J'ai décidé de compléter un peu ce chapitre car le suivant portera essentiellement sur la visite de Juan à Venise. Bonne lecture !

Le réveil fut particulièrement douloureux pour Juan, sa tête semblait désormais peser près d'une tonne et son corps avait vieillis prématurément. Alors qu'il tentait de se relever, il sentit une main délicatement posée sur son torse. Il se retourna et contempla un instant le visage angélique de Sancia, il écarta les longues mèches de ses cheveux bruns qui lui couvraient le visage tout en souriant en repensant à leurs ébats de la veille. En quittant le palais papal hier soir, il avait ressenti le besoin d d'oublier la journée qui venait de s'écouler et Sancia était le parfait exutoire : passionnée, violente et sensuelle, la belle savait comment l'enivrer et lui faire perdre tout contact avec la réalité le temps d'une nuit. Elle avait tout de la femme idéale, belle, intelligente, manipulatrice mais il lui manquait quelque chose, un élément qu'il ne parvenait pas à nommer et qui faisait terriblement défaut à sa belle-sœur. Bien sûre, il s'était parfois surpris à jalouser son frère Gioffre d'avoir épousé une telle femme qu'il ne méritait aucunement, pourtant, aujourd'hui, l'avoir comme maîtresse lui suffisait amplement car si elle était une amante hors-pair, elle faisait en revanche une bien piètre princesse. Gioffre était à Squillace pour y assurer la gouvernance de la principauté, permettant ainsi à Juan de jouir pleinement des plaisirs offerts par Sancia.

Le jour était déjà levé depuis longtemps et c'était avec regret que Juan s'extirpa du lit et des bras de Sancia pour se rendre au palais papal. Tout en se préparant, il prit garde à ne pas réveiller la belle qui dormait, non pas qu'il souhaitait la ménager mais il souhaitait par-dessus tout éviter de parler de ses activités avec elle.

Il chevaucha rapidement jusqu'à la grande cour du palais dans laquelle régnait une activité particulière. En effet, la garde du Doge était sur le départ, à leur tête le général Selzoni qui semblait particulièrement impatient de quitter Rome. Lorsqu'il aperçut le Duc de Gandia, il marcha d'un pas décidé vers ce dernier.

« Où étiez-vous passé ? hurla-t-il en attrapant Juan par le bras, l'obligeant à mettre pied à terre bien plus rapidement que prévu. Juan se rappela qu'il était censé assurer la garde de la jeune Francesca Veniere mais il avait quitté le palais en trombe après le diner. Soudain, il se rappela les derniers mots de la jeune aristocrate, il se souvint du besoin impérieux qu'il avait eu de quitter sa présence, comme si rester trop longtemps en sa présence pouvait s'avérer dangereux.

-J'avais d'autres engagements, rétorqua Juan agressivement en se dégageant de l'emprise du vieux gradé. L'idée que la jeune fille avait pu fuir la ville le terrifia, non pas qu'il craignait pour sa vie, sur ce point il était certain qu'elle saurait parfaitement se défendre, mais les représailles de son père pourrait avoir un avant-goût d'enfer.

-Il s'agit de la fille du Doge de Venise, Borgia, pas d'une vulgaire courtisane, si il lui arrivait quoique ce soit, vous perdriez le soutien et la confiance de Venise ainsi que votre réputation, le général Selzoni parlait à voix basse, de son ton calme et menaçant qu'il employait habituellement lorsqu'il s'adressait à Juan.

Du coin de l'œil, Juan distingua une longue silhouette pourpre se dessiner dans l'embrasure des portes du palais, il leva les yeux au ciel et se tourna vers son frère qui, à sa grande surprise, accompagnait Francesca qui avait revêtu une longue robe bleu roi, dont le col d'hermine faisait ressortir son teint de porcelaine. Elle se tenait là, altière, aux côtés de Cesare, son regard froid toisant les deux soldats avec dédain et colère.

-Général ! Nous n'avons pas de temps à perdre avec ce Borgia, que l'on se mette en route au plus vite, la voix de Francesca était glaciale et elle avait articulé le nom de famille de Juan avec tellement de mépris qu'il avait soudainement le sentiment d'être un pestiféré.

