Ce texte est un OS écrit lors de la participation à l'ASPIC (Ateliers Scripturaux Promouvant l'Imagination et la Créativité) organisé par le serveur Discord Potterfictions sur le thème des personnages LGBTQIA+ dans les fanfictions Harry Potter et le mois des fiertés.
Personnage : Percy Weasley
Lettre : B -
Couleur : Rouge
Cliché(s) :
1- Ça ne me dérange pas tant que tu ne me sautes pas dessus
2- La sexualité débridée des LGBT/ C'est pas de l'amour c'est que du sexe
Percy Weasley était un adolescent on ne peut plus normal, merci beaucoup. Sa vie était orchestrée à la perfection. De son emploi du temps de ministre jusqu'à ses chaussettes – triées alphabétiquement par couleur – en passant par l'organisation de sa bibliothèque personnelle. Entre ses devoirs de Préfet en chef, le mentorat qu'il proposait pour les élèves de cinquième année, son record de victoires consécutives du club de Bavboules et le projet d'horticulture qu'il menait pour la Professeure Chourave, il n'avait pas une minute à lui.
Sa septième année à Poudlard touchait à sa fin. Dans une semaine, il aurait passé son dernier ASPIC et pourrait enfin se réjouir d'en avoir fini avec l'école. Il savait déjà qu'un poste au Ministère l'attendait et il n'avait qu'une hâte : gravir les échelons. Il s'en savait capable et ses facultés d'organisation le laissaient confiant quant à la tâche à venir. Si ses calculs étaient bons – et ils l'étaient toujours – dans dix ans, il pourrait avoir atteint la place qu'il souhaitait.
À vrai dire, la seule chose désordonnée de sa vie – le fléau de son existence depuis six ans, s'il était honnête – était présentement allongée sur son lit. Son lit qui sentirait donc son parfum quand Percy irait dormir ce soir. Qui empesterait la combinaison de cèdre et de sauge qu'Oliver utilisait pour se laver, mélangée à l'effluve un peu mentholée de ses sortilèges de désodorisation.
Sur les draps, tirés au carré, qu'il avait passé sept minutes à faire ce matin, Oliver tournait, bruyamment, les pages de son magazine de Quidditch. Il agitait un pied, couvert de coton rouge et or, à un rythme déconcertant qui empêchait Percy de se concentrer et suçotait une Plume en Sucre avec entrain. Sa bouche était tachée de bleu et, toutes les quinze secondes, il léchait sa lèvre inférieure pour en retirer la couche de salive sucrée qui s'y était déposée.
Il était tout bonnement insupportable et Percy se redressa d'un coup, les pieds de sa chaise raclant sur le sol en pierre.
— Oliver, qu'est-ce que tu fais dans le dortoir ‽
Il releva la tête, la plume enfoncée dans la bouche déformant sa joue et haussa les épaules. Les yeux d'Oliver, dont la teinte exacte restait l'une des plus grandes frustrations de Percy, croisèrent les siens. Percy souffla par le nez. Étaient-ils de la couleur de l'écorce du Saule Cogneur ? Ou plutôt de celles des arbres sombres qui formaient la lisière de la Forêt Interdite ? La pénombre devait jouer, Percy savait que si le soleil les frappait correctement, ils étaient bien plus proches de la nuance du caramel.
— J'ai une heure de trou et j'attends l'entraînement de ce soir, répondit finalement Oliver en léchant une fois de plus sa lèvre inférieure.
Sa sucette luisait de salive au bout de son bâtonnet de bois et le regard de Percy alla du bonbon à la bouche d'Oliver à plusieurs reprises avant qu'il se reprenne.
— Oui, eh bien tu fais trop de bruit et tu me déconcentres. Je te prierais d'arrêter immédiatement.
Oliver haussa un sourcil et sourit. Merlin, ce sourire était tout simplement inacceptable. Un peu narquois, il plissait le coin des yeux d'Oliver, dessinait une fossette dans sa joue droite et dévoilait ses dents parfaitement alignées. C'était une rareté, des dents aussi régulières. Percy n'avait jamais vu ça sur personne d'autre et encore moins chez un joueur de Quidditch. Les Cognards ne se prêtaient pas très bien à l'existence d'une dentition irréprochable. Non pas que celui d'Oliver le soit. Il ne l'était pas. Il était insupportable. Comme le reste de sa personne.
— M'enfin, Perce, j'suis là et je lis en silence.
— Non. Non, Oliver, pas en silence. Si quelqu'un te cognait sur la tête avec le silence, tu ne saurais même pas le reconnaître. Tu es incapable d'être silencieux et tu le sais aussi bien que moi.
Un petit rire amusé échappa à Oliver et Percy aurait pu le frapper. C'était un son particulièrement détestable. À mi-chemin entre un ricanement et un soupir, il plissait le nez d'Oliver et résonnait dans la pièce malgré sa délicatesse. Comme tout ce que faisait Oliver, il prenait de la place. Beaucoup de place. Trop de place.
— Perce, qu'est-ce qui t'arrive ?
— J'aimerais pouvoir finir mon devoir pour le Professeur Binns dans le calme, c'est tout, Oliver.
— J'vais essayer d'être plus discret dans ce cas.
— J'ai peu d'espoir, mais je te laisse une dernière chance, maugréa Percy en remontant ses lunettes sur son nez avant de se rasseoir à son bureau.
Il ne fallut pas plus de trois minutes à Oliver pour reprendre son brouhaha naturel. Chlick, faisait les pages en tournant. Slurp, faisait sa langue en récupérant le sucre qui avait coulé sur sa lèvre. Pouf, pouf, pouf, faisait son pied sur les draps désormais défaits de Percy. Percy qui, perdant son calme, serra si fort sa plume d'oie qu'il en cassa le calamus entre ses doigts.
— Merlin, Oliver !
— Mais j'ai rien fait ! se défendit l'idiot en lâchant son magazine.
La cloche résonna dans la pièce, indiquant la fin de l'heure que Percy avait assignée à ses devoirs pour la journée. Il leva les mains au ciel et agita sa baguette pour ranger son matériel.
