Auteur : Gillian Middleton ( u/483952/Gillian_Middleton )

Titre : Memories Of Me (Souvenirs de moi)

Genre : Romance

Résumé : En enquêtant sur une malédiction de routine dans une petite ville de Californie Dean perd la mémoire. Avec seulement son frère sur lequel compter des sentiments commencent à se développer et ils ne sont pas exactement fraternels. Comment Sam va-t-il faire face à ça?

Pairing : Sam/Dean

Rating : M

Disclaimer : Les persos appartiennent aux créateurs de la série, et l'histoire à Gillian Middleton.

Avertissements : Je précise encore qu'il s'agit d'une traduction et que l'autrice de cette fic est Gillian Middleton. Si vous le pouvez, je vous suggère d'aller la lire en VO sur ce même site. Cette fic est une fic slash, traitant donc de relations homosexuelles qui iront jusqu'au lemon donc vous êtes prévenus. Inceste.

Merci à celles qui me lisent et qui ont la gentillesse de laisser des reviews! Attention, ce chapitre contient un lemon. Bonne lecture!


Partie 3 sur 4

« Je le savais, je savais que j'avais déjà entendu quelque chose comme ça. »

« Quoi ? » Dean poussa la chaise à côté de Sam et se pencha sur la vieille écriture effacée.

« C'est une affaire sur laquelle Papa a travaillé en 96 en Alabama. Ce type avait une collection d'objets venant d'un vieil hôpital qui fonctionnait avant la guerre civile. Tu sais, des outils de chirurgien et autres. »

Dean grimaça. « Erk. Qui voudrait collectionner des trucs pareils ? »

« Aucune idée. En tout cas, il y a eu une série de meurtres bizarres dans l'immeuble de ce type et lui-même était le suspect. Papa enquêtait sur l'idée que ce mec ait été possédé par les objets et les ait utilisés pour tuer ses voisins. Mais avant que le type ait pu être arrêté la collection a été volée. »

« Est-ce que papa a trouvé qui a fait ça ? »

« C'étaient des cultistes, » dit Sam, pointant du doigt la partie concernée sur la page.

Dean fronça les sourcils devant l'écriture en pattes de mouche. « Comment tu peux lire ça ? »

« Ouais, c'est un don, » rigola Sam. « En tout cas, pour faire court – ces gars croyaient qu'ils pouvaient exploiter le pouvoir de la malédiction qui hantait ces objets, quelle qu'elle soit. Et s'en servir à leur compte. Maintenant la Malédiction des Brackett est pas mal puissante, elle a tué des dizaines de personnes pendant le siècle dernier. Ils doivent penser avoir un moyen de voler ce pouvoir, et je suppose qu'ils connaissent le truc des 25 ans aussi bien que nous, donc ce n'est pas une coïncidence qu'ils soient venus la même nuit que nous. »

« Ouais, si tu le dis. » Dean ramassa la page photocopiée couverte des marques nettes que Sam avait faites au stylo. « Le pouvoir de la Malédiction peut être libéré par ceux qui vénèrent le Seigneur noir, » cita-t-il. « Ça a l'air de coller. Et maintenant ? »

« On fait le tour des magasins de sciences occultes du coin, il ne doit pas y en avoir beaucoup dans une ville comme celle-là. On trouve où les goths aiment traîner. »

« J'ai une question pour toi, mec, » dit Dean, posant la feuille sur la table. « Comment ça se fait que ces tordus puissent entrer et voler les bijoux sans problème, alors qu'il me suffit de ramasser ce foutu pendentif pour devenir M. Sans-Mémoire ? »

« Aucune idée. »

« Tu te souviens de ma théorie sur le fait que ces choses aient pu savoir que nous étions après elles ? »

Sam prit son air incrédule.

« Je sais, les objets maudits ne pensent pas. Je dis juste que quand nous les trouverons nous ferions mieux de les détruire sans les toucher, c'est tout. Qui sait ce que ça… pourrait… »

Soudain Dean agrippa son bras, assez fort pour lui faire mal et un regard vers son visage suffit à Sam pour savoir tout ce qu'il voulait savoir. Les yeux de Dean étaient écarquillés par la peur, ses muscles se contractaient déjà.

« Sam, » haleta-t-il. « Bon sang, Sam – »

« Tout va bien, » dit Sam, prenant son frère par l'avant-bras et le tirant de la chaise au lit. « Tout va bien, Dean. Je te tiens. »

« Sam ! » fut tout ce que Dean put crier avant de se courber dans l'agonie, s'arquant parfaitement tandis que le spasme secouait son corps. Sam ne put à nouveau qu'observer avec impuissance, écartant la table de chevet et tout ce qui pourrait toucher les membres agités de son frère et le blesser.

« Dean, » murmura-t-il encore et encore, impuissant face à la douleur qui s'abattait sur le corps de son frère, face aux larmes qui coulaient sur ses tempes et descendaient sur le dessus de lit sous sa tête agitée. Sam ne chronométrait pas, il n'en avait pas besoin, celle-là était plus longue que la précédente, d'une durée de presque deux minutes. Deux minutes qui semblaient être une éternité lorsque les spasmes s'évanouirent, laissant un Dean crispé, le souffle lourd, la lèvre saignant à l'endroit où il avait dû la mordre.

« C'est bon, » dit Sam d'un ton apaisant, essuyant maladroitement les larmes sur son propre visage. Quand il fut évident que l'attaque était terminée il se précipita dans la salle de bain et attrapa une serviette propre, la trempant dans de l'eau froide avant de l'essorer les mains tremblantes. De retour à côté du lit il essuya doucement le sang de la bouche de Dean et tamponna la larme écrasée sur sa lèvre avec un coin doux du tissu. « Tu vas t'en sortir. »

« Bordel de merde, » jura Dean d'un air sonné. « T'as vu ça ? »

« N'essaie pas de bouger pour le moment, » dit Sam d'une voix rauque.