-C'est trop aimable, Madame, je vous rassure, je n'ai guère de temps à perdre avec vous non plus, lança Juan le sourire moqueur tout en s'inclinant devant la jeune femme qui descendit les marches sans lui accorder le moindre regard avant de se diriger vers la jument qui l'avait conduite à Rome hier.

Selzoni s'empressa d'aider la jeune femme à monter sur son cheval et à se positionner avec grâce sur ce dernier. Elle n'accorda aucun regard au Gonfaloniere qui se sentit presque vexé. Alors qu'observa le convoi quitter le palais de son père au grand galop, Cesare s'approcha de Juan et l'informa que son père désirait lui parler au plus vite. Le Duc de Gandia leva les yeux au ciel, bien sûre que le Pape souhaitait lui parler au plus vite, il lui avait désobéi effrontément hier soir.

-Et tu ne viens pas assister au moment où je vais me faire exécuter pas notre père ? Demanda Juan à Cesare en voyant ce dernier s'éloigner.

-Cela aurait-été avec le plus grand plaisir mon frère, mais je connais déjà la grande nouvelle, Cesare arborait un sourire triomphale et machiavélique.

Juan se rendit lentement en directions des appartements privés du souverain pontife. Il ne cessait de repenser aux paroles de son frère et au comportement étrange de la fille du Doge, il était amusant de voir qu'elle était si impatiente de retourner dans la ville qu'elle avait fuie quelques jours auparavant.

Les gardes saluèrent le Gonfaloniere et ouvrirent les deux pans de la porte du bureau du Pape. Le souverain pontife fit signe à son fils de s'asseoir et Juan s'exécuta, inquiet de savoir qu'elles allaient être les conséquences de sa désobéissance. Rodrigo Borgia fixa son fils un long moment, comme si il cherchait ses mots ce qui n'eut pas pour effet de rassurer le jeune Duc.

-Je t'avais demandé de veiller sur Francesca Veniere, Juan et tu as préféré rejoindre l'une de tes maîtresses, le Pape était solidement assis dans son fauteuil, ses mains gantées jointes devant lui et son regard planté dans celui de Juan.

-J'étais ivre, j'ai pensé qu'il était plus sage de la laisser entre les mains des soldats, c'est… Le Gonfaloniere n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'il fut violemment interrompu par le Pape.

-Je me fiche de savoir ce que tu avais à faire ou par quelle catin tu étais attendue, Juan ! Je t'ai nommé Gonfaloniere car j'ai besoin d'un homme de confiance à la tête de mes armées ! C'est une position clé ! Tu n'as pas le droit à l'erreur, encore une erreur de ce genre, et c'est ton frère que je nommerai Gonfaloniere. Une vague de pourpre colorait à présent le visage de Rodrigo et Juan sentait sa gorge de colère et d'angoisse.

Juan demeurait silencieux, il observait son père qui faisait désormais les cents pas dans son bureau, sa robe de velours caressant le marbre froid dans un léger bruissement qui semblait percer les oreilles du soldat.

-Ce n'est pas pour cela que je t'ai fait venir, murmura Rodrigo Borgia en se plantant devant son fils, j'ai une grande nouvelle pour toi, le Gonfaloniere leva un sourcil inquisiteur en écoutant son père, tu souhaitais épouser une femme de ton rang et non une bâtarde, j'ai réussi à arranger un mariage qui consolidera nos positions et nous apportera un allier de choix. Le pape avait posé une main sur l'épaule de son fils qui avait un étrange pressentiment.

-On peut savoir qui est l'heureuse élue, père ? Demanda Juan qui énumérait mentalement la liste des duchesses, princesses et autres aristocrates disponibles susceptibles de devenir sa femme.

-Francesca Veniere ! Lâcha triomphalement le Pape en frappant dans ses mains.

-C'est hors de question, père ! Jamais, jamais je ne l'épouserai ! Le Pape gifla son fils avec force.

