Résumé pour ceux/celles qui n'ont pas lu le chapitre précédent : Drago a proposé à Hermione de s'installer au manoir après Poudlard. Hermione est prise de doutes : elle a du mal encore à lâcher prise et à accepter que Drago puisse influencer sa vie. Elle craint de perdre son indépendance et de ne plus savoir vivre sans lui. Elle accepte sa proposition, davantage pour le rendre heureux que par conviction.
Ccassandre24 : Merci encore pour ton soutien infaillible et pour tes compliments ! ^^ J'avoue que respecter les canons c'est le plus difficile pour moi, donc si c'est fidèle, je suis contente ! ^^ J'espère que ce chapitre te plaira, même si, je pense que tu commences à le voir venir, l'équilibre qui a été trouvé va progressivement se retrouver un peu... bousculé...?! Mais promis, quoiqu'il se passe, tout le monde finira heureux. x) J'aime le drama, mais la guimauve plus encore ! x)
37-«On n'est pas sérieux quand on a [dix-neuf] ans»
(D'après «On n'est pas sérieux quand on a dix sept ans», Rimbaud)
-Quelqu'un peut vérifier les tartes au four ?! entendis-je hurler d'une voix aiguë depuis le jardin par la fenêtre ouverte.
Alors, abandonnant un temps la surveillance de la confection magique des toasts, je m'accroupis pour jeter un œil par la vitre.
A point, effectivement.
D'un coup de baguette, j'ouvris la porte, sortis les pâtisseries du four et les menai sur le rebord de la fenêtre pour les faire refroidir... Autant que la chaleur de cette fin d'après-midi de juin ne pouvait l'accorder.
-Tu auras du saumon plus tard, intimais-je à Pattenrond, assis sur ce même rebord, regardant les gâteaux avec l'air d'un chat qui cherche à faire une bêtise. Va chasser le gnome.
Il me dévisagea de haut en bas avec son dédain habituel lorsque j'osais lui donner un ordre puis se releva avec panache, me montrant son derrière et m'envoyant sa queue dans les narines puis, il sauta souplement par terre.
-Accio chaises de la cuisine, ordonna Molly avec un air affairé dans la cour dont l'herbe avait enfin été tondue par Arthur en début d'après-midi. J'eus tout juste le temps de me baisser avant que lesdites chaises ne se précipitent maladroitement, l'une après l'autre par la fenêtre ouverte, assez large pour le passage d'une seule à la fois, créant ainsi un bouchon là où se trouvait ma tête un instant auparavant.
-Maman ! Attention ! Tu as failli décapiter Drago ! S'écria Ron.
-Oh ! Pardon mon chéri ! S'exclama-t-elle.
-C'est pas grave ! Articulais-je d'une voix forte pour qu'elle m'entende alors que j'étais toujours accroupi sous les chaises qui s'entrechoquaient.
-Les tartes ? Ah ! tu les as sorties ! C'est très bien !... Pcht ! Pattenrond ! va chasser les gnomes !
Je fis quelques pas dans cette posture aussi ridicule qu'inconfortable pour me dégager.
-Ça va ? me demanda Ginny, perplexe, qui passait dans la cuisine les bras chargés de paquets.
-Oui ! souriais-je en me relevant, époussetant par réflexe mon pantalon.
-On étouffe ici ! S'exclamait à nouveau Mme Weasley en passant la tête par la fenêtre. Drago, tu es sûr que tu ne veut pas quelque chose de plus léger ? Ce pentalon a l'air épais ! Et cette chemise à manche longue ! Elle a beau être blanche... Remonte au moins les manches !
-Laisse-le, Maman ! s'exclama sa fille, gênée. Viens, on termine la décoration du jardin !
Et elle ressortit avec ses paquets, détournant l'attention de sa mère.
Je retournais à mon poste initial et découvris que le couteau à mayonnaise s'était emballé et s'était mis à tartiner les murs à défaut de nouveaux toasts à recouvrir.
Franchement.
Je rompis immédiatement l'enchantement et nettoyais l'ensemble de son œuvre d'un efficace coup de baguette magique. Bon, les toasts au saumon, c'était fait. J'envoyais les roulés à la saucisse au four et ensorcelais un couteau qui découperait en petites parts trois quiches. Un M. Weasley gourmand et en sueur qui passait par-là vola un toast au saumon. Pire que Pattenrond. Va chasser les gnomes, Arthur.
