Salut à tous !
J'espère que personne n'est mort avec la canicule actuelle en France, sinon ce chapitre restera un mystère pour vous ! (terminer dans le drama de l'humiliation par le Vortex Club. Horrible)
Un petit mot d'un lecteur inconnu : il/elle m'a demandé si j'étais française de France ou de Québec à cause de mon style d'écriture. Alors là... j'avoue que c'est la première fois qu'on me demande ça. Je suis certaine à 1 000 000% que la personne qui m'a demandé ça est québécoise (certains signes ne trompent pas xD) Mais non, mon français vient bien de métropole bien que je ne sois que 50% française. Mais ça c'est une autre histoire.
Maintenant que ce voile de mystère sur mon style littéraire est levé, je vous souhaite à tous et à toutes une bonne lecture !
Kiwi
I am No Superman
Max, un écouteur planté dans l'oreille droite branché sur Syd Matters, laissait son stylo remplir les lignes du journal à la couverture usée sous ses yeux. Bien trop manipulé, celui-ci avait commencé à perdre de ses couleurs, devenant vintage sans le vouloir. Mais, vintage ou pas, Max y tenait comme à la prunelle de ses yeux. Il était son exutoire quand les choses lui échappaient. Depuis des années, il l'aidait à y voir plus clair dans sa tête, à prendre du recul sur tout ce qui arrivait, même si dernièrement tout cela concernait une personne bien précise. Une personne contre qui elle avait été tellement en colère qu'elle n'avait pas réussi à écrire une ligne depuis plusieurs jours. Elle profitait donc de sa pause de midi pour faire une petite session de rattrapage en attendant Chloé et Rachel qui étaient parties chercher des canettes au distributeur dans le hall d'entrée. S'attendant à ce qu'elles reviennent d'une minute à l'autre, elle ne releva pas la tête quand une figure entra dans son champ de vision pour se poster à sa droite. Continuant d'écrire elle se contenta de lancer un :
- Il restait du cacolac alors ? Je meurs de soif !
- Je vais faire comme si je n'avais rien entendu...
Cette voix qui ne ressemblait en rien à celle de la punk aux cheveux bleus lui fit l'effet d'un coup de poing au creux de l'estomac. Max sentit l'air quitter ses poumons et son sang ne faire qu'un tour. Le rouge aux joues d'avoir été prise en traître, elle se redressa promptement en refermant son journal d'un mouvement sec.
- Enfin, je ne vois pas pourquoi ça me surprend, reprit Victoria dans un sourire en coin qui manquait d'assurance. Maintenant que j'y pense, il n'y a rien de plus hipster que de boire du cacolac. Ca correspond au personnage.
- Ca me change des macchiato au caramel, se justifia Max du tac-o-tac, sur la défensive.
Victoria sentit immédiatement la méfiance qui fit froncer les sourcils de la petite châtain. Et si cela la peina, elle n'en montra rien. A la place, elle changea de sujet.
- Je vois que tu as déjà mangé, nota-t-elle en avisant un tupperware vide posé sur la table d'à côté. Dommage, je t'aurais bien invité au Two Whales pour un brunch. Il paraît qu'ils font de bonnes omelettes au fromage.
- Je ne savais pas que je devais t'attendre, argua la petite hipster en croisant les bras sur sa poitrine. Ni que tu connaissais le Two Whales.
Une manière de lui faire comprendre qu'elle était encore loin d'être pardonnée et que ce n'était pas un déjeuner, certes très tentant, qui allait l'acheter.
- Il y a beaucoup de choses que tu ignores sur moi, répondit la blonde en s'appuyant contre la table qui faisait face à celle de Max. Mais j'espérais pouvoir te surprendre à la sortie de ton cours.
- Tu aurais réussi si tu étais arrivée une demi-heure plus tôt, Victoria.
