Chapitre 7 : retour difficile

Kara avait été prise immédiatement en charge par l'équipe médicale du D.E.O. et n'avait pas encore repris connaissance. Alex, sa sœur, avait été prévenue, et revenait le plus vite possible, alors qu'elle était en mission sur le terrain. La disparition de la super-héroïne n'était pas passée inaperçue sur Terre, et le monde avait plus que jamais besoin de son parangon de l'espoir. Lena, quant à elle, avait été emprisonnée, et abandonnée à son sort dans une cellule, sur une couchette en béton, sans plus de cérémonie.

Kara fut branchée à diverses machines. Sa peau, habituellement dure comme de l'acier, était aussi fragile que celle d'un humain. Cela inquiéta le médecin, qui lança une batterie de tests, avant de s'attaquer à ce qui l'intriguait le plus, le bandage à l'abdomen. Il enleva le bandage imbibé de sang, avec mille précautions, et grimaça en voyant la plaie béante. Jamais il n'avait vu pareille blessure sur un corps kryptonien. Il secoua la tête et ordonna que Supergirl passe un scanner intégral, afin d'éliminer toute autre blessure potentiellement mortelle. Puis, il bloqua la lumière jaune au maximum, afin que le processus de guérison commence enfin. Il croisa les doigts pour que rien de plus grave ne soit à soigner. Il avait déjà vu assez de blessures sur le corps tourmenté de la blonde. La bataille avait dû être rude et particulièrement violente.

Alex débarqua dans la salle médicale une demi-heure plus tard, ayant fait fi de toute prudence sur le chemin pour revenir à la base. Elle était angoissée, car le message plus que laconique qu'elle avait reçu du centre de commandement ne révélait que le strict nécessaire. Et elle était bien placée pour savoir que cela ne pouvait signifier qu'une chose : Kara était revenue, mais dans un état probablement critique. Elle se pencha sur le corps inconscient de sa jeune sœur, et ne put taire un gémissement de stupeur, qui parvint à passer la barrière de ses lèvres. Le médecin se racla la gorge, et elle détourna son attention de Kara, afin d'obtenir les premiers résultats.

- Commandant, Supergirl est dans un état critique. Comme vous avez pu le constater, elle a une plaie à l'abdomen, particulièrement impressionnante. Nous allons devoir opérer, et nous assurer qu'il n'y ait pas de dégât interne. Elle souffre de multiples lacérations, et…

- Continuez. Je peux tout entendre.

- Elle a été empoisonnée à la kryptonite.

- Je le sais, elle a subi l'influence de la kryptonite rouge et a disparu de la planète.

- Non, je ne parle pas de la rouge, mais bien de la verte. Son corps essaie d'assainir son organisme, mais il n'y est que partiellement parvenu.

- Soyez plus clair dans vos propos, docteur !

- Le soleil jaune ne la guérit pas aussi vite que l'on pourrait l'escompter.

Alex plissa les yeux, fort mécontente et surprise d'entendre cela. Elle fixa les lampes, dont la luminosité était devenue presque douloureuse, pour des yeux humains. Elle reprit la parole.

- Je vais étudier un échantillon de son sang. De votre côté, sauvez-la. La Terre ne peut pas la perdre. Et moi encore moins.

Sur ces paroles, Alex partit en direction de son laboratoire, à la limite de la panique.

Une semaine s'était écoulée depuis que les deux femmes étaient revenues sur Terre. Lena avait subi moult interrogatoires, et avait finalement été libérée. Kara était toujours inconsciente, mais son état était stable, et sa sœur la veillait jalousement. La blonde avait subi une opération, afin de reconstruire son abdomen et s'assurer que les organes n'étaient pas endommagés outre mesure. Lena, quant à elle, était toujours affublée d'une attelle pour son poignet, mais se déplaçait beaucoup mieux. Elle n'était pas autorisée à voir Kara, et mourait d'inquiétude. Néanmoins, son attention avait très vite été happée par son frère, Lex, qui, en son absence, avait repris les rênes de L-Corp et ne semblait guère disposé à lui céder son entreprise.