« Aucun problème. » En fait il semblait que Dean ne puisse pas faire plus qu'ouvrir les yeux et ceux-ci clignèrent dans la lumière vive avant que Sam ne pense à se pencher et à débrancher la lampe du mur.

« Sam, » dit-il, sonné.

« Je suis là. »

« Je ne peux plus continuer comme ça. » Une nouvelle larme perla du coin de son œil et Sam l'enleva doucement avec la serviette.

« Je sais, mec. On va arranger ça, je te le promets. »

« Ne me ramène pas à l'hôpital, d'accord ? » murmura Dean, puis ses yeux se fermèrent et son souffle commença à ralentir tandis qu'il sombrait dans le sommeil.

Sam baissa la tête, ne se préoccupant même plus d'essuyer ses propres larmes. C'était étrange, qu'il soit assis aussi près de son frère et pourtant qu'il lui manque autant. Il ne pouvait s'empêcher de penser que Dean saurait quoi faire à ce moment-là. Ne pouvait s'empêcher de souhaiter pouvoir parler à Dean juste quelques minutes, l'ancien Dean, celui qui rendait toujours même les pires problèmes suffisamment insignifiants pour pouvoir s'en sortir.

« Rien ne t'arrivera tant que je serai là. »


Sam s'étira en se réveillant lorsqu'il sentit le poids de Dean quitter le lit. Il ouvrit des yeux embués et le scruta, remarquant aux les ombres allongées dans la pièce que le soleil allait sans doute bientôt se coucher. « Dean ? » murmura-t-il. « Ça va ? »

« Désolé, » murmura-t-il. « Aïe. » Il lécha sa lèvre inférieure enflée avec précaution. « Je ne voulais pas te réveiller. »

« Je ne voulais pas m'endormir, » dit Sam d'un ton bourru, s'appuyant sur ses coudes pour se lever. La main ouverte de Dean vint se poser sur sa poitrine et le repoussa sur le matelas.

« Ne te lève pas, » dit doucement Dean. « Tu as l'air d'avoir vraiment besoin de repos. En fait tu as l'air plus mal en point que moi. »

Sam étudia le visage de son frère à travers ses yeux bouffis par le sommeil. Mis à part les pâles auréoles autour des ses yeux et la lèvre déchirée Dean avait effectivement l'air d'aller beaucoup mieux. Bien que Sam dû se demander combien d'attaques comme celle-là le corps de son frère pourrait encore supporter.

« Pourquoi es-tu habillé ? »

« Je meurs de faim. En fait j'ai tellement faim que même un Big Mac me fait envie à l'heure actuelle. »

« Attends-moi, je viens avec toi, » dit Sam mais Dean se contenta de le repousser à nouveau.

« C'est juste à côté, mec. Je crois être capable d'aller juste à côté. »

Sam pencha la tête et se contenta de le regarder avec inquiétude. « Dean, » commença-t-il de son ton le plus raisonnable.

« Sa-am, » se moqua Dean. « Je vais bien, d'accord ? Il est probable que je ne pète pas un câble de sitôt. »

« On ne le sait pas. »

« On ne sait pas grand-chose, si ? » dit Dean calmement. « On ne sait pas où sont les bijoux, on ne sait pas qui les a pris. On ne sait pas pourquoi mon cerveau m'attaque de l'intérieur. » Il baissa les yeux vers sa main qui était toujours posée sur la poitrine de Sam, ses doigts jouant paresseusement avec le bouton de sa chemise de flanelle. « On ne sait pas pourquoi… »

Sam fronça les sourcils en entendant la douce douleur dans la voix de son frère. Soudain il fut incroyablement conscient de la chaleur de la main de Dean à travers le tissu de sa chemise. Conscient de l'intimité de la petite pièce, des ombres allongées, du sifflement calme du trafic sur la route mouillée à l'extérieur.

Il pleut jamais en Californie, mon cul, pensa Sam.

Plus que tout autre chose il était conscient de Dean comme il ne l'avait jamais été. La chaleur de sa hanche au bout du matelas. L'odeur fraîche de son souffle. Les brins de barbe dorée naissante sur ses joues. Ses yeux lorsque ses cils se soulevèrent et qu'il baissa les yeux.

« Dean, » dit gentiment Sam, secouant la tête. « Non. »

« Je sais, » répondit Dean, sa voix n'étant plus qu'un murmure. « Je sais, Sam. Tu vois, c'est la seule chose que je sais bien. » La main toujours sur le torse de Sam remonta, sur sa poitrine, sa clavicule, son épaule, la courbe de son cou. Le cœur de Sam battait, mais en dépit de sa position vulnérable il n'y avait pas de peur en lui. Pas de panique. Seulement une tristesse ineffable parce qu'il pouvait voir ce que son frère voulait maintenant, ce dont il avait besoin, ce dont il avait soif.

Et il savait qu'il ne pouvait pas le lui donner.

La main chaude atteignit sa joue, la saisit, le pouce la caressant, frôlant presque la rondeur de la lèvre inférieure de Sam. Les yeux de Dean étaient assombris, il sortit à nouveau sa langue pour toucher sa lèvre inférieure, puis il se pencha en avant, et ça aurait été tellement facile de simplement se détendre, de donner à Dean ce dont il avait besoin et ce qu'il désirait, peut-être même de rattraper ces fois où il n'avait pas pu ou voulu donner à Dean ce qu'il voulait.

