Chapitre 5 - Soulmate

« Pourquoi avoir pris notre défense ? », questionne abruptement Malfoy en les rattrapant.

« J'ai pas vraiment pris votre défense », soupire Harry sous le regard sombre du blond. « C'est juste que l'on ne peut pas vous condamner sans preuve. »

« Pourtant, ça ne te dérangeait pas jusqu'ici de nous accuser chaque fois que quelque chose de mauvais t'arrivait », l'interrompt Nott sans une once de méchanceté, juste rappelant la dure vérité.

« J'en suis conscient mais là, on parle de quelque chose de beaucoup plus sérieux. Les autres voient en vous des espions potentiels de Voldemort, même des bombes à retardement qui pourraient s'en prendre à nous à tout moment. Mais jusqu'à présent, rien ne nous a montré que c'est vraiment le cas. Je veux dire, ouais Malfoy et certains d'entre vous nous ont mis des bâtons dans les roues, mais je ne pense pas que c'était pour Voldemort que vous le faisiez, mais plutôt pour des raisons puériles ».

Bien sûr, il se récolte un certain nombre de regard noir à cette phrase et il se contente d'un haussement d'épaule un peu provoquant.

« La marque, vous l'avez ? »

Tous se retournent vers Ron. Harry discerne du coin de l'œil les visages livides des Serpentards. Deux hypothèses se présentent à lui : soit ils l'ont et, dans ce cas-là, ils n'auront plus besoin de se prendre la tête car ils deviendront immédiatement des ennemis, soit ils ne l'ont pas et l'idée même de la recevoir les horrifie. Et contre toute attente, Zabini s'avance vers Ron, une certaine hésitation dans son regard, avant de soulever ses deux manches. Ses bras sont dénués de toute marque. Après une certaine concertation, les autres Serpentards suivent son exemple et Malfoy est le dernier à dévoiler ses bras. Eux aussi sont immaculés.

« Pourquoi voulez-vous à ce point que l'on vous croit innocent ? », questionne Hermione une fois les manches des Serpentards retombées. « Vous auriez pu laisser couler les remarques des autres et ne pas venir nous voir. C'est ce que vous avez toujours fait jusqu'à présent. »

« Je... »

Draco mord ses lèvres, incapable de continuer. Il est bien trop fier pour supplier ses ennemis. Alors c'est Théodore qui prend sa suite pour répondre à la question d'Hermione.

« C'est notre dernière année pour échapper à la marque. Si le Seigneur des Ténèbres nous a épargné jusqu'à présent, c'est parce que le père de Draco a réussi à repousser l'échéance. Pour la plupart d'entre nous, nos parents ne veulent pas qu'on soit marqué mais pour d'autres », son regard se tourne vers Pansy qui a baissé la tête, « la marque semble une évidence. Les Parkinson font tout pour que Pansy rejoigne les rangs. »

« Ce n'est pas ce que je veux ! », s'exclame la fille furieusement.

« Aucun d'entre nous ne le veux. Mais le seul moyen d'y échapper serait d'obtenir une protection. »

« Et vous voulez utiliser l'influence d'Harry pour obtenir cette protection, c'est ça ? », grommelle Ron. « Après tout ce que Malfoy nous a fait... »

C'est vrai que dit de cette manière, Potter n'avait aucune raison d'accepter. Au final, tout ce qu'ils veulent, c'est utiliser leur ennemi pour se protéger. Mais Draco a bien conscience que c'est leur seul solution. Il s'apprête à abandonner, persuadé que c'est inutile. Ce qui s'était passé dans la grande salle lui avait donné un semblant d'espoir mais qui accepterait consciemment d'être utilisé pour protéger les rejetons de mangemorts ? Pour autant, ses yeux s'écarquillent quand Potter tend une main dans sa direction.