— Et voilà, je n'ai pas réussi à finir à cause de toi !
— C'est bon, on doit le rendre dans trois semaines ce truc.
— Et alors ? Plus vite je le termine, plus vite j'en suis débarrassé. Tu sais aussi bien que moi à quel point je déteste prendre du retard.
Ils argumentèrent tout le long du chemin qui les menait jusqu'au terrain de Quidditch. Percy abandonna Oliver devant la porte du vestiaire, salua ses frères et Harry d'un signe de tête et s'installa dans les gradins avec son livre. Oui, les entraînements de l'équipe de Gryffondor composaient une part importante de son emploi du temps chargé. Il était nécessaire de montrer son soutien à l'équipe de sa maison ainsi qu'à ses frères.
Avec un soupir frustré, il croisa les jambes et ouvrit le roman qu'il essayait de lire depuis le début de l'année. Il n'avait pas vraiment avancé dans sa lecture. Après tout, il n'avait que les heures d'entraînement pour le faire. Alors qu'il venait de finir une page, le bruit caractéristique d'un corps fendant l'air à vive allure lui fit lever le nez. L'équipe sortait du vestiaire. Ils étaient à l'heure pour une fois. Percy reprit sa lecture et bénéficia de l'heure complète pour avancer dans son roman.
Quand la cloche sonna de nouveau, il referma son livre. Il avait lu deux pages, c'était une bonne journée. Il attendit Oliver et en profita pour lire six pages supplémentaires avant que le capitaine termine sa toilette.
Oliver mouillé était encore pire qu'Oliver sec. La façon dont sa chevelure brune se hérissait sur sa tête après la douche et l'odeur entêtante de son savon étaient prodigieusement insupportables. Fut un temps, il avait accompagné Oliver du terrain jusqu'au vestiaire après les entraînements, mais il était intolérable quand il descendait de son balai. Les cheveux plaqués en arrière et les joues rougies par le vent, le souffle court et un voile de sueur sur la peau, il dépassait la limite de ce que Percy pouvait supporter. C'était un miracle qu'après six ans de vie commune, Percy ne l'ait pas jeté par la fenêtre de leur chambre.
Le reste de la journée se déroula selon le planning serré de Percy et il poussa un long soupir de contentement quand il se glissa sous ses draps quelques heures plus tard. Il prit une profonde inspiration et retint de justesse le grondement outré qui manqua de lui échapper. Bien sûr, comme il l'avait prédit, son coussin et sa couette sentaient comme Oliver. Il renifla le coton de sa taie d'oreiller à plusieurs reprises pour s'assurer qu'il ne se trompait pas et grogna pour de bon. C'était bien l'odeur d'Oliver. Familière, chaude et complètement inacceptable.
— Un souci, Percy ?
— Oui.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Rien.
— S'tu veux faire ta tête de mule et pas partager avec le reste de la classe, c'ton problème, Perce.
Il n'y avait rien. Définitivement rien, qui perturbait Percy. Tout allait très bien.
La voix, à moitié endormie, d'Oliver lui parvenait un brin étouffée au travers des rideaux qui encerclaient son lit. Percy l'aimait bien, la tessiture d'Oliver. Elle était plus tolérable que le reste de sa personne. Et il ne l'appréciait jamais autant que le soir dans la pénombre. Elle devenait un peu plus grave, à peine plus rauque, quand le sommeil commençait à s'emparer de son camarade de chambrée. C'était un son familier et apaisant. Si différente de la façon dont elle portait en plein jour, presque agressive. Le soir, elle se faisait douce. Elle avait accompagné l'endormissement de Percy depuis ses onze ans.
Percy était le seul à connaître cette voix. Du moins, il le supposait. Leur dortoir n'avait appartenu qu'à eux deux depuis le premier jour. Gryffondor n'avait reçu que deux garçons cette année-là. Serdaigle en avait eu six, Serpentard, cinq et Poufsouffle, quatre.
Percy se souvenait encore de la tête d'Oliver quand il avait été accueilli à Gryffondor. Il était ridiculement petit à l'époque. Plus petit encore que Percy qui n'était déjà pas bien grand. Il avait failli tomber de sa barque en arrivant sur les berges du Lac Noir, et Hagrid l'avait rattrapé par le col de ses robes pour l'empêcher de se noyer. Percy avait tourné le nez avec dédain. Il fallait vraiment être un incapable pour ne pas savoir descendre d'une chaloupe. Quand ils avaient découvert qu'ils se répartiraient leur dortoir à deux, Oliver avait décrété qu'ils seraient les meilleurs amis du monde à l'instant où ils avaient passé le seuil de la chambre qu'ils partageaient pour sept ans.
Percy n'avait pas vu d'inconvénient à l'idée. Après tout, même s'il avait l'air stupide, Oliver ne s'était moqué ni des robes de seconde de main de Percy ni de ses lunettes. Jusqu'à ce qu'il comprenne la tornade qu'était Oliver. En mouvement constant, incapable de rester dans le silence, le garçon était une source d'ennui à lui seul. Il lui avait fallu moins d'une semaine pour éparpiller ses vêtements aux quatre coins du dortoir et perdre la moitié de ses plumes dans le bazar. Percy avait été choqué par la force destructrice qu'il représentait. Et c'était dire quelque chose quand on avait grandi avec Fred et Georges Weasley !
Sa vie n'avait été qu'une suite de chaos vaguement arrangés depuis. Il s'efforçait de conserver une certaine forme d'organisation au sein de la pièce qu'Oliver s'empressait de déranger à la moindre occasion.
En seconde année, Oliver s'était fracturé le coude après son premier match et Percy avait été obligé de porter son sac et de prendre ses notes, quand Oliver avait refusé d'être soigné normalement. Il voulait « comprendre les moldus ». Ça n'avait duré qu'une semaine. Lorsqu'il avait réalisé qu'il faudrait bien plus que ça pour que son bras guérisse, il avait couru à l'infirmerie. Percy l'avait suivi, bien sûr. Et il avait bien fait. Oliver avait glissé dans le couloir et s'était cassé l'autre coude en tombant sur les pierres. Percy l'avait donc accompagné jusqu'à Madame Pomfresh qui s'était occupée de ses deux blessures avec un froncement de sourcils inquiet que Percy avait partagé. Il allait vraiment devoir garder un œil sur son camarade s'il ne désirait pas se retrouver esseulé dans son dortoir.
