Même si Tina avait consience que ce que venait de dire Emy n'avait comme unique but de la tourmenter, elle ne put empêcher un air triste d'apparaître son visage lorsqu'elle demanda :

— Qu'a-t-elle voulu dire ?

Norbert était totalement décontenancé, ne sachant pas comment réagir face à une telle remarque et une telle question. Il n'aurait jamais pensé qu'Emy oserait faire une telle chose. Il était vrai que, durant les deux années qu'ils avaient passées tous les deux à Poudlard, elle ne s'était jamais montrée très tendre avec lui. Mais elle ne l'était avec personne, alors cela ne l'avait pas dérangé plus que ce qu'il aurait pu croire.

— Norbert ? tenta de nouveau Tina, qui commençait à s'inquiéter, car elle n'obtenait pas de réponse.

— Je n'ai aucune idée de ce que… enfin… je ne sais pas ce qu'elle voulait dire, balbutia-t-il en réponse.

Cela ne sembla pas satisfaire Tina qui essayait de garder un air impassible. Elle n'arrivait pas à savoir ce que Norbert ressentait en cet instant. Et son cœur battait si vite qu'elle avait du mal à organiser ses pensées.

— Qui est Aysha pour vous ?

La question surprit le magizoologiste qui ouvrit la bouche sans qu'aucun son n'en sorte. Il se sentait blessé que Tina puisse penser une telle chose de lui, mais il savait qu'il ne pouvait pas lui en vouloir non plus. Aysha venait d'arriver et elle ne la connaissait pas comme lui la connaissait. Il semblait normal qu'elle se questionne sur la véritable nature de leur relation.

— Elle… hésita Norbert. Elle est ce qui se rapproche le plus d'une sœur pour moi. Rien de plus. Rien de moins.

Tina s'apaisa légèrement, mais elle continua :

— Vous voit-elle de la même manière ? Elle pourrait avoir des sentiments pour vous sans que vous ne le sachiez.

— Je vous assure, ce n'est pas de moi dont elle s'est éprise. Et puis, si c'était le cas, ça n'aurait pas été réciproque. Ce n'est pas elle que j'aime.

Se rendant compte de ce qu'il venait d'admettre, il s'empourpra et reprit, bégayant :

— D- Désolé. J- Je vous ai pris pour un B- Botruc.

— Je suppose que c'est un compliment venant de vous, répondit Tina, les joues rouges et les larmes aux yeux. Vous avez dit que vous aimiez quelqu'un ?

Norbert fixait la sorcière face à lui. Il aurait voulu lui répondre que c'était bien le cas et que c'était d'elle dont il était tombé amoureux, mais aucun mot ne sortit de sa bouche, comme s'ils étaient tous bloqués dans sa gorge. Il n'arrivait pas à gagner contre sa timidité. Son cœur battait trop vite, ses mains étaient moites, il ne voyait plus qu'elle.

Allez Norbert, fais pas ton lâche. Dis-lui maintenant !

La voix d'Aysha venait même lui rappelait ce qu'il devait faire. Ses yeux étaient plongés dans ceux de salamandre de Tina.

Qu'elle est belle, pensa-t-il intérieurement.

— Norbert ? s'inquiéta Tina, voyant qu'il ne répondait pas.

Elle lui attrapa le poignet et tout autour de lui sembla disparaître. Il oublia ce qu'il faisait ici – leur mission – et son cœur s'apaisa, sans qu'il ne puisse en expliquer la raison. Tout le stress sembla retomber et il se sentait bien. Il ne pourrait probablement jamais l'expliquer, mais ce soudain sentiment de légèreté et d'apaisement sembla lui donner du courage.

Lentement, il s'approcha davantage de la jeune femme qui ne recula pas. Doucement pour lui laisser la possibilité de le repousser, il vint déposer ses lèvres sur les siennes. Elle lui rendit immédiatement son baiser, doux et sincère, et ils se détachèrent, les joues rouges.

Les mots leur avaient toujours manqué pour s'exprimer. L'un parce qu'il ne parvenait pas à en trouver d'assez justes pour parfaitement illustrer ce qu'il ressentait, l'autre parce qu'elle était constamment éprise par la peur d'être rejetée. Le regard qu'ils échangèrent fut lourd de sens. Bien plus que tout ce qu'ils auraient pu dire avec des mots. Ils s'échangèrent un sourire et ils savaient.

Malheureusement, même les meilleures choses avaient une fin. La bulle qu'ils venaient de se créer explosa lorsqu'une voix leur parvint :

— C'est pas trop tôt, mais faudrait peut-être se reconcentrer sur la mission, vous ne pensez pas ?

Ils se tournèrent vers la personne qui venait de dire ça et furent surpris de voir April, suivie de près par Aysha. Cette dernière arborait un sourire magnifique qui réchauffa le cœur du magizoologiste. Il la reconnaissait. Cette fille de seize ans qui l'avait aidé à soigner un Boursouf. Leurs regards se croisèrent et il fut ravi d'y lire de la joie. Elle était heureuse pour lui.

