Hello Sugarcubes ! (Oui je pense que vous ressemblez tous à ça après le dernier chapitre).

Mais on arrête les conneries ! Vous vous êtes certes embarqués à bord du SSV Maximum Victory, mais notre destination n'est pas Guimauve land (même si on a pu y croire suite aux premiers jours de la relation de Max et Victoria… et que quelqu'un lève la main s'il n'a jamais été niais à faire vomir un bisounours les premiers jours où il était amoureux. *silence* Merci. C'est bien d'assumer. )

Pour ce qui est de ce chapitre, dernier chapitre avant l'épilogue (et ouiiiiii, c'est la fin), je voudrais dire plusieurs choses rapidement. La première c'est que cette fiction repose entièrement sur ce que vous allez lire ici. La niaiserie, le angst qu'on a traversé se concrétisent entre ses lignes. Je ne dirais pas que Not so SI est ma meilleure fiction, loin de là, mais elle trouve une petite place particulière dans ma vie parce que ce que traverse Victoria est quelque chose de vrai qui peut parler à beaucoup de monde. Je ne vous dirai qu'une chose « Les gens… Vous êtes magnifiques comme vous êtes, ne l'oubliez jamais. Les autres peuvent aller se faire voir. »

La deuxième chose est que le Concours Héros du Quotidien se termine samedi à minuit (heure française). Pour plus d'équité, j'aurais une deuxième personne avec moi pour choisir la meilleure photo. Je remercie tous les participants et je vous dis à la semaine prochaine pour les résultats.

Bonne lecture,

Kiwi


Victoria's Secret (Identity)

Dix jours plus tard

Max marchait tranquillement en direction des dortoirs de Blackwell quand son portable vibra à plusieurs reprises dans sa poche. Elle le sortit pour découvrir – sans surprise – deux messages entrants de Victoria. Cette fille ne savait vraiment pas dire tout ce qu'elle pensait dans un seul et même texto. Il fallait toujours qu'elle en envoie toute une volée pour donner une seule information. Mais cela fit sourire la petite brune malgré elle, surtout à la vue de la bulle de conversation qui n'était autre qu'un selfie de la blonde aux cheveux courts.

Victoria, 16h35 : Hé la geek. J'espère que ton agenda est libre ce soir parce que peu importe ce que tu as prévu, je suis V.I.P sur tous tes projets.

Victoria, 16h37 : Je finis dans une heure et j'avais envie de te voir… Pas que tu me manques, ne te fais pas des idées hipster. Mais j'ai une mission envers l'humanité en continuant mon exorcisme de la plaie vintage que tu représentes.

Max éclata de rire toute seule devant son téléphone. Victoria avait un talent inné pour vivre dans le déni, c'était hallucinant. A chaque fois, elle arrivait à inventer une nouvelle excuse pour la voir – après avoir imposé sa présence comme une invitation que l'on ne pouvait pas refuser, bien entendu –. Un peu plus et elle aurait besoin d'un cercle de soutien anonyme pour parler de ses problèmes de refoulement de vérité.

Activant le clavier numérique, Max écrivit une réponse rapide avant de s'engouffrer dans le bâtiment des filles.


Assise jambes croisées au fond de la classe de M. Jefferson, Victoria guettait son téléphone portable posé à côté d'elle dans l'attente d'une réponse. Elle connaissait Maxine. Elle répondait pratiquement toujours dans la minute. Sauf quand elle était avec Chloé. Une chose que Victoria apprenait à encaisser… avec difficulté. Elle essayait de faire des efforts, (pour de vrai !). Mais primo, cette fille l'insupportait à un point qui dépassait l'entendement humain, et secundo, elle n'aimait pas la manière dont elle s'appropriait Max. C'était certainement cela qui l'énervait le plus. On aurait dit que Chloé essayait de lui montrer qu'elle seule comptait vraiment à ses yeux et qu'il en serait toujours ainsi. A croire qu'elle voulait lui faire comprendre que leur relation ne durerait pas et qu'à un moment ou un autre elle la récupèrerait. Victoria serra son poing. Le pire, c'est qu'elle ne pouvait rien dire sans que Max ne lui lance un regard qui signifiait « Laisse tomber, Vic. C'est Chloé ». Ce qui était encore plus horripilant. Son écran s'illumina soudainement. Elle avait reçu un nouveau message.

Maxine 3, 16h40 : Je t'avoue que j'ai un programme chargé pour ce soir entre le massacre de terroristes galactiques, le sauvetage de demoiselles en détresse, le secours à de pauvres gens qui ont certainement égaré un objet précieux dans des lieux improbables… sans parler que je dois faire level up mon équipe, établir une stratégie militaire pour le développement des ressources et développer mon aura de leader inné. Je te cache pas que c'est du boulot.

Victoria regarda son téléphone avec une mine blasée de six pieds de long.

Victoria, 16h43 : Je pense que ce message signe la fin de notre relation. Je supprime ton numéro.

Maxine 3, 16h45 : T'es sûre ? :( moi qui espérais qu'on se fasse une petite session de téléphone rose avant de dormir.

Stoppée net dans sa répartie, la blonde manqua de s'étouffer avec sa propre salive en sentant sa température corporelle grimper instantanément de plusieurs degrés. Le souffle court et les yeux écarquillés, elle lut et relut ce texto comme voulant vérifier qu'il signifiait bien ce qu'il semblait signifier. Son cœur se mit à tambouriner contre sa poitrine et son bas-ventre se tordit par anticipation.

Maxine 3, 16h49 : Hahaha ! Je sais que tu rougis, Chase. Et, je plaisante, je suis libre toute la soirée. Je suis off aujourd'hui ! Passe dans ma chambre quand tu as fini, on verra ce qu'on fait *wink wink*

Non mais… Elle rêvait ou Maxine la provoquait ?! C'était plus que du suggestif ce qu'elle faisait là. Victoria avait l'impression d'halluciner. Et le pire !... c'est que cela fonctionnait bien, la petite garce savait où appuyer pour la frustrer… elle sentait son corps atteindre le point de surchauffe avec coloration intempestive de ses joues qui la trahissaient.

- Victoria !

La blonde sursauta à l'entente de son prénom et s'empressa de faire disparaitre son iPhone dans son dos. Relevant la tête, elle croisa le regard de M. Jefferson, son enseignant d'Histoire de la Photographie, qui la fixait comme si elle venait de commettre un crime contre l'humanité.

