Avant-propos :

Salut à toustes ! Je me lance dans la publication d'une de mes fics pour la première fois. J'espère que ça vous plaira. Je croise les doigts pour réussir à restreindre ma capacité de dispersion habituellement sans limite et parvenir à aller plus loin que les premiers chapitres… (Comme c'est une toute première expérience je suis d'ailleurs avidement preneuse de retours…)
Attendez-vous à ce qu'il y ait des divergences avec le canon. Sachez aussi qu'il est prévu que l'histoire aborde des thèmes assez sombres et il sera parfois questions de violences, tant psychologiques que physiques. Le contexte de guerre présent dans les deux époques balayées par l'histoire (celle de la scolarité de Tom et celle des Maraudeurs) n'y sera pas pour rien, mais il sera aussi question de familles abusives, de racisme et d'homophobie. Je tacherai de mettre des trigger warning en début de chapitre en conséquence lorsqu'il en sera question.

J'ai toujours aimé le trope du voyage dans le temps vers l'époque des Maraudeurs, et si habituellement il s'agit d'un saut dans le passé, je me suis dis qu'il serait intéressant de voir ce que cela pourrait donner avec un personnage du passé, qui aurait des liens et des infos sur Tom comme sur d'autres personnages de l'époque de sa scolarité, l'intérêt que pourrait y voir la jeune génération de cette époque et le rapport de force inégal avec d'anciens camarades ayant avancé dans leur vie.

Bonne lecture !


Chapitre 1 : Little Hangleton

Août 1943 - Little Hangleton

Deux adolescents font face au corps figé d'un vieillard dans l'étude d'une vieille masure.

L'un d'entre eux, un jeune homme élancé au teint de porcelaine et la chevelure noir de jais, s'agenouille près de l'homme gisant au sol. Baguette pointée sur la tempe du vieillard, il murmure des formules complexes avec aisance. Juste derrière lui, une jeune femme du même âge, d'une petite stature, la peau olive, ses boucles brunes coupées en un carré court. Elle observe la scène les yeux voilés d'appréhension, le ventre noué par l'angoisse et la peur. Elle ne cherche même plus à dissimuler ses mains tremblantes.

Le jeune homme se relève, l'air satisfait et se tourne vers la fille lui offrant un sourire qui sonne faux. Il l'observe un instant puis s'avance vers elle. L'adolescente reste figée.

"Lizzy… petite sœur…"

Il replace une mèche derrière l'oreille de la jeune fille avant de déposer sa main sur son épaule. Ce ne sont plus seulement ses mains qui tremblent désormais. Les larmes lui montent aux yeux. Le jeune homme lui susurre à l'oreille.

"...C'est ton tour à présent…"

Une larme roule sur sa joue. Dans le lointain, des sirènes se mettent à retentir. La nuit rougeoie dehors. Il approche la pointe de sa baguette près de son visage. Les bombardements semblent à mille milles. Leurs souffles se figent.

Une terrible détonation se fait entendre non loin, brisant la vitre de la pièce. Elle est suivie d'une violente secousse qui ébranle toute la maison. En un éclair, la terreur laisse place à la trahison, et la trahison à la défiance dans le regard de la jeune fille. Profitant de leur instabilité, celle-ci projette l'autre adolescent au sol de toutes ses forces alors qu'elle se jette de l'autre côté de la pièce. Elle saisit vivement la baguette du vieil homme qui avait roulé au sol un peu plus tôt, lorsqu'elle l'avait désarmé, et d'un même mouvement la braque sur son opposant alors que celui-ci fait de même. Les deux adolescents se jaugent dans ce qui semble être une éternité. Le jeune homme soupire.

"Lizzy, ne me résiste pas. C'est inutile. Nous savons tous les deux que tu ne fais pas le poids."

La colère sourde se mêle à la terreur dans le regard de la jeune sorcière. Le duel est lancé dans un va-et-vient de sortilèges. Autour des deux jeunes gens, les objets comme le mobilier éclatent. Dans un instant de répit il lance :

"Allons Lizzy, sois raisonnable. Je ne compte pas te faire de mal… Pas à toi."

Il évite de peu un maléfice cuisant avant de reprendre.