-Te rends-tu bien compte des difficultés que j'ai eu à conclure un accord avec le Cardinal Veniere ! Je suis le Pape, Juan, et je suis ton père ! Je commande et tu obéis ! Rodrigo saisit un vase qui se trouvait posé sur le coin de son bureau et le fracassa contre le mur tout en se remettant à arpenter son bureau en long et en large. Juan se sentit pris au piège et il comprenait mieux le comportement de la fille du Doge ce matin.

-Elle me méprise, père, ce mariage sera un échec, murmura le Gonfaloniere tout en sachant que cet argument n'avait aucun poids aux yeux de son père.

-Je ne vous demande pas d'être heureux, Juan ! La seule chose que je souhaite, c'est que tu l'épouses et que tu la ramènes à Rome ! C'est un honneur d'épouser la fille d'un Doge ! C'est ce que tu voulais, non ? Te rends-tu compte des alliances politiques que ce mariage va nous apporter ? Juan observa les yeux de son père brillait en évoquant ses futurs desseins.

-Et le Doge est d'accord ? Demanda Juan nerveusement.

-Le Cardinal Veniere est parti lui apporter la nouvelle hier soir, disons que chaque parti y trouve des avantages certains, Juan leva les yeux au ciel en se demandant bien quel avantage cela allait lui apporter.

-Juan, pense au prestige que cela apportera à notre famille et à toi, tu n'as qu'à lui faire quelques enfants et tu pourras continuer ta vie de débauche, tu ne semblais pas la trouver repoussante hier soir. Son père avait un sourire entendu au coin des lèvres et Juan savait que la discussion était close.

-Elle est juste particulièrement isolante et impertinente, soupira le Gonfaloniere en repensant aux dernières vingt-quatre heures.

-Cela vous fera un point commun, dit le souverain pontife en ricanant, une fois l'accord du Doge, la jeune Veniere sera escortée à Rome et le mariage pourra avoir lieu.

Sans demander son reste, le Duc de Gandia se leva et sortit du bureau du Pape, toujours sonné par la nouvelle. Il savait que le mariage était un acte politique, et dans sa position, c'est ce qu'il souhaitait, épouser la fille légitime d'un noble puissant. Il savait également que rien ne l'empêcherait de continuer sa vie et de profiter pleinement des plaisirs de Rome comme il l'avait toujours fait mais de ce qu'il avait pu voir de Francesca Veniere, elle allait sûrement lui faire payer très cher ce mariage et elle semblait être capable de transformer la vie du plus aguerri des soldats en un véritable cauchemar. Il repensa un court instant aux derniers mots qu'elle lui avait dit ainsi qu'à la façon dont il l'avait embrassé et il ressenti le besoin imminent de la posséder et de la dompter.

Une fois hors du palais, Juan prit une profonde inspiration, il avait la désagréable impression d'avoir été pris au piège. De toutes les femmes de l'aristocratie susceptibles de devenir sa femme, son père avait choisis la pire, fille de Doge ou non. Elle n'était ni belle, ni soumise, et il craignait que ce dernier point ne lui cause quelques problèmes à l'avenir.

Il fit quelques pas dans la cour du palais papale avant de faire signe à un des gardes d'aller chercher son cheval, ce dernier s'exécuta sans demander son reste, soucieux de ne pas s'attirer les foudres du jeune Gonfaloniere qui semblait avoir beaucoup de mal à se calmer.

Quelques instants plus tard, un palefrenier conduisit le fougueux étalon de Juan qui se dépêcha de se mettre en selle. Il ferma fermement ses jambes contre les flancs du cheval, laissant ses éperons pincer la peau épaisse de l'animal qui s'élança à vive allure en direction des grandes portes du palais qui s'ouvrirent hâtivement. Il ne savait guère où aller mais il avait besoin de se changer les idées, la perspective d'une union avec Francesca Veniere l'affectait bien plus qu'il ne le souhaitait. Bien que la matinée ne fut-ce à peine entamée, il prit la décision d'une des nombreuses tavernes du quartier juif de Rome.