Oliver était définitivement une tornade humaine et Percy allait devoir redoubler de vigilance avec lui s'il tenait à conserver son meilleur ami en un seul morceau.
En troisième année, il s'était trouvé à l'infirmerie quatorze fois. Trois fois pour des accidents de potions, deux fois pour des altercations avec des Serpentards, une fois parce qu'il avait trébuché dans l'escalier et une autre parce qu'il avait voulu voir combien de Suçacides il pouvait garder en bouche – six, Oliver avait une grande bouche. Sept de ces visites avaient été liées au Quidditch, trois cognards en pleine tête, une chute de balais, deux collisions avec les buts et une avec un joueur adverse. Percy était devenu aussi familier avec l'aile de l'infirmerie qu'il l'était avec sa propre maison. Quand Oliver n'était pas occupé à lui hurler dans les oreilles, il était allongé sur un lit aux draps blancs.
Percy passait plus de temps à s'inquiéter pour sa tornade de meilleur ami que pour n'importe qui d'autre. Après tout, s'il ne le faisait pas qui s'en chargerait ?
En quatrième année, Oliver avait grandi d'un coup. Il dépassa Percy pour la première fois et Percy détesta ça. De quel droit Oliver s'était-il permis de prendre encore plus d'espace qu'à l'ordinaire ? Cette année-là avait été particulièrement pénible. Percy n'aimait pas trop y penser. Oliver avait découvert les filles et les filles avaient découvert Oliver. Un défilé de brunette, blonde et rouquine avait traversé la salle commune au bras de son camarade de chambre qui avait, Merlin les en garde, eu le bon goût de ne pas les faire monter jusqu'au dortoir.
Percy avait passé une année horrible, sa concentration avait été mise à rude épreuve par les multiples conquêtes d'Oliver et les heures de plus en plus tardives qui le voyaient rejoindre leur chambre.
En cinquième année, c'est son propre cœur qu'Oliver brisa. Il s'était entiché d'une Serdaigle qui, pour un temps, sembla le lui rendre. Percy avait, enfin, expérimenté une période de paix. S'il avait été bien plus irascible qu'à l'accoutumée pendant les huit mois qu'avait duré la relation d'Oliver et Amanda, c'était pour des raisons parfaitement inconnues.
Quand il avait trouvé Oliver assis au milieu de son lit en pleine après-midi, Percy ne s'en était pas formalisé. Il s'était installé à son bureau pour commencer à faire ses devoirs jusqu'à ce qu'un reniflement le pousse à relever le nez de son parchemin. Il avait déjà entendu ce son. Il était généralement accompagné d'une plaie, plus ou moins grave. Percy avait sauté de sa chaise avec une violence rare et s'était précipité au chevet du garçon.
— Où ?
— Hein ? avait reniflé Oliver en s'essuyant les yeux du dos de la main.
— Où est-ce que tu as mal ? Est-ce que je dois t'emmener voir Madame Pomfresh ?
— J'suis pas blessé, Perce.
Percy ne l'avait pas cru. Oliver ne pleurait que quand il était blessé. Il avait entrepris de tirer sur le col du haut de son meilleur ami pour observer ses épaules et clavicules, avait tourné entre ses doigts ses coudes et ses poignets, avait remonté l'ourlet de son t-shirt rouge pour étudier son ventre et ses côtes. Depuis quand est-ce qu'Oliver avait autant de muscles ? Quand avait-il trouvé le temps de se dessiner autant d'abdominaux ? Est-ce que c'était normal d'en avoir autant ? C'était une nouveauté que Percy n'était pas sûr d'apprécier. Il était lui-même particulièrement mince et n'aimait guère que son meilleur ami devienne une masse de muscles. Il décida d'ignorer la question et palpa ses hanches avant qu'Oliver ne s'empare de ses deux mains. Il avait les joues écarlates quand il croisa le regard de Percy.
— Perce ! Je vais bien.
— Oliver, tu pleures ! s'énerva Percy. Où es-tu blessé ‽
— Nulle part ! cria Oliver d'une voix cassée alors que ses yeux se remplissaient de larmes. Amanda m'a jetée.
— Oh.
Oh. Percy voyait bien à quel point la nouvelle semblait attrister son meilleur ami, mais il devait avouer que c'était une forme de soulagement pour lui. Plus besoin de supporter les gloussements idiots de la jeune femme ni de toquer à la porte de son propre dortoir pour y entrer. Bien sûr, cette évolution impliquait qu'Oliver serait de nouveau seul et qu'il viendrait à nouveau prendre autant de place qu'avant dans la vie de Percy, mais c'était un inconvénient avant lequel il pourrait vivre. Il y avait déjà survécu cinq ans après tout.
En sixième année, Oliver avait changé les choses. Percy avait poussé durant l'été et dépassait à nouveau son meilleur ami de presque une tête. Il n'avait pas pu s'empêcher de sourire d'un air satisfait quand le jeune homme l'avait serré contre lui sur le quai de la gare. Les épaules d'Oliver s'étaient davantage élargies, mais, au moins, Percy était plus grand. L'année commençait bien. Le festin avait été particulièrement délicieux. Percy avait conservé son badge de Préfet en compagnie de Pénélope – qui lui avait souri plus largement que d'habitude – et Oliver avait été nommé Capitaine de l'équipe de Quidditch ce qui le remplissait d'allégresse. Et le rendait donc encore plus insupportable qu'à l'accoutumée. Tout allait bien dans le meilleur des mondes.
Percy était occupé à ranger ses livres dans la petite bibliothèque près de son lit quand Oliver s'était raclé la gorge. Percy avait tourné la tête vers lui. Assis sur son matelas, simplement vêtu de son bas de pyjama, Oliver avait passé une main dans ses cheveux. Un geste qu'il ne faisait que lorsqu'il était anxieux. Percy avait attendu. Il valait toujours mieux attendre avec Oliver, si on forçait, il se refermait comme une huître et on ne pouvait plus rien en tirer.