Mais à la place Sam leva sa propre main et attrapa gentiment l'épaule de Dean, l'immobilisant, faisant cesser le mouvement de descente.

L'œil de Dean passa de ses lèvres à ses yeux et Sam essaya, il essaya vraiment d'y faire passer tout ce qu'il ressentait. Son amour, sa compréhension. Même son pardon.

Un pli barra le front de Dean puis ses cils tombèrent sur ses yeux. « Je sais, » dit-il à nouveau, d'un ton morne. Avec un soupir il se leva du lit et traversa la pièce.

« Dean ? » dit doucement Sam, balançant ses pieds sur le côté du lit et s'asseyant. « Je suis désolé. »

« Pourquoi t'excuser ? » dit Dean avec un rire amer. « Rien de tout ça n'est de ta faute. »

« Ce n'est pas de ta faute non plus. »

« Ouais mais je suis celui qui ressent ça, » dit Dean d'une voix rauque. « Je suis celui qui se sent comme ça. » Il se retourna brusquement. « Pourquoi est-ce que ça arrive, Sam ? »

« Je ne sais pas, » dit Sam douloureusement. Ses yeux le piquaient lorsqu'il regarda une larme silencieuse glisser sur la joue de son frère.

« Comment est-ce que je peux t'aimer autant quand tu es la seule personne sur terre que je ne pourrai jamais avoir ? » Sam tressaillit en entendant cette question angoissée. « Ce n'est pas juste. »

« Tout ira bien, » insista Sam. « Quand tu retrouveras la mémoire – »

« Quand tu retrouveras ton frère tu veux dire, » dit Dean avec amertume.

« Tu es mon frère, » dit Sam avec intensité.

« Non, je ne le suis pas, » dit Dean, sa bouche se tordant avec dérision. « Je ne suis pas lui. Pour te dire la vérité – je commence à le détester. »

« Ne dis pas ça, » protesta Sam, les yeux meurtris.

« Je le pense. Tu vas le retrouver et je ne serai qu'un souvenir dont vous rirez tous les deux. Je serai parti. »

Sam secoua la tête farouchement, sautant sur ses pieds et tendant la main vers les épaules de son frère. « Tu es lui, Dean. »

Avec une vitesse surprenante les deux mains de Dean se levèrent et le poussèrent. Pris par surprise Sam tituba en arrière, son derrière heurtant le bout du lit et glissant jusqu'à ce qu'il s'asseye brusquement sur le sol. Il leva les yeux vers Dean avec surprise mais son frère regardait ses propres mains, le dégoût de lui-même s'affichant sur son visage.

« Je ne peux plus continuer comme ça, » marmonna Dean. Il croisa le regard de Sam, secouant la tête avec déni. « Je ne peux plus continuer comme ça. »

Et avant que Sam n'ait pu faire plus que se propulser sur ses pieds Dean ouvrit la porte d'entrée à la volée et disparut dans la nuit naissante.


Ses pieds étaient nus et l'asphalte était cassant et irrégulier mais Sam continua à clopiner jusqu'à l'avant-cour sous la pluie avant d'admettre qu'il n'allait pas réussir à rattraper Dean. Poussant des jurons sur tout le chemin il boita jusqu'à la chambre et perdit de longues minutes à se sécher les pieds et à enfiler des baskets. Puis il attrapa son portefeuille et ses clés et sortit.

San Marco était une ville côtière californienne typique après la tombée de la nuit. De longues rangées de magasins et de dépôts sombres fermés, puis une rue entière allumée et pleine de vie, des voitures qui passent, des essaims de filles et de garçons qui traînent dans des coins, dans des cafés, se répandant dans la rue à l'entrée des bars. La musique imprimait un rythme puissant, différent à chaque endroit mais se combinant d'une certaine manière dans un battement régulier qui martelait les oreilles de Sam et faisait battre ses tempes.

Il repérait constamment des personnes ressemblant plus ou moins à Dean partout dans la foule, la bonne coupe de cheveux, la veste en cuir, la tenue noire, les grosses lunettes – qui porte des lunettes de soleil la nuit ?

Mais chaque fois c'était quelqu'un d'autre, parfois quelqu'un qui ne lui ressemblait même pas mais le désespoir colorait la vision de Sam, le pur désir de trouver son frère le trompant à chaque fois.

« Putain, Dean, » jura-t-il à voix basse, mais comment pouvait-il blâmer Dean pour ça ? Comment pouvait-il commencer à comprendre à quel point ça devait être difficile pour son frère ?

Et pourtant, qu'aurait-il pu faire de plus ? D'une certaine manière Dean était malade, n'avait pas toute sa tête. C'était très bien de se dire qu'il aurait pu offrir à Dean un peu de réconfort pour l'aider à traverser cette passe douloureuse. Mais bientôt – si Dieu le voulait bien – son Dean serait de retour, plus acerbe et blagueur que jamais. Et comment diable Sam aurait-il pu supporter de lui faire face s'il avait cédé à ce Dean ?

Se sentant coupable il réalisa qu'il faisait exactement ce dont Dean l'avait accusé une heure plus tôt. Les séparer dans son esprit, ce Dean, celui-là. Son Dean, et ce nouveau Dean. Cet étranger qui le regardait avec les yeux de son frère mais avec un désir que son frère n'avait jamais ressenti pour lui depuis un million d'années.

Mais j'aurais pu m'approcher de lui, pensa douloureusement Sam tandis qu'il roulait dans une rue de plus, passait à côté d'un bar dans une partie plus mal famée de la ville. Même si je ne pouvais pas l'embrasser, même si c'était hors de question. J'aurais pu passer mon bras autour de lui, lui offrir du réconfort. Un câlin.

