La Grande Salle était calme en ce samedi matin, et il y avait une bonne raison pour cela. Ou même plusieurs. Tout d'abord, il était tôt, et il n'y avait pas beaucoup d'élèves présents. Peu de gens se levaient aux aurores le weekend, et encore moins le premier jour des vacances. Ce qui nous amenait à une seconde raison : c'était les vacances de Noël, et la plupart des étudiants de Poudlard étaient rentrés chez eux. Dont la moitié des Maraudeurs. Ce qui nous fait une troisième raison. Il y avait moins de monde à fanfaronner le matin.

Mais qui dit moitié des Maraudeurs partie, dit autre moitié présente. En effet, seul à la table des Gryffondor, on pouvait voir Remus Lupin, buvant calmement son thé en lisant un roman sorcier. C'était dans ses habitudes de se réveiller tôt, et il avait pour coutume de bouquiner en prenant son petit déjeuner seul, avant que ses trois compères ne le rejoignent plus tard. C'était son petit moment à lui. Et il était parfois difficile d'en avoir, lorsque l'on était ami avec les Maraudeurs. Remus avait décidé de rester à Poudlard pour les fêtes, officiellement car sa famille ne pouvait pas l'accueillir, mais la raison officieuse, la vraie raison était tout autre. Et la fit sursauter, lui faisant renverser un peu de thé sur la table en bois.

- Bonjour Moony !

- Padfoot, par Merlin !

Sirius ricana en s'asseyant face à lui. Le Gryffondor ne rentrait jamais pour Noël, fuyant sa détestable famille. James était bien resté quelques fois avec lui, comme Remus et Peter, mais cette année, le binoclard avait préféré passer Noël avec ses parents, à la santé fragile, et Peter, n'ayant su choisir qui suivre entre James et Sirius, avait fini par capituler en accompagnant James dans le Poudlard Express pour qu'il ne fasse pas le trajet seul.

Remus cala son marque page dans son roman, qu'il ferma ensuite avant d'hausser un sourcil en direction de son ami.

- Il est sept heures trente, que fais-tu debout Sirius ?

Le Gryffondor prit alors une expression faussement outrée, et répondit théâtralement.

- Comment ça ce que je fais debout ? Enfin, on est le premier jour des vacances, tu ne crois pas que j'avais envie de profiter un peu de cette belle journée ?

Voyant que son ami lycanthrope ne le croyait pas, il poursuivit, se penchant par dessus la table pour murmurer, loin des oreilles indiscrètes.

- J'ai entendu dire qu'il n'y avait pas de préfet chez les Serpentards pendant les vacances, et il se trouve qu'on m'a donné leur mot de passe.

Il avait un petit sourire en coin et le regard malicieux, mais Remus leva les yeux au ciel. S'il suivait ses amis dans pas mal de leurs bêtises en étant le cerveau des opérations, le préfet n'aimait pas embêter les Serpentards parce qu'ils étaient des Serpentards. Il n'aimait pas alimenter cette rivalité entre leurs maisons, trouvant cela puérile, puisque chacune avait ses qualités propres. Bon, il reconnaissait tout de même que la plupart des partisans du seigneur des ténèbres se trouvaient dans la maison des verts et argents, mais ce n'était pas une raison.

- Pad', je ne vais pas m'introduire dans leur salle commune. Et même si tu me regardes avec cet air de chien battu que tu sais si bien faire.

La mine implorante de Sirius se transformant en un sourire malicieux, et il prit une voix en peu plus grave et séductrice, celle qu'il utiliser pour flirter avec les filles, et qu'il savait agacer Remus.

- Que je sais si bien faire ? Moony, je pourrais obtenir n'importe quoi avec ce regard.

Face à lui, le si sérieux et imperturbable préfet sentit le rouge lui monter aux joues, alors qu'il levait à nouveau les yeux au ciel. En réalité, ce ton que Sirius employait l'énervait lors qu'il le voyait l'utiliser sur les filles du château, mais le Black ne l'avait jamais utilisé pour lui. Et il comprenait à présent pourquoi les filles gloussaient lorsqu'elles y avaient droit. Merlin, pourquoi fallait-il qu'il réagisse ainsi ?