Le quartier juif de Rome grouillait d'animation, quartier populaire par excellence et coupe-gorge notoire, il grouillait de vendeurs en tout genre, de soi-disant magiciennes avides de magie noire et de prostitués, autant dire que Juan s'y sentait parfaitement à son aise. Le jeune homme attache son cheval à l'extérieur d'un bâtiment en briques à l'allure vétuste et s'y engouffra rapidement. Le patron de l'établissement, reconnaissant le Gonfaloniere des armées du Pape, se dépêcha de lui trouver une table à l'écart afin de lui donner un semblant d'intimité. Juan commanda un pichet de vin et de la charcuterie, il observait attentivement les différents clients qui étaient déjà attablés et souls. Rome était une ville de débauche et il suffisait de regarder autour de lui pour s'en rendre compte. Les tavernes étaient un endroit fascinant car toutes les classes sociales s'y trouvaient. Les fils des grandes familles venaient s'encanailler et l'homme de la rue oublier ses tourments. L'aubergiste lui apporta un pichet de son meilleur vin, il connaissait bien cette hôte exigeant et n'était guère surpris de le voir déjà attablé à cette heure matinale. Juan bu un premier verre cul-sec qu'il reposa bruyamment et se servit aussitôt un nouveau verre qu'il avala avec la même précipitation. Le vin de piètre qualité commença à embrumer son esprit qui se perdait entre considérations futures et rêves lointains. Il ne cessait de repenser à la soirée de la veille, aux rires de Francesca, à l'attirance qu'il avait ressentie pour elle et qu'il mettait sur le compte de l'alcool. Peut-être aurait-il dû céder hier soir, peut-être aurait-il dû la mâter de toute sa virilité, lui montrer comment un bâtard traite les femmes de son espèce, mais il n'avait pas pu et il ne parvenait pas à comprendre pourquoi.

« Besoin de compagnie mon seigneur ? Une voix rauque l'extirpa de ses pensées, Juan leva les yeux vers une prostituée à la peau mate et à la longue crinière noire. Elle était jeune mais son regard et sa voix trahissaient de trop longues années passées dans ce bordel.

D'un geste brutal, Juan donna un coup de pied dans la chaise qui se trouvait en face de lui et d'un geste de la tête fit signe à la prostituée de s'asseoir, ce qu'elle fit sans poser plus de questions.

-Ton nom ? Demanda le jeune homme sans aucune forme de politesse à la catin tout en lui servant un verre.

-Ada, mon seigneur, répondit-elle en avalant une gorgée du vin que venait de lui servir Juan.

-Ada, je ne t'ai jamais vu ici, tu es nouvelle ? Demanda Juan sans intérêt. Il savait où tout cela allait mener mais il aimait créer un lien avec celle qu'il allait baiser.

-Fraichement arrivée, j'ai travaillé longtemps à florence mais j'ai été chassée par Savonarole, elle ricana d'un rire amer, et vous monseigneur, que faites-vous de si bonne heure ici ?

-Me saouler, Juan fit signe de trinquer et finit son verre avant de se resservir.

-Un homme seul se saoule soit pour oublier, soit pour se donner du courage, murmura Ada.

Le jeune Duc détailla un instant la jeune femme et décida qu'elle lui était sympathique.

-Je me saoule pour oublier mon prochain mariage et me donner du courage, lâcha Juan sans détacher son regard de la créature vulnérable qui se trouvait assise en face de lui.

-Un mariage c'est une bonne nouvelle, on ne se saoule pas de bon matin à cause d'un prochain mariage, elle est belle ? Demanda Ada curieuse de savoir qui était l'heureuse élue car si la belle venait d'arriver à Rome, elle savait que Juan Borgia était un beau parti, riche, puissant et beau comme un dieu.

-Non, répondit Juan d'un ton neutre.

-Elle est riche ? S'enquit la jeune catin en se penchant un peu plus vers le fils du pape.

-Très, s'exclama Juan comme pour se persuader lui-même que c'était tout ce qui comptait.

-Alors c'est suffisant, répondit Ada en finissant son verre de vin.

-Que sais-tu de Venise, jeune Ada ? Demanda Juan.

-Que ses prostituées sont mieux loties que moi, Ada regarda dans le vide avant de reporter son attention sur ce client potentiel.

