Sur la corde raide


Lorsque Emma se réveilla après quelques bonnes heures de sommeil, elle se sentit en pleine forme. Elle choisit de profiter de cette forme olympique en se levant tout de suite. Objectif : trouver de quoi cuisiner ce qui ferait l'affaire pour son déjeuner.

Mais dès qu'elle sortit de la chambre, elle sursauta en apercevant Ruby installée en tailleur dans son canapé.

– Salut ! T'en as mis du temps pour sortir de là !

Ce n'était, malheureusement, pas la première fois que Ruby utilisait la clé d'urgence qu'elle lui avait confiée pour tout, sauf les urgences. Alors sa surprise passa rapidement.

– Qu'est-ce qui t'amène ?

– Depuis hier tu réponds pas au téléphone. Alors je me suis dit que je devais passer parce que ce que j'ai à te raconter ne peut pas attendre, annonça Ruby pendant que son amie ouvrait son frigo. J'ai absolument besoin que tu me dises ce que tu en penses.

Ruby se leva, prit un sac avec lequel elle était arrivée et rejoignit Emma qui soupirait. C'était exaspérant mais elle commençait à avoir l'habitude de vouloir cuisiner quelque chose de bon mais de ne jamais avoir les ingrédients dans son appartement…

Nonchalamment, son amie mit une boite de donut sous ses yeux. Celle-ci la remercia en se servant, encore ensommeillée.

Les donuts, c'étaient « bon », même si ce n'était pas le genre de choses bonnes qu'elle s'imaginait manger ce matin…

Ruby savait maintenant qu'elle avait toute son attention lorsqu'elle l'emmena sur le canapé.

Assise à côté d'elle, Emma bâilla à s'en décrocher la mâchoire ce qui attira spécialement son intérêt.

– Tu t'es couchée tard pour te réveiller si tard et quand même bâiller ?

– Non… Je suis juste… fatiguée… répondit Emma en se remémorant sa nuit.

Ce fut évident que Ruby ne la crut pas vraiment. Cependant Emma se rappelait encore très bien des menaces de sa professeure si jamais elle osait révéler quoique ce soit à propos d'elles.

– Tu n'avais pas quelque chose d'urgent à me dire ?

– Belle m'a embrassé quand on est passé à la nouvelle année.

En moins d'un instant, les deux amies oublièrent le précédent sujet, et Emma sautilla de joie sur le canapé.

– C'est trop mignon ! Je m'y attendais pas du tout, et encore moins à ce que ce soit elle qui t'embrasse !

– Et qu'est-ce que je suis censée faire maintenant ?

– Avant dis-moi comment ça s'est passé.

Ruby lui résuma tout en détail devant son air absorbé par son récit.

– Elle est partie tôt car elle partait le lendemain matin à New York voir ses parents. Elle ne voulait pas avoir une tête de déterrée le premier jour de l'année… finit-elle en rêvassant. J'ai peur de la prochaine fois que je vais la revoir…

– C'est elle qui t'a embrassé. Peut-être que tu devrais attendre que ce soit elle qui t'en parle ?

– Ouais peut-être… Et toi donc, qu'as-tu fait cette nuit ?...

– Rien de spécial…

– Chez toi ?

– Oui.

– Hm hm…

– Quoi encore ?

Ruby haussa les épaules puis pencha la tête sur le côté avec un air penseur.

– Tu te couches jamais tard d'habitude. Pas au point d'être fatigué en te réveillant.

Emma savait que Ruby avait deviné que quelque chose avait changé depuis un certain temps. Et son amie savait très bien que si elle ne lui en parlait pas par elle-même, elle ne le ferait pas non plus sous la pression et que cela aggraverait plutôt leur conversation.

Ruby n'était pas la personne la plus proche d'elle pour rien.

Alors Emma hésita deux secondes, mais seulement deux secondes.

– J'vais me changer, lâcha-t-elle en se levant nonchalamment.

À partir de ce moment-là, Ruby ne l'interrogea plus à propos de la veille. Mais Emma savait qu'à long terme, le sujet reviendrait de plus en plus fréquemment.

