Guest : Avec plaisir ! Merci pour ta review, j'espère que la suite te plaira ! :)

52- «Toi qui sur le néant en sais plus que les morts» («Angoisse», Stéphane Mallarmé)

J'attaquais d'une voix dure sans perdre une seconde. Il fallait juste... qu'elle parte loin de moi. Le plus loin possible. Que plus jamais je ne croise son chemin.

-Qu'est-ce que tu fais encore là ? Il me semblait avoir été clair.

-Drago...

Toujours à m'appeler de cette voix suppliante, à croire que c'était à elle qu'on avait fait du tort. Ça me révulsait.

-«Théodore» ne t'a pas invitée à t'installer chez lui ? Ricanais-je avec un air mauvais. Il ne semblait pas contre, l'autre soir, pourtant.

-Ecoute-moi...

-Mais qu'est-ce que je gagnerais à t'écouter, hein ? Des excuses dont je me fous parfaitement ? Attention Hermione on dit pas «Je m'excuse» mais «Je te prie de bien vouloir m'excuser» ! articulais-je d'une voix haut-perchée pour l'imiter. «Mais et si moi, je n'avais pas envie de t'excuser ? Et si j'avais été trop blessé pour pouvoir oublier et t'accepter ?»

J'avais hurlé cette dernière phrase de toutes mes forces, pensant singer ce qu'elle m'avait dit au bar des Trois Balais en septembre de l'année dernière, mais je n'avais pas réussi à tenir ma distance ironique. Mon armure en miette.

Elle restait interdite, sidérée. Je la regardais, essoufflé d'avoir crié. Je repris cependant, car je n'en avais pas fini. Elle avait voulu une confrontation ? Elle allait l'avoir. Je me mis par réflexe à faire les cents pas.

-Et tu me parles d'honnêteté ! Tu me reproches de mentir à Abigail ! Tu me fais passer pour quelqu'un sans scrupule, un connard de la pire espèce parce que je cache la vérité pour protéger le secret de l'autre... de l'autre... Enfoiré !... Mais toi ! Toi ! Tu fais bien pire ! Tu es bien pire ! Tu te crois peut-être supérieure à moi avec ton honneur, ta morale, ton héroïsme. Et c'est vrai, je n'ai pas toujours été un enfant de chœur. Peu de personnes peuvent se targuer d'avoir fait entrer des Mangemorts dans Poudlard et d'avoir reçu cette saloperie de Marque... Mais j'ai su changer ! Tu ne voulais pas que je te mente ? Je ne te mentais plus. Tu voulais que je te raconte tout, sans rien omettre ? Alors je te racontais tout, même ce qui allait tourner à mon désavantage. La preuve, avec cette histoire de mariage pour contrer celui avec les Greengrass. Cet instinct que j'avais, je l'ai fait taire. Pour toi ! Pour nous ! Il n'y avait que ça qui comptait : ton bien ! J'ai appris à te faire confiance et pourtant Merlin sait à quel point faire confiance est difficile pour moi ! Et toi ! Toi ! Pendant ce temps, alors que je me jette dans le vide, tu me lâches ! Tu me mens ! Et j'aurais pu l'accepter si l'intention avait été louable. Car moi, contrairement à toi, Sainte Hermione, je ne voue pas un culte à la vérité. Mais, ton mensonge, ce n'était pas pour mon bien ! Tu as été égoïste ! Tu n'as pensé qu'à toi ! Tu n'as jamais pensé à nous. D'ailleurs, je me demande si nous avons déjà été un «nous».

Elle voulut protester mais je ne lui en donnait pas l'occasion :

-N'ose même pas m'affirmer le contraire : tu n'as jamais été foutue de me dire «je t'aime», Hermione ! Même pas un petit «Moi aussi». Rien ! Jamais ! Tu sais prendre mais tu ne sais rien donner. Tu es sèche comme tes grimoires et incapable d'aimer.

Je passais une main nerveuse sur mon visage. J'étais violent, je le savais. J'avais peut-être dépassé plusieurs fois les limites mais je m'en foutais éperdument. Je m'étais arrêté dans mes aller-retours, tourné vers la fenêtre pour ne pas la regarder. Mais j'avais encore des choses à lui dire... Tant de choses à lui dire ! Alors, je lui fis face de nouveau, après avoir repris mon souffle et mon courage. J'abaissais de nouveau la visière de mon heaume pour repartir à la charge.