"C'est seulement qu'il y a des choses qu'il vaut mieux que tu oublies à présent. Pour ton propre bien."

Son ton est mielleux. Le va-et-vient continue. Il sent qu'elle commence à fatiguer. Elle a peur, elle fait des erreurs, les erreurs s'accumulent. D'un sort informulé, il l'envoie soudainement valser au sol. Le temps qu'elle se ressaisisse, il est trop tard. Il la tient en joue. Il s'approche à pas lent sans ciller. Mais soudain, un flash lumineux intense éclate dans la pièce, les deux sorciers sont expulsés par une onde de choc, et alors qu'une nouvelle détonation se fait entendre, bien plus forte que la précédente, il n'y a plus que la douleur, la chaleur, le bruit. Puis c'est le noir.

Août 1976 - Little Hangleton

Elisa s'éveilla au milieu des décombres. La douleur pulsait dans tout son corps, elle sentait un liquide chaud et poisseux ruisseler sur sa tempe, son abdomen la faisait souffrir le martyre et des échardes de verre s'étaient enfoncées dans sa peau. Avec peine, elle repoussa les planches brisées de l'étagère qui s'était effondrées sur elle. Encore sonnée, elle jeta un coup d'œil circulaire à la pièce dans laquelle elle se trouvait. D'abord, elle constata qu'elle était seule, les rares bruits l'entourant étant sa respiration irrégulière, le tintamarre que produisait son cœur, et le bruit du vent s'engouffrant dans ce qu'il restait de la pièce. Nulle trace de Tom ou du vieillard. Si l'information en elle-même n'était pas vraiment rassurante, cela signifierait au moins un degré de danger moins imminent. Tom… Cela faisait longtemps maintenant qu'elle s'attendait à ce que le jeune homme lui plante un couteau dans le dos un jour ou l'autre, mais elle ne s'était certainement pas attendu à ce que ce jour arrive si tôt. Et encore moins être "sauvée" par une bombe. Elle observa le trou béant qui la jouxtait dans le mur de l'étude et les lambeaux de toits la surmontant. Elle l'avait échappé de peu.

Sa main toujours crispée sur la baguette qu'elle avait dérobée, elle tenta de se lever sans grand succès et retomba prise de vertiges au milieu des débris. Résignée, elle entreprit de fouiller sa besace sans fond à la recherche du dictame qui l'accompagnait toujours. Elle avait sans aucun doute bien fait de préparer plus de provisions que d'habitude pour l'été. Soignant tant bien que mal ses blessures, la jeune sorcière se demandait ce qu'il était advenu du scélérat qui lui servait de camarade. A ce stade, elle n'était pas sûre de savoir s'il y avait une réponse qu'elle préférait. La pensée de ce qu'il était advenu de Tom s'il n'avait pas, comme elle, échappé à la bombe lui donna un haut-le-cœur. Elle ne voulait pas non plus se laisser à repenser aux cris d'agonie qui avaient déchiré la nuit alors qu'elle attendait avec l'oncle de Tom. Ni à aucune des dernières actions du jeune homme d'ailleurs…

Elle devait sortir d'ici. Sortir d'ici et trouver de l'aide. Elle ne pouvait pas retourner à l'orphelinat, personne ne pourrait l'aider là-bas. Le professeur Dippet par contre saurait certainement quoi faire. Voilà. Encore fallait-il atteindre Poudlard. Peut-être y avait-il un espoir qu'une des cheminées de la masure soit reliée au réseau de cheminettes ? Ou au moins peut-être dégotterait-elle un vieux balai ? Elle doutait au vu des nombreux changements et de la complexité de leur trajet à l'aller qu'elle puisse, dans son état en plus, aisément prendre les transports moldus pour le retour. Le bus sorcier était à exclure aussi, avec les bombardements qui s'étaient intensifiés l'année passée, ce dernier avait cessé de circuler. Elisa faisait tourner ses méninges pour se sortir de là, préférant se focaliser sur des détails pratiques et terre-à-terre afin d'éviter de penser aux événements qu'elle venait de vivre et de ne pas perdre pied.

La jeune fille finit par se relever, époussetant les derniers bouts de verre et échardes de bois qui s'étaient pris dans ses vêtements, sans vraiment dénoter la présence des grains de sable encore un peu phosphorescents qui tombaient avec.