Même au déjeuner, lorsque Dean avait recherché le réconfort de sa main, Sam s'était retiré.

L'habitude ? Les Winchester n'étaient pas une famille très affectueuse. Bien sûr Papa leur donnait des accolades quand ils étaient enfants, un « bien joué, gamin, » d'un ton bourru, un ébouriffement de cheveux qui les faisait toujours grimacer et aplatir à nouveau les mèches gênantes mais les faisait sourire intérieurement.

Mais ils avaient grandi depuis et étaient devenus des hommes. La seule fois pendant la dernière décennie où Sam pouvait se souvenir d'une étreinte de la part de son père était leur rencontre avortée à Chicago des mois auparavant.

Le souvenir lui fit monter les larmes aux yeux et il s'arrêta sur le bord du trottoir pour les essuyer, pensant à combien il avait été émotif ces derniers jours. Comment Dean rirait de lui s'il le savait. Comment il se moquerait pour le taquiner et le traiterait de fillette.

Son Dean.

« Où es-tu, Dean ? »

À quand remontait la dernière fois où il avait serré Dean dans ses bras de toute façon ? Pouvait-il s'en souvenir ? Était-ce avant que son admiration enfantine pour son grand frère ne se transforme en impatience d'adolescent face à tout ce qui faisait leurs vies ?

Combien d'argent Dean avait-il ? Pourquoi n'avait-il pas pensé à demander ? Mais Dean s'occupait de l'argent, volait les cartes de crédit dans leurs boîtes postales, créait les noms à mettre dans les logiciels, arnaquait au billard et aux cartes.

Et Sam le laissait faire – le taquinait pour ça même. Mais ne se plaignait pas lorsque ça payait les factures, renouvelait l'armurerie et remplissait la voiture d'essence.

À quand remontait la dernière fois où il avait serré son grand frère dans ses bras ? Il avait essayé de le faire le dernier jour avant de partir pour aller à l'université, quand ses poings étaient toujours serrés après cette dernière bagarre avec Papa, quand il était sorti de leur dernière planque avec son sac de voyage et 160 dollars dans son vieux portefeuille usé. Il avait essayé de prendre Dean dans ses bras alors, essayé de l'atteindre. Mais Dean lui avait seulement tapé dans la main, avait attrapé celle-ci et quand Sam l'avait lâché il y avait 200 autres dollars en billets de vingt dans son poing.

Et Dean était parti, sautant dans la voiture et laissant une odeur de caoutchouc brûlé sur la route.

Ces 200 dollars en plus avaient sans aucun doute fait la différence pour percer à San Francisco.

« Dis-moi juste que tu feras attention à toi. »


La ville n'était pas si grande, elle n'avait pas autant de bars que ça mais Sam les avait tous faits avant de décider qu'il ne pouvait plus rien faire pour cette nuit. Il était peut-être minuit quand il dirigea la voiture vers le motel et entra dans le parking. Puis il respira pour la première fois pendant les quelques dernières heures lorsque les phares avant balayèrent une forme recroquevillée sous l'auvent à côté de la porte, la tête baissée sous le froid humide de la nuit pluvieuse.

Il voulait jurer, l'insulter et crier bordel Dean, t'étais où ? Mais Dean ne leva même pas les yeux lorsque Sam sortit ses longues jambes de la voiture et lorsqu'il leva enfin un peu la tête vers lui, Sam vit l'abattement sur son visage et n'en eut pas le cœur.

Il ouvrit la porte du motel et se retira pour laisser Dean franchir le seuil, ses bottes laissant des traces humides sur le tapis.

Sam alla droit à la salle de bain et alluma la douche, attendant que la vapeur gonfle avant de se pencher par la porte ouverte. Dean se tenait toujours là où il l'avait laissé, les épaules voûtées, la silhouette parcourue de frissons.

« Dean, » dit-il fermement, tendant la main, et Dean haussa les épaules et s'avança, évitant sa main et entrant dans la salle de bain.

« Laisse la porte ouverte, » lui dit Sam. « Et pour l'amour de Dieu si tu sens une autre attaque arriver assieds-toi vite. C'est mieux que de tomber. »

La mâchoire de Dean se serra à cet ordre, ce que Sam considéra comme un bon signe. Le Dean-qui-s'exécute-en-silence était en fait plus dérangeant que le Dean-qui-veut-draguer-son-frère. Ignorant ses instructions, Dean ferma la porte derrière lui en la claquant et Sam s'écroula sur le bord du lit et laissa tomber sa tête entre ses mains. Le soulagement de retrouver Dean sain et sauf était grisant. Chaque scénario catastrophe qui était passé dans son esprit pendant les quelques dernières heures lui revint et il gémit en pensant à combien les choses auraient pu mal tourner.

Et si Dean s'était simplement volatilisé ? En attrapant un bus, en faisant du stop, quittant l'étrangeté de la vie dans laquelle il s'était réveillé et de l'inconnu qui avait passé les quelques derniers jours à l'attirer vers lui et à le repousser ?

La porte s'ouvrit et Dean apparut dans un nuage de vapeur, une serviette attachée autour de sa taille et un air irrité sur le visage. « Regarde ça, » dit-il sèchement. « Le grand garçon a réussi à se doucher tout seul sans mourir. Tu dois être tellement fier. »

« Où t'es allé ? » demanda calmement Sam.

Dean leva les yeux au ciel et s'avança d'un pas lourd avec une attitude aussi exagérée qu'il le pouvait en ayant les pieds nus et une serviette rose.