-Il faudrait encore en faire quelques uns, non ? demanda-t-il d'un air inquiet.
-Cinq ou six de plus de chaque ? Proposa Georges , arrivé à sa suite, et qui engouffrait à son tour une mini-pizza, invention moldue.
Effectivement, s'ils comptaient décimer le rang des amuse-bouches avant le début de la fête, j'allais devoir en refaire.
-On est seize tout de même ! renchérit le père de famille.
-Mais non papa, treize !
-Ah oui, oui, tu as raison : treize !
-On y retourne papa ? Il faut déplacer les bancs !
Ils retournèrent dans le jardin. En passant la porte, ils éclatèrent d'un rire complice, tandis que je me remettais au travail, si consciencieux que j'en oubliais l'heure.
-Ça me parait très bien, comme ça, décréta la voix lointaine de Mme Weasley au sujet de l'installation des tables dans le jardin.
Les feuilletés !
Avec précipitation, je regagnais le four pour constater qu'ils avaient doré juste ce qu'il faut mais qu'il ne fallait pas plus. De nouveau, j'ouvris le four et pris la chaleur de plein fouet. Un coup d'œil à l'horloge : il était bientôt dix-neuf heures et pourtant on cuisait toujours. Je mis les canapés dans un saladier. Je récupérais les tartes pour les mettre sur la table et disposais le saladier à la place. J'avais fini la tâche que l'on m'avait confiée et je pensais sortir rejoindre les autres dans le jardin. Alors que j'allais quitter la pièce, Mme Weasley m'appela de nouveau par la fenêtre.
-Drago...? Est-ce que tu pourrais...
-Couper le pain et les tartes, lui suggéra-t-on.
-Couper le pain, s'il te plaît ? ...Et les tartes ?
-D'accord ! Souriais-je, heureux d'aider. Je détestais ne rien faire lorsque je voyais les autres s'affairer autour de moi car cela me donnait l'impression d'être inutile et oubliable... Et puis... être dans ma bulle, concentré sur une tache précise, cela me protégeait du tumultes des émotions des autres. Les cris de Molly, les maladresses d'Arthur, les blagues de Georges, les conseils un poil vantards de Charlie, les grommellements de Ron, le ton moralisateur de Percy, le regard plein de jugement d'Audrey, les explosions de rires de Ginny, Angelina et Hermione et les mamours de Fleur et Bill. Seul Harry semblait partager ce besoin de solitude. Il avait réussi à s'extraire du Terrier pour faire je ne sais quelle course.
Ce n'est pas que je n'aimais pas cette ambiance... C'est juste que c'était si éloigné de ce que je connaissais que parfois tout cela me paraissait trop. Alors, en tête à tête avec mon pain de campagne, j'étais ravi. Tant et si bien que je sursautais lorsqu'on passa deux bras autour de ma taille.
-Ces tranches sont si égales ! Et ces mini-pizza ont exactement le même nombre de morceaux de jambon, n'est- ce pas ? Et cette pique que tu as graduée... C'est pour couper exactement les morceaux de saucisses pour les feuilletés, non ?
Je sentais bien qu'on se moquait de moi et de mon perfectionnisme. Je rétorquais en me retournant vers l'insolente :
-C'est que j'aime le travail bien fait, moi, Madame, et la médiocr...
Je m'interrompis. Elle s'était apprêtée. Joliment apprêtée. Un rouge cerise léger sur ses lèvres, un peu de cette poudre pêche qu'on met sur les pommettes et une couleur prune sagement déposée sur le bord de ses paupières. C'était plein de fraîcheur. Une robe blanche en coton rehaussait son teint déjà hâlé. Bien taillée, contrairement à l'uniforme de Poudlard, elle mettait en valeur ses formes discrètes. Hermione avait contraint ses mèches en une sorte de tresse épaisse, sans doute avec le concours de Ginny et Angelina. Je croyais les entendre supplier pour qu'on les relâche, ses jolis cheveux indomptables. Cette coiffure ne tiendrait pas longtemps : déjà des brins revêches s'échappaient de l'élastique et retombaient sur ses oreilles et son front.
