Chapitre 5

David ne pouvait plus bouger, ce qu'il venait de voir l'avait scotché sur place. Plus moyen de penser correctement, il avait vaguement enregistré, avant d'ouvrir la porte, que la chambre, même si elle était la dernière du service était encore dans l'espace maternité. Il n'y avait pas prêté attention tout de suite, son esprit étant entièrement focalisé sur l'état de santé de son ami.

- David, enfin qu'est ce que tu as ? Tu veux bien me laisser passer ?

Incapable de parler il fit un pas de côté pour permettre à sa collègue de recevoir le choc de sa vie, les gens commençaient à les regarder bizarrement dans le couloir et cela ne s'arrangea pas quand Megan eut la même réaction que lui. Elle avait ouvert la porte avant de la refermer aussitôt murmurant un vague « Excusez-moi Madame, je me suis trompée de chambre ». David aurait certainement trouvé ça hilarant s'il n'avait pas eu l'impression de rêver tout éveillé. Maintenant qu'il y pensait, ça devait être ça, il devait encore être dans son lit, il rêvait et son réveil allait sonner d'un moment à l'autre, il se mit à rire nerveusement en pensant à la tête que ferait Colby quand il lui raconterait son rêve.

- Que faites vous devant la porte, vous ne voulez pas entrer ?

Les deux collègues sursautèrent en même temps, et quand il se retournèrent enfin, se fut pour se retrouver nez à nez avec un ours en peluche géant qui parlait. Plus tard, ils seraient incapables de dire, lequel des deux avait empêché l'autre de tomber, mais sur le moment le soutien qu'offrait l'autre n'était pas du luxe.

- Alors, vous n'entrez pas ?

Ce fut Megan qui retrouva sa voix en premier avant de demander d'une voix incertaine :

- Alan ? C'est vous ?

- Oui. Je suis désolé, je ne voulais pas vous effrayer, c'est vrai qu'on ne me voit pas vraiment derrière ce truc, si vous saviez le mal de chien que j'ai eu à le faire rentrer dans la voiture. Alors, vous n'entrez pas ?

- Ce n'est pas la bonne chambre !

- Comment ça pas la bonne chambre ? J'était là il y a une heure, je suis juste parti le temps d'aller chercher Teddy.

- Teddy ?

- Oui, Teddy, l'ours en peluche pour Ellie.

- Ellie ?

- Mais enfin, Megan qu'est ce qui ce passe ?

- Justement, je ne sais pas trop, vous pourriez peut-être nous expliquer ?

- Ne me dites pas que mon fils vous a fait le même coup qu'à moi ? Il vous a vraiment laissé venir jusqu'ici sans vous expliquer ?

- Nous expliquer quoi Alan ?

- Et bien pour la petite Ellie, la fille de Colby.

David savait qu'il n'aurait pas dû poser cette question et s'il n'avait pas déjà été assis dans une chaise opportunément placée là, celle qu'avait utilisé son patron deux heures plus tôt, il serait probablement tombé à la renverse. A côté de lui, Megan semblait soutenir le mur, à moins que ça ne soit l'inverse. Ils se mirent à bafouiller en même temps :

- Ell…. La… La fil…. La fi… fi…. Colby ?

- C'est vrai que le choc initial est rude, mais venez, entrez, je vais faire les présentations.

Encombré par Teddy, Alan dû s'y reprendre à deux fois avant de réussir à ouvrir la porte et il lui fallut encore deux autres essais pour arriver à le faire passer par la porte. Derrière lui, les deux collègues de son fils semblaient avoir décollé de la planète terre pour rejoindre une autre galaxie. A l'intérieur de la chambre, rien ne semblait avoir changé, Ellie dormait toujours à poings fermés, un doigt de son père fermement serré dans l'un deux, Colby quant à lui, était couché sur le côté, le pauvre il aurait certainement une belle crampe en se réveillant, pas facile de rester la main étendue aussi longtemps sans en ressentir les conséquences.

- Chut, entrez. Ne faites pas de bruit, ils dorment.

Megan suivit de près par David se pencha sur le berceau de la petite. Difficile de croire que cette petite merveille était la fille de leur ami.

- Voici Ellie Tessa Granger. Elle est magnifique, n'est-ce pas ? Que diriez-vous de descendre boire un café à la cafétéria et je vous explique tout ?

- On vous suit.

- Megan, vous venez ?

- J'arrive.