« Où j'allais aller au juste ? » râla-t-il. « C'est la raison pour laquelle j'étais furibard, pas vrai ? Je ne connais personne à part toi. »

« C'est pour ça que t'étais furibard ? » Sam inclina la tête et pouffa de rire. « Furibard ? »

« La ferme, » ordonna Dean. Il s'assit sur le bord du lit et tira son sac de voyage vers lui. « Est-ce que j'ai quoi que ce soit qui ne soit pas noir ? Oh, regarde. » Il sortit une chemise. « Gris. Protégez mes yeux de cette explosion de couleurs. »

« C'est comme ça qu'on a grandi, » dit Sam en haussant les épaules. « Les couleurs sombres ne laissent pas voir la poussière ou les taches de sang. »

« J'ai rien contre la manière dont on a grandi, mec, mais c'est une sacrée raison pour acheter des vêtements. »

« Ouais. » Sam observa Dean finalement perdre patience dans sa recherche et vider tout le sac sur le lit. Finalement il prit un short propre et un t-shirt kaki.

« Parce que le kaki est presque une couleur, pas vrai ? »

« Dean ? » dit Sam d'une voix rauque. « Je suis désolé pour tout à l'heure. »

Dean baissa les yeux vers les vieux vêtements qu'il tenait, resserrant ses mains sur le tissu usé. « Je te l'ai dit, » dit-il doucement. « Tu n'as rien à te reprocher. »

« Peut-être. J'aurais probablement pu gérer tout ça un peu mieux. Mais je veux te dire – il n'y a pas d'autre Dean, ok ? Tu es lui. Tu ne te souviens peut-être pas de tout maintenant, mais tu es la même personne – je le vois dans tout ce que tu dis. Dans chacun de tes mouvements. Tu t'inquiétais de ne pas me soutenir, mais, mec, tu étais là à chaque instant aujourd'hui. C'aurait été facile d'oublier que tu avançais à l'aveuglette, sans carte. Tu étais derrière moi comme tu l'es toujours. »

« Je suis celui qui devrait s'excuser, » admit Dean à voix basse. « Je voulais juste… » Il rougit. « Enfin, tu sais ce que je voulais. C'était pas juste de te mettre dans cette situation. »

« Rien de tout ça n'a été juste. » Sam fit passer sa main dans ses cheveux humides d'un air piteux. « Tu sais, si tu retrouvais la mémoire tu te foutrais de ma gueule pour la façon dont j'ai agi depuis le début. Comme une foutue fillette. »

Le regard de Dean vacilla jusqu'à lui. « Je ferais ça ? »

« Ouais. » Sam y réfléchit. « En fait pour quelqu'un qui admire autant les femmes tu peux être un peu sexiste dans ton choix d'insultes. »

« Je suis un chien, tu te souviens ? »

« Et un obsédé, » lui rappela Sam d'un air moqueur.

Dean lui fit un sourire de travers et Sam commença à penser que peut-être tout s'arrangerait, qu'ils s'en sortiraient.

« Demain, » dit brusquement Dean. « Enfin aujourd'hui je présume. »

« Quoi ? »

« Ces bijoux, Sam, ils pourraient être n'importe où, et tu le sais. »

« Dean – »

« Et si cette histoire de culte échoue. Si ces choses ont disparu… Alors moi aussi. »

Sam le regarda bouche bée.

« Et je ne reviendrai pas. »

« De quoi tu parles ? Nous allons briser cette malédiction, Dean. Quoi qu'il en coûte, on le fera. »

« Peut-être, » dit Dean dubitativement. « Je dis juste, si ça n'est pas le cas. »

« Mais où irais-tu ? » bredouilla Sam, essayant de se faire à cette idée. Dean ne partait pas. C'était lui qui s'en allait, pas Dean.

Dean haussa les épaules. « Loin d'ici, » dit-il simplement.

La gorge de Sam se serra. « Tu veux dire loin de moi, c'est ça ? »

« Je suis désolé, Sam, » dit Dean avec sincérité, les yeux tristes. « J'aimerais pouvoir te faire comprendre. À quel point c'est dur d'être si proche de quelqu'un et en même temps si éloigné. Je veux dire, je peux gérer le rejet. » Dean sourit à nouveau, avec sa bouche si ce n'était avec ses yeux. « Ça doit être un de ces talents que j'ai gardé même si je ne sais pas où je l'ai eu. Mais tu ne sais pas ce que ça fait, Sam, quand tu me regardes avec autant d'amour dans les yeux. Ou quand tu me touches avec une telle tendresse. Et je ne peux pas tendre la main et te toucher en retour sans que ce soit mal. »

Sam ne put qu'acquiescer, retenant ses larmes, la mâchoire serrée pour combattre la douleur.

« Tout ça, » murmura Dean, montrant la pièce autour d'eux, l'intimité de la lumière de la lampe et les draps froissés. « Je ne peux pas vivre comme ça. Je ne suis pas assez fort. Je sais que ça fait de moi un sale égoïste, et j'en suis désolé. Je sais juste que si j'essaie de rester je vais faire ou dire quelque chose qui va dépasser cette limite. »

« Tu ne devrais pas ressentir ça, » dit Sam, ses yeux le piquant douloureusement. « Tu ne devrais pas te sentir coupable d'aimer quelqu'un. »

« Pas quelqu'un, » dit Dean douloureusement. « Mon frère. J'ai vu ton visage quand tu as compris ce que je voulais. Tu étais horrifié, mec. Tu savais que c'était mal. »

Sam fronça les sourcils, tentant de se souvenir de ces instants de choc et d'horreur. Ça semblait tellement loin. « Tu sais, Dean, » dit-il lentement, tâtant le terrain. « Toi et moi nous avons eu quelques problèmes au fil des années. En fait nous ne nous sommes même pas parlé pendant plus de deux ans une fois. »

Dean cligna des yeux avec surprise. « Vraiment ? »

« Vraiment. Mais quoi que nous ayons traversé, quelle que soit la quantité de disputes et de coups bas qu'il y ait eu entre nous, je n'ai jamais douté d'une chose. » Sam leva les yeux et regarda son frère droit dans les yeux. « Que tu m'aimes. Autant que je t'aime. »

« Eh bien, » dit Dean, des taches rouges fleurissant sur ses joues.