— Je suis bisexuel.
Percy s'était arrêté, un livre à mi-chemin de la bibliothèque. Le silence qui était tombé sur la pièce avait été anormal. Premièrement, parce que rien n'était jamais silencieux si Oliver était présent et deuxièmement, parce qu'il avait été si lourd qu'Oliver avait à coup sûr entendu la déglutition de Percy. Percy qui prit le temps de cataloguer l'information dans le dossier compatible dans son esprit. Il n'était pas choqué, pas dégoûté non plus. La surprise était sans doute l'émotion qui correspondait le mieux. Après tout, il n'avait vu Oliver qu'avec des filles.
— D'accord.
— C'est tout ce que tu dis ?
— Qu'est-ce que tu voudrais que je te dise de plus, Oliver ?
— Je… J'sais pas.
— Bien, si jamais tu trouves la réponse à cette question, je te prie de m'en faire part. En attendant, j'aimerais finir de ranger ma bibliothèque.
— OK…
Le silence était retombé et Percy l'avait détesté plus que tout au monde. Il était trop lourd, trop épais, trop silencieux.
— Oliver.
— Oui ?
— Tout va bien. Tu es toujours mon meilleur ami. Merci de me l'avoir dit, avait-il lâché sans quitter des yeux la couverture usée du livre dans sa main.
Un souffle et un reniflement avaient résonné dans la pièce. Le silence était revenu avant d'être percé par la litanie des petits bruits qu'Oliver ne pouvait s'empêcher de faire. Percy avait souri et reprit son rangement avec un soupir contenté.
Les choses avaient changé peu de temps après ça.
Oliver avait entamé une relation avec un Poufsouffle de leur année. Ils étaient – si l'on en croyait les filles de Gryffondor – adorables. Percy ne partageait pas l'opinion de ses camarades féminines. Alicia, Angelina et Katie n'avaient qu'Oliver et Esteban à la bouche. À quel point ils formaient un beau couple, à quel point elles étaient contentes de voir Oliver enfin accepter sa sexualité, à quel point Percy était un ami formidable pour le soutenir comme ça. Percy n'avait rien dit. Il n'avait pas dit que la présence d'Esteban dans leur dortoir créait un désordre encore plus grand qu'à l'ordinaire. Que l'odeur d'Oliver avait changé, désormais mêlée à celle, tout à fait horrible, de son petit ami. Il n'avait pas parlé d'à quel point son planning avait été profondément perturbé par la nouvelle relation d'Oliver qui semblait n'en avoir rien à faire.
En réalité, il n'avait rien dit à personne pendant presque trois semaines. Si Oliver tenait tant que ça à trimbaler son Poufsouffle de compagnie partout avec lui, Percy saurait se rendre invisible. Il l'accompagnait toujours aux entraînements – après tout, ils étaient inscrits sur son emploi du temps – et l'attendait systématiquement à la porte du vestiaire. Il n'avait, cependant, pas échangé un mot avec Oliver depuis exactement trois semaines, deux jours, six heures et huit minutes quand il entendit la voix de Stewart résonner depuis l'intérieur. Le reste de l'équipe avait quitté les lieux depuis déjà cinq minutes et Percy s'impatientait.
— Eh, Wood ?
— Ouais ?
— C'est vrai que t'es pédé ?
Un silence anormal était tombé sur le vestiaire et Percy avait tendu l'oreille avec plus d'acuité.
— Qu'est-ce que t'as dit ? avait demandé Oliver.
— Bah quoi, j'ai le droit de savoir, non ? J'veux dire on sait tous comment vous êtes, hein ! Z'avez beau être en « couple » z'êtes toujours prêt à vous faire enfiler par le premier venu.
Le silence était devenu assourdissant. Percy avait dégluti à de multiples reprises. Il attendait qu'Oliver se défende, qu'il ouvre la bouche et le remette à sa place, comme il savait si bien le faire d'ordinaire. Il était toujours le premier à se jeter en avant quand il s'agissait de protéger les autres. Percy avait même dû lui retirer des points – l'idiot – après qu'il ait planté son poing dans le nez d'un Serpentard qui avait insulté une première année de Poufsouffle, pas plus tard que la veille. Il attendit, mais rien ne vint.
— J'veux dire, le prends pas mal, Wood, hein, vraiment ! Ça me dérange pas tant qu't'essaies pas de me sauter dessus. J'sais que j'suis pas dégueu, mais j'suis pas de ce bord.
Le silence avait continué et Percy l'avait trouvé encore plus insupportable que les babillements d'Oliver. Il avait poussé brutalement la porte des vestiaires. Pour la première fois depuis des semaines, il avait été assailli de plein fouet par l'odeur d'Oliver. Sauge, cèdre et une vague trace de transpiration. La pièce était un véritable sauna et Oliver, les joues rouges et les yeux brillants, était figé près de la sortie de la zone des douches. Des gouttelettes tombaient de ses cheveux et roulaient le long de son torse, et les doigts qui tenaient sa serviette autour de ses hanches le faisaient avec tant de force que ses phalanges en étaient blanchies. Percy n'avait pas réfléchi davantage.
— Stewart.
— Oh, salut, Weasley, t'es venu récupérer ton p'tit ami ?
— Non. Vingt-cinq points en moins pour Gryffondor, une semaine de retenue.
— Quoi ‽ Comment ça ? Pourquoi ? J'ai rien fait !
— Perce…
— Ferme-la, Oliver.
Il avait levé une main en direction de son meilleur ami et contenu de son mieux la colère, étrangère, qui enflait au creux de sa poitrine. Il ne remarqua pas le choc qui s'étala sur les traits d'Oliver à l'entente des mots qu'il avait employés sans y penser.
— Et tu iras voir la Professeure McGonagall pour lui expliquer pourquoi il faut qu'elle trouve un nouvel Attrapeur le plus rapidement possible.