— Je crois que j'ai quelque chose à raconter à Thésée, commenta Aysha en lui adressant un clin d'œil.

Il leva les yeux au ciel, amusé de voir à quel point son frère et son amie pouvait être des commères. Elle ne lui laissa cependant pas le temps de répliquer quoi que ce soit, car elle tira sa meilleure amie pour s'éloigner et disparaître dans une autre rue.

Ce soir-là, Thésée fut surpris de voir que Jacob et lui faisaient partis des derniers à rentrer. Cependant, il le fut davantage en voyant Aysha l'aborder avec un grand sourire sur les lèvres, ayant à peine eu le temps de fermer la porte derrière lui.

— Devine qui vient d'assister à la plus belle chose que nous attendions ? demanda-t-elle en affichant un air énigmatique, tout en gardant son sourire.

— Je suppose que c'est toi, à en juger la façon dont tu m'abordes, répondit-il d'un air absent, perturbé par le visage de son amie.

— Exactement ! Je pensais que cela n'allait jamais arriver !

— C'est génial… mais de quoi tu parles ?

Aysha laissa échapper un léger rire en secouant la tête, partagée entre l'amusement et l'exaspération de le voir si perdu.

— De Norbert et Tina, voyons ! De qui veux-tu que je parle ? Des fesses de Merlin ?

— Oh !

Thésée aurait sûrement félicité et charrié son frère en temps normal, mais il était trop occupé à observer ce sourire.

— Tu m'écoutes ? lui demanda la sorcière en faisant de grands gestes pour attirer son attention.

— Tu as un beau sourire.

Aysha ouvrit de grands yeux et son sourire s'effaça. Jacob, qui avait suivi leur échange, afficha un air étonné.

— Quoi ? s'étonna la sorcière en fronçant les sourcils.

— Je veux dire… que ça fait du bien de te voir sourire comme ça. Cela me manquait.

— Celui de Queenie me manque, s'exaspéra le Moldu. Il était magnifique.

Personne n'osa lui répondre et un silence s'abattit sur eux. Ce fut April qui le brisa en leur demandant, apparaissant dans l'entrée :

— Vous avez vue Emy et Dean ? Ils ne sont pas rentrés, expliqua-t-elle alors que ses amis hochaient négativement la tête. Et le soleil est déjà couché.

— Ils ont peut-être eu un problème, s'inquiéta Helena qui entrait à son tour dans le vestibule. Il leur est peut-être arrivé quelque chose ? Ils sont peut-être dans l'incapacité de rentrer ?

— S'ils avaient eu un problème, ils nous auraient envoyé un patronus, répondit sa benjamine.

— Ou peut-être qu'ils n'ont justement pas eu la possibilité d'en envoyer un.

Aysha ouvrit la bouche pour répondre, mais elle ne put rien dire, car un grand bruit retentit.

— Qu'est-ce que c'était ? demanda William en les rejoignant, suivi des autres.

Personne ne répondit. Dans un crépitement effrayant, les lumières clignotèrent avant de s'éteindre totalement.

— Des Détraqueurs… murmura l'Occlumens alors que la chaleur ne faiblissait pas.

— Comment le sais-tu ? demanda Thésée.

Elle pointa du doigt une vitre où du givre avait commencé à se répandre.

— Des quoi ? les questionna Jacob, un peu tourmenté.

— Des Détraqueurs, répéta Norbert. Les gardiens d'Azkaban, la prison des sorciers en Grande Bretagne.

— Que font-ils là ? les interrogea Manuela d'un air apeuré.

— Grindelwald a dû les envoyer, proposa Aysha en haussant les épaules. Ils ont sûrement dû…

La jeune femme ne continua pas. La porte d'entrée venait de s'ouvrir sur Dean et Emy.

— Où étiez-vous ? Vous avez vu les Détraqueurs ? s'empressa de demander Helena, inquiète.

— On se calme ! ordonna sa sœur en passant une main dans ses cheveux bruns. Pas la peine de nous bombarder de questions.

— On s'est inquiétés, nous !

— Pour rien, alors. On a juste amené des invités.

— Des invités ? s'étonna April. Mais qui ?

Pour toute réponse, les deux retardataires entrèrent et, devant la porte, apparurent une femme et un homme aux cheveux noirs. Du coin de l'œil, Thésée vit la mâchoire d'Aysha se contracter, mais il n'en savait pas la raison.

— Excusez cette visite tardive, marmonna la femme. J'espère que l'on ne vous dérange pas.

Personne ne répondit et, cette fois, Thésée vit Aysha serrer les poings.

— Que faites-vous là ? demanda Helena sur un ton sec.

— On a croisé Emy et elle nous a invités. J'aurais dû me douter qu'Aysha serait là.

Son regard se posa sur l'intéressée. Un regard noir et n'exprimant que de la haine.