À midi, Regina passa déjeuner chez ses parents pour rattraper le précédent repas. Son père ne lui fit aucun commentaire mais elle le devina curieux. Il l'avertit plutôt que sa mère avait des soupçons sur la raison son absence, mais celle-ci ne lui posa aucune question.

Regina oublia rapidement ses inquiétudes, ses souvenirs de sa soirée étaient encore frais et envahissaient tout l'espace dans son esprit. Elle ne regrettait pas le moins du monde d'être partie. Elle aimait ses parents, mais après des dizaines de fêtes de fin d'années passées avec eux, le changement lui faisait tellement de bien.

Durant toute sa journée, elle pensa plusieurs fois à sa soirée à Helios, et l'excitation de la veille revint à vitesse grand v. Comment ferait-elle pour regarder Mademoiselle Swan dans les yeux le lundi qui approchait ?! Tout le self-control que cela lui demandera… Regina en était déjà épuisée mentalement.

Elle ne parvenait pas à y croire lorsqu'elle retraçait tout le chemin parcouru avec Mademoiselle Swan depuis le mois de septembre. Il s'était déroulé bien plus de choses que tout ce qu'elle avait pu imaginer un jour. Elle n'avait aucune idée pourquoi et comment en à peine un semestre, cette femme était devenue si importante pour elle. C'était insensé.

Les cours reprirent quatre jours après. La première fois que Regina aperçut l'étudiante, elle était tendue mais cela se passa beaucoup mieux que ce qu'elle avait pensé.

Tant qu'elle ne se retrouvait pas face à elle, tout devrait bien aller…

Son vœu fut réalisé durant deux semaines. Un soir en fin de semaine, la professeure se trouvait dans son bureau lorsque quelqu'un toqua à la porte. Une blonde qu'elle commençait à voir beaucoup trop en ce moment entra calmement quand elle le lui autorisa.

– Salut.

La brune se tendit et se leva immédiatement.

– Qu'est-ce que vous faites là ? l'interrogea-t-elle durement en faisant le tour du bureau.

Emma fut prise au dépourvu par son ton. Après leur dernière rencontre, elle avait un peu oublié à quel point cette femme pouvait être froide si elle n'était pas d'humeur.

– Je me demandais si…

Elle ne finit pas sa phrase et Regina s'impatienta. Son air ne lui disait rien qui vaille.

Emma s'approcha soudainement d'elle, créant ainsi une proximité assez spéciale entre elles qui leur rappela à toutes les deux leur précédente rencontre. Ses yeux ne quittèrent pas les lèvres de sa professeure. Elle n'avait pas oublié son goût ni sa douceur appétissante et elle désirait les redécouvrir… Emma manqua même de s'étonner que Madame Mills n'avait pas installé une distance plus correcte.

– Je me demandais si on pouvait se revoir le weekend prochain… lui expliqua Emma en rougissant.

Regina était troublée. Elle voulait encore une fois savourer les lèvres de la blonde. Mais ses pensées de ses derniers jours lui revinrent en mémoire et la poussèrent à l'esquiver et à se ranger derrière son bureau.

Elle ne pouvait pas laisser place à ses désirs ici, pas dans cet endroit où elle devait se montrer totalement neutre.

– Non.

Emma réalisa vite qu'elle ne refusait pas parce qu'elle n'était pas disponible. C'était simplement un non catégorique. Elle cligna des yeux avec incompréhension tellement la voix de Madame Mills était dure.

– Après ce qu'il s'est passé l'autre nuit, je vois pas pourquoi vous refusez… ironisa Emma.

– Mademoiselle Swan, je n'apprécie pas que vous entriez dans mon bureau, pendant que je travaille, pour me demander de vous soulager. C'est insultant, mal poli, et davantage irrespectueux. Qui vous a donné le droit de venir ici ?

Sa professeure ne lui avait jamais adressé la parole ainsi, Emma était déboussolée. Son comportement était le total opposé de celui du premier jour de l'année. La fin de sa phrase sonnait presque comme une menace et son ton n'indiquait rien de bon à son égard. Emma avait pensé que mentionner leur dernière soirée la détendrait. Quelle triste erreur…

– Je vous ai déjà demandé de faire preuve de discrétion et de précaution ! Et vous vous approchez de moi comme si de rien n'était, dans mon bureau où n'importe qui pourrait entrer à n'importe quel moment ? Même votre simple présence, ici, les portes fermées, seule, avec moi est presque suspecte ! Vous êtes inconsciente ! Et surtout vous ne me prenez pas au sérieux.