Elle effleura la joue du bébé avant de s'arracher à sa contemplation et suivit à contre cœur les deux hommes qui étaient déjà sorti de la chambre.

Une fois confortablement installé, un café chaud à la main, et n'ayant réussi à tirer que des réponses monosyllabiques des deux jeunes gens en face de lui, Alan commença son récit. Cette fois c'était lui qui avait la très nette impression de venir d'une autre planète et de parler une langue étrangère, mais il se lança tout de même.

- Je suis arrivé il y a deux heures, j'étais dans le centre, au refuge pour les sans-abri, je leur donne un petit coup de main de temps en temps. Enfin bref, comme je n'avais pas pu voir Colby hier soir, je me suis dit que je pourrais éventuellement passer voir si on m'autoriserait à une visite. J'ai eu le même choc que vous, j'ai dû rester assis sur cette chaise à côté de la porte pendant dix bonnes minutes, les infirmières m'ont ensuite dit que j'étais le deuxième à avoir fait un malaise devant cette chambre aujourd'hui.

- Don ?

- Oui, Don ! Toujours est-il que la marraine de la petite est venue me parler ensuite. C'est la chef du service maternité, c'était aussi la meilleure amie de Tessa, la mère d'Ellie.

- C'était ?

- Tessa Ryan est morte il y a trois mois, elle a été renversé par un mari qui sortait d'ici alors qu'il venait de perdre sa femme.

Alan venait enfin de finir son récit et un seul regard aux deux personnes en face, lui suffit pour comprendre qu'ils mettraient plus de temps que lui à s'en remettre. David semblait le plus abattu des deux.

- Je comprends mieux certaines choses maintenant.

- Je vous demande pardon Megan.

- Colby a eu quelques passages à vide au cours de ces dix derniers mois, je comprends mieux maintenant. Ce que je ne comprends pas en revanche c'est qu'il n'ait jamais rien dit à personne.

David s'était levé à ce moment-là, incapable d'en entendre plus. C'en était beaucoup trop pour lui, il pensait encore jusqu'à il y a pas très longtemps que Colby était son meilleur ami. Dire qu'il avait culpabilisé de ne pas s'être montré plus attentif. Il n'entendit pas Megan approcher mais sentit qu'elle lui posait une main sur l'épaule.

-David ? Ça va ?

- Tout va très bien, merveilleusement bien !

- On peut en parler si tu veux.

- Parler de quoi ? Il n'y a rien à dire !

- David, et si tu laissais à Colby une chance de s'expliquer.

- De nous expliquer quoi, qu'il a une petite fille de trois mois, que la mère de la petite est morte ? Attends, j'ai certainement du oublier quelque chose !

- Ne crois pas que ça été facile pour lui. Tu t'imagines ce qu'il a du endurer ces dix derniers mois en gardant tout ça pour lui ? Le fardeau que cela a dû être ?

-Personne ne lui a demandé de le faire. En général, c'est à ça que serve les amis.

- David, je suis sûre qu'il y a une bonne raison à tout ça. On remonte avec Alan, il dit que les infirmières ne vont pas tarder à réveiller Colby pour voir si sa contusion cérébrale ne s'est pas aggravée. C'est l'occasion de lui parler.

- Je crois que je n'en ai pas très envie.

- David, s'il te plait, je te le répète, ne crois pas que cela soit facile pour lui. Viens avec nous.

Il se laissa entraîner par Megan, pour lui faire plaisir, même si au fond de lui il était convaincu que peu importe l'explication que Colby fournirait, il ne lui pardonnerait pas sa trahison.

La montée en ascenseur se fit dans le silence le plus total, Megan ne voulait pas risquer de dire quelque chose qui ferait changer David d'avis. Elle aussi était déçue, Colby n'avait pas jugé bon de se confier, elle aussi pensait, apparemment à tort, qu'il formait une équipe soudée et qu'en cas de problème, ils n'hésiteraient pas à se confier l'un à l'autre. Quelle désillusion !

En arrivant dans le couloir, ils aperçurent Don faire les cents pas devant la chambre. Ils avaient du passer pas mal de temps à la cafétéria, pour qu'il soit déjà là.

- Où étiez-vous tous passés ?

- Ton père nous a fourni l'explication que tu as omis de nous donner.

- Je pensais que Colby serait à même de la fournir.

- Peut-être mais tu aurais quand même pu nous épargner le choc initial.

- Personne ne me l'a épargné à moi !

- Don Eppes ! Tu changes de ton immédiatement !