-Et avec qui tu oses me trahir ? Hein ? Avec qui ? rugis-je. Avec mon meilleur ami ! Et je me rends compte d'un coup, d'un seul, que je ne suis pas entouré d'un être abjecte, mais de deux ! Qui l'aurait cru, hein ?! Que juste sous mon nez, à mon insu, vous vous foutiez tous les deux de moi ! Comment aurais-je pu suspecter quelque chose d'aussi odieux ?! Même ma propre jalousie, mon propre entendement n'avait pas imaginé un scénario aussi nauséabond ! Qu'il t'aime, qu'il tente de te séduire, à la rigueur, mais que toi, que j'adorais comme le soleil, que je... que je voyais aussi pure que la neige, tu puisses me trahir ?! Jamais je n'aurais pu l'imaginer une seule seconde ! Mais alors dis-moi ! Car je suis curieux ! Depuis quand ? Oh non, tiens, laisse moi deviner : je parierais bien sur un mois environ... Je me trompe ? Quand commence ta froideur en somme ? Plus besoin de moi quand un autre peut t'embrasser et te prendre dans ses bras ! N'est-ce pas ? Et alors c'est comment ? Je suppose qu'il embrasse mieux que moi ? Qu'il te fait mieux l'amour ? Tu l'aurais jeté si non, non ? Tout comme tu le fais pour moi ! Quoi d'autre ? Il est plus intelligent ? Plus sérieux ? Plus doué ? Son passé est moins sombre ? Son bras gauche est immaculé ? Il fait moins tâche sur les photos ? Alors dis-moi, Hermione : qu'est-ce que Nott a de plus que moi ?!

De nouveau, j'avais hurlé avec mes tripes ma dernière phrase. Je retins mes larmes qui menaçaient de déborder comme un verre rempli d'eau qu'on aurait bousculé. Plein de larmes à ras-bord. Je repris, dans un souffle :

-Quand je pense que j'allais te donner justement ce que tu voulais... Que j'allais te quitter. Tout simplement parce que je n'en pouvais plus... de ta froideur. Et toi, tu m'as fais croire... tu m'as fais espérer à nouveau, le matin dans ma chambre... Même quand je t'ai vu quitter la soirée avec Nott... J'y ai cru jusqu'au bout, à notre réconciliation... Alors que toi, tu n'y pensais même plus. Je pensais à toi et toi, tu pensais à lui ! Pourquoi ? Pourquoi tu ne m'as pas laissé partir ? C'était pourtant le plus simple pour toi, non ? C'était ce que tu devais attendre ! Je n'étais plus qu'un fardeau pour toi... Alors... Pourquoi est-ce que tu ne m'as pas laissé abandonner ?... Et toi ? Pourquoi tu ne m'as pas quitté avant ?

Je me perdais de nouveau dans la contemplation du parc. Le jour avait fini par se lever complètement malgré les nuages bas et lourd. Il allait peut-être neiger. Nous n'avions pas eu de neige pour Noël. Un peu de vent secouait les cimes des chênes verts. Premier jour de l'an 2000. Nouveau siècle, nouveau millénaire. Nouveau célibat. Quelle pitié.

Une idée me vint alors à l'esprit. Malgré mon ton bien plus calme, elle n'avait pas osé répondre à mes questions précédentes. Je repris d'une voix douce, car je voulais vraiment qu'elle donne les réponses à toutes les interrogations qui tournaient dans ma tête. Je savais que sans ces clés, mon esprit ne retrouverait jamais le repos.

-Est-ce que je te fais peur ?

Je me retournais vers elle pour l'entendre. Elle était debout, recroquevillée sur elle-même, le visage baigné de larmes.

Qu'elle pleure. Sadiquement, je me satisfaisais de ses larmes. Qu'elle souffre un peu au moins : elle ne ressentirait de toute façon pas le centième de la douleur que j'éprouvais.

Elle me regardait avec un air de parfaite incompréhension. Je répétais alors la question :

-Hermione, est-ce que je te fais peur ?

-N... Non.

-Je te fais pitié alors ? C'est pour ça, que tu ne m'as pas quitté ?

C'était mieux que de lui faire peur, mais ça restait intolérable.

-Non plus...

Je pouffais, incrédule.

-Si, je dois te faire pitié. Le pauvre petit Drago Malfoy tout seul dans son manoir...

-Non, pas du tout, au contraire.

Elle avait fait un pas vers moi tandis que je pouffais de nouveau. «Au contraire» : n'importe quoi.