La petite brune hésitait entre garder un ton froid et plein de reproches et se laisser attendrir par le regard doux et craintif qu'elle découvrait sur le visage de son opposante.
- Et si j'étais en avance pour t'inviter à dîner ? A moins que ton agenda ne soit déjà rempli.
Max ne répondit pas, ses yeux ancrés dans les orbes vert impérial qui ne la lâchaient pas, elle essayait de scanner les réelles intentions de son opposante.
- A quoi tu joues ?...
Victoria se passa une main dans la nuque et poussa un petit soupir fatigué.
- Ca va peut-être te surprendre, mais je ne joue pas, Maxine, avoua-t-elle en décrochant son regard pour fixer les coutures de sa jupe. Je ne suis pas douée pour exprimer ce que je ressens et encore moins pour parler sans avoir l'air de mépriser le reste du monde… mais, j'essaye de te montrer que je ne suis pas complètement une enfoirée… Même si clairement, je l'ai été la dernière fois (elle s'arrêta de parler, cherchant ses mots) Ce que j'essaye de dire, c'est que je suis profondément désolée de ce qui s'est passé avec Nate… Vraiment. Il ne se passe pas une seconde sans que je ne veuille remonter le temps pour changer les choses. Si j'avais ce pouvoir, crois-moi, je ferais tout pour empêcher qu'il ne te fasse du mal comme il l'a fait ! Et… je sais bien qu'il est en parti responsable de ce qui est arrivé, mais je suis encore plus à blâmer que lui. J'aurais dû faire quelque chose, j'aurais dû agir… mais j'étais figée sur place, incapable même de comprendre ce qui était en train de se passer. J'étais terrifiée et bloquée à l'idée que tout mon univers s'écroule…
Elle coula un regard en direction de la photographe qui continuait de l'observer sans un mot.
- Mais c'est fini, fit-elle avec une voix légèrement tremblante qui pourtant reflétait une profonde détermination. Je préfère perdre tout ce que je possède plutôt que perdre ton amitié, Maxine… parce que je ne me suis jamais sentie aussi vivante qu'en étant avec toi. Je ne me suis jamais sentie aussi fidèle à moi-même...à ce que je veux, ce que j'aime, qui je suis…
Victoria sentit ses mains trembler et elle les resserra autour de son sac à main.
- Tu vas rire… Il m'a fallu tout perdre pour me rendre compte de ce que je possédais… C'est idiot et cliché, n'est-ce pas ?... Mais c'est la vérité. Je n'arrivais pas à voir que je tenais à ces moments qu'on avait au Starbucks, et je n'arrive pas à croire que je suis en train de dire ça, mais que quelque part je tenais à toi. A la base, je venais ici pour m'éloigner un peu de mon univers et faire un break des gens qui m'entouraient… et petit à petit, je me suis rendue compte que je venais ici parce que j'aimais bien discuter de tout et de rien avec toi. On peut parler photographie comme super-héros, et je ne me sens jamais jugée ou idiote d'aimer ce genre de choses…
La blonde ferma les yeux une seconde pour remettre ses pensées en ordre et se ressaisir.
- Dans tous les cas, j'ai déjà prévenu Nate que s'il touchait à un seul de tes cheveux, c'en serait fini de lui. Il est au courant. Il ne t'embêtera plus jamais, c'est promis. Et si tu ne veux plus entendre parler de moi, je comprends parfaitement… mais juste pour que tu saches… tu me manques, Maxine. Nos conversations me manquent.
Encore une fois, Max ne répondit rien. Elle garda un silence solide qui arracha une mine désolée à la blonde.
- Okay, je vois, reprit-elle. Je savais à quoi m'attendre en venant te voir et je pense que je le mérite… Quelque part, je me sens libérée d'avoir pu dire la vérité. Je te souhaite bonne chance pour la suite, Max. Je sais que tu seras une grande photographe et je te souhaite de réussir.