- Avoir des bonnes notes ne te dispense pas d'écouter, la sermonna le grand brun d'une voix légèrement agacée.

- J-je… Je suis désolée, Monsieur. Je vous écoutais, s'excusa-t-elle en reprenant de sa superbe malgré ses joues en feu et l'excitation qui faisait frémir son bassin.

- Ah oui ? Dans ce cas, peux-tu me donner un exemple d'une photographe qui a su parfaitement capturer la condition humaine en noir et blanc ?

- Diane Arbus, répondit-elle aussitôt.

- Exact. Pourquoi Arbus, Victoria ? Appuya-t-il, semblant vouloir vérifier qu'elle ne lançait pas cela au hasard.

- A cause du désespoir qu'elle saisissait sur les visages de ses sujets. Quiconque pose ses yeux sur ses clichés reste hanté à jamais par les regards criants de tristesse de ces mères et enfants.

- Bien bien, et peux-tu me dire qui a inventé le procédé qui a donné naissance aux premiers autoportraits ?

Alors que les dix dernières minutes de la leçon lui avaient complètement échappées, Victoria se félicita intérieurement d'avoir lu la veille au soir le livre qu'ils utilisaient en classe. Un sourire de chat se dessina sur ses lèvres. Elle connaissait cette réponse.

- Ce procédé a été inventé par Louis Daguerre en 1835, Monsieur, récita-t-elle en se réinstallant confortablement dans sa chaise. Il a créé ce que l'on appelle le « daguerréotype », une technique qui produit des portraits sur une surface polie, leur donnant un effet particulier comme un miroir.

- Effectivement…, s'étonna l'enseignant en entendant sa réponse sans faute. C'est une bonne réponse, Victoria – la jeune femme sembla ronronner de plaisir à l'entente du compliment –, mais que cela ne t'empêche pas à l'avenir, de m'écouter quand je parle. Donc je disais…

Victoria essaya de se re-concentrer sur la leçon en cours. De toute façon il était prévu qu'elle rejoigne Max plus tard dans l'après-midi. Elle lui ferait payer par la même occasion de s'être fait prendre la main dans le sac avec ses conneries.

##

Quand Victoria ouvrit brusquement la porte de la chambre de Max – sans avoir frappé – elle trouva, comme elle s'en doutait, sa petite-amie installée dans son canapé devant son ordinateur portable. La petite châtain de son côté releva immédiatement la tête à son entrée, lui décochant un sourire qui lui fit oublier toute idée de vengeance dès qu'elle croisa son regard. Victoria ferma la porte en roulant des yeux malgré un sourire persistant sur les lèvres qu'elle refusait de reconnaître.

- Salut, beauté fatale, s'amusa Max. Bien bossé cet aprem ?

A l'entente des explosions qui faisaient vibrer les haut-parleurs de son PC, la riche héritière aurait parié qu'elle regardait encore un de ses trucs de super-héros qu'elle adorait.

- Je devrais te faire payer m'être fait chopper en train de t'envoyer un message, répondit la nouvelle arrivante en se laissant tomber – avec grâce – sur le canapé à ses côtés. Et ça aurait pu être mieux, même si je garde ma place de première de la classe.

- Qui peut battre Victoria Chase ? Sourit la petite hipster dans un sourire sarcastique. A part moi bien entendu ?

- Il faudrait déjà que tu rendes une photo pour ça. J'ai de la marge jusque-là.

- Peut-être un de ces jours, répondit-elle sur un ton énigmatique.

- En attendant, tu devras te contenter de la place de seconde, Caulfield.

Max n'attendit pas une seconde de plus pour réclamer son baiser de bonjour qui arracha un nouveau sourire à la blonde. Docile, elle se plia à sa volonté sans chercher à discuter et en profita même pour prolonger leur échange durant de longues secondes qu'elle savoura à leur juste valeur. Leurs lèvres dansaient de concert sur un rythme sourd et pourtant silencieusement mélodieux à leurs cœurs. Ces derniers, aussi vigoureux que des tambours de guerre, semblaient donner la mesure et n'accéléraient que pour mieux s'apaiser dans une reprise de contrôle presque inconsciente. Victoria avait beau essayer de s'en persuader tous les jours, elle n'arrivait toujours pas à réaliser la chance qu'elle avait de l'avoir dans sa vie. La magie opérait chaque fois un peu plus. Chaque fois qu'elles se retrouvaient seules toutes les deux.

Sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte, ou plutôt sans qu'elle veuille l'accepter à cette époque, cette attraction avait commencé lorsque leur unique point de rendez-vous n'était autre que le Starbucks café. Déjà, à ce moment, la présence de Max était devenue intoxicante… à présent elle en profitait pleinement sans même se sentir coupable. Victoria saisit doucement Max par sa veste grise démodée pour l'embrasser comme si s'écarter signifiait perdre une partie d'elle-même. Cela faisait tellement bien de retrouver la petite hipster après une longue journée où elles n'avaient pas pu se croiser. Victoria voulait que cet instant dure toujours, que le souffle qu'elles partageaient deviennent l'unique apport d'oxygène dont elle avait besoin. Elle aurait pu se faire à leur bulle hors du temps et du monde.

Alors, quand Max s'écarta, déterminée, Victoria émit son habituel petit grognement mécontent accompagné d'un froncement de sourcil réprobateur. Elle s'apprêtait à revendiquer la suite de ce baiser quant à la place, elle reçut une petite tape sur le bras qui l'arrêta dans sa phrase :

- Voilà ! J'ai encore raté toute l'intrigue à cause de toi ! Râla la petite hipster. Bravo.

- Comme s'il y avait une intrigue, franchement, fit la blonde dans un soupir lassé et dramatique.

- Bien sûr que oui !

- Maxine… ta naïveté est parfois touchante, mais ouvre les yeux s'il te plaît.

- Je t'assure qu'il y en a une !

- Tu parles, c'est toujours la même chose ces films… commença-t-elle avant de prendre son air suffisant qui indiqua à Max qu'elle s'apprêtait à se transformer en Queen Bitch. Arrête-moi si je me trompe mais ça commence avec un mec carrément geek qui n'est pas aimé par la société ou qui a perdu ses parents et là il se fait irradier, mordre par une bestiole improbable ou se fait exposer à une substance toxique qui lui donne des superpouvoirs. Bien entendu, il est amoureux d'une fille superbe qui ne le voit pas, ou qui l'a friendzoné depuis des années, mais il va la séduire sous la coupe de son masque de super-héros. C'est là que le méchant entre en jeu en essayant de tuer la fille en question mais évidemment il n'y arrivera pas parce que Hollywood aime les suites, les préquels et dérivés donc faut garder la nana sous le coude pour un épisode 2. Tu auras un combat épique, une scène de baiser, voire de cul si tu as de la chance, beaucoup d'explosions, quelques placement de marques de voiture et une musique potable. J'ai raté quelque chose ?