-C'est la robe que tu as achetée l'autre jour avec Ginny et Fleur ?
Elle acquiesça d'un sourire, sans doute déjà au fait qu'elle était resplendissante dedans. Je l'imaginais au magasin se laisser convaincre de la prendre, conseillée par Fleur dont le goût était sûr et distingué et encouragée par Ginny. Sans cela, je devinais qu'elle n'aurait jamais osé ce léger décolleté, ni la dentelle des manches, ni cette portion de dos dénudé au creux de ses reins, ni la mousseline recouvrant la jupe car tout cela ne lui ressemblait pas. Cette transfiguration n'était pas un mal pourtant, car, oui, son sourire avait raison : resplendissante, elle l'était. Je commençais à comprendre, au détour des conversations, qu'elle s'interdisait beaucoup de choses par timidité ou par rigidité, comme si la féminité rimait nécessairement avec frivolité, coincée dans son rôle de fille sérieuse.
Je savais que les filles aiment entendre qu'elles sont belles. Hermione, si peu sûre d'elle à ce sujet, ne devait sans doute pas faire exception. Alors, je jouais je jeu :
-Tu es très jolie, lui chuchotais-je en embrassant sa joue du bout des lèvres pour ne pas ruiner son maquillage.
Au passage, j'en profitais pour humer son parfum. Ginny avait du lui prêter le sien, sucré et vanillé.
-Merci, répondit-elle, les yeux baissés et rougissant.
Elle n'avait sans doute pas souvent reçu ce genre de compliments. De moi, d'abord, parce que j'étais tout simplement un mufle et je devais corriger ça. D'Harry ou de Ron, ensuite, par ce qu'ils ne l'avaient jamais considérée comme une femme, et c'était peut-être encore le cas maintenant. Je ne suis même pas certain que Ron, pendant les deux semaines passées en couple, ne l'ait vraiment vue autrement que comme une amie, une mère ou une sœur.
Ce crétin de Krum peut-être ? Ou MacLaggen, quand il n'était pas occupé à s'auto-admirer ? Quoiqu'il en soit, ces occasions avaient dû être trop rares.
Je me souvenais sans peine cette heure d'étude, en quatrième année, où elle avait reproché à Harry et Ron, avec éclat, de ne pas l'avoir invitée au bal. En découvrant cela, j'avais été frappé d'incrédulité : comment avaient-ils pu ne pas l'envisager ?! J'en croyais minimum un sur les deux amoureux d'elle et cela devait sans doute participer à la haine que je leur vouais à cette époque.
Qu'ils ne songeassent pas à elle me paraissait bien incroyable car déjà je la trouvais tout à fait digne d'être aimée. Intelligente, bien plus que quiconque, avec une répartie tranchante, bien plus que celle qu'on m'opposait d'habitude, belle, bien plus que la majorité et plus douce (chose qui me paraissait si exotique à l'époque !) que tous réunis.
Et puis, le soir du bal, ç'avait été la gifle : d'abord, une jalousie brûlante contre ce crétin de Krum, que je n'expliquais pas mais dont Pansy, ma cavalière, se moquait à loisir. Ensuite, du ressentiment contre tous ces abrutis qui auraient pu l'inviter mais qui ne l'avaient pas fait : MacLaggen, Smith, Davies... Tous ces butors qui osaient rêver d'elle à voix haute dans les couloirs ou dans les vestiaires de Quidditch quand Potter et Weasley n'étaient pas là. Enfin, une colère contre moi-même que je n'arrivais pas à identifier...
Pour expliquer mon attirance, je me voyais en esthète, intéressé par le beau seulement. C'est que depuis toujours, j'aimais sa beauté discrète, loin des canons de beauté auxquels des Fleurs, des Ginny, des Daphné Greengrass ou des Cho Chang pouvaient appartenir. Parfois, cette beauté semblait décupler pour éblouir, comme un reflet de soleil que l'on se prend dans les yeux. Ce phénomène étrange était comme un oiseau des marais et, à chaque repas passés dans la Grande Salle, éloigné d'elle et caché, camouflé, par les élèves de Poufsouffle et de Serdaigle qui se dressaient entre nous comme des roseaux, j'attendais qu'elle se manifeste, tantôt à la lumière des chandelles, tantôt éclairée par les vastes fenêtres. Je patientais, patientais, patientais jusqu'à ce que se manifeste cette apparition, accompagnée d'un sourire, d'une rougeur ou encore de sourcils froncés selon ce qu'on pouvait bien lui dire.