Sur ces mots, Victoria fit demi-tour et se dirigea vers la sortie quand une voix l'intercepta. Elle s'arrêta nette.
- Je finis mon shift à 20h30. J'aurais certainement faim après…
Un long soupir soulagé échappa à la blonde qui sentait ses mains trembler. Le cœur battant à tout rompre, Victoria sourit nerveusement en se retournant à moitié. Elle découvrit un regard moins dur peint sur le visage de la petite brune pour la première fois depuis le début de leur discussion.
- Putain…
- Quoi ?...
- T'es pas possible, Max… t'allais vraiment me laisser partir.
- Avoue que c'était mérité.
- Mérité, certainement… mais je pense surtout que ça t'amuse de faire faire des montagnes russes à mes émotions.
Contre toute attente, Max s'arma d'un petit sourire qui respirait aussi le soulagement devant la tournure de la situation. Victoria sentit son cœur s'emballer.
- Je reconnais que c'est assez plaisant.
- Tu as de la chance que je me sente magnanime et redevable… Je laisserai passer pour cette fois. Mais ne t'y habitue pas trop parce que je ne suis pas prête de le refaire.
- Tu as l'air dévastée, effectivement.
- Tu n'imagines pas, fit-elle dans un demi-sourire en secouant négativement la tête, mais je me rassure en me disant que mon latte vanille m'attendra cet aprem.
- Je trouve que tu t'avances beaucoup. Qui te dit que tu n'es pas encore sur la Liste Noire du Starbucks ?
Victoria eut le temps d'entrapercevoir dans un battement de cil, un sourire plus serein, plus vrai sur le visage de Max. Mais il disparut aussi vite qu'il était apparu.
- Parce que je suis une cliente fidèle.
Voyant alors que Chloé et Rachel venaient dans leur direction, la blonde trouva bon de battre en retraite. Etre en infériorité numérique ne lui disait rien qui vaille à cet instant précis, pas alors que son cœur et son esprit étaient émotionnellement perturbés. Et d'autant plus avec une fille aussi énervante que Chloé et aussi parfaitement détestable que Rachel. Elle fit donc un petit signe d'au revoir à Max avant de filer sous les « Oh Victoria ! Pourquoi tu pars si vite ? », « On n'interrompt rien, j'espère ? » de la punk qui ne la firent pas s'arrêter pour autant.
Dieu qu'elle détestait cette fille.
Pressée de mettre de la distance entre ces deux énergumènes et elle, Victoria ne la vit ni ne l'entendit quand cette dernière s'approcha de sa meilleure amie pour lui tendre la main en disant « Tu me dois vingt boules. »
Vingt heures sonna comme un coup de gong libérateur aux oreilles de Max. Prévenus depuis une dizaine de minutes de la fermeture prochaine, les derniers clients quittèrent les lieux en emportant leurs boissons pour aller les siroter à l'extérieur. Le calme prit possession de la salle de son emprise de velours. La petite hipster lâcha un long soupir en mettant un tour de clé à la porte d'entrée pour s'occuper tranquillement du nettoyage. Le coffee shop était enfin vide et elle s'était déjà bien avancée dans la mise en place pour le lendemain. Il ne lui restait plus que les stocks à faire derrière le comptoir, un coup d'éponge sur les tables et le sol côté client.
- Tu veux que je te file un coup de main ? Ca ira plus vite à deux.
Max revint vers le comptoir où l'héritière Chase était accoudée. Elle caressa du regard le gobelet vide au nom de Nina Ricci posé depuis plus d'heure sous son nez. Pour une fois, elle avait écrit le vrai nom que Victoria lui avait donné. Une manière de faire un pas dans sa direction suite à ses excuses.