Max regarda sa petite amie pendant une seconde avant d'éclater de rire.

- Okay, ne me fais plus jamais croire que tu ne regardes pas ce genre de films ! Tu es grillée puissance mille, s'amusa-t-elle en lui déposant un bisou sur la joue.

- Ca veut dire que tu vas éteindre ce truc ? Grogna la blonde avec une mauvaise foi évidente.

- Non, ça veut dire qu'il me reste vingt minutes et que je veux voir la fin !

Victoria voulut protester mais les deux orbes d'un bleu profond qui aspirèrent son âme la firent céder.

- Vingt minutes, pas une de plus.

- T'es la meilleure ! S'enjoua Max en se serrant contre elle. La plus chiante, la plus râleuse et la plus têtue mais la meilleure.

- Je suis née pour être numéro 1 dans tout ce que j'entreprends, c'est dans mes gênes.

- Chase ! Tais-toi, j'écoute…

Victoria leva les yeux au ciel silencieusement, mais au lieu de remettre la petite hipster à sa place elle sortit de sa main libre son iPhone de son sac à main. Quitte à laisser Max regarder la fin de son film en toute tranquillité autant aller checker ce qui se disait sur Facebook. Elle alluma son téléphone et pianota quelques secondes jusqu'à atteindre son fil d'actualité. Ajustant sa position pour garder Max dans ses bras sans la déranger, elle s'installa un plus confortablement dans les coussins en tissu – on était loin du confort de son canapé en cuir.

Voyons, voyons… Qu'est-ce ce qui se passe dans le monde ? pensa-t-elle avec curiosité.

Elle avait quatre notifications. C'était des identifications sur des photos principalement et un rappel d'anniversaire, rien d'inhabituel en soi. Elle se pencha donc sur les messages du fil d'actualités avec plus d'intérêt. Les premiers posts étaient des informations politiques peu intéressantes, suivies de photos partagées par Dana entrecoupées de memes qu'elle parcourut parce que, bien qu'elle ne veuille pas le reconnaître, elle aimait bien cet humour ringard. Particulièrement ceux avec des chats… Si Maxine découvrait cela, c'en serait fini de sa réputation. Victoria fit donc défiler les images sans trop s'attarder dessus en s'assurant que l'attention de sa copine était toujours focalisée sur l'écran de l'ordinateur et non pas son téléphone. Au bout de quelques minutes, ne trouvant rien de passionnant, elle le reposa pour se concentrer sur la châtain dans ses bras. A la voir si concentrée – et s'ennuyant ferme, pour dire la vérité –, une idée germa dans son esprit tordu. Une idée de vengeance bien méritée. Dans un sourire en coin, Victoria commença par découvrir sa nuque et sa gorge du bout des lèvres pour descendre jusqu'à sa clavicule en écartant légèrement le col de son t-shirt du bout des doigts. Elle embrassa sa peau couleur de craie avec une adoration aimante, la suçotant par endroits. Max se mit à se tortiller sous ses assauts répétés qui incendiaient chaque parcelle de chair qu'ils effleuraient.

- Viiiic… tu n'es pas sage ! Geignit-elle dans un sourire qui démentait sa tentative de résistance.

- Je peux arrêter si ça te dérange, ronronna-t-elle en remontant la ligne de ses baisers jusqu'à son oreille qu'elle embrassa plus lentement faisant grimper la température.

Elle arracha un gémissement légèrement plus aigu à sa partenaire dont la respiration venait de se raccourcir sensiblement.

- Alors, Maxine ? La titilla-t-elle entre deux baisers et en glissant lentement une main sous son t-shirt pour caresser son ventre. Dois-je arrêter ?

Max ferma les yeux, remontant sa main à hauteur de la nuque de la blonde pour passer une main dans ses cheveux. Victoria avait une manière tellement sensuelle de prononcer son prénom. C'était indécent… Personne n'aurait jamais dû avoir le droit de sonner aussi sexy en se contentant de l'appeler.

Tournant légèrement la tête, Max abandonna pour de bon le film qu'elle était en train de regarder pour sceller leurs lèvres dans un baiser désireux et étrangement impérieux. Elle n'allait pas se laisser avoir et mener en bateau ainsi. La riche héritière, de son côté, l'accueillit dans ses bras à l'aide d'un rire contagieux qu'elles partagèrent dans leur distance intime. Sous le toucher de la langue de Victoria, Max sentit son cœur fondre et une chaleur dévorante croître dans son bas-ventre. Elles n'avaient d'yeux que pour l'autre et se découvraient avec délicatesse et un brin d'impatience.

Max regarda les lèvres de Victoria quand elle réussit à s'écarter assez afin de pouvoir les admirer. Elle souriait de nouveau. Un sourire lumineux bien que calme et patient. Elle se sentit de nouveau aimanté dans leur direction, elle ne pouvait pas résister, ne voulait pas résister…

Des coups frappés à la porte accompagnés d'une petite voix fluette les interrompirent.

- Max ? Tu es là ?...

- Sérieusement, chuchota Victoria dans le semi-baiser qu'elles partageaient encore. On peut pas faire semblant de ne pas être là ?...

- Tu es diabolique.

Se détachant des lèvres de Victoria à regret, Max soupira et tenta de se reculer pour reprendre sa place sur le canapé, mais la riche héritière ne fut pas de cet avis. Comme pour chasser l'intrus, et dans le cas présent l'intruse, la blonde marqua son territoire en resserrant son étreinte autour de la taille de Max et en l'empêchant de quitter ses bras.

- Je suis là, Kate, entre ! Fit-elle en jetant un regard blasé à Victoria qui signifiait « tu as quel âge ? ».