Lena avait été stupéfaite d'apprendre que les quelques jours de son aventure spatiale, étaient devenus sur Terre, plusieurs semaines. Le temps ne passait pas de la même façon sur la planète bleue et la planète où ils avaient échoué. Sept semaines s'étaient donc écoulées, et elle avait été portée disparue. Son frère Lex s'était alors empressé de reprendre le flambeau de son entreprise, L-Corp, et de la faire évoluer vers des affaires peu scrupuleuses. Aussi était-elle repartie en guerre contre ce dernier, et se battait avec son avocat, afin de reprendre son entreprise des mains de son frère. Cela drainait toute son énergie et son temps, malgré tout, elle pensait souvent à Kara, et souhaitait la revoir, afin d'avoir une petite conversation avec elle. Elle tenta plusieurs fois de la joindre par téléphone, à son appartement, mais personne ne décrochait jamais. Elle essaya même le D.E.O., mais ne fut pas autorisée à parler à qui que soit. Elle perdit patience, mais se heurta systématiquement à un mur. Apparemment, Alex Danvers avait donné des ordres, afin que sa petite sœur Kara ne soit pas dérangée durant son hospitalisation. Lena espérait, le cœur lourd, que telle était l'explication, et non pas quelque chose de plus grave qu'on lui cachait délibérément.

Au sein de l'unité médicale du D.E.O., le temps passait lentement. Kara s'était réveillée, mais restait étonnamment confuse, néanmoins, son état de santé s'améliorait de jour en jour. Les lampes de soleil jaune fonctionnaient à pleine puissance, permettant à la super-héroïne de récupérer physiquement, et de voir ses plaies se refermer et guérir. Cependant, sa vitesse de guérison était très inférieure à celle observée habituellement. Elle restait silencieuse la plupart du temps, et son regard était souvent perdu dans le vague. Elle restait allongée sous les lampes, parlant peu. Elle semblait détachée de son corps et restait là, sans rien demander, perdue dans ses pensées.

Alex s'inquiétait beaucoup pour sa sœur, qui avait perdu sa légendaire joie de vivre et son optimisme à toute épreuve. Elle était mutique, et attendait quelque chose, sans jamais dire ce que c'était. Deux semaines plus tard, Kara se leva enfin, et se balada dans la structure du D.E.O., sans vraiment faire attention à ce qui l'entourait. Elle tentait vainement de mettre en ordre ses idées, mais beaucoup de choses restaient très floues dans son esprit. Elle se retrouva, au fil de ses pérégrinations, devant les vestiaires. Elle y entra et se dirigea vers le sien, qui était parfaitement anonymisé. Elle entra le code et trouva son téléphone portable, déchargé. Elle le brancha à une prise électrique, et attendit qu'il fut à moitié rempli pour enfin l'allumer. Des messages de sa mère, d'Alex, et de ses amis, datant de plusieurs semaines, défilaient devant ses yeux. Elle les effaça sans même les lire. Ils savaient qu'elle était en vie, elle n'avait donc nullement besoin de les rassurer. Elle verrait cela plus tard. Elle vit enfin un message qui retint son attention : Lena avait tenté de la joindre à sept reprises, mais depuis cinq jours, c'était le calme plat, son téléphone n'avait plus rien reçu de sa part. Elle ouvrit fébrilement tous les messages de la brune, et son cœur se serra progressivement. Apparemment, une certaine personne avait donné des instructions pour que la chef d'entreprise ne puisse pas l'approcher. Elle délaissa son téléphone, et se rendit dans la chambre remplie de lampes à soleil jaune. Elle s'assit sur le bord du matelas, et réfléchit. Au bout de deux heures, elle soupira et se changea. Elle sortit du D.E.O. sans un regard en arrière, et se dirigea vers L-Corp.