La riche blonde était arrivée vers dix-huit heures trente pour venir commander sa boisson habituelle et s'asseoir à sa place en bout de comptoir. D'abord méfiante, Max devait avouer que le premier quart d'heure avait été un peu étrange. La discussion avait été forcée contrairement à d'habitude, et l'une comme l'autre, elles avaient tâté le terrain pour savoir jusqu'où elles pouvaient aller. Mais il avait suffit d'une remarque de sa cliente pour que leur jeu de répliques revienne en force. Leur fausse rivalité lui avait manqué. Son regard de jade lui avait manqué. Victoria lui avait manqué…
- Tu es sûre ? Je ne vais pas t'obliger à travailler ici.
La blonde afficha une mine de dégoût forcée en mimant un frisson.
- Mon dieu, je suis en train d'attraper des sueurs froides rien qu'à l'idée de m'imaginer travailler dans un coffee shop hipster, répondit la blonde en se levant de son tabouret. Mais quitte à être enfermée ici après la fermeture avec toi, autant faire quelque chose d'utile.
- Sache que je garderai les bandes vidéo des caméras de surveillance comme preuve, rit Max. Ce sera collector !
- J'espère que tu les conserveras à côté de ta boîte de cookies sans gluten aux morceaux de chocolats eco-friendly. Je me sentirais honorée.
Max éclata de rire alors que la Reine de Blackwell se penchait par-dessus le comptoir dans un air satisfait pour attraper une éponge afin de nettoyer les tables.
- Occupe-toi des stocks, je fais la salle.
La petite hipster acquiesça, amusée par la situation. Mais au lieu de prendre son carnet de note pour noter les choses qui manquaient derrière le bar, elle ouvrit son sac à main pour en tirer son appareil photo. Aussi discrète qu'un ninja, Max se glissa dans le dos de Victoria et attendit que celle-ci expose involontairement son meilleur profil pour appuyer sur le détenteur. Le bruit accompagné du flash firent relever la tête à la jeune femme qui eut juste le temps de voir la brune abaisser son polaroid.
- Tu ne viens pas de faire ce que je crois que tu viens de faire, hipster ?...
- Oh que si ! S'amusa Max dans un sourire victorieux. Et crois-moi, ce cliché va aller sur mon mur photos !
Elle attendit que le cliché s'imprime pour le secouer doucement jusqu'à ce que les couleurs apparaissent clairement.
- Montre ! S'il est raté, je mets mon véto dessus ! Grogna Victoria en s'approchant promptement.
- C'est ma photo, j'en fais ce que je veux !
- Le droit à l'image l'emporte toujours. Me dis pas que t'es photographe et que tu ignores ce principe de base !
Instinctivement, Max écarta la photo en tirant son bras vers l'arrière pour la mettre hors de portée de la blonde qui la surplombait dorénavant de sa grande taille. Victoria se tenait face à elle, la main tendue le long de son propre bras dans une tentative pour attraper le papier glacé. La distance entre elles qui, jusque-là, était restée respectable, se réduisit sensiblement quand celle-ci essaya de l'immobiliser d'une main pour rendre sa besogne plus aisée. Leurs espaces personnels respectifs se confondirent le temps d'un l'instant leurs visages se rapprochèrent dans une lutte au corps à corps qui devint intoxicante. Max se figea comme un lapin prit dans les phares d'une voiture. Elle percevait avec une précision effrayante la proximité de leurs corps, la main de Victoria serrée autour de son bras, son souffle sur sa joue. Elle releva le menton pour plonger dans le regard vert impérial au-dessus d'elle qui ne lui était jamais paru si intense et captivant. La seconde se prolongea, comme si le temps venait de se figer. La blonde cessa de se battre à son tour. Sans même s'en rendre compte, elle se retrouva à porter sa seconde main au niveau de l'avant-bras de Max pour le tenir avec une douceur craintive. Leurs regards ne se quittaient plus, la photo était devenue la dernière de leurs préoccupations. Victoria essaya d'ouvrir la bouche pour dire quelque chose mais la referma, incapable de former une pensée cohérente.
- Victoria, souffla Max comme pour essayer de la prévenir.
