Kotoko dormit durant deux jours et deux nuits tant elle était épuisée physiquement et émotionnellement par les derniers événements. La terrible épreuve qu'elle venait de traverser avait bien faillit lui coûter la vie et anéantir celle de tous ceux qui l'aimait. Mais tout c'était bien terminé et Irie s'était confié à elle d'une manière inattendue et soudaine l'emplissant d'un véritable bonheur lui faisant alors tout oublier.

Au bout du troisième jour elle s'éveilla complètement et fut heureuse de découvrir à son chevet un Naoki endormi dans le seul fauteuil de la chambre un livre poser sur les genoux. Kotoko ne put se résoudre à le réveiller et le couva alors un long moment du regard, souriant béatement attendant que son bien-aimé daigne ouvrir les yeux. Le pauvre n'avait surement rien dormi ces deux derniers jours voulant certainement guetter l'instant où elle reprendrait connaissance. Cette pensée la fit frémir de plaisir. Elle repensa à sa déclaration et sentit les larmes monter ne cherchant nullement à les refouler. Malgré ce qu'elle avait traversé elle était aujourd'hui la plus heureuse des filles et elle ne pouvait s'empêcher de remercier le ciel d'avoir auprès d'elle un homme aussi merveilleux qu'Irie-kun. Elle ferma de nouveau les yeux se laissant aller toute entière à une étonnante imagination, sa bouche alternant rire et sourire. Elle gloussait tant et si bien que Naoki s'éveilla à son tour et resta stupéfait de voir la jeune fille en si bonne forme. Il la contempla un instant avant d'attirer son attention.

-Qu'est-ce qui te fait rire ? demanda-t-il d'un ton neutre.

Kotoko stoppa net ses ricanements et ouvrit de grands yeux étonnés fixant quelques secondes le plafond avant de porter son regard sur le jeune homme.

-Irie-kun ! Prononça-t-elle timidement.

-Etais-tu encore en train de t'imaginer des choses idiotes ? Dit-il dans un sourire tout en se levant pour s'approcher d'elle.

-Heu ! Non ! Bien sur que non !

-Tu ne changeras jamais. Poursuivit-il en s'asseyant sur le lit.

Kotoko l'observait, attendrie, les yeux pétillants et le cœur joyeux. Cependant, l'expression de tristesse qui peigna soudainement le visage de Naoki lui serra la poitrine.

-Kotoko ! Je te demande pardon ! Dit-il d'une voix douloureuse.

-Irie…kun !

-C'est de ma faute si tu es dans ce lit d'hôpital.

-Mais qu'est-ce que tu racontes ? Je vais bien et je ne devrais pas tarder à sortir maintenant.

Naoki lui lança un regard emplit d'une extrême douceur accompagné d'un mélange de reconnaissance.

-Pourquoi es-tu toujours ainsi ?

-Hein ?

-Je t'ai une fois de plus fais souffrir et tu sembles ne pas m'en vouloir. Pourquoi ?

Le ton de sa voix trahissait nettement ses émotions. Kotoko ne l'avait jamais vu dans cet état. Elle pouvait sentir à quel point Naoki se sentait mal et coupable de ce qui lui était arrivée. Elle en fut bouleversée et touchée.

-Je…je ne pourrais jamais t'en vouloir.

-Pourquoi ? Cria-t-il. Je ne comprends pas. Je me suis pourtant à de nombreuses reprises mal comporté avec toi. Je ne te mérite surement pas.

Cette fois Kotoko se mit à pleurer tant elle était émue par les sentiments et le comportement de ce dernier.

-Je t'aime Irie-kun. Lâcha-t-elle tout simplement. Après t'avoir vu avec Matsumoto j'ai voulu te haïr et t'oublier mais je ne pouvais pas. C'était impossible. Tu es le seul qui compte pour moi. Je t'aime tellement.

Elle éclata en sanglots sous l'œil effaré de Naoki qui la prit doucement dans ses bras pour la bercer en la consolant avec de doux mots.

-Ne pleure plus Kotoko, je suis là. Jamais plus je ne te ferai de mal. Jamais plus je ne te laisserai. Pardonne-moi. Je t'aime Kotoko.

-Oooohh Irie kun hurla-t-elle avant de passer ses bras autour de son cou enfouissant sa tête dans son épaule. Si tu savais comme j'ai eu peur. J'ai vraiment cru que j'allais mourir. Mais je ne pouvais pas baisser les bras alors quand la voiture a percuté la rambarde de sécurité et qu'elle menaçait de se précipiter dans le ravin, je me suis échappée par la fenêtre cassée et…et…et…

-Chuuut ! Calme-toi ! Ca va aller.

Naoki la laissa pleurer toutes les larmes de son corps avant de la prendre par les épaules pour la redresser. D'une main il souleva son menton pour planter son regard dans le sien et lui posa un doux baiser sur les lèvres.

-Calme-toi et raconte-moi ce qui s'est passé !

Kotoko inspira profondément avant de se lancer dans son récit. Elle expliqua son retour à la maison, la terrible oppression qu'elle avait ressentie en les découvrant lui et Yuuko enlacés et raconta comment elle avait eu son effroyable accident.

-Pendant l'espace d'un instant j'ai voulu mourir.

A ces mots le sang de Naoki ne fit qu'un tour et son cœur rata un battement. Pourtant il ne pipa mot et écouta la suite du discours de sa future femme.

-J'ai pensé que si je mourrais alors je ne souffrirais plus, mais c'est alors que j'ai pensé à mon père. Je ne pouvais pas lui infliger ça, surtout après que ma mère ait disparue. Il ne s'en serait probablement pas remis. Alors j'ai lutté et marché jusqu'à la maison. Je ne pouvais tout simplement pas abandonner. Je voulais te revoir une dernière fois.