Emma baissa difficilement la tête. Sa professeure avait raison dans un sens, elle n'avait pas vraiment respecté ses règles. En venant dans le bureau, elle n'avait pas vraiment fait attention si des personnes étaient dans le coin et pouvaient les surprendre. Néanmoins, ses phrases lui faisaient vivre un violent retour à la réalité qu'elle ne pensait pas entièrement mériter.

– Qu'est-ce qu'il vous arrive Madame Mills ? s'interrogea Emma en fronçant les sourcils. Pourquoi vous êtes si énervée contre moi d'un coup ?

– Écoutez, j'ai aimé les soirées qu'on a passées ensemble. Beaucoup même, là n'est pas le problème. Mais je ne sais pas si je peux continuer comme ça. Je vous ai énoncé mes règles, et vous ne les avez pas respectées. Et par ce fait, vous rendez cela trop dangereux pour moi. Je suis désolée.

– Mais…

– Il n'y a pas de « mais » Mademoiselle Swan, il n'y a rien d'autre à dire, la coupa Regina après s'être repris un minimum. Plus vite vous l'acceptez, mieux ce sera pour vous et pour moi.

Apercevant que l'étudiante restait déboussolée, Regina tenta une approche différente pour que Mademoiselle Swan comprenne et valide enfin ses mots.

– Il faut avant tout que vous obteniez votre diplôme Mademoiselle Swan, avoua Regina en hésitant à parler à cœur ouvert. J'ai vu vos notes d'examen. Je ne devrais pas vous le dire, mais vous l'avez à peine réussi. Vous avez fait vos pires résultats depuis que vous êtes à Storybrooke. Et peut‐être que ce n'est pas le cas, mais je pense que c'est en rapport avec ce qu'il s'était passé entre nous et que vous n'aviez pas la tête claire.

A nouveau, Emma ne sut pas comment réagir. Elle ne s'était pas vraiment rendu compte à quel point elle avait été déconcentrée durant cette période.

– Vous savez que Storybrooke est stricte, et que s'il vous arrive quelque chose, vous pourriez tout perdre. Vous avez un profil qui… dirons-nous pourrait attirer l'œil. Vous êtes orpheline… Vous êtes une femme qui aime d'autres femmes… Découvrir que vous avez eu des rapports sexuels avec une professeure est la dernière chose qu'il vous faudrait. Vous êtes intelligente, vous méritez de réussir. Je sais que Storybrooke représente votre avenir. Je ne veux pas que vous gâchiez votre vie à cause de quelques moments de sexe insignifiants.

Regina ne parvint pas à déduire si elle comprenait vraiment ce qu'elle lui disait.

– Vous ne pouvez pas prendre des décisions à ma place à propos de ce qui est bien pour moi, parla enfin Emma en soutenant son regard.

– Je suis votre professeure, je suis censée vous faire réussir, pas l'inverse. Il me semble que je suis la mieux placée pour reconnaitre ce qui est bien pour vous et vos études. Alors vous ferez exactement ce que je dis. Cette discussion est terminée, quittez mon bureau, conclut Regina avec agacement.

Gardant une allure toujours sérieuse et neutre, elle s'assit dans son siège et évita de croiser le regard de Mademoiselle Swan. Elle voulait à tout prix que son autorité fonctionne à nouveau sur elle, ce qui paraissait une mince affaire.

Emma resta quelques secondes, immobile, puis elle finit par retrouver ses esprits. Elle quitta la pièce sans attendre une seconde de plus. Elle ne comprenait pas ce qu'il venait de se passer et pour l'instant, elle n'avait pas la tête à réfléchir à ça, elle avait surtout besoin d'un petit réconfort qui prendrait la forme d'un bon diner à emporter.