-Si, insista-t-elle face à ma mine sceptique. En réalité tu es...

Elle fit une pause pour essuyer ses larmes sur ses joues.

-... Tu es peut-être l'homme le plus courageux que je connaisse.

Je levais les yeux au ciel. Elle ne savait plus quoi inventer. Elle reprit :

-Plus qu'Harry, plus que Ron... Tu sais te battre. Tu as tout supporté. Tu sais tout endurer. Et je sais... que rien ne saurait t'abattre.

-Mais alors pourquoi ne m'as tu pas quitté ? demandais-je avec une voix d'où transpirait mon exaspération.

Elle se rapprocha encore d'un pas.

-Parce que justement, tu sais te battre.

-Tu avais peur de moi donc, coupais-je.

Je ne comprenais rien.

-Non, reprit-elle et, avec sa voix, ses larmes, de plus belle. Je ne t'ai pas quitté aussi parce que... tu as bon cœur...

Moi, bon cœur ? Quelle connerie.

-Parce que tu es doux et fidèle. Mais aussi parce que tu es brillant et ambitieux. Parce que tu es drôle.

-Pourquoi vouloir me quitter alors ? Qu'est-ce qui me manque ? Qu'est-ce que Nott a et que je n'ai pas ?

Elle fit un pas, encore. Un dernier pas et elle était capable de me toucher. Je ne le voulais pas et pourtant, je ne bougeais pas, suspendu à ses lèvres.

-Rien.

-Il va m'en falloir un peu plus, répliquais-je sèchement, agacé de m'être senti touché par ce qu'elle venait de dire.

-Tout ce que Nott a c'est... c'est... qu'il n'est pas toi.

-Charmant, pouffais-je ironiquement en haussant les sourcils, plus blessé que jamais. Je vous souhaite beaucoup de bonheur.

Et sur ses mots, je me décalais pour ouvrir la porte d'entrée.

-Nous en avons fini je pense... Je ne te retiens pas.

J'étais ulcéré par cette réponse à la fois obscure et blessante. Ce n'était pas le moment de jouer les Trelawney.

-Attends ! Tu fais fausse route, s'écria-t-elle sans bouger d'un iota.

-Mais explique-moi alors ! M'exclamais-je en refermant la porte d'un geste sec.

Il faisait froid et le vent s'engouffrait dans le hall. Je détestais cette avidité qui me retenait de la jeter dehors sans ménagement.

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Ses cents pas, son expression figée à défaut de marquer la douleur, son ton sec, ce hall en hiver... Elle avait déjà connu ça, il y a un an, à quelques jours près. Est-ce que la vie n'était pas un éternel recommencement ? Ses larmes reprirent à nouveau.

-J'essaye de t'expliquer mais toi, essaye un peu de comprendre ! S'exclama-t-elle, désespéré de ne pas réussir à s'entendre avec lui.

-Pardon ?! S'écria-t-il, stupéfait. Pardon ?! Mais comment veux-tu que je comprenne, par Merlin ?! Tu crois vraiment que je perdrais mon temps à parler avec toi si je pensais pouvoir comprendre par moi-même ?! Si tu es encore là, à mouiller le carrelage avec tes pleurnichements, c'est uniquement parce que justement : je ne comprends pas ! Je ne comprends pas ta trahison ! Je ne comprends pas pourquoi tu as fait traîner cette situation jusqu'à me mentir ! Je ne comprends pas ce que je suis sensé comprendre ! Et j'essaye de discuter honnêtement avec toi mais en réalité, je parle seul avec un mur ! Mais peut-être est-ce simplement parce que tu ne sais pas être honnête ?

Tout ce qu'il avait pu dire l'avait traversée de part en part comme des lames. Tour de magie moldu raté. Découpée, ses morceaux, dispersés. Et comme d'habitude à chaque fois qu'elle se disputait violemment avec lui, les mots simples, efficaces, ne voulaient pas sortir. Comment lui dire ? Comment lui expliquer ? Elle se sentait prise au piège : quoi qu'elle dise, c'était toujours une mauvaise réponse, il ne la croyait pas, il ne saisissait pas ce qu'elle essayait de lui faire comprendre et elle avait la sensation de s'enliser à chaque phrase qu'elle prononçait. C'était comme un oral d'ASPIC pour lequel elle n'avait pas révisé. Mais cette fois-ci, plus important que son avenir, elle jouait son bonheur.