- C'est toujours non, Sirius.

Pour masquer sa gêne, il prit sa tasse de thé, et rouvrit son livre. Cela faisait quelques mois que Remus avait compris. Au début, il se sentait juste jaloux lorsqu'il voyait son ami draguer toutes les filles de Poudlard, sans vraiment savoir pourquoi. Puis il avait commencer à rougir lorsque Sirius s'intéressait à sa vie amoureuse, même s'il savait que c'était sans arrière pensée. Ensuite, son coeur s'était mis à battre plus vite lorsqu'ils étaient tous les deux, ou lorsque le brun passait un bras autour de ses épaules, le regardait, s'inquiétait pour ses nuits de pleines lunes... Et les vacances d'été avaient été longues, sans nouvelles de lui. C'était en traversant la gare de King's Cross, le premier septembre, que Remus avait compris. Dans un coin un peu sombre, tentant de se cacher du regard de la foule, le sorcier avait vu un couple d'hommes s'embrasser. Et immédiatement, son esprit avait pensé à Sirius, qu'il rejoignait quelques minutes plus tard. Il n'avait d'ailleurs pas réussi à regarder son ami dans les yeux durant tout le trajet.

- Tu n'es pas drôle, Moony. On a quartier libre, et tout ce que tu trouves à faire, c'est bouquiner.

Sirius croisait les bras sur son torse en soufflant, et Remus, loin d'être vexé, releva son regard vers lui.

- Je suis drôle, Padfoot. Juste, je n'irai pas dans une autre salle commune que la nôtre.

Il replongea ses yeux dans son roman, manquant les grimaces que son ami face à lui faisait en le singeant. Il y eut un instant de blanc, avant que Remus, de son air imperturbable, ne sorte cette phrase qui fit presque bondir Sirius de joie :

- Par contre, je crois que j'ai entendu Rusard marmonner quelque chose à propos de l'absence de Prongs et de pouvoir se reposer.

- Merlin, je savais que je pouvais compter sur toi Moony !

Sirius frappa dans ses mains en parlant un peu trop fort au goût de son ami, qui ne put retenir un sourire malgré tout.

Il ne fallut pas longtemps aux deux Maraudeurs pour échafauder un plan. Et encore moins de temps pour entendre le concierge hurler dans les couloirs après les "foutus élèves qui mériteraient qu'on les pende par les poignets".

Cachés dans un placard à balais, les deux garçons se retenaient de rire, collés l'un contre l'autre, observant à travers les interstices de la porte. Rusard marchait en boitant, les cheveux plein de mousse rose, et les vêtements trempés. Il s'éloignait, cherchant les coupables, et les garçons purent rire sans manquer de se faire prendre. Pour autant, ils n'étaient pas sortis de leur cachette. Remus fut le premier à se calmer, et il se rendit alors compte de la proximité qu'il avait avec Sirius. Leurs corps étaient collés, et bien qu'il soit plus grand que son ami, il pouvait sentir le souffle du Black sur la peau de son cou.

Les battements de son coeur s'accélérèrent, et il remercia Merlin d'être dans la pénombre, qui cachait le rouge de ses joues.

Sirius sembla sentir le changement de comportement de son ami, et Remus le vit le regarder intensément, avec un sourire en coin. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'ils se retrouvaient ainsi tous les deux, mais c'était bien inédit que l'ambiance entre eux était différente comme cela.

Remus déglutit, et alors que Sirius allait prendre la parole, le préfet plaqua sa main sur sa bouche pour l'empêcher de parler. Son ami le regardait d'un air interrogateur à présent, mais comprit bien vite lorsque la voix de Rusard résonna tout près de leur cachette.

Le concierge cherchait toujours les coupables, et il s'arrêta devant la porte du placard à balais.