Elle finit par relever les yeux pour les plonger dans les miens. Elle passa ses bras autour de mon cou et je resserrai alors mon étreinte au creux de son dos. Exactement là où il était nu, et je le caressais légèrement du bout des doigts.
Aujourd'hui, c'était moi son cavalier, enfin ! Est-ce qu'un jour, je cesserai d'être émerveillé par tout cela ? Pour l'instant, je n'en revenais toujours pas. J'avais vaincu Krum, dépassé McLaggen, Davies, Smith, Weasley et Potter. Et surtout, je m'étais compris. Pour de bon.
-Prêt à faire la fête ? Me souffa-t-elle à l'oreille avec un petit sourire en coin.
-Et comment ! Souriais-je. Ce n'est pas tous les jours qu'on fête ses ASPICS !
En réalité, mon esprit peut-être austère ne voyait pas trop ce qu'il y avait à célébrer... Mais puisque les Weasley insistaient ! Et puis... Hermione était radieuse : elle avait fini première dans quatre des huit matières, Nott la suivant de près avec trois. Elle majorait donc. De peu, certes, mais qui s'en souciait ? Son rival et elles avaient tout de même eu la gentillesse de me laisser triompher une unique fois, en potions.
Des bruits caractéristiques de transplanage, des exclamations, qui par défaut, me mirent sur le qui-vive. Toujours prêt à affronter un danger, quel qu'il soit.
Ginny qui descend les escaliers discrètement, elle aussi apprêtée, suivie d'Angelina que je vois du coin de l'œil nous observer sans aucune retenue : nous restions encore, je crois, un couple étrange pour certains.
-Cette mine toujours soucieuse, sourit Hermione, en lissant mes sourcils froncés de ses deux pouces.
Je souris à mon tour. Elle n'avait sans doute pas tort. Elle posa son front contre le mien :
-Qu'est-ce qui t'inquiète ?
- Rien, répondis-je sans réfléchir.
Puis, me forçant à répondre sincèrement :
-Les bruits de transplanage, entre autres... C'est juste que... ça pourrait être... n'importe qui, éludais-je.
Elle caressa ma joue. Je n'avais pas besoin d'en dire plus.
-Un jour, on ne sursautera plus au moindre bruit. On n'aura plus peur de l'inattendu. On ne dégainera plus sa baguette par réflexe.
-On la perdra, même, et on s'en rendra compte qu'au moment de faire la vaisselle, renchéris-je en frottant mon bout du nez contre le sien.
Son sourire s'élargit encore et elle m'embrassa tendrement.
-Ton rouge à lèvres ! Fis-je remarquer contre sa bouche, le voix étouffée par son baiser.
-Je m'en fiche.
-On y va ? Finit-elle par me demander après avoir rompu notre échange ses yeux perdus dans les miens.
-Oui !
Elle me prit fermement les deux mains et me tira vers la porte et je me laissais entraîner.
-Bon, je ne sais pas si c'était une bonne idée, finalement...
-De quoi ? Pouffais-je.
-Tu vas sans doute sursauter, mais essaye de laisser ta baguette là où elle est !
-Mais pourquoi ?
Je riais franchement devant tant de mystères. Elle répondit à ma question par une autre question :
-Tu aimes les surprises, non ?
Nous franchissions enfin la porte :
-Mais, par Merlin, pourq...
-BON ANNIVERSAIRE !
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Tout s'était joué en une fraction de seconde. Un mouvement de recul, d'abord, accompagné par un geste brusque de sa main, heureusement entravé par Hermione, pour saisir sa baguette. Elle savait. Elle avait compris qu'il fallait se méfier d'un dragon blessé.
Puis la sidération courte d'un esprit vif et entraîné. Enfin, une explosion de rire et la réception d'une Pansy Parkinson dans ses bras.
-Tu ne t'en doutais pas, hein ?!
-Non !
Il parcourut l'assemblée d'un regard avec un reste d'incrédulité. Il croisa le regard de Charlie qui lui sourit.