Regina retira ses lunettes et massa ses tempes en soupirant. Cela ne s'était pas si mal passé finalement. Elle avait réussi à dire ce qu'elle voulait lui dire sans trop de soucis et à faire semblant qu'elle savait ce qu'elle faisait. Elle venait de mettre un stop aux fougues de Mademoiselle Swan, mais aussi aux siennes… Et elle se doutait que cela allait très vite poser problème.

Peut-être qu'elle aurait dû être plus claire et directe. Elle s'était toujours comportée différemment face à cette étudiante, plus sincère, plus calme, plus patiente… Trop faible, c'était ridicule.

Regina se sentait perdue, sa tête lui semblait prête à refaire la déco de son bureau…

La professeure sursauta lorsqu'elle entendit la porte s'ouvrir soudainement.

– Hey, Robin nous a invités à boire un verre vers dix-huit heures, la surprit Mary-Margaret. Tu veux venir ?

Regina lâcha un grand soupir. Elle avait cru pendant une seconde que Mademoiselle Swan revenait à la charge.

Elle fut étonnée que son amie prononce le nom de leur collègue qu'elles connaissaient toutes les deux assez mal.

– Je n'ai pas vraiment la tête à ça… Et je n'ai pas vraiment le temps ce soir.

– Ça n'a pas l'air d'aller…

– C'est juste la fatigue, ça ira mieux demain.

Regina ne s'attarda pas dans son bureau, elle rangea ses affaires en écoutant Mary-Margaret faire la conversation par elle-même, comme d'habitude lorsque Regina était épuisée.

Cette femme pouvait bien casser les pieds à n'importe qui, même si ses intentions étaient parfaitement bonnes.

De son côté, Emma rentra chez elle très troublée et déprimée. Une seule question tournait sans arrêt dans sa tête : comment avaient-elles pu passer d'une rencontre si chaude à une discussion si sérieuse la fois suivante où elles se retrouvaient seules ? Elle ne l'avait même pas laissé parler et Emma se sentait un peu vexée. Elle voulait s'exprimer, s'excuser et rassurer sa professeure. Mais cette femme s'était montrée têtue et elle en était fatiguée.

Peut-être qu'il lui fallait un peu de temps. Elle allait déjà rentrer chez elle et se sortir son balai du cul. Et puis on disait bien « la nuit porte conseil »…

Peut-être qu'elle allait regretter de s'être emportée…

Lorsque Emma revit la professeure, il n'y eut cependant aucun signe qu'elle ait changé d'avis, ou même qu'elle le ferait un jour ou l'autre. Elle ne lui avait accordé aucun regard, à contrario des cours des précédents mois.

Mais Emma n'y prêta pas vraiment attention. Ruby lui avait proposé de passer le weekend ensemble et elle était impatiente.

Le samedi soir, les deux amies retrouvèrent Killian, August et Belle dans un bar à jeu en ville. C'était exactement ce dont Emma avait besoin, et elle comptait bien se détendre durant cette sortie et s'amuser un peu.

À leur arrivée, la tablée discutait déjà des récents potins croustillants. Emma avait levé les yeux au ciel discrètement quand Ruby salua Belle d'un air gêné. Elles ne s'étaient pas vraiment parlé depuis le dernier jour de l'année, et cela commençait à peser Emma qui avait dû écouter Ruby lui exprimer toute la journée son inquiétude.

Pour le reste de la soirée, la fine équipe s'amusa un peu avec quelques jeux. Mais au bout d'une heure et demie, Ruby intervint avec une nouvelle idée.

– Et si maintenant on jouait à action ou vérité version pimenté ?

C'était évidemment celle qui avait le plus bu de cocktail de la soirée qui faisait cette proposition. Emma ignora ce détail et accepta immédiatement. Tout était bon à prendre pour éviter de croiser le regard dévorant de Killian…

En quelques instants, le groupe établit les règles et chacun écrivit quelques questions qu'on rassembla en deux paquets. Ruby commença et demanda une vérité. Elle répondit à une question assez simple avec malice.

Ce fut ensuite le tour d'Emma. Elle choisit vérité en voyant le regard de Ruby qui lui évoquait clairement qu'elle attendait qu'elle dise action pour la caser avec Killian. Elle fut alors encore plus inquiète au sujet des questions qu'elle avait marqué.