Cette dernière lui fit comprendre sans même ouvrir la bouche que l'intervention lui déplaisait au plus haut point et qu'elle n'allait pas céder du terrain. Peut-être qu'assister au péché éternel ferait fuir la petite catholique plus rapidement. Du moins, ce fut forte de cette pensée qu'elle continua son manège immature. Max soupira de plus belle alors qu'une tête aux longs cheveux châtain clair passait par l'entrebâillement de sa porte. Kate se figea immédiatement en apercevant Victoria aux côtés de celle à qui elle était venue rendre visite. Sans être ouvertement hostile, la leadeuse du Vortex Club lui retournait un regard indéchiffrable qui la mit un peu mal à l'aise.

- Viens, assis toi, Kate, l'invita Max en se détachant de l'étreinte de Victoria qui tira une tête de félin mécontent à qui on aurait retiré son jouet.

- Max… il faut que je te parle, c'est important.

- J'imagine que je vais devoir aller vous faire du thé ? Ronchonna la blonde en se redressant, se doutant qu'elle ne serait pas la bienvenue dans cette conversation.

Pour accompagner ses dires, Victoria s'étira de tout son long sous le regard de Kate qui s'écrasa instantanément, mal à l'idée de les avoir interrompues. La petite hipster roula des yeux, amusée avant de se reconcentrer sur sa nouvelle invitée.

- Ne fais pas attention à elle, elle est encore en apprentissage pour ce qui est d'être sympa avec les autres. Elle fait des progrès mais c'est pas encore ça.

- Et elle, elle est toujours en apprentissage pour ce qui est de s'habiller correctement, contre-attaqua la concernée en se préparant à quitter les lieux. Mais c'est la pire élève de tous les temps… Même moi je ne peux pas y faire grande chose.

Victoria prit une mine dramatique un peu exagérée en ajoutant un « c'est pourtant pas faute d'avoir essayé » qui sonna comme une pique bien placée.

- Tu es dure, Vic !

- Il n'y a que la vérité qui blesse, Maxine. Bon allez, je vous laisse, (elle se tourna vers sa petite amie) et fais-moi signe pour ce soir dès que tu es libre…

- Non, attend ! L'arrêta Kate en tendant le bras dans la direction de Victoria. Ce que j'ai à dire vous concerne toutes les deux en vérité…

Victoria arqua un sourcil, figée dans sa récupération de sac à main, alors que Max fronçait les siens, dévisageant leur interlocutrice commune.

- Comment ça ?

De nouveau on frappa à la porte, empêchant la religieuse de répondre. Dans un énième levage d'yeux au ciel, Victoria ouvrit la porte pour tomber nez à nez avec Taylor. La blonde aux cheveux longs paraissait avoir couru pour arriver jusqu'ici au vu de son visage rougi et de sa respiration sifflante.

- Tout le monde s'est donné rendez-vous ici ou quoi ? Maugréa l'héritière Chase avant de tourner sa tête par-dessus son épaule pour capter le regard de Max. La prochaine que je te dis que je veux être tranquille avec toi, si tu pouvais éviter d'inviter toute l'école ce serait sympa…

La petite photographe lui répondit par un haussement d'épaule qui signalait sa non-implication dans cette histoire.

- Vic, je savais que tu serais là ! Il faut que je te montre un truc, ça ne pouvait pas attendre, fit Taylor sérieusement avant de se mettre sur la pointe des pieds pour faire un signe à Max par-dessus l'épaule de Victoria. Salut Max ! Ca va bien ?! Et… salut Kate ? Ajouta-t-elle avec une voix un peu plus aigüe qui marquait sa surprise.

Elle haussa les sourcils, ne comprenant pas ce que cette dernière faisait là alors que Victoria s'était vantée plus tôt d'avoir un rencard qui l'attendait.

- Ménage à trois ? Questionna-t-elle en ramenant son regard sur Victoria.

- Tay', ta gueule putain, gronda la blonde en se pinçant l'arête du nez, fatiguée par la tournure que prenait la situation. Qu'est-ce que t'avais de si important à me dire qui ne pouvait pas attendre ce soir ?...

- Quelque chose qui ne va pas te plaire…

Pour accompagner ses propos, Taylor tendit son smartphone à sa meilleure amie avec une moue désolée. Durant toute sa course pour atteindre la chambre de Max, elle l'avait tenu serré au creux de son poing. Son visage était grave. Sceptique, Victoria récupéra l'appareil pour voir s'afficher un écran noir avec une vidéo qui avait été mise sur stop. Un titre en lettres blanches s'afficha en haut à gauche quand elle tapa dessus : « Victoria's Secret : Fashion Gay Show ». Son sang ne fit qu'un tour. Sans qu'elle n'en comprenne vraiment la raison, la blonde se figea par anticipation de ce qu'elle allait voir. Son estomac se tordit douloureusement. Quelque chose lui disait que ce titre était très mauvais signe…

La vidéo se lança accompagnée d'un extrait musical de I'm a sinner. Victoria fronça les sourcils. L'image était floue et manquait grandement de stabilité mais on reconnaissait bien le parking de Blackwell ainsi que sa décapotable en fond. L'héritière Chase déglutit péniblement. Une caméra-cachée de Max et elle…

Sur la vidéo, la petite hipster riait et essayait de se mettre sur la pointe des pieds pour lui faire face et l'embrasser tendrement. Et si la blonde semblait se moquer d'elle au premier abord, elle ne se recula pas quand leurs lèvres se rencontrèrent. Au contraire, elle sembla même chercher le contact.

- Cette vidéo a fait le tour de toute l'école, ajouta Taylor à mi-voix alors que Victoria gardait un silence lourd de paroles, ses yeux rivés sur le film de dix secondes qui se jouait en boucle. Tout le monde l'a reçu directement sur son téléphone.

- C'est de ça dont je voulais vous parler à toutes les deux aussi, ajouta Kate, la mine contrite en dansant maladroitement d'un pied sur l'autre. J'étais avec Alyssa quand elle l'a reçue…

Victoria sembla suffoquer pendant un instant. Toute couleur avait disparue de son visage. Elle sentait qu'elle allait vomir.

- Vic ?...

Il venait de se passer exactement ce qu'elle redoutait quand elle avait refusé de protéger Max. Sa plus grande peur. Une peur qui lui explosait à la figure à cet instant précis. L'affichage de ses penchants à grande échelle. Echelle mondiale si la vidéo était en ligne. Elle venait de signer son arrêt de mort sociétal. Les mots « Je suis foutue » tournaient dans sa tête comme un vieux réflexe impossible à abattre. Elle avait craint ce jour. Elle avait tout fait pour le retarder… Et maintenant qu'il était arrivé, elle se sentait blessée à un endroit où personne n'aurait jamais dû avoir accès. Un endroit bien loin derrière ses habituels murs de protection. Et comme tout animal acculé, elle réagit par l'instinct le plus primaire qui soit. L'attaque. Quitte à tomber, elle ne tomberait pas seule.