-On s'était dit que tu n'avais pas dû fêter dignement tes derniers anniversaires, expliqua la mère de ce dernier. Dix-neuf ans, tout de même !
-Merci ! Répondit-il tandis qu'elle s'agrippait à ses hautes épaules pour lui planter un bisous sur la joue.
-C'est normal, mon chéri !
Entendre sa mère appeler Malfoy "Mon chéri" donnait toujours en sentiment d'étrangeté à Charlie. Un jour il s'y ferait... peut-être.
Et alors, le défilé commença. D'abord Fleur qui tint à lui faire la bise à la française, deux sur chaque joue en en profitant pour se suspendre à son cou sous le regard noir d'Hermione et Ginny. Lui, impassible, pour ne pas dire de marbre, s'exécutait docilement. Les vélanes prétentieuses, ça ne devait pas être son style.
Ce fut ensuite Percy qui vint lui serrer très officiellement la main pour le féliciter de ce passage dans le monde des adultes. Charlie se retint de lever les yeux au ciel. Pitié ! Comme si Malfoy l'avait attendu pour se frotter au merdier que le monde magique pouvait représenter !
Percy avait fini par retourner vers eux après la guerre et Charlie avait espéré que ce dernier ait gagné en auto-dérision et en légèreté en ces trois ans de brouille. Ça n'avait pas été le cas. Se rendre compte de son erreur vis à vis d'Harry Potter ne lui avait pas pour autant donné un esprit critique : de nouveau il révérait l'actuel ministre de la magie, Kingsley Shacklebolt, et si d'aventure ce dernier devenait critiquable, Charlie était sûr qu'il le défendrait bec et ongles sans aucune remise en question. Son laïus, un délicat mélange de banalités ronflantes et de remarques étonnantes de naïveté, était écouté poliment par un Drago Malfoy dont les yeux finissaient toujours par dériver sur le distingué décolleté d'une certaine Gryffondor en robe blanche.
Et, il y avait de quoi : Charlie lui-même sentait ses propres regards se perdre dans cette direction. Il faut dire aussi que la petite et sérieuse Hermione Granger, dans cette robe, n'avait plus rien de petite... et le sérieux n'était plus tout à fait la première chose à laquelle on pouvait penser en la voyant ainsi.
Pendant que son esprit se perdait dans des rêveries aussi fantasques qu'impossibles, il sentit des yeux se poser sur lui. Le Pansefer, évidement, qui ne relâchait jamais sa garde et qui posa une main sur la taille de son trésor. Charlie sourit intérieurement : il aurait du se méfier. Il le savait, pourtant, que les Pansefers sont de ces dragons jaloux et territoriaux. En bon dresseur, il baissa symboliquement la tête, feignant la soumission. Il fallait réinstaurer une certaine confiance. Lorsqu'il releva les yeux, le pansefer avait détourné la tête, rassuré concernant sa domination, peut-être, mais n'avait pas lâché Hermione pour autant tandis que c'était au tour d'Harry de présenter ses hommages.
Après que son père et Georges aient quitté le petit groupe formé de Malfoy, Hermione, Ginny, Harry et Parkinson, Zabini osa enfin s'approcher, observateur et réservé. Après avoir pris brièvement et pudiquement Malfoy dans ses bras, il rejoignit Parkinson et lui prit la main. Des bagues de fiançailles à leurs annulaires gauches.
Super. La reproduction des élites avait encore de beaux jours devant elle.
Zabini fut suivi par Nott, tout aussi secret, jetant des regards curieux autour de lui. Ils se serrèrent la main avec émotion. Charlie savait que les Serpentards n'étaient pas très démonstratifs, alors, il lui semblait que ce qu'il venait de voir devait être la plus grosse effusion sentimentale qu'il ait jamais vue.
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Nott n'était pas du tout à l'aise, et ce, pour plein de raisons. Être chez les Weasley pour un barbecue, déjà, était une raison tout à suffisante pour lui causer des sueurs froides.
Ensuite, l'idée de l'anniversaire surprise lancée par Mme Weasley et Fleur Delacourt-Weasley. Drago n'aimait pas les surprises. Bon, il semblait finalement que ça lui ait fait plaisir tout de même mais personne n'avait été dupe- lui, en tous cas ne l'avait pas été, concernant ce mouvement vif du bras retenu par Hermione lorsqu'il avait sursauté. A quel moment, surprendre quelqu'un de traumatisé pouvait sembler être une bonne idée ? Bon, heureusement, Hermione avait quand-même anticipé la chose... Elle commençait à bien le connaître.