-Que sais-tu du Doge de Venise ? Un rictus amusait se dessina sur le visage du jeune Gonfaloniere.

-Un homme puissant et riche, c'est leur roi à eux les vénitiens, Ada parlait avec cet accent florentin particulièrement désagréable aux oreilles des romains.

-Alors dans ce cas je vais épouser une princesse, Juan écarta les bras et éclata de rire en voyant le visage choqué de la jeune femme qui mit un moment à assimiler cette dernière information.

-Alors dans ce cas, vous devriez boire pour fêter ça, vous allez devenir encore plus riche et encore plus puissant, ça vaut bien le sacrifice d'épouser une laide, vous pourrez toujours la coucher sur le ventre et ignorer son visage, répondit Ada sans la moindre gène.

Le jeune Duc aimait la franchise des catins du quartier juif, elles l'amusaient follement sans compter qu'elles étaient particulièrement dégourdies.

-Alors nous allons fêter cela, Juan sortit une bourse de sa ceinture de laquelle il prit quelques pièces qu'il glissa dans les mains de la jeune femme qui lui envoya un sourire aguicheur et entendu.

Elle se leva plus ou moins gracieusement et attrapa la main du jeune homme afin de le conduire à l'étage où se trouvaient les chambres mises à disposition des filles de joie du quartier moyennant bien sûre une commission pour l'aubergiste.

Lorsque le jeun Duc se réveilla, il était seul dans une chambre aux murs défraichis et dont la forte odeur vint lui piquer les narines. Il avait complètement dessaoulé et malgré son mal de crâne persistant, il parvint à se lever et à s'habiller. Il remarqua les griffures sur son torse et il se rappela l'intensité avec laquelle il avait profité des savoirs et des talents d'Ada.

Sans plus tarder, il descendit les escaliers jusqu'à se retrouver dans la taverne qui était désormais bondée d'hommes complètement ivres. Sans tarder, il quitta les lieux, soucieux de se retrouver dans le confort de son palais et d'avaler un met raffiné. En apercevant un des fils de Fabrizio Colonna converser avec sa jeune florentine nouvellement romaine, Juan ne put réprimer un sourire de voir ainsi un de ses rivaux passer après lui. La débauche et la luxure étaient de loin les meilleurs péchés et qu'importe s'il devait errer en enfer pour l'éternité pour avoir si souvent succombé à la tentation.

La nuit fut courte et la journée de la veille avait laissé des marques sur le jeune Gonfaloniere qui avait été mandaté pour assurer la protection d'une importante délégation napolitaine. Il avait chevauché aux aurores avec une trentaine de soldat à l'orée de la ville pour y attendre le convoi de dignitaires. Juan avait en horreur ce genre de missions, d'une part parce que de son point de vue, le plus haut gradé de l'armée romaine n'avait pas à se déplacer pour une simple mission de protection et parce que d'autre part, lesdites missions devaient systématiquement débuter aux aurores.

Après presqu'une heure d'attente, il aperçut enfin les gardes napolitains encadrant plusieurs voitures. Il s'avança vers eux et salua l'homme en tête du convoi, un vulgaire capitaine qui devait à peine frôler la trentaine. Les hommes de la garde papales avec à leur tête le Gonfaloniere, ouvrirent la marche et se dirigèrent vers Rome, vers le Vatican.

Dans la cour du palais du Pape, tout le concile était réuni et son père trônait sur un siège dorait avec à sa droite Cesare qui, comme à son habitude, affichait une mine sombre et fermée. Juan mit pied à terre et se dirigea vers son père avant de se placer à sa gauche. Il jeta un regard à Cesare qui l'ignorait copieusement. Le jeune duc de Gandia connaissait l'ambition démesurée de son frère et la perspective de voir son ainée épouser la fille d'un des hommes les plus puissants d'Italie ne devait que peu le réjouir. Depuis sa conversation avec la jeune prostituée, Juan envisageait ce mariage sous un autre angle, oui, il allait épouser une princesse et cela ne pouvait que renforcer son influence et sa richesse. Il espérait simplement que ladite princesse soit suffisamment coopérative et ne lui causerait pas trop de problèmes.