- Vic ? Répéta Taylor, inquiète de son silence et de l'absence de conscience qu'elle percevait dans ses yeux.

- Trouve-moi quelqu'un qui s'y connait en piratage, Tay'. La personne qui a fait ça vient de signer son arrêt de mort… articula-t-elle d'une voix vide d'émotion, la mâchoire contractée. Je peux te promettre qu'elle va souffrir.

Taylor allait acquiescer, sa loyauté envers la riche héritière la poussant à se ranger à ses côtés pour la couvrir, mais elle fut devancée par la châtain dont la voix les interrompit toutes les deux.

- Victoria… plaida Max en s'approchant doucement de sa petite amie pour voir la vidéo à son tour. Calme-toi.

Elle attira son regard de jade. Consciente de sa colère contenue, la jeune photographe caressa son avant-bras avec une délicatesse infinie, alerte à sa moindre réaction de rejet. La blonde la laissa faire, semblant être dans un état second. Sans la brusquer, Max écarta ses mains pour pencher le smartphone dans sa direction. La vidéo se relança depuis le début. Elle garda le silence pendant toute la diffusion sentant Victoria se tendre à ses côtés. Quand elle eut terminé, elle releva la tête pour dévisager toutes les personnes dans la pièce.

- Franchement… Je vais être honnête. Celui ou celle qui a fait ça ne mérite pas un oscar. Il n'a pas su saisir mon meilleur profil. C'est à peine si on me reconnait. Et en plus la qualité est à chier.

Réalisant qu'elle venait de dire un gros mot, Max se tourna vers Kate :

- Je suis désolée, fais comme si tu n'avais rien entendu.

Eberluée par une réaction à laquelle elle ne s'attendait pas, la grande blonde aux cheveux courts abaissa sa tête dans la direction de la barrista comme cherchant à comprendre le sens de ses paroles. Mais Max la regardait en retour avec une indifférence absolue. Son regard bleu envoûtant brillait par son absence de crainte quant aux conséquences désastreuses que cette vidéo allait engendrer pour leurs avenirs respectifs.

- Bah quoi ? Reprit Max en haussant de nouveau les épaules. On est quand même dans une école d'art, et celui ou celle qui a filmé ça s'y est pris comme un manche.

- Je crois que tu ne comprends pas bien la situation, fit Victoria en fermant les yeux une seconde pour garder son calme.

Elle n'était pas d'humeur à se perdre dans de longues explications et l'insouciance de Max pouvait être mignonne à certains moments mais pas à cet instant précis. Elle reprit pourtant d'une voix détachée de colère à l'encontre de la châtain :

- Cette vidéo nous expose devant toute l'école, aussi bien toi que moi. On va avoir droit à toutes les remarques et critiques possibles sur ce que l'on représente, sur ce que l'on… est… finit-elle par lâcher avec une pointe de honte dans la voix. Tu peux dire adieu à ta tranquillité, adieu à ta vie d'avant…

On aurait dit qu'elle avait honte d'avoir honte. Honte d'avoir à se justifier.

- Moi je crois que c'est toi qui ne comprend pas bien la situation, l'interrompit la petite hipster en plongeant son regard dans le sien pour effacer le monde qui les entourait. La personne qui a fait ça est une fouille-merde et c'est triste pour elle. Les gens sont bêtes, immatures et ils ont besoin de faire du mal aux autres pour se sentir mieux dans leurs baskets.

- Non mais, ce que je veux dire, Maxine, c'est…

- Non, écoute-moi jusqu'au bout !

Victoria se tut, ravalant son objection.

- Je ne veux pas faire de scène devant Kate et Taylor, mais dis-moi seulement si ce que je vais dire est vrai ou pas, reprit Max en marquant un temps pour recentrer l'attention de la blonde sur elle. Quand tu m'as présenté tes excuses après ce qui s'est passé au coffee shop, tu m'as dit que tu étais prête à renoncer à tout pour ne pas me perdre. Tu le pensais vraiment ?

- Maxine… là n'est pas le suj…

- Je t'ai posé une question, Victoria. Tu le pensais vraiment ? Oui ou non, ce n'est pas plus difficile que cela.

- Oui, chuchota-t-elle.

- Et est-ce que me parler autrement que comme une sous-merde à Blackwell t'a détrôné ? Est-ce que ça a changé ta vie ?...

- Tu connais déjà la réponse.

- Mais je veux te l'entendre dire. Est-ce que me fréquenter, en tout bien tout honneur, bien entendu, dans des lieux publics te fait te sentir mal ?... Parce que, même avec la qualité pourrie de cette vidéo, j'arrive à deviner un sourire sur ton visage.

Victoria garda le silence, baissant les yeux sur le smartphone qu'elle tenait toujours dans sa main gauche. Elle regarda la vidéo se jouer encore une fois.

- Je ne sais pas pourquoi cette vidéo a été faite, reprit Max sur un ton plus doux. Mais il est clair, vu le titre, que l'objectif est de te faire du mal à toi. Je sais que la Victoria qui dirige Blackwell a envie de se venger… envie de montrer qu'on ne peut pas faire saigner Dieu impunément. Mais… Tu sais ce qui ferait encore plus mal en retour ?

La petite brune releva le menton de son opposante.

- Que tu n'en ais rien à faire, répondit-elle à la question muette qu'elle put lire dans les yeux de la riche héritière. Que tu assumes pleinement tes sentiments et que tu passes au-dessus des remarques désobligeantes qu'on pourra te faire. Car tu es Victoria Chase et que, quoique tu fasses, tu t'attireras toujours l'envie et la jalousie – Max marqua une pause pour reprendre son souffle – Tu ne peux pas désamorcer une bombe qui a déjà explosée… Par contre, tu peux en limiter les dégâts et réagir de sorte à reprendre le contrôle.

Elle pointa un doigt ver son cœur.

- Ca, tu peux le faire si tu assumes cette part de toi, cette part qui a besoin de s'exprimer pour que tu te sentes complète. Et si tu assumes ça, alors plus personne ne pourra te blesser à son propos. Après tout, qui peut te faire du mal sur quelque chose dont tu n'as rien à battre ?... Tu deviens intouchable. Et tu détruis ceux qui pensaient te faire du mal.