Elle n'était pas bête. En tout cas moins gnangnan et compliquée qu'il ne le craignait. Il ne la détestait plus, il était même possible qu'il l'estime, depuis qu'ils avaient affronté ensemble le brouillard épais et plein de ténèbres, en février dernier. Et là nous arrivions au dernier problème de Nott : Hermione Granger, désormais digne d'intérêt, était anormalement radieuse dans cette robe blanche.
Demain, enfin, après trois mois de séparation, il voyait Abigail. Demain, ça irait mieux.
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La soirée se déroulait à merveille et Hermione était au comble du bonheur. Malgré ses craintes, la fête faisait plaisir à Drago. Il avait éclaté de rire. Un rire franc. De mémoire, elle ne l'avait jamais vu ainsi.
Si c'était Molly et Fleur qui avaient lancé l'idée, ce fut elle tout de même qui avait bâti le projet : trouvé la date, d'abord, car, bien qu'au détour d'une conversation en cours de divination, elle avait appris qu'il était Gémeaux, du deuxième décan (pourquoi, à cette époque, avait-elle retenu cette information ?!), elle ne connaissait pas le jour exact. Elle avait aussi proposé d'inviter les Serpentards, ce qui enchanta Molly mais fit s'étouffer une bonne partie de la famille. Elle avait également pensé à un cadeau. Ils s'étaient tous cotisés, Serpentards inclus, pour pouvoir lui offrir un présent digne d'une fête des dix-sept ans sorcier.
Hermione avait perdu le fil de la conversation qui animait Ginny, Pansy et Harry. Comme souvent, Drago écoutait silencieusement en ponctuant de temps en temps d'une blague ironique. Elle embrassa du regard la longue tablée autour de laquelle ils s'étaient tous assis, Arthur et Georges les réapprovisionnant régulièrement en grillades.
Blaise s'était fait alpaguer par Molly et commençait à révéler sa nature expressive, encouragé par Angelina. Nott, bien qu'à côté de Drago, bavardait paisiblement avec Bill et Charlie.
Alors qu'ils arrivaient tous à satiété, Fleur la prit par les épaules.
-C'est l'heure ! Lui chuchota-t-elle tandis que Drago lui lançait un regard interrogatif.
Hermione lui sourit.
-Je reviens.
Alors, il sourit de nouveau, comprenant ce que cet abandon motivé par Fleur signifiait, déjà gêné de l'attention qu'on allait lui porter.
-Respire, ça va bien se passer, lui souffla-t-elle, un brin moqueuse.
Il pouffa en caressant une des mains qu'elle avait posée sur ses épaules.
-Mais oui, ça va bien se passer, renchérit Fleur en pinçant légèrement les épaules du Serpentard avant de se diriger vers la cuisine.
Hermione se retint de lever les yeux au ciel. Toujours à vouloir attirer le regard et l'attention de la gente masculine, la Vélane ne devait même pas avoir compris la teneur de leur conversation.
Devant le plan de travail de la cuisine, Molly, décorait déjà le gâteau de bougies éternelles.
-Tu veux apporter le gâteau Hermione ? Fleur veut se charger du cadeau.
Fleur. Fleur. Fleur. Elle commençait à sévèrement lui taper sur le système, Fleur. Pas d'esclandre.
-Bien sûr, sourit-elle poliment.
Alors elle se chargea du plateau sur lequel reposait la tarte aux pommes décorée et sortit de la maison. Dès qu'ils la virent, les Weasley entonnèrent le chant rituel sous les regards gênés des Serpentards excepté Blaise qui participait joyeusement à la chorale, un brin moqueur vis à vis de Drago, peut-être.
On pouvait toujours compter sur Zabini. Drago de son côté, gardait les yeux baissés avec un sourire gêné.
La cacophonie s'accrut lorsqu'il s'agit de nommer celui qui était fêté, indécisément Malfoy ou Drago puis le chant reprit en vigueur pour la dernière phrase. Enfin, l'explosion, faite d'exclamations, d'applaudissements et de rires.
-Bah souffle, Malfoy ! S'exclama Ron.