Lena était absente, lorsqu'elle se présenta à l'accueil du siège de l'entreprise. Elle fixa alors la standardiste, qui se sentit mal à l'aise face à ce regard bleu pénétrant. Kara ne répondit rien et se contenta d'attendre dans un des fauteuils mis à la disposition du public dans le hall. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle allait pouvoir dire à la brune, mais elle ne voulait pas abandonner la partie maintenant. Après plus de trois heures sans bouger, elle s'assoupit. Une main la secouant prudemment la sortit de son sommeil.

- Madame ? L'entreprise ferme ses portes, vous devriez rentrer.

- Lena Luthor n'est pas à son bureau ?

- Non, madame Luthor n'est pas là. Elle est en long déplacement, comme je vous l'ai dit. Vous devriez rentrer chez vous, vous semblez… Fatiguée.

- Très bien.

Kara, telle une marionnette, repartit vers son appartement. Elle avait les clés de son antre dans son sac à main, et leur poids la rassurait. Elle avait besoin de retrouver ses marques, et de reprendre pied avec la réalité. Son entrevue avec Lena attendrait le lendemain. Arrivée chez elle, elle enleva sa veste et s'étendit sur son lit. Elle n'avait plus trouvé un meuble aussi douillet depuis bien longtemps. Son corps se détendait enfin, et elle sombra dans un sommeil sans rêve. Elle fut brutalement réveillée par la sonnette de l'entrée, et vit une minute plus tard le visage de sa sœur au-dessus d'elle. Elle semblait particulièrement furieuse.

- Mais je peux savoir ce que tu fiches ici, Kara ?!

- Je suis chez moi.

- Tu es censée être au D.E.O. pour guérir, pas te la couler douce chez toi, à disparaître sans prévenir personne !

- Ah, oui, pardon. J'avais besoin d'être un peu seule, je crois.

- Mais bon sang, Kara, réagis ! On dirait un zombie !

- Je suis fatiguée, j'aimerais me reposer.

- Kara, je ne sais pas ce qu'il se passe dans ta tête, mais tu me fais peur.

La blonde lui jeta un regard interloqué, avant de simplement hausser les épaules.

- Bonne nuit, Alex.

Sa sœur la contempla un instant, avant de baisser la tête et s'en aller. Il était inutile de continuer cette conversation saugrenue, tant que Kara n'aurait pas décidé de s'expliquer davantage.

Le lendemain matin, Kara partit tôt de chez elle. Elle se rendit à nouveau à L-Corp, espérant trouver Lena. La standardiste la reconnut et appuya sur une ligne privée. Kara attendit patiemment. Elle reçut une invitation à monter au dernier étage, dans le bureau de Lena, qu'elle connaissait par cœur. Jessie, la secrétaire particulière de son ancienne amie, la pria de patienter. Elle semblait nerveuse, et s'éclaircit la voix quelques minutes plus tard. Lorsque la porte s'ouvrit enfin, qu'elle ne fut pas sa surprise de voir Lex, sourire en coin et petit air mutin sur le visage.

- Kara ! Mais quelle bonne idée de me rendre visite !

- Lex ? Mais enfin, qu'est-ce que vous faites là ?!

- Je suis le patron, ma chère Supergirl.

Le sourire forcé de Lex démontrait qu'il avait toutes les cartes en main. Kara reçut presque un électrochoc devant cet être immonde.

- Où est Lena ?

- Je ne sais pas trop. Peut-être à faire du jardinage ? Ou bien du shopping, pour noyer son chagrin ?

- Je ne vous crois pas !

Kara voulut forcer le passage, afin de s'assurer que Lena n'était pas prise en otage par son fou furieux de frère. Mais il la renvoya dans ses cordes, avec une facilité déconcertante. Il en fut lui-même étonné, et éclata de rire.

- Hé bien, serais-tu devenue une vulgaire poupée de chiffon ? Ou pire, une humaine ?

Pour vérifier sa théorie, il la gifla, ce qui lui fendit la lèvre, et la mit à terre.