Un silence de plusieurs secondes lui répondit. Un silence durant lequel Victoria dévisagea la petite hipster comme désirant imprimer dans sa mémoire le moindre détail de son visage parfait. Ses taches de rousseur détouraient avec élégance ses traits fins et linéaires. Son menton formait une petite courbe qui donnait du caractère à ses lèvres pincées qu'elle savait douces et qui apaisaient ses craintes. Mais ce qui fascinait la riche héritière plus que tout, c'était les yeux bleus océans qui la fixaient avec une adoration non feinte. Ce regard d'une couleur qu'elle avait très rarement croisé semblait changer et évoluer en fonction de ses humeurs. Aussi imprévisible qu'un raz de marée, il pouvait être aussi calme et beau qu'un jour en mer en plein été, comme plus froid et mordant que eaux de l'Antarctique quand elle était énervée. Et ce regard la dévorait littéralement d'affection, comme incapable de lui mentir ou de cacher ses sentiments brûlants.

- Tu sais que des fois tu dis des choses intelligentes ?... essaya de plaisanter la jeune femme en ramenant une main sur son visage pour effacer sa lassitude et la migraine qui alourdissait son jugement.

- Comment ça des fois ?

Un petit rire sans joie échappa à Victoria qui rendit son téléphone à Taylor. Cette dernière lui adressa un sourire compréhensif.

- J'essaye de te faire un compliment, accepte le sans rechigner, Maxine.

- Moi, je pense que tu devrais accorder un peu plus de crédit à ta chérie, s'amusa Taylor. Elle marque des points là.

- Heureusement que je ne te garde pas auprès de moi pour penser, argua-t-elle avec un peu plus de mordant que précédemment.

Victoria prit alors une grande inspiration en essayant de desserrer ses poings.

- Okay… Je dois avouer que chercher un coupable et de lui faire regretter d'être né est terriblement tentant… et malgré tout, j'ai bien envie de le faire…

Elle s'arrêta un instant.

- Mais tu as raison, Max – elle laissa son regard glisser sur les trois personnes présentes dans la chambre avant de revenir sur sa copine – On va devoir la jouer autrement si on veut éviter le scandale du déni et du mensonge qui finira obligatoirement par éclater un jour ou l'autre. Je ne pourrai pas toujours cacher ma situation et si ça éclate maintenant ça fera moins mal que d'ici un ou deux ans. (elle reposa son regard sur la petite hipster) Le pire c'est que je ne suis même pas vraiment en colère que l'on me voit sur la vidéo… je suis plus en colère parce que ça pourrait te faire du tort à toi alors que tu n'as rien demandé de tout cela…

Max voulut dire quelque chose mais ce fut au tour de l'héritière Chase de lui faire un petit signe qui la réduisit au silence pour aller jusqu'au bout de sa pensée.

- Il ne faut pas avoir un Q.I de 200 pour voir que cette vidéo pue la vengeance à plein nez. Utiliser la marque de Victoria's Secret c'est retourner ma personnalité contre moi-même. Or, si on s'en tient à ma liste de « méfaits », dit-elle en accompagnant ses paroles de mimiques de parenthèses des doigts, et de personnes assez intelligentes pour faire ce jeu de mots, notre liste de suspects se réduit sensiblement. Il n'y a que deux personnes qui auraient vraiment eues une raison valable de faire cette vidéo… et l'une d'entre elle se trouve dans cette pièce.

Immédiatement les trois jeunes femmes tournèrent la tête pour s'observer mutuellement. Max fixa Taylor qui leva les mains pour clamer son innocence mais Victoria stoppa rapidement le procès en pointant Kate du doigt.

- Toi.

La petite religieuse eut un mouvement de recul effrayé.

- Moi ? M-mais, je…

- Kate ne ferait jamais ça ! La défendit Max en se plaçant entre sa petite amie et la concernée.

- Tu aurais pu faire la vidéo, répéta Victoria en articulant chacun de ses mots, si tu veux tout savoir, je suis la première à penser que tu avais une bonne raison de le faire. Tout le monde aurait compris ton désir de te venger pour ce qui est arrivé à la dernière soirée du Vortex Club…mais je t'élimine de ma liste de suspects car tu es trop proche de Max pour pouvoir lui faire du tord. Et tu n'as pas assez de culot pour faire ça…

Kate inspira de nouveau normalement alors que la petite hipster lui posait une main sur l'épaule pour s'excuser à la place de Victoria. Elle pouvait paraître vraiment sans pitié des fois même si c'était juste sa façon de parler et sa logique mathématique qui la rendait ainsi.

- Tu penses à qui alors ? Demanda Taylor, dubitative. Me dis pas que… noooon…

Son regard se figea dans la réalisation comme ayant reçu une lumière divine.

- Juliet ?

- Bingo, répondit son amie en claquant des doigts. Je vois que tu penses pareil que moi.

- Ah c'est vrai qu'à sa place, je serais toujours en colère contre toi et j'aurais voulu te faire payer le coup de Zack'… réfléchit-elle à haute voix.

Victoria se caressa la lèvre inférieure en réfléchissant et fut interrompue dans ses pensées quand Taylor éclata subitement de rire. Ramenant son regard sur elle, elle arqua un sourcil pour lui demander de s'expliquer sur la raison de son hilarité.

- Non mais sérieusement, je trouve ça ironique comme situation. Si tu te mets à la place de Juliet, j'entends.

- Comment ça ?

- Bah, elle se fait voler son mec à l'aide d'un seul sexto alors qu'elle fantasme dessus depuis le collège, et la fille qui le lui vole est gay qui plus est ! Avoue qu'elle doit avoir les boules !

Pour toute réponse, l'héritière Chase roula des yeux avec un sourire en coin sarcastique. L'idée lui plaisait bien. Son côté Queen Bitch avait tendance à reprendre le dessus quand elle pouvait écraser la médiocrité d'un coup de talon. Et actuellement, elle réfléchissait à comment retourner la situation à son avantage tout en ridiculisant la journaliste de Blackwell. Il était triste de voir que celle-ci ne pouvait même pas faire un reportage vidéo correct. Sa carrière dans le journalisme risquait de ne pas être très longue. Enfin, si elle commençait un jour.

Toujours dans ses pensées, et ignorant Max et Kate qui discutaient d'une solution pacifique assises sur le lit, Victoria balaya la chambre de la petite hipster du regard avant de s'arrêter, une idée en tête. Les yeux braqués derrière sa petite amie, elle fixa le mur recouvert de photos avec une étrange satisfaction.