Alors, celui-ci s'exécuta.
De nouveau, on applaudit lorsque toutes les flammes s'éteignirent. Puis le cadeau arriva, apporté par Fleurk qui, encore, lui flanqua une bise sur la joue.
Elle allait finir par le polir à force de se frotter à lui.
Une fois qu'il s'en fut saisi, il déballa l'objet du papier avec une délicatesse infinie, sans rien déchirer. Hermione eut un sourire tendre en reconnaissant là les manières qu'il pouvait avoir avec elle. Est-ce qu'on pouvait juger un homme à la manière dont il traite son papier cadeau ?
Il plia en huit l'emballage puis s'intéressa à l'étui noir devant lui. Avec ces manières lentes et étudiées d'aristocrate qui lui servaient de camouflage, comme d'habitude, il s'en saisit et l'ouvrit. A peine découvrit-il son contenu qu'il referma le couvercle en éclatant de rire pour la seconde fois de la soirée.
-C'est quoi ? Osa demander Georges, trop éloigné pour voir.
-Un stéthoscope ! Répondit Pansy à l'autre de la table.
-Merci ! S'exclama le Serpentard, les yeux baissés, trop impressionné d'être le centre de l'attention. C'est... c'est vraiment... Même tout ça, continua-t-il en réussissant finalement à lever son regard pour désigner l'assemblée d'un geste vague dans l'obscurité qui commençait à s'emparer de l'espace. Enfin, merci, conclut-il, son masque de marbre solidement fixé sur son visage.
Arthur se leva pour allumer les guirlandes lumineuses.
-Qui veut essayer de nouveaux feux d'artifices ? Proposa soudain Georges alors qu'un silence tantôt gêné, tantôt pensif selon les convives, commençait à s'installer, une fois les part de tartes englouties.
-Moi, moi ! S'écria Ginny.
-Ceux que tu veux mettre en vente le mois prochain ? Demanda Angelina.
-Oui !
-Moi aussi je veux, s'écria Pansy, parfaite dans son rôle de fille qui n'a jamais froid aux yeux.
-Ce ne serait pas ceux aussi qui n'étaient pas en accord avec la réglementation des douanes ? Demanda Percy.
-Si, avoua son frère dans un sourire malicieux. Je les ai fait alléger juste ce qu'il faut.
-Tu les as déjà essayés ? reprit Charlie.
-Non, mais justement, c'est l'occasion !
Enfin, la lumière surgit, Arthur venant finalement à bout de son installation électrique moldue.
-Aaaah ! S'exclama-t-on de manière entendue.
-Alors on y va ?
-Oui ! S'égosilla Ginny.
Mais son hurlement fut couvert par celui de sa mère :
-Pas dans le verger ! Allez plus loin ! La dernière fois, vous avez failli faire brûler le prunier !
-D'accord, répondit Georges depuis l'intérieur de la maison pour chercher les fusées.
Il en sortit aussi vite qu'il n'en était rentré et tous les intéressés le suivirent dans la nuit.
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Ce qui était bien lorsque Bill et Charlie étaient là, c'est que c'était eux qui se chargeaient de freiner les idées inconscientes de leurs cadets. Hermione, seule, n'était pas vraiment écoutée et se contentait de lever les yeux au ciel et, en Cassandre, de prévenir que ça allait mal tourner. Elle leur avait dit, pour le prunier !
-C'est parti pour la première, s'exclama Georges.
-Tiens-la plus droite, ordonna Charlie, un poil autoritaire. Comme ça, reprit-il en guidant les mains de Georges qui se laissait docilement faire, sachant pertinemment qu'il ne pouvait pas lutter contre le paternalisme de son grand-frère.
-Elle sera bleue, celle-ci, paria Pansy.
-Attention Ron, protège tes petites noreilles, ça va faire BOUM !
-Je sais très bien le bruit que ça fait, Georges !
Un sifflement aigu leur perça les tympans lorsque la fusée décolla. Ils purent suivre sa trajectoire avec les étincelles qu'elle projetait. Elle s'éleva dans les airs puis redescendit en parabole et s'éteignit complètement.
-Ça a pas fait BOUM, remarqua Zabini.
-Ça a fait SHIIIIIIOUF-POC, renchérit Ron, trop heureux de se moquer de son frère à son tour.