Son prénom prononcé d'une voix rauque ne fit qu'électriser un peu plus la concernée qui n'arrivait plus à se retirer. Leurs visages se penchèrent un peu plus, leurs lèvres se rapprochèrent inéluctablement. Leurs souffles s'enlacèrent, caressant les nervures de leurs lèvres en attente de la suite. Victoria déglutit péniblement. Les alarmes avaient beau rugir dans sa tête, elle était incapable du moindre mouvement en arrière. Ses émotions s'entrechoquaient dans un tumulte chaotique qui descendit jusqu'à son bas-ventre. Et pourtant, elle était étrangement calme, comme si elle se tenait à l'endroit le plus sûr au monde.
- Que crois-tu faire ? murmura Victoria en ultime rempart à ce qui se préparait.
- Je ne sais pas, répondit Max avec sincérité, tout aussi sereinement chamboulée.
Leurs lèvres entrèrent en contact, se joignirent dans une caresse délicate et presque absente du moindre mouvement. Ce ne fut rien de plus qu'un frôlement, un contact aussi léger qu'un battement d'ailes de papillon, mais il suffit à couper le souffle aux deux jeunes filles, à effacer le monde qui les entourait. Au bout de quelques secondes, elles se reculèrent légèrement. Le temps semblait s'étirer indéfiniment. Les paupières mi-closes, elles essayaient de guetter un signe en provenance de l'autre. Quelque chose leur signalant qu'elles n'avaient rien fait de mal.
- Je suis désolée, chuchota la blonde devant le silence qui se prolongeait, comme ayant du mal à reprendre sa respiration.
- Ne le sois pas, dit la petite hipster avec une telle certitude que Victoria sentit ses barrières
s'effondrer.
Malgré cette autorisation, ce fut avec une délicatesse infinie qu'elles renouèrent l'union de leurs lèvres. Le baiser se fit plus appuyé, plus réciproque bien qu'encore timide. Chacune d'elle savourait cette sensation inédite, cette douceur qui promettait encore tant. Elles découvraient une saveur, une chaleur qu'elles avaient imaginée maintes fois sans oser faire le pas. Et, comme ayant peur de briser ce rêve fragile, elles n'émirent aucun autre geste si ce n'est rester blottie l'une contre l'autre. Leurs lèvres se découvraient, goûtaient à une drogue addictive et foudroyante, partageaient tous les mots qu'elles ne s'étaient pas avoués ces derniers mois. L'instant ne dura que quelques secondes mais cette volupté parut une douce éternité à leurs cœurs.
Sans regret, Max se retira pour admirer la blonde dans ses bras rouvrir les yeux avec une lenteur appréciative.
- Victoria, je serais ravie de continuer cette discussion. Vraiment… reprit-elle avec amusement, les yeux brillants, mais si on ne finit pas le nettoyage, on ne sortira jamais d'ici.
- Est-ce que ça veut dire que je peux me servir des Latte Vanille autant que je veux jusqu'à demain ?
La petite hipster rigola alors que la main qui était posée sur son avant-bras descendait jusqu'à trouver ses doigts et les entrelacer tendrement. Elle jouait à retracer les lignes de ses mains.
- Non, ça veut dire que tu vas dormir dans un fauteuil en cuir pas confortable avec une odeur de café pour te bercer.
- On ferait mieux de se dépêcher alors... fit-elle avec un dégoût évident, surtout que je commence à avoir faim.
Max secoua la tête en essayant de se détacher de Victoria qui l'empêcha de partir pour la serrer de nouveau contre son corps.
- J'ai du mal à te laisser partir, avoua-t-elle dans un petit regard gêné. On ne peut pas rester comme ça un peu plus longtemps ?...
Elle se pencha à peine pour retrouver ses lèvres que la brune terminait de combler la distance dans un sourire. Après un nouvel échange encore trop court, cette dernière porta une main à la joue de la riche héritière pour remettre une mèche blonde en arrière et admirer la couleur vermeille de ses pommettes. Victoria était adorable dans sa gêne légèrement déniée.