– Qui est la dernière personne avec laquelle tu t'es imaginée t'envoyer en l'air ?

Emma s'en souvenait très bien, c'était pas plus tôt qu'il y a cinq jours. Elle n'avait pas arrêté de ressasser les orgasmes que Madame Mills lui avait donnés le jour d'avant. Alors tout naturellement Emma s'était mise à inventer les prochaines fois.

– Euh… Vraiment ? questionna Emma en voyant Ruby rire.

Elle avait vite deviné la réponse à son expression gênée.

– Tu connais le gage !

Elle commençait à regretter d'avoir accepté ce jeu idiot…

Elle se sentait mal à l'aise d'annoncer qu'elle avait pensé à leur professeure… Sans oublier qu'elle lui avait interdit de prononcer son nom dans des contextes qui sortaient de l'ordinaire.

– Bon, d'accord…

Et Emma confia le nom d'une personne différente.

– Biiiip ! réagit Ruby en levant le bras vers elle, pointant un doigt accusateur. Faux !

Emma la fusilla du regard. Elle était la seule à plus ou moins deviner son attirance pour leur professeure. Elle lui avait promis de ne rien dire. Même si Emma devrait la connaitre depuis le temps…

Essayant de piéger Ruby avec certaines choses qu'elle avait bien pu lui dire, Emma tenta d'autres noms. Son amie se moqua d'elle si fort qu'elle se résolut à dire la vérité à tout le monde.

– Bon… D'accord… Je pensais à Madame Mills.

– Mills ? s'étonna Belle.

Ruby éclata de rire en voyant tous les regards confus. Plus personne n'avait de doute, Ruby allait regretter cette soirée le lendemain et personne ne pouvait y faire quelque chose, elle était incontrôlable. Il valait mieux en profiter, et Belle eut l'ingéniosité de saisir sa chance.

La blonde fut satisfaite lorsque Belle taquina Ruby au point de la faire rougir. Elle avait vraiment l'air idiote dans ces moments-là…

– Ruby, c'est à toi, l'avertit Killian sans qu'elle ait remarqué le tour des autres passer.

– Euh… Action.

– Suce doucement l'oreille de la personne à ta droite au moins vingt secondes.

Ruby se retourna vers ladite personne et vit alors Belle rougir.

– Qui a écrit ça ? demanda-t-elle d'une petite voix.

August haussa les épaules et un sourcil en souriant.

– Je te rappelle que c'est toi qui as défini les règles…

– Ça aurait pu être pire…

Belle soupira et Ruby lui proposa d'aller ailleurs si elle le souhaitait. Elle la dévisagea simplement, alors son amie l'emmena jusqu'aux toilettes. Tandis qu'elles quittaient la table, Emma lui fit un clin d'œil moqueur.

Une fois face à face dans un lieu calme, aucune des deux filles ne furent plus à l'aise que l'autre. Ruby écouta toutes les instructions de Belle et y mit beaucoup d'attention dans ce geste.

Les yeux fermés, les joues Belle s'empourprèrent alors et elle se mordit la lèvre. Cela ne dura à peine quelques secondes et quand Ruby s'éloigna, elle fut déçue qu'elle n'ait pas continué, elle eut du mal à revenir sur Terre. Ruby semblait satisfaite de son effet et afficha un grand sourire.

Elles retournèrent tranquillement auprès du groupe qui ignora volontairement leurs visages rouges et poursuivit avec les deux garçons. Arriva vite le tour d'Emma qui se releva pour choisir une action, à ses risques et périls sachant que Ruby était capable de tout ce soir.

– Tu dois laisser la personne à ta gauche décrocher ton soutien-gorge si t'es une fille ou…

Emma n'attendit pas la fin, elle se leva en exprimant son indignation en voyant que son voisin était Killian.

– Quoi ? s'exclama Emma plus fort qu'elle ne l'avait voulu.

La tablée s'empêcha de rire à sa réaction qui attira l'attention de quelques autres clients du lieu. Son visage se décomposa lorsque August lui affirma qu'il ne blaguait pas.

– Cette action est complètement débile !

– On va aux toilettes, j'imagine ? demanda alors Killian.