- Ecoute Papa, je crois que tout le monde a été secoué par cette histoire, si on essayait tous de se calmer. On pourra voir Colby dans cinq minutes, les infirmières sont en train de s'assurer qu'il a toujours toute sa tête.

- J'en doute !

- David !

Don, Alan et Megan s'étaient exclamé en même temps. Personne n'avait entendu la porte s'ouvrir derrière eux.

- Vous pouvez entrer. Par contre ne restez pas trop longtemps, ces deux-là ont toujours besoin de repos. Je reviens dans cinq minutes avec le biberon d'Ellie.

-Merci.

Colby était assis dans son lit, quand ses collègues et amis entrèrent dans la pièce. Il était pâle et ne se sentait pas très bien, de la sueur lui coulait dans le dos, il savait qu'il devrait un jour ou l'autre affronter ce moment, il l'avait simplement imaginé différemment. Le repas qu'il avait prévu pour la semaine prochaine aurait du lui permettre de leur présenter Ellie dans de biens meilleures conditions. Maintenant qu'il était au pied du mur et pas à cent pour cent de ses capacités intellectuelles et physiques, il avait du mal à lever le nez de son couvre-lit. Quand il le releva enfin, Don était au pied de son lit et le regardait sévèrement, Megan était penché au-dessus du berceau d'Ellie qui lui avait enfin rendu son doigt. David quant à lui était planté devant la fenêtre, le regard perdu dans le vide, les mains dans les poches et les épaules voûtées comme s'il portait tout le fardeau de la terre. Le seul qui semblait avoir un comportement normal était Alan, il s'était assis dans le rocking-chair de la pièce et regardait Megan et Ellie d'un œil bienveillant. Le silence sembla s'éterniser, personne n'osant prendre la parole, il savait bien que c'était lui qui devait des explications à tout le monde mais il ne pouvait se résoudre à ouvrir la bouche. Finalement un léger bruit à la porte le fit sortir de sa transe, l'infirmière était de retour avec le biberon d'Ellie.

- Vous voulez que je l'emmène pour lui donner ?

- Non ! Je peux lui donner !

Megan et Alan s'étaient exclamés en même temps sans laisser le temps à Colby de répondre, l'infirmière lui tendit tout de même le biberon.

- Tenez Megan, prenez le rocking-chair se sera plus confortable pour lui donner le biberon.

- Merci Alan ! Colby, je peux ?

- Bien sûr ! Attention à sa tête.

- J'ai déjà vu et tenu un bébé avant Granger !

- Désolé !

- Ne t'inquiète pas, je ferais attention, c'est promis. Allez viens jeune demoiselle, c'est l'heure de manger.

Personne n'avait soufflé mot durant l'échange, tout le monde semblait captivé par la scène, même David avait lâché le paysage des yeux pour voir ce qui se passait dans la pièce. Colby n'avait pas quitté Ellie du regard, il savait qu'il pouvait faire confiance à Megan, mais il n'en était pas moins anxieux. Personne en dehors du personnel médical ne s'était jamais encore occupé d'Ellie. Il devrait apprendre à laisser les autres s'occuper de sa fille, une chose de plus à mettre sur sa liste des nécessités à intégrer, à croire qu'elle n'en finirait jamais. Nora lui avait dit qu'il en apprendrait tous les jours, en attendant il aurait bien besoin de savoir comment ce sortir de ce mauvais pas, maintenant qu'il avait eu l'occasion d'y réfléchir, si on lui donnait la chance de retourner en arrière, il ferait les choses différemment. On entendait maintenant que les petits bruits de succions que faisait Ellie en tétant goulûment son biberon. Megan semblait aux anges, si seulement sa fille avait le pouvoir d'apaiser tout le monde dans la pièce, il serait le plus heureux des hommes, mais il ne devait pas essayer de se décharger de son fardeau, c'était à lui d'assumer. Il se racla la gorge avant de commencer, même s'il ne savait pas vraiment par où, il était épuisé avant même de commencer et sa tête le faisait toujours horriblement souffrir.

- Je crois que je vous dois une explication.

- Tu crois ?

- Don, laisse-le s'exprimer.

- Ce n'est pas grave Alan.

- Bien on t'écoute, comment tu expliques qu'on ne découvre qu'aujourd'hui l'existence d'Ellie ?

- Je ne sais pas trop par où commencer.

- Par le début Granger, par le début.

- Bien, Nora m'a dit qu'elle vous avait expliqué pour l'essentiel.