« Vous avez l'air de vraiment vouloir échapper à la marque. Je ne dis pas que je peux vous accorder ma totale confiance, parce que des coups bas, tu m'en as fait suffisamment Malfoy pour que je me méfie encore. Mais si c'est de ma protection que vous voulez, c'est d'accord. Juste que, au moindre faux pas, je n'hésiterais pas à la retirer. Et aussi, je pense qu'il est préférable que nous mettions fin eux différends entre nos deux groupes. Nous avons une guerre à préparer. Même si nous ne restons que des adolescents, il est certain que nous y serons mêlés d'une manière ou d'une autre, et c'est pas en nous chamaillant comme des enfants que nous allons y arriver. »

Les Serpentards sont trop abasourdis pour réagir. Quand Potter a-t-il gagné autant en maturité ? A vrai dire, Harry lui-même s'étonne de réagir de cette manière. Il y a encore peu de temps, il se serait montrer presque arrogant envers eux et aurait refusé sans même chercher à entendre ce qu'ils avaient à dire. Mais ce comportement lui paraissait bien puéril à présent. Il n'empêche que sa main commence à peser et il hésite à renoncer à la poignée de main. Il a l'impression d'être projeté quelques années en arrière, quand il a refusé la poignée de main de Malfoy. Mais contre toute-attente, cette fois, sa main et celle de Malfoy se rencontre. Le contact est doux, sans animosité et Harry se surprend une nouvelle fois à apprécier le contact de Malfoy.

« Je pense que pour une fois, tu as raison Potter. »

Puis un silence gêné empli le couloir. Après avoir passé tant d'années à se haïr, aucune des deux parties ne sait vraiment comment agir en présence de l'autre. Alors, d'un commun accord, ils décident de partir chacun de leur côté. Mais avant que les Serpentards ne soient hors de vue, Harry pianote dans l'air.

« Qu'est-ce que tu fais ? », demande curieusement Ron et Harry se rappelle qu'il ne lui a toujours pas parlé des liens.

« Euh, Hermione, tu peux lui expliquer ? »

Sa meilleure amie fait une moue avant de tout expliquer à Ron tandis que lui observe les liens qui le lient aux Serpentards. Étrangement, tous les liens sont blanc lunaire. C'est la première fois qu'il voit autant de liens d'une même couleur. Seul celui de Malfoy diffère. C'est l'un des deux liens qui se démarquent des autres. Celui accroché à son annulaire. Le lien rouge aniline.

« Et donc, quand tu comptais me parler de ce nouveau pouvoir ? », gronde Ron en lui donnant un coup de pied violent.

« Je comptais te le dire mais je voulais pas te déranger à cause du match ! »

« Comme si le match était plus important que ce qui te concerne à mes yeux... »

Harry sourit aux paroles murmurées par Ron et entoure ses épaules de son bras avec joie.


« Dis grande sœur, est-ce que c'est vrai qu'Harry Potter nous sauvera tous ? »

Harry cligne des yeux à plusieurs reprises pour s'accommoder à la vision avant de se figer d'horreur. Une vision. Il n'en avait pas eu depuis la rentrée, alors pourquoi maintenant ? Il aperçoit du coin de l'œil deux jeunes enfants enfouis dans l'étreinte puissante d'une adolescente à peine plus âgées que lui. Tout autour d'eux, des cris d'agonie résonnent.

« Oui mes chéris, il nous sauvera, c'est l'Elu après tout. »

« Mais les méchants sont déjà là et personne ne vient nous aider ! », pleure la plus jeune en s'agrippant à la robe de sa sœur. « Tout ça c'est des mensonges ! C'est un enfant lui aussi, il peut pas être le sauveur ! »

Cette dernière ne répond rien, ses yeux vides de toute lueur d'espoir. Pardon, pense intérieurement Harry en fermant les yeux, tu as raison, je ne suis pas un véritable sauveur. Je ne peux rien faire à part assister à tout ça. Harry s'en veut terriblement mais il sait également que c'est le but premier de Voldemort. Le briser au travers des visions. Harry ne peut qu'assister, impuissant, à leur mort, sans pouvoir rien y faire.

Mais lorsqu'il ouvre de nouveau les yeux, le paysage a changé. Il est allongé dans un champ de fleur, sa tête reposant sur les genoux d'une femme. Cette dernière lui est étrangement familière. Ses cheveux roux chatouillent son visage et ses yeux bleu glace le fixe avec chaleur. Elle caresse tendrement son visage et Harry se sent apaisé entre ses mains.

« Dors Harry, dors. Quand tu te réveilleras, tout sera oublié. Nous veillons sur toi à présent. Tes cauchemars, nous les combattrons pour toi, alors ne pense plus à rien. »

Elle pose un baiser sur son front et Harry sent ses paupières s'alourdir. Il s'en rappelle à présent, il l'a déjà vu dans l'un de ses rêves. Anja. Celle qui détient le même pouvoir que lui.