- Je sais que vous êtes là, chenapans...

Soudain, une sorte de cri mélangé à un rire retentit un peu plus loin, détournant son attention.

- Peeves...

Rusard siffla, et se tourna vers l'esprit frappeur en le maudissant, partant à sa poursuite. Les deux amis, ayant retenu leur souffle, reprirent leur respiration normalement, et sortirent de leur cachette.

Le concierge n'était plus là, mais ils filèrent vers leur salle commune. Le trajet était silencieux. Sirius avait un sourire fier et amusé sur les lèvres, et les quelques élèves qu'ils croisèrent savaient rien qu'en le regardant qu'il avait fait une bêtise. De son côté, Remus avait le visage fermé. Ses prunelles miel fixaient le vide alors qu'il marchait, et ses pensées tourbillonnaient dans sa tête. S'il était toujours parvenu à masquer ses sentiments pour son meilleur ami, il était persuadé que Sirius savait à présent tout. Et qu'allait-il se passer à présent ? Qu'allait devenir leur amitié ? Le groupe des Maraudeurs ? Il savait que son amour, car oui, il avait fini par se l'avouer, c'était bien de l'amour qu'il ressentait, n'était pas réciproque. Sirius et James avaient été les premiers amis qu'il avait eu dans sa vie, suivi ensuite par Peter. Les trois Gryffondors avaient été les premiers à accepter sa condition de loup-garou sans jugement, et à le soutenir, allant même jusqu'à devenir des animagi pour lui tenir compagnie lors des pleines lunes. Mais à présent, Sirius n'allait plus se comporter comme ça avec lui. Evidemment, l'homosexualité était proscrite chez les sorciers, surtout chez les sang-purs, et elle était à peine avouable chez les moldus. Le Black le renierait, le jugerait pour la première fois. Leur amité ne serait plus, et...

- Moony ?

Le préfet sortit de ses pensées en secouant la tête, et regarda Sirius, l'air perdu.

- Je te demandais ce que tu voulais faire ?

Ils étaient arrivés sans qu'il ne s'en rende compte dans la salle commune, où trois élèves discutaient tranquillement.

- Hmm, je... Je vais commencer mon devoir de runes. Il a l'air assez compliqué et...

Il bafouillait, et ne finit pas sa phrase pour monter dans leur dortoir chercher ses affaires, laissant Sirius pataud et déçu au milieu de la pièce.

La journée passa sans que Remus ne décroche de ses révisions, même durant les repas. Sirius s'était donc tout d'abord ennuyé, mais avait vite fini par aller se promener dans le château à la recherche de bêtises à faire, ou de personnes à embêter. La même chose se produisit le lendemain, malgré les efforts du Black pour tenter de parler avec son meilleur ami. Mais rien n'y faisait : Remus éviter de regarder Sirius, et ne lui adressait que très peu la parole. Le lycanthrope culpabilisait, s'en voulait beaucoup d'avoir agi de la sorte, persuadé que si son ami tentait de lui parler, c'était uniquement pour lui reprocher ses sentiments.

Mais il en était tout autre. Sirius, apprenant que Remus restait seul avec lui à Noël, avait senti son cœur bondir dans sa poitrine. Il avait noté de son côté que les moments seul avec lui se faisaient plus rare, depuis le début de l'année, et il en avait souffert en silence, avant de mettre un mot dessus. En réalité, il savait depuis longtemps. Il avait toujours ressenti quelque chose de différents pour Remus, mais n'avait jamais vraiment su dire pourquoi. Cette envie de le protéger de tout, de l'aider le plus possible avec sa condition de loup-garou, d'avoir son approbation quoi qu'il fasse... Et deux ans plus tôt, il avait vu un Serdaigle de leur année se rapprocher de lui. D'un point de vue extérieur, c'était pour leurs cours en commun. Mais Sirius avait senti monté en lui une colère sourde à chaque fois qu'il lui enlevait son ami. Il savait que ces deux-là partageait quelque chose qu'il ne pourrait pas avoir avec Remus : cet intérêt pour la connaissance. Et il avait été jaloux. Il n'avait pas mis tout de suite de mot sur ce qu'il ressentait, mais il avait alors commencé à draguer de plus en plus de filles, enchaînant les relations courtes pour se changer les idées. Puis il avait gardé cette habitude. C'était sa façon de se sentir aimer. Mais il se rendait toujours compte rapidement que ce n'était pas ce qu'il voulait. Alors il essayait avec une autre fille. Mais il n'était jamais satisfait.