- Oh, mais que c'est drôle ! Tu n'es plus rien, Kara Zor-El ! Passe le bonjour à mon idiote de sœur, et dis-lui de ne pas m'approcher ou je vous ferai des misères, à toutes les deux ! Simplement pour mon bon plaisir.

Il claqua la porte, laissant la blonde réfléchir à ses menaces, tandis que Jessie essayait maladroitement de la redresser. Elle lui souffla à l'oreille.

- Lena est chez elle, vous devriez aller la voir, elle tente de récupérer L-Corp, mais ce n'est guère reluisant. Je pense qu'elle a besoin d'aide, et… Vous aussi.

Devant l'air peiné de la secrétaire, Kara repartit en direction du penthouse de la chef d'entreprise évincée. Son égo avait pris un sacré coup, mais son inquiétude était montée d'un cran, face aux menaces de Lex.

Kara prit un taxi, afin de se rendre rapidement chez Lena. Elle salua le portier et patienta, lorsqu'il appela Lena. Il l'informa qu'elle avait de la visite et déclina l'identité de Kara. La réponse fut immédiate et surpris l'homme, qui était plutôt habitué à la froideur de la chef d'entreprise. Il raccrocha et se tourna vers la blonde.

- Elle vous attend. C'est assez rare pour être noté, ces temps-ci.

- Merci.

Le léger sourire qu'elle lui rendit réchauffa le cœur de l'homme. Peut-être que Lena Luthor sortirait enfin de son appartement. Elle prit l'ascenseur et toqua à la porte. Lena lui ouvrit, le penthouse, dans son dos, était plongé dans la pénombre.

- Lena…

- Kara, c'est bien toi ? Tu es vivante ?

- Bien sûr… Lena, mon dieu, dans quel état es-tu ?

Lena se contenta de battre en retraite, afin de la laisser passer. Elle dévisagea Kara comme si la jeune femme n'était pas réellement là, tel un fantôme. La super-héroïne entra, sans autre cérémonie, et se tint dans un coin, gauche et timide. Ça ne lui ressemblait pas, surtout devant Lena. Mais elle ne savait absolument pas comment se comporter face à elle.

Lena se racla la gorge et passa nerveusement une main dans ses cheveux, qui n'étaient pas aussi lisses que d'ordinaire. Elle semblait épuisée, et de profonds cernes ornaient son visage anguleux. Elle avait perdu du poids et semblait tituber.

- Lena, tu es ivre ?

- Peut-être un peu. J'avais besoin de relâcher la pression, et de me détendre.

- Avec une bouteille entière de whisky ?

Kara avait observé la table basse de son amie et avait vu la bouteille presque vide, qui trônait dessus. Elle soupira, comprenant que Lena se laissait aller. Elle voulut s'approcher d'elle, mais cette dernière se déroba et eut un mouvement de la main, signifiant qu'elle souhaitait passer à autre chose. Elles se dirigèrent vers le salon, sans un mot. Lena s'affaissa dans le canapé confortable, tandis que Kara restait là les bras ballants, ne sachant pas si elle pouvait s'asseoir à ses côtés, ou se contenter du fauteuil en face. Devant l'attitude de la brune, elle choisit finalement le fauteuil, par dépit. Elle commença à se balancer d'avant en arrière, face au mutisme de la maîtresse de maison. Elle finit par gigoter, ramenant Lena à la réalité. Cette dernière la fixa enfin, l'air las.

- Kara, tu tombes assez mal, je dois dire. Mais je suis heureuse de savoir que tu vas bien. N'ayant plus de nouvelles, j'ai cru qu'il t'était arrivé malheur.

- J'ai été alitée un certain temps. Mes blessures étaient profondes. Et Alex me surveillait comme le lait sur le feu.

- C'est ce que je me suis dit. Je me suis fait un sang d'encre, tu sais. Avec la blessure que tu avais à l'abdomen, j'ai pensé que même Supergirl ne s'en relèverait pas.