« Tu as toujours été là pour moi, mec. »

Dean lui lança un demi-sourire peiné et Sam le regarda avec un amour infini. Il détestait ce sentiment d'impuissance. Détestait le fait qu'il veuille offrir du réconfort mais qu'il ne sache pas comment le faire sans faire empirer la situation. La peur le perçait à présent, brûlante comme de l'acide. Il était en train de perdre Dean, de perdre son frère, il pouvait le sentir s'éloigner de plus en plus à chaque instant qui passait.

Peut-être que demain, s'ils pouvaient trouver ce foutu pendentif, mettre fin à la Malédiction…

Mais à cet instant demain semblait être à des années lumière. Dans cette petite chambre minable, dans cette ville étrange. Dans une vie pleine de villes étranges. Tout ce qu'il avait maintenant c'était Dean, et il ne pouvait pas le perdre, pas pour ça, pas pour une vieille malédiction folle furieuse. Il ne pouvait pas laisser ses espérances pour le lendemain amputer sur ce qui devait être fait ce soir, maintenant, à la minute. Pour qu'ils puissent atteindre demain.

Puis soudain son chemin fut tracé devant lui et il fut stupéfait de ne pas l'avoir vu avant. Parce que Dean avait bel et bien toujours été là pour lui, même quand il n'avait pas été d'accord avec lui, même quand il aurait été très difficile de dire lequel d'entre eux deux avait agi comme le plus grand des immatures.

Et maintenant c'était au tour de Sam d'être là pour lui.

Sur des jambes soudainement tremblantes de nervosité Sam se leva et fit le petit pas qui l'amena à côté de Dean, se laissant tomber à côté de lui sur le bord du lit. Les yeux que Dean leva vers lui étaient las, vieillis, remplis de tristesse. Et de confusion.

« Sam ? »

Lentement, pour laisser à Dean la chance de se retirer, Sam tendit la main vers celle de son frère qui était lâchement posée sur le tas de vêtements sur ses genoux.

« Qu'est-ce que tu fais ? »

Déglutissant avec difficulté Sam leva la main de Dean et en effleura les jointures avec ses lèvres.

« Sam ? » dit Dean, la voix tremblante.

Sam s'humecta les lèvres nerveusement et embrassa à nouveau la main de Dean, la tournant délicatement et caressant doucement sa paume calleuse. Les doigts de Dean sursautèrent convulsivement et il leva sa main libre pour toucher le poignet de Sam, l'entourant de ses doigts et le tenant fermement.

« S'il te plaît, Sam, » dit-il d'une voix entrecoupée. « Ne fais pas ça. »

Sam sourit contre la peau chaude à cause de la douche, sentant les tremblements du corps de Dean à côté du sien, entendant son souffle court.

« Pourquoi ? » murmura-t-il, sentant Dean vaciller en sentant le souffle chaud contre sa peau sensible.

« Parce que tu ne le veux pas, » se força à dire Dean.

« Apparemment si. »

« Non, » dit Dean avec force, retirant ses mains de l'emprise de son frère. « Je ne t'ai pas dit que je m'en allais pour te forcer la main, Sam. Je n'essayais pas de te faire chanter. »

« Je n'ai jamais pensé ça, » dit Sam honnêtement. Il tendit de nouveau la main et prit doucement et délibérément celle de Dean dans la sienne à nouveau.

« Alors qu'est-ce que c'est au juste ? » dit Dean, les yeux écarquillés tandis que Sam levait la main captive et la posait sur sa mâchoire, s'y penchant avec un soupir. « Est-ce que c'est de la culpabilité ? Tu penses que tu me dois quelque chose ? Ou est-ce que c'est ta vision de l'amour fraternel ? »

Sam regarda son frère, plissant le front pendant qu'il retournait réellement les options dans sa tête avant de décider de sa réponse.

« Oui, » dit-il simplement. « Tout ça à la fois. » Prenant une profonde inspiration il se pencha en avant, gardant les yeux ouverts et observant les yeux de Dean s'écarquiller encore plus. Mais l'autre homme ne se retira pas et ça arriva, les lèvres de Sam se pressèrent contre celles de Dean et ils s'embrassèrent pendant de longs moments. C'était si chaste que c'était presque fraternel, ou ça aurait pu l'être si le regard de Dean ne brûlait pas aussi férocement lorsque Sam se retira.

« Nous sommes frères, » murmura Dean d'une voix enrouée, mettant ce fait sur le tapis, l'affirmant abruptement comme pour s'en convaincre autant que Sam.

Sam croisa son regard. « Je n'ai pas oublié, » murmura-t-il en réponse.

L'autre main de Dean se leva et il prit le visage de Sam tendrement. « Moi si. »

« Je sais. » Les yeux de Sam vacillèrent un moment. « C'est quelque chose dont nous nous soucierons demain. »

« Demain, » dit Dean d'un air perplexe. « C'est à des années lumières. »

Malgré l'intensité de l'instant Sam pouffa, s'émerveillant de voir à quel point ils étaient semblables parfois, malgré toutes leurs différences. Étrangement ça le fit se sentir mieux.