– Tu imagines bien, marmonna Emma en attrapant son ami par le bras. Je ne veux pas que des yeux curieux voient cette humiliation…

Emma l'entraina derrière elle en maudissant la personne qui avait osé écrire ça.

– Attends, l'interrompit Killian alors qu'elle ouvrait la porte des toilettes.

Croyant le pire arriver, Emma se tourna lentement.

– On n'est pas obligé de le faire si tu veux pas. Je sais que Ruby t'embête avec ça et je veux pas en ajouter moi aussi.

Emma fut tellement surprise qu'elle en oublia presque comment accepter. Elle avait imaginé qu'il prendrait l'offre comme elle venait : sur un plateau.

– Ouais. Je préfère. Euh… merci.

Les deux amis restèrent quelques minutes et plaisantèrent même à propos de Ruby et de Belle. Quand ils revinrent à la table, personne ne sembla avoir de soupçon.

– Alors ? interrogea impatiemment Ruby.

– Ferme-la Ruby… Je veux plus en entendre parler…

Emma fut ravie quand elle eut une vengeance servie sur un plateau : durant le tour de Belle. August lui demanda enfin ce qu'elle choisissait, mettant fin au massacre d'Emma par la même occasion.

– Action !

– Tiens la main de ton voisin de droite et regarde-le dans les yeux durant tout le tour suivant sans rire, sans parler et sans bouger sinon tu recommences ton tour.

– Oh oh… réagit Emma en voyant que ledit voisin était August.

Elle était déçue, le destin ne leur jouait pas des tours cette fois-ci en casant à nouveau Belle avec Ruby pour les actions comme elle l'avait été avec Killian.

Ruby regarda ses deux amis se mettre en place avec une expression qu'Emma ne déchiffra pas. Cette dernière remarqua grossièrement sa jalousie. Finalement elle n'était pas si déçue, elle ne savait même pas que son amie était capable d'éprouver de la jalousie pour si peu.

Une fois qu'ils furent prêts, August passa au prochain tour, celui de Ruby.

– Euh… Vérité, choisit-elle encore troublée.

– Tu dois confier un secret par rapport à quelqu'un présent à cette table.

– Dommage qu'Emma ait déjà avoué qu'elle est attirée par Madame Mills car je l'aurai bien dit…

Emma maugréa et lança un regard noir à son amie. Ruby souffla durant un instant en cherchant une idée. Elle dévisagea chacune des personnes autour de cette table pour finir par poser les yeux sur Belle, qui n'avait aucune idée qu'elle la scrutait étant donné qu'elle était de dos.

– Je crois que… je me sens vraiment attirée par Belle.

La concernée ne put s'empêcher de rire nerveusement.

– Ruby, c'est un secret pour personne, plaisanta Killian.

Emma fit taire son ami avec un coup de coude et regarda Belle s'asseoir correctement en jetant un coup d'œil à Ruby. August reprit rapidement et quelques minutes après, Killian redevint sérieux lorsque son tour fut annoncé.

– Killian, tu dois nous confier une anecdote où tu as eu vraiment très honte.

Le concerné réfléchit pendant un instant avant de redresser ma tête d'un air usé.

– Alors c'était… l'année dernière. Je venais de finir ma séance de sport et je suis un peu arrivé en retard au cours de Madame Mills…

En entendant le nom Mills, Emma tendit l'oreille pour écouter attentivement l'histoire.

– Je suis entré dans la salle avec vraiment à peine cinq minutes de retard, et elle a trouvé immédiatement l'excuse de me rabaisser devant à peu près deux cents personnes… Il me semble qu'elle a même réussi à me comparer à un putois… Et ensuite à une marmotte…

Emma n'avait pas eu d'écho de cet accident. Il n'était guère étonnant venant de sa professeure, mais il lui rappelait de quoi Madame Mills était capable.

– Cette professeure est vraiment impitoyable, elle est juste horrible, lui confima August avec un regard compatissant.

– Je te le fais pas dire… lui répondit Killian en baissant la tête.

Emma se mordit la lèvre en écoutant ce que pensaient ses amis de Madame Mills. C'était hilarant de remarquer qu'ils voyaient une personne très différente de la femme qu'elle connaissait…

Emma était plongée dans ses souvenirs lorsqu'elle entendit son nom de la bouche de Ruby.