- Il faut croire que je suis solide. Mais j'ai croisé ton frère à L-Corp. Il a pris le contrôle de ta société ? Comment est-il parvenu à un tel résultat ?

- J'ai été portée disparue trop longtemps, et une entreprise de cette ampleur ne peut fonctionner sans dirigeant. Il s'est bien évidemment porté volontaire, en changeant une ou deux petites choses dans les statuts de la société, afin de me barrer la route, au cas où je revienne, comme par magie.

- Je vois. Tu as besoin d'aide ?

- Non, Kara. J'ai une armée d'avocats, qui sont sur le coup.

- Et toi, comment vas-tu ? Après ce que tu as vécu sur cette planète, je me doute que tu dois être… Déboussolée ?

- Tu as au moins le mérite de mettre les pieds dans le plat, à défaut de t'embarrasser de subtilité…

La blonde rougit sous l'accusation. Mais elle était également à bout de nerfs, et voir son amie dans cet état lui fendait le cœur.

Les silences entre les bouts de phrases entrecoupés devenaient insupportables. Les deux femmes se faisaient toujours face, mais aucune ne savait comment poursuivre cette farce sociale. Kara se leva lentement, et fit un pas en direction de la porte d'entrée. Elle devait sortir de cet appartement lugubre, où la désolation régnait en maître. Elle laissa son regard contempler Lena, mais cette dernière semblait endormie. La blonde ne put partir, en la laissant ainsi. Elle vint près d'elle, et tira sur le plaid, afin de les couvrir toutes les deux. L'alien avait un besoin viscéral de sentir la présence de Lena à ses côtés, de la savoir vivante et encline au pardon. Car les regrets la taraudaient toujours, et elle désirait plus que tout l'absolution de la brune. Elle se put s'endormir, contrairement à sa comparse. Elle l'observa toute la nuit, sans broncher. Au petit matin, Lena s'éveilla, une douce chaleur se diffusant autour d'elle. Elle tourna la tête et vit la journaliste collée contre son corps, une main sur sa cuisse. Elle rougit légèrement, se rappelant des mots de la jeune femme sur la planète, et de son humiliation. Leurs yeux se rencontrèrent, et le temps s'arrêta brusquement. Les prunelles de la blonde ne reflétaient que désespoir et tristesse, et lui renvoyaient ses propres turpitudes. Elle laissa une larme lui échapper, devant ce mélange étrange de fragilité et de dévotion.

- Kara… Pourquoi tu restes ici avec moi, alors que tu pourrais sauver des innocents ?

- Je n'ai pas d'innocents à sauver, c'est terminé. La seule que je veuille sauver, c'est toi. Et peut-être moi-même par ricochet.

- Et comment t'y prendrais-tu, pour me sauver ? Tu irais tuer mon frère ? Ou tu tenterais de te confondre en excuse, pour avoir assisté à mon… Viol ? Sans rien tenter pour l'arrêter ?

La colère subite de Lena désarçonna Kara, qui resta interdite. Elle baissa la tête, honteuse, laissant le silence reprendre ses droits.

Après quelques minutes où Kara rassembla tout son courage, elle souffla légèrement et releva le visage vers Lena, qui attendait visiblement une réponse.

- Je ne tuerai personne. Et je ne m'excuserai jamais assez pour ce qu'il s'est passé sur cette planète. J'aurais dû essayer quelque chose, n'importe quoi… Ce n'est pas une excuse, mais je ne parvenais plus à bouger… J'aurais préféré que ce soit moi plutôt que toi.

Les traits de la jeune femme se durcir, démontrant combien tout ceci lui était insoutenable. Cette scène la hanterait jusqu'à la fin de ses jours. La brune étouffa un sanglot, partageant ce moment intime avec difficulté, mais elle redoutait encore davantage d'être seule, si Kara l'abandonnait à son tour. Elle la fixa, et caressa sa joue de la main, incapable de se réfréner, ayant un besoin urgent de tendresse.