— QUOI ‽
— Je suppose que notre Directrice de Maison ne sera pas enchantée d'apprendre que l'un des membres de son équipe tient des propos homophobes qui risquent fort de blesser son gardien et capitaine. Tu as eu de la chance que ce soit moi qui ait entendu cette conversation. Je n'aurais pas donné cher de ta peau si mes frères avaient été présents.
— J'vais t'éclater la gueule, Weasley.
Il pensa à Charlie, quelque part en Roumanie. Charlie qui avait très probablement subi le même genre de remarque. Peut-être même pire. Sans hésiter, il agita sa baguette et immobilisa le futur ex-Attrapeur de Gryffondor. Il souffla par le nez puis la dirigea vers Oliver qui le fixait la bouche ouverte. D'un mouvement souple, il envoya une grande vague d'air chaud sur son meilleur ami.
— Habille-toi, Oliver. On rentre.
Il lévita les vêtements du gardien jusqu'à lui et détourna pudiquement le regard tandis qu'il s'habillait. Une fois prêt, Oliver s'était emparé de la main tendue de Percy et l'avait suivi jusqu'à leur dortoir. Le lendemain, Stewart avait quitté l'équipe, fait perdre cinquante points supplémentaires à Gryffondor et hérité de deux mois complets de retenue. Harry avait rejoint l'équipe deux jours plus tard. Le même jour, Oliver avait rompu avec Esteban, sans jamais vouloir expliquer la raison de cette rupture à Percy. Percy ne s'en était pas plaint, il n'avait pas besoin de savoir « pourquoi », il avait juste besoin de savoir qu'Esteban ne trainerait plus dans leur chambre.
Les choses s'étaient faites tellement progressivement après ça que Percy n'avait pas réalisé. Il était encore incapable aujourd'hui de pointer avec précision le moment où les choses avaient vraiment changé.
Oliver avait simplement commencé à s'installer plus près de lui, de plus en plus près, jusqu'à ce que sa cuisse soit toujours pressée contre celle de Percy, que son épaule frotte toujours contre la sienne et que l'odeur de son shampoing s'imprègne dans chacun des vêtements de Percy. Un jour, alors qu'ils étaient assis côte à côte sur le lit de Percy, il lui avait pris la main.
Percy avait été surpris, mais les mains d'Oliver étaient étrangement douces dans la façon qu'elles avaient de toucher les siennes. Ses paumes étaient rêches, mangées par les cals qu'il se créait en tenant son balai. Elles étaient chaudes et c'était une sensation agréable. Alors Percy l'avait laissé faire. Oliver avait joué avec ses doigts, les avait entrelacés aux siens et les avait laissés entre eux. C'était confortable.
Il avait ensuite commencé à passer son bras autour de la taille de Percy. Puis, il était venu s'appuyer contre son épaule. Il avait exigé qui Percy de lui lise à voix haute son roman du moment. Il s'était endormi plusieurs fois comme ça, sa tête brune reposant sur le pectoral de Percy. Percy qui n'avait pas pu s'empêcher de glisser les doigts dans ses cheveux. Ce n'était qu'une simple curiosité. Après six ans à les voir, il s'était souvent demandé s'ils étaient aussi doux qu'ils en avaient l'air. Oui, ils l'étaient. Une nouvelle chose inacceptable.
Un jour, Oliver avait été particulièrement insupportable. Tant et si bien que Percy avait menacé de ne pas continuer sa lecture, pourtant passionnante. Oliver lui était grimpé dessus pour essayer de s'emparer de l'ouvrage. Il était bien plus lourd que Percy, son poids sur ses cuisses et son torse avait été intolérable, horrible. Il était chaud et son corps était étonnamment moelleux pour quelqu'un qui possédait tant de muscles. Quand il avait enfin réussi à refermer la main sur son bouquin, son nez avait été pressé contre celui de Percy et leurs regards s'étaient croisés durant une fraction de seconde. Oliver avait relâché la tension qu'il maintenait sur le livre et avait avalé d'un mouvement, à la fois infinitésimal et gigantesque, la distance qui séparait ses lèvres de celles de Percy.
La bouche d'Oliver avait été bien plus douce que ce à quoi Percy aurait pu s'attendre. Ses lèvres s'étaient assouplies contre celles de Percy et sa barbe naissante avait frotté contre son menton de façon intrigante. C'était à la fois profondément différent de lorsqu'il embrassait Pénélope et en même temps mille fois plus agréable. Intolérable, en somme. Oliver s'était reculé en catastrophe, mais, en croisant le regard de Percy, avait souri et s'était penché pour l'embrasser de nouveau.
Percy l'avait laissé faire, après tout, que pouvait-il faire d'autre ? Le repousser ? Lui dire d'arrêter ? Après tout, Oliver restait son meilleur ami. Non ? Ils pouvaient bien s'étreindre un peu si ça rendait Oliver heureux.
Les baisers étaient donc rentrés dans leur routine du soir. Percy commençait toujours par lire, il arrivait généralement à terminer un chapitre avant qu'Oliver perde patience et entreprenne de mordiller et embrasser la peau de son cou, puis celle de ses lèvres. Ils finissaient affalés sur le lit de Percy, au milieu de ses draps défaits, leurs jambes entrelacées et les doigts d'Oliver enfouis dans les mèches rousses de Percy tandis que lui refermait ses mains sur ses hanches. Ils s'embrassaient longtemps, jusqu'à ce que leurs bouches soient gonflées, que le menton de Percy brûle sous les assauts de la barbe qu'Oliver refusait de raser le soir. Ils s'embrassaient jusqu'à ce que le seul goût que Percy soit capable de percevoir soit la saveur de la langue d'OIiver.
C'était profondément pénible, cette sensation de picotement qui ne disparaissait pas vraiment jusqu'au matin, ce petit goût qui restait là, aussi têtu que la personne à laquelle il appartenait. Percy avait, plus d'une fois, été obligé de s'occuper d'un léger problème après leurs séances de baiser. Dans le noir, les rideaux de son lit fermés et deux doigts pressés contre sa bouche encore brûlantes, Percy avait laissé ses longues phalanges couvertes de taches de rousseurs glisser sous l'élastique de son bas de pyjama. S'il s'agissait d'ordinaire d'une affaire rapide, d'un simple besoin à assouvir pour pouvoir revenir à ses activités ou s'endormir en paix, dans ces moments, il prenait son temps. Parce que la sensation fantôme des lèvres d'Oliver sur les siennes était presque plus agréable que celle de sa paume.