– Tu le fais avec moi ? lui demanda-t-elle avec un air un peu angoissé.

– Faire quoi ?

– J'ai pris une action et j'ai eu : remplis une cuillère à ras bord de ta boisson en la tenant avec les dents et fais la boire à quelqu'un toujours avec tes dents.

Emma devina rapidement que son amie n'était pas sûre d'y parvenir et qu'elle la choisissait car à priori si elle ratait avec elle, elle ne lui en voudrait pas trop. C'était plus ou moins vrai, mais elle pouvait toujours trouver un moyen de se venger plus tard.

– D'accord, je me dévoue.

– Merci, souffla Ruby avec soulagement.

En général, elle ferait tout pour Ruby. Mais en la voyant tenter de remplir la cuillère de sa boisson en tenant le bout de celle-ci avec les dents, Emma s'inquiéta un peu plus, amusant les autres qui pariaient sur leur réussite.

Et quand elle tourna doucement la tête vers elle, la cuillère tremblotait dangereusement. Ça ne pouvait que mal finir…

Dupant tout le monde, Emma se pencha rapidement vers elle et attrapa la cuillère avant de boire en un instant. Ruby ouvrit la bouche presque immédiatement sous la surprise et la cuillère tomba vide sur la table.

– Bah c'était moins compliqué qu'on le croyait ! rétorqua Ruby sans même qu'elle n'y croit elle-même.

– Emma t'a bien aidé, lui répondit Belle.

Elle haussa les épaules en dévisageant Belle qui l'observait d'un air amusé.

Quelques minutes après, Killian choisit action.

– Danse au moins le temps d'une chanson avec le ou la partenaire de ton choix !

Killian se tourna vers Emma et tenta de déchiffrer son expression. Il finit par lui présenter sa main.

– Tu veux bien ?

À son regard, Emma devinait qu'il lui laissait le choix. Elle hésita quelques secondes mais il était trop tard pour former des pensées cohérentes. Elle se leva en prenant sa main sous le cri de surprise mêlé de joie de Ruby.

Ils se rendirent sur une petite piste de danse auprès de quelques personnes et Killian la laissa mettre la chanson.

À peine se commencèrent-ils à danser qu'Emma éclata de rire lorsqu'elle entendit Ruby crier son prénom par-dessus la musique. Elle leva les yeux au ciel quand elle l'encouragea à faire le spectacle. Malgré elle, elle le lui accorda, elle se colla à lui doucement. Son amie siffla presque immédiatement.

Emma fut la première étonnée de s'amuser à danser avec Killian. Elle s'arrêta dès la fin de la musique mais ne fut pas totalement contre d'enchaîner.

C'est dès qu'ils s'assirent qu'ils se rendirent tous les deux comptes de leur fatigue. Les autres n'en menaient pas large, Ruby n'arrêtait pas de bouger dans tous les sens, Belle buvait des verres d'eau à la suite le regard dans le vide. Seul August remarquait leur état. Il ne perdit pas de temps à indiquer à tout le monde de se préparer. Ils se levèrent tous et se préparèrent à le suivre jusqu'à sa voiture, August étant leur conducteur de la soirée.

Alors que Belle montait la fermeture éclair de sa veste, elle ne put aller jusqu'au bout car une paire de lèvres se déposa sur les siennes sans autre forme de procès. Ruby s'éloigna immédiatement comme si elle réalisa ce qu'elle venait de faire en même temps. Figée, aucune des deux femmes ne dit un mot, et Emma, qui avait tout vu de la scène, tira Ruby vers la sortie.

Elle emmena son amie qui se mit à rouspéter jusqu'à la voiture, puis la fit entrer à l'avant. Lorsque Belle s'assit, à côté d'Emma, cette dernière se sentit au milieu d'une drôle de tension. Belle avait les joues encore plus rouges qu'il y a quelques minutes et tout le long du chemin, elle garda les yeux fixés sur le paysage sans dire un mot.


Franchement ce chapitre... (fait un peu à l'arrache)

Bref, gros merci à ceux qui sont toujours en train de me lire 3