- Maxine ?

- Oui ? Répondit la petite hipster en reportant son regard sur la blonde qui venait de l'appeler. Oh… c'est quoi ce sourire mauvais ?...

- Je viens d'avoir une idée.

- Je vois ça… et excuse-moi mais ça ne me dit rien qui vaille.

Victoria fit signe à Taylor d'approcher d'un petit mouvement de tête.

- J'aurais besoin que tu récupères mon Nikon dans ma chambre. Tu peux aller le chercher s'il te plaît ? Je te passe les clés.

- Ouais… okay ?

- Victoria, l'arrêta Max alors qu'elle allait remercier son amie. C'est quoi ton plan ? J'aimerais bien comprendre…

La Reine de Blackwell redressa légèrement son menton. Sa posture s'était faite plus rigide et Max nota qu'elle semblait avoir retrouvé sa confiance en elle. Un sourire mesquin qu'elle lui connaissait bien pour l'avoir vu plusieurs fois s'adresser à elle, flotta sur ses lèvres.

- On va avoir besoin de mettre ton talent pour les selfies à contribution. Pour une fois que ça peut servir.

Max fronça les sourcils dans une mine interrogatrice qui signifiait qu'elle attendait plus d'informations. Victoria se plia à sa question muette :

- S'ils veulent des photos de nous et avoir le scoop de l'année, autant le leur donner avec une image de qualité. On va faire une photo qu'on va poster sur instagram et bien laisser sous-entendre à Juliet qu'on ne fait pas le travail à moitié.

- Tu veux poster une photo de nous ? S'étonna la petite brune. Genre… de nous ?

- Je veux juste une belle photo avec une vraie composition qui puisse faire passer un message, pas un truc gnagnan avec un bisou si tu te poses la question. On est dans une école de photographie, autant se servir de ce que l'on a appris ici. Dis-moi comment tu verrais le cliché, toi ?

Durant une infime seconde, Max fut surprise que la Grande Victoria Chase daigne lui demander son avis en matière de cadrage. Elle la regarda d'ailleurs avec des yeux ronds. Mais devant sa mine décidée, un sourire d'une oreille à l'autre fendit son visage.

- J'ai quelques idées, oui !

##

Installée confortablement dans son lit avec Max dans ses bras, Victoria avait beau tenter d'ignorer son portable, elle ne pouvait s'empêcher de checker les notifications instagram qu'elle recevait toutes les cinq minutes.

- Du nouveau ? Demanda la brune, comprenant le besoin de sa petite amie de protéger sa réputation qui était en train d'en prendre un coup.

- On vient d'atteindre les 102 likes… s'étonna Victoria, le cœur battant plus fort qu'à la normale. Ca ne fait même pas une demi-heure que la photo est en ligne.

- Et ça te surprend vraiment ? Sourit gentiment la brune en déposant un baiser sur la joue de la riche héritière.

- Bah un peu quand même… je suis habituée à avoir de nombreux likes, mais je ne pensais pas qu'une photo de… deux filles ensemble, se reprit-elle en hésitant sur la dénomination à utiliser, puisse faire autant de bruit. Positivement j'entends.

- Que veux-tu ? Gay is the new black, rigola la barrista devant la mine inquiète qui cherchait du réconfort. Bienvenue dans la dernière trend, Vic. Un peu plus et tu vas devenir hipster.

- Retire ce que tu viens de dire…

- Jamais ! Tu es à la mode !

Un petit silence suivit ses propos avant que Victoria ne le brise de nouveau :

- C'est vrai que ça se passe bien pour le moment. Mieux que je ne le pensais, même… mais ça ne veut pas dire que tout le monde va l'accepter comme ça, mes parents notamment... s'assombrit-elle.

- Mais ils ne sont pas là actuellement. Nous, nous le sommes. Ensemble ici et maintenant.

- Ca ne veut pas dire qu'ils n'émettront pas un jugement.

- Victoria, commença la petite brune en entrelaçant ses doigts avec ceux de sa petite amie.

Elle attira son regard immédiatement. Il brillait d'incertitude malgré le petit sourire d'apparat qu'elle portait avec faiblesse, preuve qu'elle essayait de faire confiance à Max.

- Ces gens, peu importe que ce soit des élèves de Blackwell, tes parents ou des inconnus que tu croiseras dans la rue… ils n'ont pas le privilège de vivre nos vies, de ressentir ce que nous ressentons, ni de te voir à la manière dont je te vois. (elle marqua une pause pour caresser du bout des doigts la main de l'héritière Chase) Tu es belle Victoria. Talentueuse. Forte. Déterminée. Tu brilles d'une lumière incroyable malgré cette indécision récurrente dans ta vie. Mais surtout, ce qui m'a attirée vers toi, c'est que tu es une personne profondément gentille bien que tu essayes de le cacher pour te protéger.

Elle marqua une pause pour reprendre son souffle.

- Tes parents pourront te juger, certaines personnes de ton entourage le feront aussi, c'est une évidence, mais… L'avis des autres ne compte pas. Certains te tourneront le dos, certains te colleront une étiquette sur le front disant « lesbienne » et des fois ce sera dur à supporter. Des remarques tu en auras. Mais tu en aurais aussi si tu disais être musulmane ou végétarienne. Les gens ont besoin de juger, de critiquer pour tout ce qu'ils jugent différent de leur conception de la normalité, mais… Ils ne feront que passer dans ta vie. Le seul avis qui compte, c'est le tien. Ce que toi, tu penses, la manière dont tu te vois. Tu as des années et des années qui t'attendent devant toi, et si tu vis selon des principes dictés par les autres, tu ne seras jamais heureuse. Tu ne serais jamais toi. Et pour être toi… Pour être la personne magnifique que je vois qui a peur d'écouter la voix au fond d'elle, il faut te faire confiance. Tu es gay, et alors ?... Ca peut être terrifiant de s'assumer, ça peut faire mal, mais faire semblant d'être une personne que tu n'es pas sera mille fois plus douloureux. Et le pire, c'est que tu ne pourras jamais en vouloir à personne d'autre qu'à toi-même parce que tu seras heureuse dans le privé avec moi, mais tu vivras un enfer sitôt la porte menant à l'extérieur passée. Et Vic… tu mérites d'être heureuse et de ne pas te sentir honteuse de qui tu es. Tu es parfaite ainsi.