Allez, dis-lui qu'il se trompe ! Ça n'effacera sans doute pas son sentiment de trahison, mais ça l'atténuera peut-être... au moins ! Allez ! Dis-lui ! Que les mots sortent de cette foutue bouche !

-Ce n'était pas vraiment ce que tu crois.

Ses yeux roulèrent d'exaspération.

-Oh par pitié, Hermione, je pensais qu'être à Gryffondor t'aurait au moins donné le courage d'assumer ! Mais tu fuis depuis tout à l'heure et tu n'expliques rien. Tu parles en énigmes, vaine tentative pour essayer de...

-Ça ne s'est pas passé comme tu penses ! S'entendit-elle s'exclamer précipitamment en le coupant.

-Mais alors comment ? Arrête de tourner autour du pot et parle clairement ! La pressa-t-il, visiblement à bout de patience.

Elle déglutit difficilement avant de se lancer. Interdiction de merder.

-D'abord, il n'y a rien eu entre Nott et moi jusqu'à hier soir, répartit-elle en se ressaisissant.

-Si tu le désirais à ma place, c'est du pareil au même.

-Je ne le désirais pas. Il n'y a eu que toi.

-Je ne te crois pas, Hermione. On arrive pas à tromper quelqu'un par hasard. Tu ne vas pas me faire croire que tu as trébuché et que ta bouche a malencontreusement atterri sur la sienne, tout comme tes mains se sont égarées jusqu'à ses cheveux ! Et tu l'as laissé poser ses mains sur toi !

De nouveau, cette voix de douleur et de rage. Presqu'un cri.

Hélas, selon Hermione, cette version abracadabrantesque, c'était presque la vérité. Malgré ses quelques vingt-quatre heures à ruminer dans ce hall, elle n'avait pas trouvé d'explication à son geste si ce n'est : Théodore avait été là, au mauvais endroit, au mauvais moment et elle aurait peut-être embrassé n'importe qui d'autre à sa place. N'importe qui qui lui aurait permis de tromper sa solitude. Il devait en être de même pour le brun : en l'embrassant, elle avait pensé à Drago ; lui, avait du penser à Abigail. Et c'était tout. Mais comment lui faire comprendre ?

Elle entendait sa peine et elle aurait tout donné pour pouvoir le réconforter, comme à chaque fois que les souvenirs de ses mauvais jours l'assaillaient. Mais aujourd'hui, le mauvais souvenir, c'était elle.

-C'est à toi que je pensais...

Il pouffa de nouveau ironiquement : son regard dur la quitta un instant pour se perdre au loin alors qu'il dodelinait de la tête pour manifester son incrédulité.

-Ça n'a aucun sens... Ça n'a absolument aucun sens ! Tu m'avais moi !... Alors pourquoi, par Merlin, avais-tu besoin d'embrasser Nott pour penser à moi ?! Pourquoi est-ce que ce n'était pas moi à la place de Nott dans cette chambre ?! Pourquoi est-ce que, pendant un mois, tu m'as traité comme un pestiféré ? Tu m'évitais ! Est-ce que mes doigts étaient devenus des ronces, ou... je ne sais pas ?! Du papier de verre ?!

-Il fallait qu'on se quitte...

-Oh, sans blague ? Rétorqua-t-il avec un rictus sardonique. Et c'était à moi de faire le sale boulot, hein ? Le gars est un ancien Mangemort, on peut bien lui refiler les tâches ingrates ! Et tout ça pourquoi ?!

Hermione essaya de passer outre ces accusations injustes. Il était en colère.

-On devait se quitter car...

Mais il la coupa, comme s'il ne voulait pas l'entendre de sa bouche :

-Oh, je sais très bien pourquoi ! Pas la peine d'expliquer ! Mais sache que lui aussi est promis. Lui aussi devra se marier au plus vite pour fuir Millicent. Lui aussi devra te faire assister à des séjours longs et pénibles pour essayer de régler des affaires financières et pendant lesquels on t'insultera exactement de la même manière qu'on a pu le faire pendant cette maudite fête. En me quittant, tu crois fuir ces obligations mais en réalité, tu replonges dedans la tête la première ! La situation de Nott est même pire que la mienne car lui, n'a pas de salaire pour vous entretenir ! Tu as fait un très mauvais calcul ! Remarque, moi, ça m'arrange, je pourrai rembourser la dette plus vite ! Et puis cohabiter avec Nott senior te plaira sans aucun doute ! Vous vous rappellerez le bon vieux temps ! Celui où ton existence avait un sens !