« Qui êtes-vous ? », demande-t-il difficilement. « Vous aussi... Vous maîtriser... Les liens... »

« Dors cher enfant. Tu auras les réponses que tu cherches plus vite que tu ne le crois. »

Et, sans aucune possibilité de lutter, Harry sombre dans un sommeil des plus reposants.

Lorsqu'il se réveille le lendemain, il n'a plus aucun souvenir de cette nuit.


Ron – Jaune canari, Hermione – Rose pêche, Malfoy – Rouge aniline, ? - Lien vaporeux...

« Qu'est-ce que tu fais Harry ? »

« Je note tous les liens que je connais et auxquels je suis relié. »

Ron et Hermione observent tous les deux le cahier griffonné d'Harry. Un certain nombre de points d'interrogation figurent ci et là, signe qu'Harry ignore pour la plupart des liens, si ce n'est tous, leur signification.

« Du rouge pour Malfoy, c'est assez étonnant », murmure Hermione en coinçant son menton entre ses doigts.

« Pourquoi ça ? »

« Et bien, en général, le rouge représente l'amour. »

« Ou la colère et le danger », rétorque Ron en prenant une chocogrenouille. « Pourquoi Malfoy et Harry auraient un lien dont la signification serait l'amour hein ? Ils ont été longtemps agacés l'un par l'autre, la colère serait donc plus logique. »

« Le rouge peut aussi représenter un lien d'âme sœur. »

Les trois Gryffondors bondissent de leur place en découvrant une Luna souriante à leur côté. Aucun d'eux ne l'avait entendu arriver. Ses longs cheveux blonds sont relevés en un étrange chignon, retenu par divers objets tout sauf adapté à cela et ses vêtements sont aussi colorés que d'habitude. Sans se vexer de leur sursaut, elle s'installe prêt d'Hermione et commence à jouer avec ses cheveux. Des regards sont lancés à leur table, les maisons ne se mélangeant normalement pas lorsqu'ils se trouvent dans la grande salle, mais avec Luna, tout le monde a fini par d'habituer à son étrangeté et son non-respect de certaines règles.

« Qu'entends-tu par lien d'âme sœur Luna ?

« Huuuum... Certaines personnes ont ce qu'on appelle une âme sœur et dans beaucoup de livre, ce lien est représenté par un fil rouge. Mais ce n'est pas forcément une âme sœur au sens romantique. C'est plutôt une personne avec qui notre destin est étroitement lié. La relation peut être purement platonique, voire familiale, tout comme elle peut être bien évidemment romantique. Pour d'autres encore, ce lien d'âme sœur peut être extrêmement toxique et mener à la haine. Mais pourquoi tu t'intéresses à ça Harry ? »

Harry ouvre la bouche pour trouver une excuse, peu désireux d'exhiber son pouvoir à tout le monde mais avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, son don capricieux s'active. Un lien d'or le reliant à Luna scintille de manière aveuglante. Il frotte un instant ses yeux, agressé par cette lumière et rencontre le regard de Luna. Pour la première, il voit son amie profondément confuse. Ses yeux bleu clignent à plusieurs reprises avant que sa main se dirige vers le lien et que ce dernier se dérobe à son contact.

« Luna, tu... »

« Ah ! Il est l'heure de reprendre les cours. A plus tard Harry, Hermione et Ron. »

Et comme si rien ne s'était passé, elle repart, une expression rêveuse collée sur son visage.

« Euh, il s'est passé quoi là ? »

« Luna... Elle a vu le lien. »


Tiens, Granger est déjà là. Théodore serre ses livres contre sa poitrine et scrute la bibliothèque. Comme attendu d'un samedi matin, à part Madame Pince et Hermione, l'endroit est complètement vide. Il se place à une distance respectable de la Gryffondor et étale ses devoirs devant lui, jetant de temps à autre de discrets coup d'œil en direction de la jeune fille. Théodore est forcé de constater que plus les années passent, plus Hermione s'embellit. Elle est bien plus jolie que toutes ces filles que ses parents lui ont présenté pour de potentielles fiançailles. Et puis elle est intelligente, elle au moins. Et contrairement à elles, elle n'est pas du genre à dépendre des autres, ni à se laisser marcher sur les pieds. S'il doit être honnête avec lui-même, ça fait maintenant quelques années qu'il a des sentiments pour la rouge et or. Mais en raison des désaccords entre leurs groupes respectifs, Théodore a toujours pris soin d'enfouir ces derniers afin que personne ne sache l'admiration et l'attirance qui éprouve pour elle.