Elisa entreprit de retourner dans la pièce à vivre de la demeure morte. Elle ne put s'empêcher de noter en chemin que la masure semblait avoir changé. Si les débris et la poussière s'expliquaient facilement avec les bombardements, qu'en était-il de la végétation qui s'était installée dans la lugubre demeure ? Ses pensées furent pourtant stoppées net. Arrivée près de l'escalier, Elisa s'était mise à entendre des murmures. Sa main serrée sur la baguette du vieux Gaunt à s'en faire blanchir les jointures, elle retient sa respiration et se mit à avancer le plus discrètement possible sur le vieux parquet.

A mesure qu'elle s'approchait du salon, les susurrements s'intensifièrent. Entre ses doigts, la baguette semblait pulser. Comme saisie de transe, elle avançait hypnotisée jusqu'à faire face à une large peinture qu'elle avait vu animée par ce qui devait être les membres de la famille de Tom quelques heures plus tôt et qui à présent n'était plus qu'une toile noire et vide. Sa tête bourdonnant, Elisa n'était plus qu'à moitié consciente de ce qu'elle faisait alors que du doigt elle caressa la devise inscrite sur le cadre, la prononçant à voix haute. Il y eut un clic sonore, puis la peinture pivota dans un grincement sinistre, laissant apparaître une cache secrète.

A l'intérieur, Elisa trouva un coffret gravé de runes. Les chuchotements déferlaient dans sa tête comme une vague. Elle plaça la baguette de Morfin sur la serrure de la boîte, mais celle-ci s'ouvrit sans que la jeune fille ne jette de sort. Elle ne fit pas attention à la lueur qui n'avait émané qu'un instant des runes, ni au petit serpent noir sorti de la serrure qui s'était enroulé autour de la baguette qu'elle tenait, avant de remonter discrètement le long de sa main, pour disparaître sous sa manche. Son attention était absorbée par tout autre chose. L'ouverture du coffret révéla une bague sertie d'une pierre noire elle-même gravée d'un motif triangulaire. Les chuchotements hurlaient à présent autour d'elle. La bague l'appelait, irrésistiblement. Ils lui faisaient l'effet d'une supplique. Elle devait prendre la bague dans ses mains, l'enfiler à son doigt… Mais alors qu'elle s'apprêtait à se saisir de la bague, les images de Tom arrachant le bijou aux mains du vieux Gaunt alors qu'elle-même le tenait en joue avec sa propre baguette lui revinrent. Comme sortie d'un envoûtement, elle reprit ses esprits et referma le coffret brusquement. Sur une impulsion, elle se saisit de la boîte, la sortant de sa cache.

A peine Elisa s'était-elle saisie de l'objet qu'une bourrasque violente s'engouffra dans la pièce, refermant la cache dans un claquement sonore et projetant la jeune fille au sol. L'atmosphère pesante de l'endroit était devenue étouffante et la jeune fille vit soudainement les ombres dans la pièce s'agiter, s'étendant dangereusement dans sa direction. Étirées en tentacules, les ombres fondirent sur elle. Elisa se jeta sur le côté au dernier moment, manquant de peu de se faire oblitérer par l'une d'entre elles. Elle n'eut pas la possibilité d'éviter la suivante qui lui lacéra le flanc. A l'extérieur, le ciel se couvrait de nuages noirs qui vinrent obstruer peu à peu la lumière de la lune, plongeant un peu plus Elisa dans l'ombre. Les ombres de la pièce prirent la forme de créatures monstrueuses, semblant gagner en matérialité et en puissance. Les créatures d'ombres harcelaient Elisa. La sorcière tentait d'éviter tant bien que mal les assauts répétés des ombres se protégeant de quelques sortilèges peu efficaces. Blessée et à bout de souffle, le bourdonnement se faisait à nouveau entendre, saturant son esprit et alors qu'elle faiblissait sous l'assaut des ombres, la jeune fille se retrouva acculée. Tentant le tout pour le tout, alors que les ombres se refermaient sur elle, Elisa sprinta et se jeta par la fenêtre la plus proche.