- Kara… Tu vas partir, hein ? Tu vas me laisser ici, seule ?

- Non, je resterai à tes côtés.

- Mais enfin, Supergirl a une ville à sauver !

Les yeux de la blonde se voilèrent brusquement, au grand étonnement de Lena. Cette dernière prit la main de la super-héroïne, la pressant doucement, afin de connaître le fond de sa pensée.

- Tu sais que tu es toujours la sauveuse de la ville, et de la planète. Tu peux remettre ton costume et filer dans les airs. Tu auras peut-être des détracteurs qui te mettront des bâtons dans les roues, mais tu restes une représentante du Bien.

- Tu te trompes.

- Ne perds pas espoir, toi, son parangon !

- Lena…

La blonde fixa son attention sur Lena, et dans un souffle, lui avoua la vérité.

- J'ai perdu tous mes pouvoirs. Ils ne sont jamais revenus. Peut-être que j'ai passé trop de temps sous soleil rouge, ou que mes blessures étaient trop profondes. Peu importe aujourd'hui. Je ne suis qu'une simple femme, sans rien de particulier.

Après un profond silence, elle reprit, avant de perdre le courage qu'elle avait eu à lui dévoiler cet aspect de sa personne.

- Enfin, si, j'ai une chose de particulier en réalité. Je t'aime.

Lena écarquilla les yeux, incapable de prononcer un mot. Leur amitié avait toujours été si différente de celle des autres. C'était un sentiment profond, qui s'était finalement fracassé l'année dernière sur leur désaccord et les manipulations cruelles. Mais le lien n'avait pas complètement disparu. Et Kara venait littéralement de se mettre à nu devant Lena Luthor, en lui disant des mots que la brune avait trop peu de fois entendus durant sa vie. Cela faisait beaucoup à digérer. Kara n'avait plus de pouvoirs et elle l'aimait. Elle ouvrit la bouche, sans savoir ce qu'elle allait dire. Au lieu de prononcer des paroles profondes, réconfortantes, ou bienveillantes, elle rit. Son rire désarçonna Kara, qui ne sut comment réagir. Lena se moquait-elle de cette déclaration malvenue ? Ou bien était-ce sa réponse, tant cet amour lui semblait incongru ? Kara fut choquée par cette réaction, qui la blessa profondément. Elle se releva, raide et humiliée. Elle se morigénait de ne pas avoir su tenir sa langue. Alors qu'elle reculait, afin de se sauver de cette situation grotesque, Lena se leva à son tour et la prit dans ses bras, sans autre explication. Kara en resta pantoise, devant tous ces revirements émotionnels. La voix de Lena lui parvint à l'oreille.

- Pardon, Kara, mais personne ne me dit jamais ces quelques mots, et que ça vienne de celle qui a failli me tuer, sur le coup, ça m'a paru… Démentiel.

- Ah… Euh… Désolée.

- Non, ne le sois pas. Et par pitié, ne reviens pas sur tes paroles. J'ai besoin de toi. Tellement besoin de toi.

Lena se décolla lentement de Kara, et l'embrassa chastement sur les lèvres, avec une immense douceur. Kara resta le plus longtemps possible ainsi, priant tous les dieux qu'elle connaissait, afin que l'éternité les percute et les laisse dans cette bulle hors du temps. Lorsque les lèvres de Lena s'éloignèrent, la blonde ouvrit les yeux et la dévisagea, décontenancée.

- Tu… Mais… Qu'est-ce que ça veut dire ?

- Je ne sais pas… Mais je ne peux pas te perdre, et je sentais que tu allais partir. Je n'ai pas réfléchi, mon instinct a pris le dessus.

- Il suffisait de me demander de rester.

- Alors reste.

- Bien sûr, je ne vais nulle part.

Un timide sourire naquit sur le visage de Kara, qui n'osait croire que Lena puisse ressentir la même chose. Lena, quant à elle, se rassit sur le canapé et tapota la place à ses côtés. L'alien comprit l'invitation et l'accepta volontiers.