Malheureusement pour Percy, un soir, Oliver découvrit son petit problème. Alors qu'ils s'embrassaient, Oliver plia le genou, tant et si bien que sa cuisse vint presser contre l'entrejambe de Percy qui ne put retenir le soupir surpris qui lui échappa. La sensation était si intolérable qu'il inclina son bassin vers l'avant pour la reproduire. Il devait en avoir le cœur net. Le rire léger d'Oliver résonna fort dans la pièce quand ses hanches ondulèrent contre celle de Percy et qu'il lui tira un nouveau gémissement.
Ainsi commença le troisième énorme changement que connut leur relation. Les baisers restèrent, mais s'accompagnèrent d'autres choses. D'abord, il y avait eu ces frottements, désespérés et précipités. Puis leurs mains s'étaient mêlées à la partie, puis leurs bouches. Il y avait aussi eu les après-midi passées ensemble à Pré-au-Lard, lors desquelles Oliver n'invitait plus ses conquêtes. Conquêtes que Percy ne croisait plus d'ailleurs, ce qui lui convenait très bien. Il avait – Percy n'était pas sûr de savoir pourquoi – commencé à lui faire des cadeaux. Une nouvelle plume, un carnet à pages perpétuelles, une bourse neuve pour ranger ses Bavboules et un sécateur haut de gamme.
Ils ne s'étaient pas vus des vacances. Ce qui arrangeait Percy. Oliver ne lui manquait pas. Son rire grave, la façon dont il se cognait toujours dans le chambranle de la porte parce qu'il était trop pressé pour regarder où il mettait les pieds, l'odeur de son shampoing. Non, vraiment, rien de tout cela ne manquait à Percy durant les deux mois d'été.
Il avait enfin le temps de lire en paix, sans le poids familier sur son épaule. Il pouvait s'appliquer autant qu'il le souhaitait pour faire ses devoirs sans le jacassement incessant de son colocataire. Il pouvait s'endormir sans être importuné par la respiration paisible d'Oliver au travers des rideaux. Sa brosse à dents ne trainait plus près de la sienne et quand il avait froid il n'avait qu'à prendre un de ses cardigans. Ils étaient tout aussi chauds que les sweatshirts moldus que portait Oliver.
Non, vraiment, Percy adorait passer l'été seul et retrouver le visage bronzé d'Oliver sur le quai de la gare ne lui faisait ni chaud ni froid. Il n'était pas enchanté le moins du monde de l'étreinte dans laquelle il s'était engouffré à peine le mur traversé. Il n'avait, d'ailleurs, pas inspiré à plein poumon le parfum de son camarade de chambre.
Et les voilà, l'année suivante. La septième année. La dernière année.
Percy n'était certainement pas terrifié à l'idée d'un futur qui ne contiendrait pas la présence constante d'Oliver à ses côtés. En réalité, il avait hâte. Hâte de quitter le Terrier, de prendre un petit appartement quelque part sur le Chemin de Traverse, qu'il ne partagerait avec personne. Il avait hâte de vivre dans le silence, d'enfin savoir où étaient rangées ses affaires. Il avait hâte. Vraiment hâte.
Un raclement de gorge le tira hors de ses pensées et il sursauta légèrement sous sa couverture qui sentait toujours Oliver.
— Oliver ?
— Oui ?
— Tu m'as jamais dit ce que tu comptais faire quand tu en aurais fini avec Poudlard ?
— Ah bon ?
— Non.
— J'ai eu des propositions de la part de plusieurs équipes de Quidditch.
— Oh.
Oh.
— À l'étranger ?
— Hmhm, entre autres, mais deux clubs au Royaume-Uni aussi.
— Ah ?
Pitié, pas Flaquemare. Pas Flaquemare. Flaquemare. Si Flaquemare offrait une place à Oliver, il ne quitterait jamais l'Angleterre. Peut-être même qu'il désirerait partager l'appartement de Percy. Ce serait intolérable. Oliver était bien trop doué pour rester coincé en Angleterre, il avait les moyens de jouer partout dans le monde. Percy espérait vraiment que Flaquemare ne l'avait pas repéré, Oliver méritait de découvrir l'Univers sans Percy.
— Ouais, Appleby et Flaquemare.
La gorge de Percy se serra et il laissa, sans le vouloir, échapper un petit couinement. Dans le silence qui suivit la déclaration d'Oliver, il n'entendit rien. Jusqu'à ce que les tentures de son baldaquin s'ouvrent. Dans le filet de lumière qu'offrait la Lune, presque ronde, Oliver lui apparut. Les cheveux complètement ébouriffés et une trace de draps sur la joue et il inclina la tête sur le côté.
— Perce ?
— Oui ? marmonna-t-il.
— Pourquoi tu pleures, Percy ?
Oliver se glissa derrière les rideaux et s'installa sur le lit de Percy comme s'il s'agissait du sien. Il se faufila sous la couverture et prit la main de Percy dans la sienne avant de le tirer contre son torse. Percy inspira profondément son odeur familière, bien plus puissante que celle qui trainait sur ses draps. Ses draps qui, qu'il le veuille ou non, sentaient toujours comme Oliver.
— J'vais accepter la proposition de Flaquemare. C'est mon club préféré. J'vais nulle part, Percy.
— Tu devrais. Avec ton talent tu pourrais te faire une place dans la ligue américaine.
Oliver rit et le son se réverbéra dans sa cage thoracique, ricocha contre l'oreille de Percy et vint se nicher contre son cœur. Une petite boule de chaleur parfaitement insupportable qui irradiait à l'intérieur de sa poitrine. Il avait envie de vomir.
— Nah, j'aime trop Flaquemare. Puis, si j'te laisse tout seul, qui va déranger tes étagères quand tu regardes pas ? Tu t'ennuierais trop.