- Tu m'énerves.
- Haha, pourquoi ?!
- Hn… Tout ça… Ce n'est pas dans mes habitudes…
- Peut-être que tu n'avais pas les bonnes habitudes, Chase ?
Un grognement dédaigneux lui répondit alors qu'elle détournait les yeux, embarrassée :
- Quel sort m'as-tu jeté ? Demanda-t-elle d'une petite voix.
- L'addictivus Supremus, répondit la châtain avec aplomb. Je l'ai appris dans un grimoire vieux de plusieurs millénaires.
Victoria roula des yeux. Bien sûr il avait fallu que Max casse ce moment avec une blague geek.
- Tu me fatigues… lâcha la Reine de Blackwell.
- Je te fascine, nuance. Allez, au travail ! Plus vite on aura fini, plus vite on sera au resto'.
Dans un sourire en coin, Victoria acquiesça et retourna à ses tables pendant que Max repassait derrière le comptoir pour terminer les stocks.
##
Arrêtée devant le campus de Blackwell depuis deux bonnes minutes, Victoria avait coupé son moteur mais aucune d'entre elles n'avait encore fait un geste pour sortir de la voiture. A la place, elles se regardaient, profitant de leur dernier moment ensemble dans leur bulle.
La petite hipster s'était attendue à ce que Victoria la conduise dans un endroit très chic quand elle lui avait dit l'emmener dans un meilleur endroit que le Two Whales. Le genre de restaurant hors de prix où tous les serveurs en costumes se seraient inclinés devant elle en lui servant des « Miss Chase » à tout va. Mais il n'en fut rien. Certes, le restaurant avait été clairement au-dessus de ses moyens, mais il s'était révélé être un petit bistro de quartier où la jeune femme ne s'était pas senti mal à l'aise. Au contraire, elle avait beaucoup apprécié le dîner. Et Victoria lui avait révélé qu'elle avait choisi l'endroit exprès pour elle. Ce qui lui avait fait d'autant plus plaisir.
- Je dois dire que j'ai passé une très bonne soirée, confia Max sans lâcher du regard le visage de la blonde qui se fendit d'un sourire.
- Meilleure que t'es soirées geek avec Wallace ? Répondit-t-elle en relevant le menton d'un air peu modeste.
- Warren, rit la petite brune. Eeeet je pense que ça se discute.
Victoria perdit son sourire alors que son éternel froncement de sourcils revenait en force sur son visage.
- Pardon ? Tu oses me faire croire que passer ta soirée à te gaver de chips aux côtés d'un bizut boutonneux pré-pubère en chaleur est comparable à une sortie en tête-à-tête avec moi ?
- Il a de bons arguments quand il me propose de jouer à Final Fantasy.
- …
Max éclata de rire devant la mine choquée de la blonde qui tourna à une moue boudeuse quand elle comprit qu'elle se moquait d'elle. Il était si facile de la faire réagir et enrager. La petite hipster se pencha en avant pour déposer un baiser sur ses lèvres, mais la blonde tourna légèrement la tête pour esquiver l'attaque en traître. Max déposa alors un premier baiser sur sa joue, puis un deuxième en se rapprochant de ses lèvres. Ils étaient des caresses qui redessinaient les traits de la blonde de la commissure de ses lèvres jusqu'à son oreille. Elle sentit Victoria frémir sous le contact.
- On t'a déjà dit que tu avais un petit air mignon quand tu boudais ?