Le regard de Dean suivit le sourire à fossette et prit un grand air réprobateur. « Hé, c'est pas juste, » dit-il sur la défensive. « C'est pas juste de sortir la grande artillerie avec moi. »

« Qu'est-ce que je peux dire ? » rigola Sam. « Les fossettes marchent à tous les coups. » Il tourna sa joue dans la main de Dean, sentant la chaleur émaner de sa peau rougie. « Tu veux ça, Dean. Tu as besoin de ça. »

« Je veux que tu le veuilles aussi. »

« Alors montre-moi, » défia Sam. « Fais-moi le vouloir aussi. »

Le regard de Dean chercha le sien et Sam le croisa audacieusement, plus certain que jamais que c'était ce qu'il fallait faire.

« Je t'ai prévenu que je n'étais pas assez fort, » lui dit Dean et Sam sut que la bataille était terminée. Dean ne se battrait plus.

Étrangement c'est à ce moment-là que Sam commença à se sentir vraiment nerveux. Il pouvait sentir son cœur marteler sous ses côtes lorsque Dean ouvrit délicatement les boutons de sa chemise de flanelle. Il écarta les côtés et étudia le t-shirt gris que Sam portait dessous. « Combien de couches tu portes ? » murmura-t-il.

« Je sens le froid, » bredouilla Sam en faisant glisser ses bras hors de la chemise à manches longues.

« Je dirais que tu es trop frêle mais, mec, » dit Dean avec admiration en faisant passer ses mains sur le torse de Sam à travers le tissu fin. « Je t'ai vu sans ta chemise. »

L'admiration non dissimulée fit rougir Sam et il baissa timidement la tête tandis que Dean avait un petit rire.

« Tu rougis ? » demanda-t-il avec enchantement et Sam se sentit se tortiller. Il n'était tellement pas du genre à rougir. Après ses années d'adolescence maladroite il était en fait devenu assez à l'aise avec les femmes, se faisant aussi bien des amies qu'il attirait des amantes potentielles.

Mais il n'était pas avec une femme maintenant et il s'étonna lui-même en voyant à quel point il se sentait anxieux à cause de ça. C'était tellement important qu'il fasse ça bien, tellement important qu'il soit là pour son frère, qu'il lui donne ça. Soudain impatient il fit passer son t-shirt par-dessus sa tête et poussa Dean en arrière sur le lit, frissonnant en sentant la cuisse nue de Dean glisser contre le tissu bien lavé de son jean, de fines poussières de cheveux dorés l'effleurant doucement.

Fronçant les sourcils avec concentration Sam se lécha les lèvres et se pencha en avant, appuyant un baiser d'urgence contre les lèvres de Dean, ouvrant délibérément la bouche et passant sa langue sur la rondeur charnue.

« Aïe, » marmonna Dean et Sam sentit un pincement de honte en sentant un goût de sang dans sa bouche.

« Oh mon Dieu, je suis désolé ! » s'exclama-t-il, se roulant sur le dos, portant une main tremblante à son front et le frottant anxieusement. « J'ai oublié ta lèvre. »

« Sam, c'est bon, » dit Dean d'un ton apaisant, se soulevant un peu sur le lit et se mettant sur le coude. La lampe était derrière lui, redessinant ses cheveux, leur donnant une douce teinte dorée dans la lumière tamisée. « Calme-toi, ok ? Tu n'es pas en train de passer un test. »

Sam se détendit en entendant la douce touche d'humour dans la voix de Dean, se couchant sur l'oreiller, son regard croisant un peu anxieusement le regard vert inquiet. « Je ne veux pas foirer ça, » admit-il.

Dean posa une main sur la poitrine de son frère à l'endroit où son cœur battait férocement. « On peut encore arrêter ça, » offrit-il calmement. « C'est déjà tellement important que tu veuilles me donner ça. S'il te plaît ne fais pas quelque chose que tu regretteras plus tard. »

Et Sam considéra effectivement cette possibilité un moment, considéra l'idée de se lever de ce lit et d'aller jusqu'au sien. De s'éloigner de ce petit espace d'intimité qu'ils avaient créé dans cette petite chambre douillette. Dehors les voitures passaient sur la route mouillée et le vent soufflait une rafale de gouttes de pluie contre la vitre. Dehors se trouvait le monde réel, celui dans lequel ils n'avaient jamais eu leur place, celui dans lequel ils étaient toujours les exclus.

Sam frissonna et tendit la main, passant une grande main sur l'épaule de Dean, la fermant sur la poignée de taches de rousseur sur la peau dorée.

« Je ne veux pas arrêter ça, » admit-il. « C'est… ce n'est pas juste à propos de toi, Dean. C'est à propos de moi aussi. Moi te donnant quelque chose. Laisse-moi faire s'il te plaît ? S'il te plaît ? »

La douce inquiétude de Dean s'évanouit et ses yeux s'échauffèrent tandis qu'ils voletaient sur le visage de Sam, de ses yeux suppliants à la légère rougeur qui couvrait ses hautes pommettes à la rondeur de ses lèvres.

« Arrête-moi si ça devient trop, » dit Dean d'une voix rauque, mais il ne laissa même pas à Sam le temps d'acquiescer à cette requête tremblante avant que ses lèvres ne s'avancent et il n'y eut aucun rejet cette fois lorsque Sam entrouvrit les lèvres à cette exploration qui ne montrait aucune hésitation, sa mâchoire forte s'ouvrant lorsque la main de Dean se posa sur elle, la saisissant, la caressant.

C'était étrange, des lèvres d'homme sur les siennes, cette légère rugosité de barbe naissante, une mâchoire forte s'appuyant contre la sienne. Les formes plates d'une poitrine d'homme contre sa large cage thoracique.