— Arrête de parler, Oliver. Il est tard.
— Qui est-ce qui t'empêcherait de faire imploser ta grosse cervelle ?
Oliver se pencha et posa ses lèvres sur celle de Percy avant qu'il ne puisse rétorquer et qui répondit avec ferveur à son baiser. C'était devenu courant dans leur relation. Oliver grimpait dans le lit de Percy, s'y installait comme si c'était le sien, s'amusait de l'empêcher de se concentrer et finissait par éteindre le cerveau de Percy. Triste affaire que cette histoire d'éteignage de cervelle, en vérité. Il suffisait qu'Oliver le touche un peu trop longtemps pour qu'il devienne la seule pensée capable d'occuper son esprit. C'était franchement pénible, surtout quand Percy essayait de réfléchir. Il fallait qu'il trouve une solution pour réussir à fonctionner correctement lorsqu'Oliver faisait ce genre de choses. Ce fut dans cette optique-là qu'il glissa ses doigts sous le haut de pyjama d'Oliver pour tracer du bout de l'index les creux qui marquaient ses abdominaux. Ce fut aussi avec cette idée en tête qui enfouit sa seconde main dans les cheveux d'Oliver et qu'il l'invita à grimper sur lui.
Parce qu'il fallait vraiment trouver une solution pour qu'Oliver arrête d'occuper ses pensées, il se dévêtit avec précipitation avant de faire de même pour le garçon qui prenait trop de place dans sa vie depuis des années.
Il haleta quand la peau nue d'Oliver entra en contact avec la sienne, quand ses phalanges tracèrent des symboles dénués de sens sur ses côtes, quand ses dents se plantèrent dans le creux de son cou tout doucement.
Il gémit, sans le vouloir, quand la langue d'Oliver découvrit un téton érigé et vint le taquiner. Ses doigts s'enfouirent dans les cheveux d'Oliver, par réflexe – vraiment, ce n'était pas de son fait –, quand sa bouche se referma sur son érection et qu'il entreprit d'enfoncer son sexe jusqu'au fond de sa gorge. Encore une des choses parfaitement intolérables qu'était capable de faire Oliver. Percy n'avait jamais réussi, et il avait essayé, encore et encore. C'était en s'entraînant qu'on devenait meilleur, lui avait toujours répété sa mère. Il n'était pas sûr qu'elle lui avait donné ce conseil en ayant ce genre de truc en tête, mais là n'était pas le sujet.
La question, non, le problème. C'était qu'Oliver était meilleur à ça que Percy.
— Percy ?
— Oui ?
— Tu penses trop.
La phalange lubrifiée d'un sort d'Oliver s'enfonça en lui et fit taire le flot de ses pensées. Après tout, c'était la moindre des politesses, d'arrêter de réfléchir quand votre meilleur ami bisexuel venait appuyer contre votre prostate, non ? C'était la chose censée, quand on était un homme pas du tout amoureux et parfaitement hétérosexuel, non ?
Percy s'étrangla sur un gémissement quand le doigts d'Oliver pompa à un rythme régulier au creux de son ventre. Les yeux fermés, les mains fermement accrochées aux draps et à la chevelure de son meilleur ami, il se cabra dans le lit avec un grognement.
— Qu'est-ce que tu veux, Percy ?
— Gn…
— Nan, j'veux que tu me dises.
— Oh, par Merlin Oliver ! Tu sais très bien ce que je veux ! Tu vas me faire le plaisir de fermer ta grande bouche et finir ce que t'as commencé !
— C'est-à-dire ?
— Je veux que tu m'empêches de penser Oliver !
— À vos ordres, m'sieur.
Le sourire qu'il aperçut sur les lèvres de son meilleur ami aurait dû lui mettre la puce à l'oreille. Le deuxième doigt qu'il glissa en lui, aussi, après analyse. Mais, voyez-vous, Oliver était particulièrement doué pour suivre les consignes. Percy était donc dans l'incapacité de réfléchir. Le monde ne se résumait qu'à l'odeur de la sauge et du cèdre, qu'à la chaleur de la peau d'Oliver sur la sienne et qu'à la sensation étourdissante des phalanges… qui venait de s'extraire de lui.
Le souffle court et les joues écarlates, Percy se releva sur les coudes pour foudroyer du regard Oliver qui s'était redressé à genoux. Percy oublia ce qu'il s'apprêtait à dire quand ses yeux se posèrent sur la main d'Oliver qui s'activait sur son sexe tendu. Il avança maladroitement sur ses genoux et poussa contre les cuisses de Percy qui écarta les jambes pour lui faire de la place.
— Prêt ?
— Oui.
Pas de question supplémentaire. Oliver appuya l'une de ses mains – Merlin soit remercié pas celle couverte de lubrifiant – sur l'oreiller près de la tête de Percy et de l'autre guida son sexe en lui.
Percy inspira face à la brûlure, mais elle s'estompa rapidement. Il cligna des yeux en réalisant ce qui se passait. Le poids d'Oliver sur lui, en lui. Comment une chose aussi nouvelle pouvait-elle paraître aussi familière, aussi nécessaire ? C'était impossible. Du genre d'impossibilité insupportable dont seul Oliver Wood était capable.
Il inclina ses hanches de façon expérimentale et couina en sentant le sexe de son meilleur ami se déplacer en lui. Oliver grogna contre la tempe de Percy et embrassa sa pommette avant de demander à voix basse.
— Dis-moi qu'j'peux bouger, Perce, s'te plait.
— Tu peux bouger, Oliver.
Extrêmement mauvaise idée. Terrible idée, même. La sensation poussa les yeux de Percy à se fermer et il haleta.
— Encore.
Était-ce vraiment lui qui venait d'articuler ça ?
— Attend.
Comment ça attendre ? Absolument pas ! Oliver avait stoppé le va-et-vient de ses reins et Percy s'apprêtait à lui indiquer que c'était l'inverse de ce qu'il venait d'ordonner quand les mains d'Oliver se glissèrent sous ses jambes. Les genoux de Percy se trouvèrent dangereusement près de ses oreilles après la manœuvre et Oliver lui sourit entre eux. Ses mèches brunes lui tombaient dans les yeux alors que son visage était comme encadré par les cuisses couvertes de taches de rousseur de Percy.