Victoria sentit son cœur accélérer alors que ses yeux s'étaient tournés vers leurs mains jointes.

- A quoi tu penses ?... demanda la châtain après un petit silence.

- Que tu es trop bien pour moi, murmura-t-elle de manière presque inaudible. Je me demande comment tu peux arriver à voir autant de bon en moi.

Max rit doucement, presque aussi discrètement que le murmure qui venait de quitter les lèvres de sa copine.

- Je t'offrirai un miroir pour ton anniversaire pour que tu puisses te regarder en face. Peut-être qu'ainsi tu verras ce que je veux dire, sourit-elle.

- Je vois surtout à quel point j'ai changé ces derniers mois… en bien j'entends ! Ajouta-t-elle devant le regard curieux que Max lui retourna. Depuis que je te connais, et bien avant qu'on commence à sortir ensemble, tu m'as poussée à avancer. Discrètement. Silencieusement… Tu n'arrêtes pas de me mettre face à mes limites, mes barrières et mes contradictions. Je me sens une personne meilleure grâce à toi… plus vraie.

Max esquissa un tendre sourire qui signifiait que tout le plaisir était pour elle.

- Merci.

La blonde expira un soupir tendu qui reflétait les nœuds d'appréhension qui enserraient son estomac. Elle serra un peu plus fort Max contre elle, ses yeux se reposant sur la photo qu'elles avaient pris plus tôt dans la soirée. Une image toute simple où elles étaient toutes les deux prises en légère plongée devant le mur aux photos de la brune. Leurs visages souriants étaient surplombés par la guirlande à la douce lumière tamisée de la chambre donnant un charme particulier au cliché. Victoria avait alors écrit en commentaire « I've never expected to fall for someone like her. Life is Strange… » suivi de plusieurs hashtags qui avaient su attirer le regard du monde au-delà de son cercle de followers.

Plusieurs commentaires fleurissaient déjà.

Taylor, en première, évidemment. Elle avait dû rafraîchir son fil d'actualité jusqu'à ce que la photo soit mise en ligne. Victoria lut le commentaire à haute voix : « Ah en voilà de la qualité image ! Enfin quelqu'un qui sait se servir de son appareil contrairement à d'autres amateurs ! ». Max ricana d'une manière bien trop adorable pour que ce soit vraiment sadique, réchauffant le cœur de la blonde. Malgré elle toujours inquiète, elle se tenait à l'affut des réactions qui approuvaient les dires de la fille Christensen qui ne cessaient d'apparaître. Au moins, la vengeance à l'encontre de Juliet était propre, non haineuse. La Reine de Blackwell n'avait même pas eu à se salir les mains pour la viser directement à la jugulaire.

Ca, c'est fait. Voilà pour toi, Watson.

A la surprise de Victoria, le second commentaire n'avait été écrit par personne d'autre que Nathan. Voir son nom apparaitre lui fit l'effet d'une pierre jetée dans son estomac en prévision de ce qu'elle allait lire. Ses mains se mirent à trembler légèrement. Mais, Nathan balaya ses doutes sur un « Tant que je suis premier dans ton cœur, je peux accepter qu'une hipster essaye de me concurrencer. » accompagné d'un smiley.

Abruti, tu m'as fait peur.

Son approbation, et sa demande de pardon soulagèrent Victoria comme jamais, lui retirant un poids énorme de la poitrine. Elle avait eu peur du rejet du jeune homme suite à leur conversation – houleuse – sur le fait d'arrêter de bizuter Max. Il lui prouvait aujourd'hui qu'il était passé outre. Leur amitié allait au-delà de ce genre de conflits.

- Je la trouve plutôt bien en plus cette photo, commenta Max en observant également le cliché.

Victoria ne lui répondit pas. Elle fixait l'écran de son iPhone comme si tout cela était détaché de sa réalité. Avoir dévoilé cette partie d'elle lui paraissait tellement étrange… cela provoquait en elle des sentiments paradoxaux. D'un côté elle était euphorique, soulagée, extatique, et de l'autre complètement effrayée, dans la peur des conséquences qui allaient irrémédiablement s'ensuivre. Et pourtant… elle recevait des commentaires loin d'être haineux et dégradants comme elle s'y attendait au premier abord. La photo devait déjà avoir fait le tour des réseaux de l'école vu les notifications qu'elle recevait.

- Je me dis juste que pour notre première photo ensemble, on aurait pu la prendre au Starbucks, ajouta la petite hispter d'une voix pensive. Ca aurait eu un impact encore plus grand, enfin, du moins une signification encore plus forte pour nous.

Victoria esquissa un petit sourire du bout des lèvres. Pour la première fois depuis le début de la soirée, il était sincère.

- On aura tout le temps d'en faire d'autres là-bas. Etonnamment, et je dis bien étonnamment, je ne me suis pas encore lassée de toi.

- Serait-ce une manière détournée de me dire que nous sommes officiellement ensemble ? s'amusa Max, son sourire s'élargissant.

- Disons qu'aux yeux de la loi et des codes de bienséance sociale, j'émets mon droit royal d'exclusivité sur ta personne à durée indéterminée, argua la blonde avec son petit air arrogant qui se trahissait par son regard affectueux.

- Je sens qu'on va encore devoir négocier sur les termes de ce contrat…

Pour toute réponse, Victoria se pencha vers les lèvres de Max qu'elle embrassa doucement. Celle-ci ferma les yeux pour se glisser contre le corps de la riche héritière et l'attirer à elle jusqu'à ce que leurs corps s'enlacent entièrement.

- Tu es à moi, sourit la Reine de Blackwell contre ses lèvres.

- Tu es une sale gosse de riche capricieuse, répliqua Max sans se démonter bien que ses mots susurrés contre sa bouche la faisaient frémir d'envie. Je ne suis à personne !

- Je t'ai déjà dit que « personne » était mon deuxième prénom ?

- Je croyais que c'était Maribeth…

- Tu t'es mal renseignée.

Un petit silence suivit sa réplique.

- D'ailleurs… comment tu sais ça ? fit-elle subitement.

Max lui adressa une grimace qui signifiait « Oups… grillée ».

- Maxine…

- Il se peut – par hasard – qu'un soir je sois entrée dans le bureau du principal avec Chloé et que ton dossier scolaire se soit trouvé dans la pièce ? Sourit-elle en essayant de se montrer innocente.

- Caulfield. Je vais te tuer.