Mais à présent... Peut-être qu'il pourrait tenter une approche ? Après, leur but n'est-il pas de prouver au trio qu'ils peuvent leur faire confiance ? Bien évidemment, tout ça n'est qu'un prétexte pour servir ses proches intérêts. Mais Théodore est un Serpentard après tout, et s'il peut se rapprocher d'Hermione en utilisant cette excuse, alors il n'hésitera pas. Finalement, il se lève et se dirige vers la table occupée par la jeune fille avant de s'asseoir face à elle. Hermione ne relève même pas la tête à son approche, bien trop focalisée sur ses lectures.

Théodore jette un œil à l'objet de son attention et fronce aussitôt les sourcils.

« D'abord Potter et maintenant toi, pourquoi est-ce que vous vous intéressez aux pouvoirs héréditaires ? »

Hermione claque le livre sur la table, comme prise sur le fait, et baisse la tête sous le regard noir de Madame Pince. Théodore s'en veut un peu de l'avoir surprise mais ça l'intrigue. Après le questionnement de Draco, il a demandé à ses parents de lui amener une liste de toutes les familles possédant un don héréditaire étant donné que les Nott étaient chargés de les recenser. Tout avait découlé d'un commun accord des différentes familles en raison du potentiel dangereux que pouvait avoir ce genre de pouvoir. Mais les Potter n'était pas le genre de famille à ne pas respecter ce genre d'accord et ces derniers ne figuraient vraisemblablement pas dans le registre.

Harry n'est donc a priori pas détenteur de pouvoirs héréditaires, sa mère étant née de moldus, et Hermione ne devrait pas être concernée par cela non plus. Quant à Ron... Seul Charlie est connue comme détenteur du don propre à leur famille. Donc pourquoi s'y intéresser à ce point ?

« Sans raison particulière », répond Hermione en refermant son livre précipitamment.

« C'est amusant, tu fais des recherches sur ces pouvoirs mais tu ne sais pas lequel est propre aux Nott ? »

Hermione hausse un sourcil et Théodore lui sourit malicieusement avant de sortir le registre de ses robes. Il le glisse vers Hermione et pointe l'endroit où figure son nom de famille. Don de la vérité. Autrement dit, personne ne pouvait lui mentir. Il s'attend à voir la jeune fille rougir de honte ou lui jeter un regard mauvais mais à la place, ses yeux observent méticuleusement le parchemin avant de s'écarquiller.

« Dis-moi Nott, qu'est-ce que tu peux me dire exactement sur ces pouvoirs héréditaires ? », demande-t-elle en faisant fi de la révélation de son pouvoir. « Est-ce que deux personnes de familles différentes peuvent avoir des pouvoirs similaires ? »

« Impossible. Ce sont des pouvoirs offerts par la Magie elle-même. Elle ne donnerait jamais le même pouvoir à deux personnes issues de familles différentes car chaque pouvoir est lié au passé profond de la famille qui le détient. Et seuls les sang-purs disposent de ce genre de capacités. »

« Je vois, merci pour ces informations, je t'emprunte ça ! »

Et sans qu'il n'ait le temps de répliquer, Hermione s'enfuit, son registre à la main.

Sérieux, c'est quoi cette histoire ?


De son côté, Hermione fixe le parchemin en se demandant quoi faire. Devait-elle en parler immédiatement à Harry ou serait-il mieux d'attendre d'avoir plus d'informations ?

Car une famille semble détenir le même don qu'Harry. Mais Hermione n'a jamais entendu parler d'eux.

Les Filipkovitch.

Ne te précipite pas Hermione. Tu sais à quel point la Magie est capricieuse. Peut-être que les informations de Nott sont erronées.

Oui, elle attendrait avant de faire part de ses trouvailles à Harry. Sa priorité est de trouver des informations sur cette famille avant de supposer tout lien entre elle et Harry.