ! Je ne parle pas de ça !
- J'aurais dû me douter que c'était trop beau. Hermione Granger qui sauve la vie du pitoyable Draco Malfoy par pure gentillesse. J'aurais dû savoir que même chez les Gryffondors la gentillesse avait une limite.
- Mais non ! Tu n'es pas pitoyable, je parle pas de ça du tout. Je… Crois moi, ne vas pas t'imaginer que j'aurai dû te laisser seul dans ton coin. Je viens juste de réaliser que j'ai attaqué la situation sous le mauvais angle, j'ai été aveuglé et ça ne me ressemble pas de faire des erreurs aussi grossières.
- Wah. La Ministre serait-elle en train d'avouer une faiblesse dans son raisonnement ?
- Tu aurais pu être journaliste à la Gazette.
- Je sais. J'ai un talent inné pour critiquer les gens.
Elle lâcha un petit rire en le regardant, il affichait un sourire amusé qui disparaissait lentement à mesure qu'il se rapprochait du visage d'Hermione, elle se figea, incapable de choisir entre ce qu'elle voulait et ce qui était raisonnable, il approcha une main de son visage, le bout de ses doigts effleurèrent sa joue sans pour autant la toucher, il effleura sa peau jusqu'à son cou avant de continuer à approcher son visage.
- J'aurais jamais pensé regretter d'avoir détesté une aussi belle personne. Tu es un ange Granger.
Et il déposa ses lèvres sur son front, un simple baiser de remerciement qui réchauffa la jeune femme presque instantanément, son sang ne fit qu'un tour avant de remonter au niveau de ses joues qui rosirent sous l'emprise de la gêne, elle n'aurait jamais cru qu'être embrassé sur cette zone pourrait être aussi intime, elle aurait pu être nue dans son lit après avoir fait l'amour que ce ne serait pas aussi intime que la scène qui venait de se dérouler sous ses yeux et dont elle était actrice. Un toussotement se fit entendre et Hermione s'éloigna brusquement du blond pour se tourner vers Scorpius, le petit s'était réveillé et il avait, visiblement, assisté à toute la scène. Elle ne saurait absolument pas gérer ça, pas un son ne voulut sortir de sa gorge, aucun. Elle jeta un regard à Draco qui se contenta d'ouvrir les bras pour faire signe à son fils de venir lui faire un câlin, le petit s'y jeta avec plaisir, posant sa joue sur son torse pour écouter son cœur. Visiblement, il ne semblait pas choqué ou surpris par ce qu'il venait de voir, avait-il l'habitude ? Cette question rendit jalouse la brune, elle n'émit pourtant aucun commentaire et se contenta d'aller se placer en retrait, droite, le dos contre le mur, elle observa le père et son fils partager un moment de complicité rien qu'à eux avant de s'éclipser dans le couloir, une fois seule, elle soupira et s'installa sur la chaise à côté de la porte pour observer les allées et venues des médicomages dans le couloir. Qu'allait-elle devenir si elle s'engageait sur une pente aussi savonneuse ? Visiblement rien de bon. La seule personne qui pourrait la conseiller n'allait probablement pas aimer la situation, et elle se voyait mal retourner voir Ron deux soirs de suite pour qu'il écoute ses malheurs, c'était purement égoïste.
Alors qu'elle commençait à tout remettre en question, elle entendit deux médicomages en pleine discussion, peu professionnelle, une discussion qui attira son attention alors qu'elle faisait semblant de jouer avec ses doigts.
- Tu crois que c'est possible ?
- Elle n'a personne dans sa vie, elle veut juste coucher avec lui, y a pas de sentiments.
- Tout le monde n'est pas aussi superficiel.
- Je te parie que si. Simple attirance physique, elle le connaît même pas en dehors du travail.
Alors qu'elles s'éloignaient, une pensée dangereuse s'insinua dans l'esprit de la Ministre. Et si, ce n'était que physique ? Il était tout à fait possible qu'elle soit attirée par Draco simplement parce qu'il était bel homme. Après tout, elle n'avait pas eu de relation sexuelle depuis tellement longtemps que ça devait se compter en année maintenant. D'un autre côté, elle n'avait pas non plus une libido très active, elle n'avait pas ressenti l'envie de coucher avec qui que ce soit. Avait-elle cependant déjà noué des liens avec un homme séduisant depuis sa rupture avec Ron ? Avait-elle eu ne serait-ce qu'une possibilité d'avoir quelqu'un dans son lit pour une nuit ? Pas vraiment. "Ça suffit" s'insurgea-t-elle contre elle-même. "Physique ou pas, les journaux l'accusent déjà de t'avoir séduit pour que tu prennes sa défense, il est hors de question de les laisser déformer la vérité plus longtemps."