Après un atterrissage particulièrement douloureux, la jeune fille se redressa et se mit à courir avec l'énergie du désespoir au milieu de l'orage qui avait éclaté. D'un bref coup d'œil en arrière, elle aperçut la masure vomir les créatures d'ombres à sa suite tandis que l'ombre projetée par la maison des Gaunt elle-même ondulait dangereusement. Slalomant entre les arbres, Elisa dévalait la colline à toute vitesse propulsée par un dernier shot d'adrénaline. Atteignant le chemin sinueux qui descendait vers la route du village, la jeune fille se prit les pieds dans une racine et finit sa course en un douloureux roulé-boulé s'écrasant sur l'asphalte en contre-bas. Sonnée et blessée Elisa releva la tête alors qu'une des créatures d'ombres l'atteignait. Mais alors que celle-ci se jetait sur elle, la créature s'écrasa sur une paroi invisible bordant la route. Elisa incrédule regarda les autres créatures d'ombres tour à tour se fracasser sur la frontière invisible qui la gardait à l'abri. A côté d'elle, son regard tomba sur une lourde pierre gravée de symboles. Elle observa les alentours et constata que plusieurs de ces pierres gravées ornaient le bord de la route. Les ombres étaient piégées dans leur cercle d'invocation. Elles ne pouvaient plus l'atteindre. Non-désireuse de s'attarder pour autant, la jeune fille se releva et se remit immédiatement en chemin, dès qu'elle eut repris ses esprits, boitant sur la route en direction de Great Hangleton.

La route fut difficile, ses blessures, la fatigue et le choc de l'ensemble des derniers événements l'écrasant sous la pluie diluvienne. Elisa arriva au village alors que les premières lueurs de l'aurore pointaient leur nez derrière le rideau de pluie qui s'était apaisé. A bout de souffle et de force, la jeune fille s'effondra sur le premier bout de trottoir venu.

Fébrile, elle tenta de sommairement s'occuper de ses blessures, sans grand succès s'agissant des vilaines balafres laissées par les ombres. Elisa finit le peu de dictame qui lui restait et pensa les entailles du mieux qu'elle put. La pluie avait finalement cessé. Trempée jusqu'aux os, assise au sol, elle faisait rouler la baguette du vieux Gaunt entre ses doigts, peinant à se concentrer sur un plan pour se sortir du bourbier dans lequel elle était coincée. Un bruit semblable à une détonation éclata soudain non loin, Elisa aperçut deux phares déchirer la brume du petit matin et foncer droit vers elle. Un violent crissement de pneus et une gerbe d'eau plus tard, la sorcière se retrouva nez à nez avec l'énorme roue d'un bus à double impériale d'un violet vibrant.

Alors qu'elle relevait les yeux, une voix nasillarde s'éleva.

"- Transport d'urgence pour sorcières et sorciers en perdition ! Alors ma petite demoiselle, où est-ce qu'on vous emmène ?" Une sorcière rabougrie et d'un certain âge se tenait sur le pas de la porte.

"- Heu… Je…je croyais que vous ne circuliez plus…" balbutia bêtement la jeune fille encore au sol.

"- Qu'on circulait plus ? En voilà une drôle d'idée ! T'entends ça Ernie ?" lança la vieille au conducteur, puis reportant son attention sur Elisa "Vous avez l'air en piteux état, dépêchez-vous de monter plutôt que de rester là avec votre air ahuri."

Et joignant le geste à la parole, la sorcière descendit du bus et tracta Elisa par le bras pour la relever, faisant preuve d'une force insoupçonnée pour son vieil âge.

"- Alors, on vous dépose où ?"

"- Est-ce qu'à Pré-au-lard ce serait possible ?"

"- Bien sûr qu'c'est possible, mais va falloir aligner la monnaie".

"- Heu oui bien sûr", répondit la jeune fille en farfouillant dans sa sacoche en quête de quelques gallions.

Une fois qu'elle eut payé la bonne femme lui tendit un ticket en ajoutant, "Vous devriez vous trouver un lit fissa, faudrait pas qu'vous nous fassiez un malaise."

Elisa acquiesça et suivant le conseil alla s'effondrer sur un lit à l'arrière du bus. L'épuisement la rattrapant, elle sombra dans un sommeil profond et agité.