Mais c'était aussi incroyablement familier parce que c'était la bouche de Dean sur la sienne, les mains de Dean qui caressaient, glissaient sur sa peau, avec une callosité délicieuse. Dean qui faisait l'amour avec sa bouche comme s'il la vénérait, tournant la tête, émettant de petits bruits de gorge.

Et Sam pouvait sentir cette familiarité à travers l'étrangeté – que c'étaient les mains qui l'avaient tenu toute sa vie, qui le relevaient quand il tombait, le soutenaient quand il titubait, l'apaisaient quand il était agité. Cette familiarité ne devrait-elle pas être malsaine, le tabou n'était-il pas brisé ainsi ? N'aurait-il pas dû sentir que c'était mal ? Le sentait-il ? À travers la familiarité, l'étrangeté, l'accord inattendu et le désir ?

Où était le mal ?

Il y eut un subtil déplacement de poids et Dean fut sur lui, autour de lui, le corps pressé contre le sien, sa peau nue et chaude transpirant d'excitation, le pouls rapide. Ses yeux étaient grands ouverts à la faible lumière de la lampe, fixés sur Sam et tellement remplis d'amour que Sam sentit sa gorge se serrer, sentit les larmes lui monter aux yeux et rouler sur ses tempes.

« Shh, » l'apaisa Dean, ses lèvres douces suivant le tracé des larmes, sa langue rêche comme celle d'un chat les goûtant. « Shh, Sam. Tout va bien. »

Ça faisait tellement longtemps qu'il n'avait pas eu la satisfaction de sentir le poids d'un amant se presser contre lui. Dean plia les hanches et un instinct que Sam ne savait même pas qu'il possédait le fit étendre les jambes, haletant en sentant la pression. Soulevant ses hanches il se pressa à travers le denim doux contre la chaleur. « C'est bon, » haleta Dean.

« C'est fait pour. » Un doux murmure alors que des lèvres talentueuses s'écrasaient de nouveau contre sa bouche puis alignaient un collier de baisers le long de sa mâchoire. Il trouva la fossette de Sam et la bénit avec sa langue, faisant frissonner et sourire le plus jeune, transformant la fossette en pli et faisant sortir un gémissement de la poitrine de Dean.

« Bon sang, Sam, » marmonna-t-il, embrassant avec ferveur le cou de Sam et descendant dans le creux de sa gorge. « Dis-moi que ça te fait du bien à toi aussi. Parle-moi. »

« Je peux pas, » haleta Sam, rejetant sa tête contre l'oreiller, courbant à nouveau le dos, recherchant cette dureté à l'endroit où il était maintenant dur, affamé, en manque. « Dean, aide-moi, » marmonna-t-il, ses mains tremblantes se tendant vers sa ceinture, cherchant les boutons pour le libérer de sa prison. « J'ai besoin de te sentir, » gémit-il, au-delà de l'étrangeté et de la familiarité, au-delà du bien et du mal, tombant profondément dans la faim et dans le désir.

Ça faisait tellement longtemps que quelque chose n'avait pas été aussi agréable, pensa Sam alors que Dean défaisait boutons et tirait sur la ceinture, prenant le jean et le boxer blanc en même temps pour les faire descendre sur les longues jambes qui s'agitèrent impatiemment et les enlevèrent.

Et maintenant tout n'était que chair chaude et ils avaient tous deux dépassé le stade des paroles tandis que les mains masculines et puissantes se déplaçaient, caressaient, se pressaient sur les peaux lisses et juvéniles, se glorifiant de la pure sensualité du contact et de la sensation du toucher. Sam se laissa aller, n'ayant jamais été étendu sous quelqu'un d'autre ni aimé aussi inconditionnellement. Étant toujours celui qui embrassait et étant si rarement embrassé lui-même et peut-être jamais aussi profondément, Sam ne put que tourner la tête sur l'oreiller et saisir la chair recouverte de sueur qui imprimait à présent un rythme, aussi familier que ses battements de cœur, glissant contre le creux de ses cuisses.

De longues jambes se soulevèrent et s'accrochèrent autour des hanches étroites de Dean.

Ça faisait si longtemps qu'il n'avait pas été touché, étreint et caressé. Que des mains autres que les siennes n'avaient pas glissé sur la surface de son ventre, et le simple fait que la main de quelqu'un d'autre, que la main de Dean le touche à cet endroit était suffisant pour envoyer de folles palpitations en direction de ses sens submergés.

Puis la main de Dean le trouva, s'enroula autour de lui, s'enroula autour d'eux deux et Sam n'eut même pas le temps de retrouver le rythme de sa respiration que déjà il jouissait, se courbant, s'accrochant avec les mains, serrant les dents et rejetant la tête en arrière alors qu'ile explosait.

Il y eut une bouffée de chaleur humide entre eux puis Dean se raidit contre lui et Sam frissonna à nouveau en sentant l'humidité se projeter contre son ventre et la sensation, la simple réalité et l'intimité à couper le souffle de ce qui se passait provoqua chez lui un autre spasme, puis un autre.

Enfin, vidé et épuisé, il sentit Dean se détendre au-dessus de lui, sa silhouette musclée trouvant facilement tous les endroits où ils se complétaient et s'y incrustant. Il aurait dû se sentir lourd, ça aurait dû être inconfortable, mais au lieu de cela Sam sentit un confort dont il ignorait qu'il avait eu un besoin maladif pendant aussi longtemps. Les bras de Dean l'étreignaient, le berçaient, le corps de Dean le protégeait.

Cela faisait des mois que Sam n'avait pas sombré dans un sommeil aussi doux.