- Exact, on veut savoir pourquoi on ne l'apprend que maintenant.

- Donnie, laisse-le s'exprimer.

- C'est assez difficile à expliquer. Quand Tessa m'a appelé pour m'annoncer sa grossesse j'ai un peu paniqué, je me sentais responsable. J'ai été abandonné à la naissance et je m'étais toujours juré de ne pas reproduire le processus, je crois que j'avais même inconsciemment décidé de ne jamais avoir d'enfants. C'est à ce moment-là que j'ai décidé de garder ça pour moi dans un premier temps, j'avais tellement honte de moi, j'étais en train de replonger dans mon enfance, comment avais-je pu être négligeant au point de concevoir un enfant qui allait forcément souffrir de cette situation bizarre. Et puis les mois ont passé, tout ce passait très bien avec Tessa, on peut même dire que je commençais à reprendre confiance, si on était capable de réagir en adulte responsable maintenant, peut-être que le bébé serait heureux. Ensuite Tessa est morte, et j'ai replongé dans mes angoisses.

- Pourquoi n'avoir rien dit à ce moment-là ? Bon sang Granger, je pensais quand même ne pas être inaccessible à ce point, j'ai toujours fait en sorte d'être à l'écoute de mes hommes.

- Je sais. En fait c'est à cause de vos regards à l'instant présent, que je ne l'ai pas fait. J'ai eu droit à ces regards pendant toute mon enfance, vous savez le regard de pitié pour le pauvre petit orphelin qui n'a pas de famille. C'est exactement le même regard que vous avez tous en ce moment et je ne voulais pas avoir à vivre ça tous les jours au bureau. J'avais juste besoin de la routine et de gens normaux autour de moi, c'est comme ça que j'ai réussi à tenir le coup. Pour Ellie, c'est pareil, j'étais persuadé de la perdre, quand je l'ai vu juste après sa naissance, elle était si petite, et tout ce que je distinguais d'elle sous le respirateur, les perfs et fils divers, c'était un tout petit morceau de son ventre rose. Quand on la voit aujourd'hui on a du mal à croire qu'elle était aussi fragile, le moindre petit microbe aurait très bien pu…

Colby ne pu achever sa phrase, il avait la gorge nouée, il s'en voulait tellement d'avoir fait comme ses parents, en abandonnant sa fille les premières semaines de sa vie… Et même si aujourd'hui il ne laisserait plus rien les séparer, il avait quand même conscience de son comportement méprisable. Cette petite n'avait pas demandé à perdre sa mère et encore moins à venir au monde, tout comme lui au moment de sa naissance et pourtant c'était bel et bien lui qui en avait fait les frais. Il avait préféré sauvegarder sa petite vie, travailler pour ne pas penser qu'il avait une petite fille mourante à l'hôpital, c'était David sans le savoir qu'il l'avait poussé à se rendre à l'hôpital ce fameux soir. Il était ensuite revenu encore et encore sans pouvoir se résoudre à entrer pour la voir de près mais au moins il était là, et même si Nora lui disait le contraire, il ne pouvait s'empêcher de penser que s'il était venu plus tôt, peut-être qu'Ellie aurait moins souffert en couveuse.

Don était en colère, il n'acceptait toujours pas qu'un de ses hommes ait préféré garder pour lui un secret aussi pesant. Depuis le jour où il avait pris en charge des séances d'entraînement de recrues à Quantico au jour où on lui avait donné sa propre équipe, il avait mis un point d'honneur à toujours être là, à l'écoute. La bonne santé mentale et la bonne entente dans une équipe pouvaient leur sauver la vie en intervention. On arrive à rien avec une équipe qui part en lambeaux, et c'est ce qu'il ressentait aujourd'hui, d'abord Dwayne Carter et ensuite Ellie, Granger accumulait les gaffes. Pour la défense de celui-ci, il pouvait dire que son explication pour Ellie était plutôt valable, l'affaire Carter quand à elle, mettrait un peu plus de temps à se faire oublier. Il décida néanmoins de faire un geste, il bougea du pied du lit et alla poser une main apaisante sur l'épaule de Colby qui regardait maintenant dans le vide.