En septembre, lorsque Remus s'était légèrement éloigné de lui, Sirius n'avait pas compris. Jusqu'à maintenant. Jusqu'à l'épisode dans le placard à balais. Il avait été idiot, tout ce temps. A se voiler la face. Mais lorsqu'il avait vu son ami réagir de la même façon que ces filles qu'il draguait, il avait ressenti cette chose dans son ventre. Cette chose qu'il recherchait. Et s'il n'avait rien dit sur le chemin du retour, c'est parce qu'il savait que ce genre de conversation ne se faisait pas au détour d'un couloir. Enfin, il ne le savait pas vraiment, mais il n'avait pas envie que ce soit de cette façon. Alors, dans la salle commune, il avait espéré que Remus propose d'aller dehors, ou dans leur dortoir. Mais... non. Il l'avait évité, ignoré. Et Sirius était blessé de cette situation. Il tentait de comprendre, il se demandait pourquoi le préfet agissait de la sorte. N'avait-il pas vu que leur amitié à eux était différente ? Particulière ?

Le vingt-quatre décembre arriva, et les deux garçons ne se parlaient toujours pas. Le midi, alors que Remus révisait son cours d'astronomie, une élève de Poufsouffle s'approcha d'eux. Sirius était affalé sur la table, jouant du bout de sa fourchette avec la nourriture dans son assiette. La jeune fille avait un an de moins qu'eux, mais Sirius l'avait déjà croisée quelques fois. Elle avait fini elle aussi en retenue, pour avoir tenter de piéger les toilettes des garçons, et le Gryffondor avait noté l'effort. Il fallait dire aussi qu'elle était plutôt mignonne, avec ses grands yeux marrons et ses boucles châtain. Mais il ne connaissait même pas son prénom.

- Hey.. Salut ?

Sirius releva ses iris grises vers elle, et Remus interrompit sa lecture, qu'il reprit instantanément lorsqu'il réalisa que la Poufsouffle s'adressait à son ami.

- Je voulais savoir... Je vais à Pré-au-Lard cet après-midi, est-ce que ça te dirait de m'y accompagner ?

Elle ne semblait pas particulièrement mal à l'aise de parler au célèbre Maraudeur, mais plutôt gênée de n'inviter que Sirius, et pas Remus.

Black jeta un coup d'oeil au préfet, mais voyant qu'il n'en avait cure, il se redressa et lui accorda un sourire charmeur et lui répondit d'une voix suave.

- Tu me rappelles ton prénom jolie demoiselle ?

- Charlotte.

- Eh bien, Charlotte, je suis ravi que tu me le proposes.

Il lui adressa un clin d'oeil alors qu'elle souriait de toutes ses dents, et Sirius posa sa fourchette.

- Nous pouvons même y aller maintenant, si tu as fini de manger !

Remus releva la tête en entendant l'exclamation de son ami, et son coeur se serra. Le Black se levait déjà, sans lui prêter attention, attrapant le bras de la Poufsouffle pour l'entraîner dehors.

Sirius rentra tard. Remus était déjà couché, sans pour autant trouvé le sommeil. Et quand il l'entendit ouvrir la porte, il n'osa pas le lui reprocher. Après tout, cela faisait plusieurs jours qu'il ne lui parlait plus, il n'était pas légitime. Le cœur lourd, il l'écouta se glisser dans ses draps. Merlin, il ne savait plus quoi faire. S'il allait lui parler, leur amitié en prendrait un coup. Et s'il ne le faisait pas, aussi.