— Prêt ?
— Oui.
Oliver entama un rythme régulier qui fit tourner la tête de Percy. Le mouvement était millimétré pour frotter de façon constante contre sa prostate et il laissa échapper une longue plainte rauque. Il y avait peut-être des mots là-dedans – encore, arrête pas, comme ça – mais personne n'aurait pu le prouver.
Le souffle de Percy était erratique, sa peau brûlante et quand la paume calleuse d'Oliver se referma sur son érection, il eut l'impression d'imploser. Dans les décombres de sa psyché, tout ce qu'il restait c'était le visage d'Oliver. Le sourire plein de fierté qu'il arborait et l'éclat lumineux de ses yeux caramel. Son odeur de sauge et de cèdre et la tendresse avec laquelle il avait toujours tenu la main de Percy dans la sienne. Comme s'il était quelque chose de rare, de précieux, quelque chose qui valait la peine d'être chéri. Comme s'il avait trouvé, dans ce corps gringalet et couvert de taches de son, quelque chose qui méritait son affection et son attention.
Les larmes jaillirent des yeux de Percy sans qu'il puisse les retenir et il cria son orgasme en les sentant rouler sur ses joues et ses tempes. Ses bras se refermèrent violemment autour d'Oliver qui s'affala sur lui en le suivant. Contre sa clavicule, il percevait l'humidité de la respiration saccadée du garçon et son dos était moite sous ses paumes. Ç'aurait dû être désagréable toute cette moiteur, sans compter le sperme qui séchait sur son torse et cherchait à s'écouler hors de lui. Ç'aurait dû être profondément inconfortable, mais il n'aurait lâché Oliver pour rien au monde.
Dans le silence – relatif comme toujours quand Oliver était présent – qui suivit, Percy se racla la gorge et s'exprima d'un ton pincé.
— Je crois que je suis bisexuel aussi, Oliver, marmonna-t-il les yeux braqué sur le ciel de lit rouge et or.
— Woah, quelle nouvelle ! ricana son ami.
— Ne te moque pas alors que je viens d'avoir une révélation, veux-tu ?
— T'es juste un peu à la bourre, mais tout va bien, Perce.
— Comment ça, en retard ?
— Je sais que t'es bi depuis l'an dernier.
— Ah bon ‽
— Tu crois qu'y a beaucoup de mecs hétéros qui taillent des pipes à leurs meilleurs amis ?
— Langage, Oliver ! Et… non, probablement pas, j'admets que tu marques un point.
— Yay, moi, répondit-il d'un ton plein d'humour.
Le silence retomba sur la chambre et Oliver s'installa plus confortablement sur Percy qui laissa enfin glisser ses jambes avec une petite grimace quand le mouvement délogea le sexe ramolli de son ami. Avec le poids d'Oliver sur lui, dont la respiration s'apaisait progressivement, Percy se concentra sur les deux années précédentes. Il marmonna quelque chose et hocha la tête.
— Je crois aussi que je suis amoureux de toi, dit-il d'un ton qu'il espérait factuel.
— Tu crois ?
— Je…
— Parce que moi j'sais que j'suis amoureux de toi.
— Quoi ‽
— Hmhm… Depuis la quatrième année.
— Mais enfin, tu es sorti avec une quinzaine de filles en quatrième.
— J'essayais de me convaincre que c'était pas le cas.
— Et Amanda ‽
— J'ai… J'ai cru qu'Amanda fonctionnerait, mais… Elle est plus intelligente que ce que j'croyais.
— C'est une Serdaigle après tout. C'est parce qu'elle est plus intelligente que toi que ça n'a pas marché ?
— Non, Percy, rit Oliver en secouant la tête. C'est parce qu'elle était pas toi que ça a pas marché.
— Oh…
— Ouais.
Oliver commença à rouler pour s'éloigner de lui, mais Percy raffermit sa prise sur son dos. Il enfonça doucement ses ongles dans les omoplates du sorcier et enfouit son nez contre sa tempe.
— Non. Reste.
— Écoute, Percy… Je…
— Je sais que je suis amoureux de toi, Oliver.
— Vraiment ?
— Oui.
Oliver se redressa avec une telle brutalité qu'ils rebondirent sur le matelas. Il s'appuya sur ses bras pour regarder Percy dans les yeux. Il avait encore les joues rouges et ses cheveux étaient si ébouriffés qu'il aurait pu faire de la concurrence à Harry. Il était si beau que Percy se demanda comment il avait fait pour respirer en sa présence les trois dernières années. Timidement, il leva une main et caressa la cicatrice qui marquait le haut de la pommette de son meilleur ami.
— Percy ?
— Hmm ?
— Tu veux être mon petit ami ?
Un rire surpris échappa à Percy qui secoua la tête.
— Non ? Tu veux pas ?
— C'est… La situation est ridicule, Oliver !
— Tu dis ça parce que t'es couvert de foutre ?
— Langage, Oliver ! s'énerva Percy. Mais… oui, en partie.
— Tu veux que je te redemande après la douche ?
— Non, la réponse restera la même avant ou après que je me sois lavé.
Il prit le visage d'Oliver en coupe entre ses mains et observa ses traits insupportables. Ses cicatrices, ses dents parfaitement alignées, les plis au coin de ses yeux, la fossette dans sa joue gauche, le brun de ses iris. Ce visage qu'il avait vu grandir et qui l'avait vu grandir. Ce visage qui avait été la première chose qu'il voyait au réveil depuis sept ans. Ce visage qui avait toujours été une source de réconfort.
— Oui, Oliver, je veux bien être ton petit ami.
— OK, dans ce cas faut enfin que t'acceptes de m'appeler Ollie. Personne m'appelle Oliver à part ma mère.
— Ta mère et moi.
Oliver le fit taire d'un baiser et Percy se perdit dans la saveur de son rire contre ses dents, dans la douceur de ses lèvres sous la pointe de sa langue. C'était intolérable. C'était parfait.