L'intéressée roula des yeux mais ramena son visage en direction de Max qui en profita pour l'embrasser pour de vrai. Sa répartie mourut dans son souffle qu'elle partagea avec plaisir. A la place, elle remonta sa main le long de la joue de Max pour la glisser jusqu'à sa nuque, approfondissant leur échange. Il n'y avait plus de timidité. Plus la restreinte de faire quelque chose de déplacé. Juste cette envie de ne plus jamais s'écarter. Victoria mordilla doucement la lèvre inférieure de Max, lui demandant la permission d'aller plus loin, mais elle fut agréablement surprise quand ce fut la brune qui prit les devants. Elle glissa sa langue contre celle de la riche héritière et prit le dessus sur leur échange qui pour une fois ne se plaignit pas de se faire dominer. C'était une sensation aussi nouvelle qu'agréable.
Quand elles s'écartèrent, Victoria attrapa autoritairement Max par le col de son t-shirt pour lui dérober ses lèvres qui lui manquaient déjà. Elle sentit la petite brune sourire contre sa bouche et murmurer un « Il faudrait qu'on rentre, il se fait tard… » auquel Victoria répondit par un grognement mécontent.
##
Une fois au chaud dans son lit, Max attrapa son portable pour voir qu'elle avait une dizaine de textos non-lus de la part de Chloé qui se résumaient à :
« Hey Super Max, tu fais quoi ce soir ? Ca te dit un ciné' ? »
« La Terre à Max ! Je répète, la Terre à Max. Le ciné c'est okay ? Rachel sera là aussi. »
« Bon, j'ai compris tu es avec Bitchtoria. Comment oses-tu me faire passer après une meuf qui écoute du David Guetta ?! Je suis outrée et deg'. »
« Dans tous les cas, je veux tous les détails ! Tu m'entends ! »
« Et n'oublie pas de m'appeler !... J'ai pas envie de devoir aller te chercher dans le Manoir Chase pour t'enlever les pulls en cachemire et des Louboutins qu'elle t'aura fait porter pour te transformer en quelqu'un de potable. »
Il y avait également un message de Kate qui l'invitait à une tea party mercredi prochain, un de Rachel qui semblait être au courant qu'elle avait un rendez-vous – on se demande bien qui pouvait être sa source. Et deux messages de Warren. Le premier était un même assez drôle représentant un chat et le second un rappel que Star Wars passait à la télé demain soir et qu'ils pouvaient le regarder ensemble. Max préféra ne pas répondre, à la place, elle appela Chloé qui répondit au bout de deux sonneries.
- Hey Chloé !
- Ravie de savoir que tu en vie, pourriture. Je commençais à me demander si je devais lancer un appel à témoin sur toute la région… et plus précisément faire faire un perquisition dans la chambre de Bitchtoria.
- Je n'ai pas disparue si longtemps que ça, rit la petite brune d'un ton un peu gêné.
- Ouais ouais, c'est ce qu'on dit. Bon… arrête de tourner autour du pot, je veux tout savoir. Sur une échelle de 1 à 10, elle est bonne à quel point ? Et elle est du genre dominante ou dominée ?
Max vira au rouge cramoisi.
- C-Chloé ! On est juste allées au resto !
- Elle t'a sorti le grand jeu ? Elle a rampé comme une misérable ?
- Elle ne m'a pas emmenée dîner à la Maison Blanche si tu me poses la question. Elle a même fait un truc plutôt simple. C'était juste… agréable, ajouta-t-elle d'une voix plus douce et rêveuse.
- Je suis déçue, admit la punk d'une voix lasse. Je m'attendais à mieux de la part de Chase.
Elle s'arrêta de parler un instant et au bruit que Max entendit à travers le téléphone, elle comprit que sa meilleure amie était en train de chercher ses feuilles à rouler.
- Mais sinon je dois comprendre que je vais devoir apprendre à la supporter, c'est ça ?
La petite hipster esquissa un sourire.
- On ne s'est pas dit clairement qu'on était ensemble ou quoique ce soit, mais… je pense ?
- Ca risque d'être fucking épique.