Alors que de nouvelles larmes tentaient de s'échapper de ses yeux, elle les refoula bien vite et acheva sa phrase dans un magnifique et éblouissant sourire.

-Et je suis près de toi maintenant.

-Oui et ça pour toujours. Conclut-il en séchant ses yeux.

Ils se dévisagèrent un long moment en silence avant que Naoki ne prenne son visage entre ses mains tout en déposant sur ses lèvres une multitude de petits baisers. Alors qu'il la serra de nouveau dans ses bras, Kotoko émit un grognement de douleur en posant sa main sur son ventre.

-Excuse-moi ! Je ne voulais pas…

-Ce n'est rien ! Le coupa-t-elle. Irie-kun ?

-Quoi ?

-Qu'as-tu ressenti quand je me suis enfuie de la maison ? Osa-t-elle demander tout en baissant la tête.

A cette question Naoki se leva et s'écarta du lit pour aller se poster près de la fenêtre laissant son regard errer au loin.

-Hé bien, au début je ne sais pas trop ! Commença-t-il. Tu t'es enfuie tellement vite que je n'ai pu te rattraper et je ne savais pas quelle direction tu avais prise. J'ai ordonné à Yuuko de partir immédiatement. D'ailleurs elle s'excuse auprès de toi et s'en veut terriblement de ce qui c'est passé.

Kotoko se raidit au nom de sa rivale mais Naoki poursuivit rapidement son récit.

-J'ai essayé de t'appeler mais tu n'avais pas pris ton portable. Alors je me suis dis que je n'avais peut-être aucune raison de m'inquiéter et que tu reviendrais probablement bientôt. Du moins, j'ai tenté de m'en convaincre. Mais au bout de plusieurs heures j'ai senti la panique et la peur m'envahir, et j'ai alors réalisé que quelque chose n'allait pas. J'ai appelé tes amis mais aucun d'eux n'avaient de tes nouvelles. Je suis alors parti à ta recherche mais sans résultat, il n'y avait aucune trace de toi. J'ai cru devenir fou. Quand je suis revenu il y avait ces étranges tâches de sang et j'ai aussitôt compris. Quand je t'ai découverte dans l'eau baignant dans ton sang, j'ai senti mon cœur bondir dans ma poitrine et mon estomac se nouer. Jamais encore je n'avais ressenti de telles émotions. Et quand le médecin m'a avoué que tu allais mourir c'était comme si on m'arrachait une partie de moi-même. Je ne pensais pas qu'il était possible de souffrir autant.

La voix de Naoki qui se voulait imperturbable se brisa sur les derniers mots. Cependant, il reprit bien vite le contrôle de lui-même et en se tournant vers Kotoko qui venait de s'asseoir sur le bord du lit, il lui adressa un sourire des plus chaleureux.

-Tu es désormais saine et sauve ! Bon retour parmi nous Kotoko.

Cette dernière posa ses mains sur son visage pour dissimuler de nouvelles larmes et sans réfléchir sauta en bas du lit pour se précipiter vers lui, mais…

-Idiote ! Lança Naoki, laissant percer une pointe d'irritation dans la voix.

En deux enjambés il arriva près d'elle et s'agenouilla à ses côtés.

-Aïe ! Gémit-elle en se frottant le bas du dos.

-Est-ce qu'il t'arrive de réfléchir ? Demanda-t-il en colère. Tu as trop présumé de tes forces, tu ne peux pas encore te lever.

-Pardon ! Dit-elle en reniflant.

Kotoko qui gisait à terre tenta de se relever. Naoki l'observait d'un œil moqueur. Décidément, cette fille était vraiment maladroite. Mais malgré ça, il l'aimait tel qu'elle était avec tous ses défauts. Il passa alors une main sous ses jambes et une autre dans son dos et la souleva en l'emportant près de la fenêtre.

C'est à ce moment précis que débarquèrent toute la petite famille, les bras chargés de nourriture, ainsi que d'un énorme bouquet de fleurs.

Son père ainsi que sa future belle-mère se précipitèrent tels deux tornades sur la jeune malade, la bombardant de questions sur son état de santé, et la touchant pour s'assurer qu'ils ne rêvaient pas et qu'elle allait bien.

Exaspéré et décontenancé par ces comportements extrêmes, Naoki allongea la jeune fille dans son lit et s'écarta pour observer la scène d'un air blasé. Il n'avait jamais supporté de telles effusions de joie, mais aujourd'hui malgré ce côté abusif, il se sentait particulièrement bien et heureux. Il reconnaissait volontiers qu'il avait une famille formidable, et se sentit soudainement transporté de joie à l'idée qu'il allait épouser la personne dont il était éperdument amoureux. Il n'avait alors jusqu'ici jamais su ce qu'était être vraiment heureux, et il avait fallut un malheureux accident pour enfin lui faire réaliser que le bonheur ne pouvait tenir parfois qu'à un fil.

Tout à son bonheur, il écouta d'une oreille distraite Kotoko raconter à la famille ce qu'il s'était passé et se confondre en excuse auprès de son beau-père d'avoir perdu la voiture au fond d'un maudit ravin. Ce dernier la rassura du mieux qu'il put en lui jurant que cela n'avait aucune importance et que la seule chose qui comptait était qu'elle soit en vie et en pleine forme.

Au bout d'une heure d'heureuse retrouvailles, ils laissèrent Kotoko se reposer en compagnie de la seule personne destinée à rester auprès d'elle le restant de ses jours. A la demande de sa bien-aimée, Naoki s'allongea près d'elle en la prenant tendrement dans ses bras et s'en réaliser qu'il sombrait lui-même dans le sommeil, ils se murmurèrent une dernière fois leur amour mutuel.

-Je t'aime très fort Irie-kun.