-Je dirais même plus : SHIIIIIIIIIPIOUK ! Fit mine de réfléchir à voix haute Pansy.
-C'est quoi ces lumières, dans les hautes herbes ? demanda Nott, mais sa question ne trouva pas de réponse : Hermione ne savait pas de quoi il s'agissait et les autres étaient trop occupés à railler.
-CHIIIIIIII...
-Non, tu ne l'as pas : c'est SHIIIIIIII...
-CHIIIIII...
-SHIIIIIII...
-SHIIIIII...
-Voilà, très bien ! Encouragea Ginny alors que Bill essayait de reproduire le bruit sous les rires des autres.
-Moquez-vous ! S'exclama Georges, légèrement piqué.
-Des lucioles proposa finalement Harry, qui n'était pas loin d'eux.
-Ça fait beaucoup de lucioles en un seul endroit, contra Drago. C'est... autre chose.
Hermione savait à cet instant qu'ils étaient tous les quatre déjà armés, prêts à en découdre.
-Ça se rapproche, remarqua la Gryffondor.
Et alors, surgit des broussailles un immense tigre d'étincelles et de fumées colorées. Un rugissement comme un roulement de tonnerre. Il devait faire six mètres de long et trois mètres au garrot. Il bondit vers vers eux à une vitesse folle. Un expelliarmus échappa à Harry sous la surprise et atteint un arbre du verger dont toutes les cerises tombèrent.
Le fauve ouvrit sa large gueule et les engloutis tous dans un vent violent.
On prit fermement la main d'Hermione, comme cette fois dans le Hall du manoir. Ce n'était pas Nott, c'était Drago. Cette fois-ci, il ne laisserait rien les séparer. Il l'attira contre lui pour cacher le visage de la jeune femme contre son torse et le protéger du souffle chargé de particules.
Une fois qu'ils eurent tous traversé le corps du tigre, ce dernier disparût derrière eux et la nuit redevint silencieuse et immobile. Ils restèrent tout aussi figés un instant. Puis, soudain :
-C'était un truc de fou ! S'écria Ginny en sautant sur place.
-Et ça, ça passe la douane ?! S'exclama Nott.
-Bah... oui, répondit un peu penaud Georges face au ton accusateur de Nott.
-C'est dangereux, Georges, renchérit Charlie.
Nott et lui s'étaient bien trouvés. Drago relâcha son étreinte en soupirant de soulagement, fatigué peut-être de sa journée. On ne pouvait plus parler d'ascenseur émotionnel à ce point là, mais plutôt d'un accélérateur à particules. Il retira sa veste pour l'épousseter.
-C'était cool ! Hurla Ginny pour contester.
-La maison exploserait que tu trouverais ça cool, tacla Bill.
-Tu ne vas quand-même pas mettre ça en vente ? C'est trop dangereux ! Reprit Charlie.
-C'est pas parce qu'on a eu peur que c'était dangereux ! Dans le fond, ce n'était rien de plus que de la fumée et des flammèches. Tu en as tous les jours dans ta cheminée !
-Je ne mets pas ma tête dans ma cheminée, personnellement !
-Qui veut des cerises ? Proposa Pansy, assise sur une branche basse de l'arbre qui s'était pris le sort de désarmement.
-Moi ! S'exclama Blaise en trottinant vers elle, suivi de Ron.
Hermione frissonna de ne plus sentir la chaleur du corps de son amant contre elle et sentit une veste se déposer sur ses épaules. Elle sourit de cette manière délicate. Puis, deux mains se posèrent sur sa taille et la firent reculer, reculer, reculer jusqu'à s'éloigner des autres et les cacher derrière les premiers arbres du verger.
Puis les deux mains glissèrent sur son ventre pour l'étreindre complètement. Dans l'obscurité, un baiser dans son cou, ses cheveux qu'on libère en faisant doucement glisser l'élastique, son parfum qu'on respire, sa peau qu'on goûte du bout des lèvres, puis une voix, ou plutôt un souffle près de son oreille qui la fit frissonner :
-J'avoue que je me sens un peu... fatigué.
Elle sourit et passa une mains dans ses cheveux. Après un temps où il appuyait ses yeux contre son épaule, il reprit :
-Merci... pour tout.