Max approuva mi-amusée mi-inquiète et finit par lui raconter l'intégralité de sa soirée. Au fur et à mesure de son histoire, elle se rendit compte qu'elle ne pouvait s'empêcher de sourire comme une gamine à l'évocation de chaque souvenir qu'elle pouvait raconter dans les moindres détails. Chaque expression de Victoria était marquée au fer rouge dans sa mémoire. Chacun de ses sourires…
Ce fut d'ailleurs quand elle reçut un message de celle-ci qu'elle annonça à Chloé qu'elle devait raccrocher. La punk ne chercha pas trop à la retenir, le joint devait commencer à lui monter à la tête et elle voulait certainement profiter des effets avant d'aller se coucher. Elles se souhaitèrent donc une bonne nuit avant que Max ne se précipite sur sa boîte de réception.
Victoria, 23h58 : Tu dors ?
Max, 00h01 : Pas encore. Je pensais à toi :)
Victoria, 00h01 : En bien j'espère ?
Max, 00h03 : Ca dépend. Est-ce que tu considères le fait que je puisse te faire chanter jusqu'au restant de tes jours comme une bonne chose ? Parce que ma photo de toi en train de faire le ménage est très réussie. Mdr
Victoria, 00h04 : …
Victoria, 00h05 : Je vais devoir t'éliminer, Maxine. Dommage, j'en étais venue à t'apprécier.
Max, 00h06 : Tu es une vraie veuve noire ! *smiley choqué*
Victoria, 00h07 : Et dire que ta mort ne me rapportera rien… j'ai mal choisi ma victime. *tristesse*
Max, 00h08 : Tu dis ça mais tu ne pourras pas te débarrasser de moi, je te manquerai trop.
Victoria, 00h10 : Tous les hipsters se ressemblent. Je n'ai qu'à aller au Starbucks et ramasser une fille qui boit un macchiato caramel avec un t-shirt ringard. Je pense que ça fera l'affaire.
Max, 00h11 : :(
Max, 00h11 : Je me sens stéréotypée au plus profond de mon âme.
Victoria, 00h12 : Tu as choisi la voie du hipster, tu as cédé toute seule au côté obscur de la Force.
Max, 00h13 : Serait-ce une invitation à regarder Star Wars, demain soir ? *wink* :)
Victoria, 00h14 : T'as cru que je m'appelais Warden ou quoi ? Non mais allo.
Max, 00h15 : Je suis impressionnée par ton aptitude à inventer des noms à ce pauvre garçon. C'est Warren.
W-A-R-R-E-N.
Victoria, 00h16 : Pourquoi on parle de lui déjà ?
Max, 00h18 : Parce que tu as amené le sujet ?
Victoria, 00h20 : Peu importe. Demain midi t'es libre pour déjeuner ?
Victoria, 00h21 : Oh ! Et j'ai oublié de préciser… Sache que je ne prendrai pas « non » pour une réponse recevable.
Max, 00h24 : Je dois manger avec les filles, mais je termine les cours à 15h. Donc on peut se retrouver à ce moment-là avant que j'aille bosser à 16h ?
Victoria, 00h25 : J'aurais préféré le déjeuner mais okay... Attend moi devant l'entrée principale, alors.
Max sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. Victoria acceptait de la rejoindre dans un endroit public à la vue de tous, et en plein jour de surcroit. Leur couple n'était peut-être par encore officiel, mais elle se tenait à sa promesse d'être elle-même et pas seulement au Starbucks. La petite hipster se dépêcha de lui répondre à l'affirmative avant de lui souhaiter bonne nuit. Elle osa même ajouter un petit cœur à son message. Cœur auquel Victoria répondit par un autre accolé à son bonne nuit.
Les choses risquaient de devenir intéressantes dans les jours à venir. Tellement que Max eut du mal à trouver le sommeil. Elle se retourna longtemps dans son lit, ses pensées tournant en boucle sur tout ce qui s'était passé durant la journée. Elle avait eu un rencard avec Victoria !