Il cogita pendant longtemps, avant de finir par quitter son lit et descendre dans la salle commune. Il avait écouté attentivement la respiration de son ami pour vérifier qu'il dorme bien et éviter d'avoir à le confronter. Et aussi pouvoir poser son cadeau de Noël sous le sapin sans qu'il ne le voit.

Le feu dans la cheminée était presque éteint, et il le raviva d'un coup de baguette en se laissant tomber dans le canapé, après avoir déposé le paquet. Il soupira, laissa sa tête aller en arrière. Mais à peine l'eut-il fait, qu'il se redressa brusquement en se retournant.

Sirius était en bas des marches, le fixant d'un regard impénétrable. Sa mâchoire carrée n'était pas détendue, ses sourcils n'était pas froncé, mais ses prunelles grises transmettaient une multitude d'émotions que Remus ne savait identifier. Il déglutit, et le regarda s'approcher de lui. Les cheveux jais de son ami étaient partiellement décoiffés, dû à leurs longues minutes dans le lit, et le lycanthrope se retint de descendre son regard vers le torse découvert du Gryffondor. Sirius avait la fâcheuse tendance à dormir uniquement avec son pantalon de pyjama, et Remus refusait de se faire prendre à contempler les muscles dessinés sous la fine peau du Maraudeur.

- Parle-moi.

La voix de Sirius était grave, sérieuse. Il s'approcha davantage, jusqu'à n'être séparé de Remus que par le dossier du canapé. Ce dernier déglutit en le fuyant du regard. Que pouvait-il lui dire ? Il ouvrit la bouche comme pour parler, mais rien ne sortit, et il la referma. Sirius se pencha alors sur lui, posant ses deux moins sur le bord du canapé.

- Pourquoi tu m'évites comme ça ?

A ses yeux rougis, Remus ne sut s'il avait pleuré ou trop bu. Il eut un léger froncement de sourcils, avant de se racler la gorge.

- Je ne t'évite pas.

Mensonge. Ils le savaient tous les deux. La mâchoire de Sirius se contracta et son regard se fit plus dur.

- Arrête avec ça, Remus. Tu sais très bien ce que je veux dire.

Piqué, même si son ami avait vu juste, Remus recula légèrement, s'agaçant que le Gryffondor s'énerve aussi rapidement. Même si, au fond de lui, il savait que c'était légitime.

- Non, qu'est-ce que tu veux dire, Sirius ?

Ils ne s'appelaient que rarement par leurs prénoms, et ils savaient que dans ces cas-là, c'était sérieux.

- Tu ne me parles plus. Tu ne me regardes plus. Tu ne fais rien avec moi. Merlin, on est que tous les deux, et tout ce que tu trouves à faire, c'est réviser tes stupides cours !

- Mes cours ne sont pas stupides Sirius !

- Eux peut-être, mais toi oui ! Bordel, ça n'arrive plus qu'on se retrouve ensemble, et toi tout ce que tu fais c'est t'isoler dans ton coin sans faire attention à moi !

- Parce que tu fais attention à moi, toi peut-être ?

Le ton montait entre eux, et leurs yeux devenaient de plus en plus sombres à mesure que les reproches fusaient. Remus n'en avait cure de parler de ses sentiments, de ce qu'il ressentait. Après tout, c'était fini, non ? Il avait déjà tout gâché.

- Evidemment !

- Ah oui ? Donc partir avec une fille dont tu ne connais même pas le prénom la veille de Noël, passer le réveillon avec elle en me laissant seul, c'est faire attention à moi ?

- Mais Merlin Remus ! Tu ne m'avais pas adressé un mot de la matinée ! Que voulais-tu que je fasse ? Admirer Ô combien studieux tu es ? Et rester passer la soirée en silence avec toi m'ignorant à côté ?

- Je ne t'aurai pas ignoré ce soir !

- Ah oui ? Et en quel honneur ? Soudainement, parce que c'est le réveillon de Noël, tu retrouves ton sens du savoir vivre ?