- Je suis là pour te remplacer, Hermione.
- Ah… Harry, tu tombes bien. Je commençais à fatiguer.
- Je vois ça, tu es toute pâle, qu'est-ce qui t'arrive ?
- Je dois juste dormir une heure ou deux pour m'occuper de réparer mes erreurs.
- Qu'est-ce que…
- Plus tard Harry.
Et d'un bond, elle se leva pour quitter le bâtiment. Elle transplana aussitôt qu'elle atteignit un endroit calme, elle ne voulait pas être vue par les journalistes, maintenant chaque erreur risquait d'être fatale pour sa carrière ou pour Draco. Rapidement, elle rentra chez elle pour dormir, mettant une alarme deux heures plus tard pour être sûre de se réveiller.
Les choses allaient vite devenir intense, elle se donnait une semaine pour boucler cette affaire, une lourde semaine pendant laquelle elle devait mettre de côté toute sa vie personnelle, pas un regard tendre, pas une parole douce, tout ne devait être que strictement professionnelle entre Draco et elle pendant qu'elle le réhabilitait. De toute façon, il y avait peu de chance que lui s'intéresse à elle de la même façon, peu importe la façon dont elle s'intéressait à lui. Sur cette résolution un peu branlante, elle s'endormit sans plus de cérémonie. Un sommeil agité, le cauchemar d'une vie totalement obscure agita ses pensées et ses convictions, elle se sentait piégée, le cliché de courir dans une forêt sombre et qui ne cessait de s'assombrir, pourchassée par quelque chose qui l'effrayait mais qu'elle ne pouvait voir. L'alarme la réveilla avant qu'elle ne puisse véritablement commencer à paniquer.
Les choses n'allaient pas s'arranger toute seule, même si elle mourrait d'envie de rester sous sa couette, pendant des jours, l'heure était au courage, au vrai. Elle devait faire face à sa décision stupide, affronter la réalité du monde extérieur et réagir en conséquence. Après tout, elle avait toujours été une femme forte et convaincue de ses propres valeurs, aujourd'hui encore, elle allait montrer que rien ne la ferait flancher, ni le lynchage médiatique, ni la pression et encore moins la peur. Elle se rendit au Ministère de la Magie, la tête haute, le dos bien droit. Elle avait encore des recherches à faire pour aider Draco, pour ça, elle devrait réhabiliter quelques-uns des enfants de Mangemort.
Les heures défilèrent alors qu'elle s'était enfermée dans son bureau, demandant à son secrétaire de lui ramener les dossiers de Parkinson, Zabini et Nott, puisqu'elle estimait que Goyle était probablement trop stupide pour comprendre l'enjeu de cette action. En se renseignant plus en détails, elle remarqua qu'aucun d'entre eux n'avait subi le moindre procès et tous avaient eu une réorientation par rapport aux matières choisies initialement pour leurs ASPICs. Elle referma les dossiers, c'était sans issu, ils n'étaient pas rejetés par la société, Parkinson et Zabini n'étaient pas des noms aussi remarqués que ça, seul Nott aurait pu faire l'affaire. Elle attrapa donc son dossier, parcourut rapidement des yeux avant de remarquer une date de décès, il s'était suicidé après la capture de son père en 1998. Elle envoya tout balader d'un geste rageur et s'affaissa dans son fauteuil. Miss-je-sais-tout avait toujours une solution pour tout et n'importe quoi, c'était le moment de positiver. Le fait d'avoir aidé Draco dans sa réinsertion ne devenait plus une aussi grave erreur, après tout, il était le seul qui avait officiellement besoin d'aide pour se réinsérer. Elle n'avait trouvé aucun autre nom d'ex-Mangemort célèbre qui pourrait avoir un enfant de leur âge avec un besoin de réinsertion. Heureusement pour elle que les Lestrange n'avaient pas eu d'enfant, sinon elle se serait définitivement engagée dans une cause perdue. Résultat, Draco avait toujours besoin de son aide et pour l'instant, la seule solution qu'elle avait eu, avait été de faire monter McGonagall devant une foule de journalistes.
Il ne lui restait alors que deux personnes pour l'aider, Harry et Ron, comme au bon vieux temps.