- Je ne dis pas que je ne vais pas avoir besoin de temps pour digérer l'information et je suis désolé pour le regard, je ne voulais pas te mettre mal à l'aise ou te donner l'impression que je m'apitoie sur ton sort, parce que ce n'est pas le cas. Je suis simplement effaré par ton histoire et très déçu que tu n'es pas jugé pouvoir me faire confiance, c'est la base de tout dans une équipe, je te confie ma vie tous les jours et c'est pareil pour toi, sans cette confiance nous sommes morts. Ne recommence jamais un truc comme ça, est-ce que c'est clair ?

Don n'obtint qu'un hochement de tête en guise de réponse, mais le regard que lui lança Colby à ce moment là disait tout ce qu'il avait besoin de savoir, il lui disait qu'il était réellement désolé.

- Bien, je crois qu'il est temps de vous laisser avant qu'on se fasse jeter d'ici. Allez, tout le monde dehors. On reviendra demain.

- Merci à vous, merci beaucoup, je suis vraiment désolé. Ce n'était pas un manque de confiance vous savez, je voulais simplement que tout reste normal.

- Ecoute Colby, c'est fait c'est fait, nous allons aller de l'avant. Oublions tout ça. Tiens je te rends ta petite merveille, elle vient de s'endormir.

- Merci Megan. Alan je voulais vous remercier pour l'ours en peluche, c'est vraiment….

- Ça me fait plaisir, il s'appelle Teddy.

- Merci beaucoup.

Le seul qui n'avait pas bougé était David, tout ce qu'il venait d'entendre lui échappait encore et il était comme Don, pour lui, la confiance était la base de tout, et même s'il comprenait les motivations de Colby il ne s'en sentait pas moins blessé. Celui-ci l'interpella avant qu'il suive le reste du groupe.

- David ?

- Allez-y, je vous rejoins en bas.

Ils quittèrent tous la pièce, Megan en dernière, elle était fascinée par la petite mais elle craignait aussi la réaction de David.

- David, écoute, je suis vraiment désolé.

- Ne te fatigue pas.

- J'ai joué au con, je m'en rends compte, mais ce n'était pas dirigé contre toi, au contraire. Tu te souviens de ce soir il y a un peu plus d'un mois, celui où tu m'as emmené dans ce petit bar où il jouait du Jazz.

- Je crois que oui.

- J'avais pas été voir ma fille depuis sa naissance et j'y suis allé ce soir là après notre soirée.

- Pourquoi ce soir là ?

- Tu as dis quelque chose qui m'a fait réfléchir, j'ai bien failli tout te dire, mais j'ai eu peur de voir ta manière de te comporter changer.

- Tu aurais dû me faire confiance.

- David, encore une fois ce n'est pas un problème de confiance, c'est simplement que les gens changent sans s'en rendre compte, sans penser à mal, mais d'un seul coup ils deviennent différents et se comportent différemment parce qu'ils ont pitié de toi. J'avais un meilleur ami quand j'étais petit et quand il a su qu'il ne pourrait jamais venir jouer chez moi, parce que justement je n'avais pas de chez moi il s'est mis à changer, il passait de plus en plus de temps avec les autres enfants et au final j'ai passé toute mes récréations à jouer seul dans mon coin. Ce n'est pas vraiment une période dont j'aime me souvenir.

- C'était quoi la phrase ?

- La phrase ?

- Oui celle qui t'a donné envie d'aller voir ta fille ?

- Tu m'as dit que les occasions de réparer ces erreurs étaient trop rares pour laisser passer la chance de le faire quand celles-ci se présentaient.

- J'ai dit ça, moi ? Tu es sûr ?

- Aussi sûr qu'un et un font deux.

- Je m'épate des fois.

- Merci, David.

- On est des adultes maintenant, plus des gamins dans une cours de collège. N'oublie plus jamais que je suis toujours là pour n'importe quoi, enfin sauf pour changer les couches, là tu te débrouilleras tout seul, tu t'en souviendras ?

- Je n'oublierais plus, c'est promis. Tu es sûr pour les couches, je crois qu'Ellie a besoin d'être changé.

- Je vais te filer un coup de main comme je suis un mec sympa.

- C'est gentil. Mais qu'est ce que tu fais ?

- Je cherche le bouton d'appel pour sonner l'infirmière.

- Ah, je me disais aussi !

- Bien, je vous laisse avant de me faire jeter, je repasserai demain avec les autres.

- David ?

- Oui ?

- Merci, vraiment.

David quitta la pièce en hochant la tête, il avait dit ce qu'il avait à dire et il était content d'avoir crevé l'abcès avec son partenaire, il faudrait certainement un peu de temps avant que les choses redeviennent comme avant mais elles le redeviendraient.