Remus leva les yeux au ciel en soufflant. Là, il n'avait rien à répondre. Un silence s'installa, dans lequel on pouvait entendre seulement les crépitements du bois dans la cheminée, et leurs respirations lourdes.

Finalement, ils bougèrent en même temps. Sirius se redressa, et se retourna pour marcher dans la salle commune, pendant que Remus baissa la tête.

- J'ai été blessé que tu partes avec elle.

Il avait murmuré, si bien que Sirius ne fut pas certain d'avoir entendu. Il fronça les sourcils, et se rapprocha du canapé pour s'asseoir lui aussi.

- Pourquoi ?

Sa question était simple, mais ses attentes étaient grandes, et son coeur battait fort contre sa poitrine. Remus eut un léger rire nerveux. Il ne le regardait toujours pas dans les yeux, il ne voulait pas affronter ses yeux si gris.

- Je suis toujours blessé quand tu pars avec une fille, de toutes façons, ça ne change rien.

Il renifla, et cala son dos contre le dossier pour fixer les flammes, le visage neutre. C'était trop tard pour reculer à présent, il fallait qu'il crache le morceau. De toutes façons, Sirius lui en voulait déjà assez.

Ce dernier ne lui répondit d'ailleurs pas tout de suite. Il se contenta d'observer son profil. Ses cheveux châtain, parsemés déjà de quelques cheveux blancs. Ses prunelles miel dans lesquels se reflétaient les flammes. Son nez légèrement courbé. Ses lèvres fines. Lèvres qu'il eut envie de toucher.

- Et tu sais pourquoi je pars avec elles ?

Sirius avait chuchoté, et il leva doucement une main pour effleurer les lippes du préfet, qui retint alors sa respiration, les yeux légèrement écarquillés et le coeur battant à tout rompre, attendant qu'il poursuivre.

- Parce qu'elles me font oublier ce que je n'ai pas.

Ses doigts glissaient sur la peau de sa joue.

- Elles me font oublier que ce que je ressens, ce n'était pas réciproque.

Doucement, il attrapa le menton de Remus pour lui faire tourner son visage vers lui, pour plonger son regard dans le sien. Et lorsque leurs yeux se connectèrent, il n'y eut plus rien. Juste eux. Juste leurs coeurs qui battaient à l'unisson.

- Mais, ce n'est pas vrai n'est-ce pas ? Toi aussi, tu le ressens, Rem' ?

Le préfet ne savait pas vraiment quoi répondre. Il était tétanisé. Il n'avait jamais embrassé personne, il n'avait jamais eu le moindre flirt. Il découvrait tout. Et c'était intense. Son regard quitta les prunelles grises de Sirius pour glisser sur ses lèvres, qui eurent le temps de s'étirer dans un sourire avant qu'il ne les remonte.

Le Black s'approcha lentement, comme s'il attendait que Remus ne le stoppe. Mais ce dernier était bien trop obnubilé par l'instant présent, par le visage du Gryffondor qui s'approchait du sien. Ses lèvres s'étaient entre-ouvertes, et ses yeux, qui avait commencé par descendre sur les lèvres face à lui, s'étaient fermés. Leurs visages n'étaient qu'à quelques millimètres l'un de l'autre, mais Sirius s'arrêta un instant.

- Je ne sais pas du tout ce que je fais, mais bordel Rem', j'en ai eu tellement envie...

Leurs lèvres s'unirent alors. C'était inconnu. C'était hésitant. C'était doux. Puis ce fut plus sûr. Sirius ramena ses mains pour attraper le visage de Remus, qui se laissa faire, posant ses propres mains sur les avant-bras du Gryffondor. Aucun des deux ne saurait décrire ce qu'ils ressentaient. Mais ce que je peux vous dire, c'est qu'ils découvraient ensemble ce qu'ils avaient toujours attendu, et que leurs sentiments s'entremêlaient entre eux pour que leurs âmes ne forment plus qu'une.