— Oui, répondit Aysha. Vous auriez dû.

— Je pensais que nous t'avions mieux élevée. Ce n'est pas une manière d'accueillir ses parents.

— Pourquoi vous accorder l'accueil réservé aux parents alors que vous n'avez jamais été les miens ?

Un silence s'installa et une moue tordit le visage de la femme. Thésée la vit attraper quelque chose dans sa poche, puis, plus rien. Ce fut le noir complet.

Norbert ouvrit lentement les yeux. Il ne savait pas où il était. Il peinait à voir quelque chose, mais il sentait qu'il était attaché.

— Norbert… murmura une voix à côté de lui.

Il reconnut celle de son frère et il demanda :

— Où sommes-nous ?

— Personne ne le sait, répondit Aysha à sa place. Quand nous nous sommes réveillés, nous étions déjà ici, sans savoir comme nous y étions arrivés.

— Comment est-ce possible ?

— Dean et Emy nous ont trahis, voilà comment c'est possible, lui répondit la sorcière sur un ton amer. On aurait dû s'en douter.

— Comment voulais-tu qu'on sache, Aysha ? la questionna Helena. Emy n'a pas changé de comportement. Elle a toujours été comme ça. Et Dean aussi n'a rien montré.

— Oui, pour Dean, c'est étonnant. Mais on aurait dû se douter qu'Emy aurait rejoint Grindelwald. Après tout, elle partageait ses idées, non ? Elle a toujours été une horrible personne, tu devrais le savoir. Et ne me reprends pas sur ces propos, parce que tu sais que c'est vrai.

Helena ne répondit pas. L'atmosphère était tendue, alors Norbert préféra poser une question afin de briser le silence pesant qui s'était installé :

— Sommes-nous tous là ?

— Oui. Sauf Emy et Dean, évidemment.

L'auteur n'eut pas le temps de poser une autre question, car une porte venait de s'ouvrir, laissant entrer un peu de lumière. Il vit cette fameuse femme qu'il avait repérée avec Tina avant que leurs deux amis traîtres ne les interrompent. Un sourire mauvais étirait ses lèvres, ce qui laissa courir un frisson le long de l'échine de Norbert.

— Monsieur Norbert Dragonneau, fit-elle d'une voix grinçante, nous avons besoin de vous.

Il ne fallut que quelques secondes à la femme pour le libérer grâce à sa baguette et à l'emporter hors de la pièce, fermant la porte derrière elle, ce qui replongea le reste du groupe dans l'obscurité.

— Il faut faire quelque chose, murmura faiblement Thésée. Que vont-ils faire à Norbert ?

— Pas des choses très charmantes, si tu veux mon avis, marmonna April avant de se tourner vers la personne à sa droite qui n'arrêtait pas de bouger. Qu'est-ce que tu fabriques, Aysha ?

— Laisse-moi finir.

Lorsque tout le monde se tut, on pouvait entendre de légers cliquetis provenir des chaînes d'Aysha et il ne fallut que quelques secondes de plus pour qu'une boule de lumière ne se mette à léviter, dévoilant une Aysha défaite de ses chaînes.

— Vous… vous pouvez faire de la magie sans utiliser vos baguettes ? balbutia Jacob qui avait bien remarqué que ses amis n'étaient plus en possession de leurs fidèles amies.

— Comment as-tu fait pour défaire tes chaînes ? la questionna Helena sur un ton qui trahissait à quel point elle était dépassée par les événements récents.

Aysha se contenta de tendre son doigt à la lumière. Sur ce dernier, un Botruc était pendu.

— Pickett ?

La voix de Tina résonna un instant et Aysha s'approcha de la jeune femme. Elle se pencha si près de l'Auror que cette dernière sentit son souffle dans son cou. L'Occlumens passa son bras derrière la prisonnière afin que Pickett atteigne ses poignets. Pendant que le Botruc faisait son travail, Aysha assura :

— Ne vous inquiétez pas. Norbert n'est jamais sans défense.

Tina eut juste le temps de lui sourire pour la remercier avant qu'elle ne se redresse, Pickett étant parvenu à la libérer. Aysha fit passer le Botruc à tout le monde et, alors qu'elle allait se redresser après avoir libéré Thésée, qui était le dernier attaché, celui-ci attrapa son poignet et lui murmura :

— Nous croupirions encore ici si tu n'avais pas été là. Alors, merci.

Aysha se contenta de soutenir son regard jusqu'à ce qu'Helena leur fasse remarquer les bruits de pas et les murmures qui approchaient.

— Brune. Cheveux au carré, purent-ils entendre.

Thésée se leva et se plaça à côté de la porte, ce qu'April imita de l'autre côté, tandis qu'Aysha faisait disparaître la boule de lumière qu'elle avait fait apparaître un peu plus tôt. La porte s'ouvrir alors, et les deux partisans de Grindelwald entrèrent, armés de leur baguette.