Ces derniers mots, d'une violence gratuite, piquèrent Hermione. Son sang ne fit qu'un tour : elle ne supportait plus ses manières brusques et il avait été trop loin. Elle aurait pu essuyer beaucoup d'insultes. Elle s'y était préparée. Mais pas ça. Quelle image avait-il d'elle ? D'une femme vénale ? Calculatrice ? Futile ? Qui change d'homme aux gré de ses besoins ? Une lâche qui fuit la moindre difficulté ? Or, s'il y avait bien une chose qu'Hermione avait toujours suivi, c'était bien son cœur. Même le quitter était une décision prise par amour !

Et si lui, avait été plus détaché des traditions et de ce monde qu'il disait exécrer, peut-être n'en seraient-ils pas là ? Peut-être que la panique à l'idée de ne pas réussir à le rendre heureux ne se serait pas imposée à elle ? Elle aurait appris à lui dire qu'elle l'aimait, sans crainte de s'engager plus en avant ?

-Toi, tu as l'impression de parler à un mur ? Moi, je parle avec un Troll ! Lâcha-t-elle froidement. Tu te trompes : Théodore est bien plus libre que toi. Et tu pourrais l'être autant que lui si tu le voulais car tu n'as pas les obligations que tu crois avoir. Tu pourrais te foutre de ce que cette société pense !

-Et me présenter avec une héroïne de guerre né-moldue à mon bras alors que je suis engagé avec une Sang-Pur, ce n'est pas assez provocateur pour toi peut-être ?! Tu ne connais pas ce monde ! Comment peux-tu te permettre de le juger ? Tu crois tout savoir, tout maîtriser et tu t'en sortais très bien dans microcosme de Poudlard. Mais il est temps de te rendre compte que le monde est plus complexe que ça ! Tu ne peux pas tout connaître et tu ne vas pas avoir d'autre choix que d'apprendre à faire confiance !

-C'est toi qui le rends compliqué !

-Non ! C'est toi qui t'es habituée au monde fermé de ton trio et des Weasley, qui sont certes très sympathiques mais ne sont pas foutus de voir au-delà de leur bout de terrain infesté de gnomes !

-C'est toi qui dis ça ? Tu honores des valeurs qui te font horreur ! Tu crées des paradoxes là où il ne devrait pas y en avoir ! Tu n'es jamais en paix ! En réalité, tu es bien trop effrayé à l'idée de ne plus avoir à te torturer. Tu l'aimes, ce destin maudit ! Il te donne un os à ronger pour combler le vide de ton existence !

-Je préfère avoir affaire au vide qu'à l'étroitesse de la tienne, où tout est si millimétré que personne si non toi, ne peut y trouver sa place. Ni Ron, ni Siegfried, ni moi, ni Nott, ni personne ! Je devrais le prévenir, tiens, que ce que tu recherches en réalité tiens plus du colocataire qu'autre chose.

-Fais donc ça, dans ton grand hall vide ! Il ne faudrait surtout pas que tu règles ton problème d'argent en vendant un manoir qui te rend malheureux !

-Le manoir ne m'appartient pas ! Tu le sais très bien ! Il est à ma famille ! Nos enfants...

Il se retint de poursuivre sa phrase mais il en avait trop dit. C'était symptomatique de leur relation : lui dire qu'il n'avait aucune attente tout en passant son temps à les suggérer, en filigrane. Ce fut à son tour de pouffer, de mépris, hors d'elle :

-Nos enfants ? Nos enfants ?! S'il y a bien une chose dont tu peux être sûr, c'est que jamais je n'aurais laissé mes enfants s'enchaîner à cette bâtisse qui te retient prisonnier. Jamais je n'aurais introduit mes enfants dans cette société nauséabonde. Il est heureux que nous n'ayons pas eu d'enfant, Malfoy, car tu t'apprêtes à faire les mêmes erreurs que tes parents !

Il la regarda avec un air sonné.

-Comment oses-tu ? Gronda-t-il, après avoir repris ses moyens.

Ses yeux lançaient des éclairs et Hermione reconnut tout de suite que ses mots avaient dépassé sa pensée.

-Drago, je...

Mais il l'interrompit, avec une colère froide qui la faisait bien plus trembler que celle explosive à laquelle elle avait eu droit quelques instants plus tôt. C'était de ces feux souterrains qui exploseraient plus durement encore, parce qu'ils avaient été contenus.

-En fait Hermione... reprit-il d'une voix tremblante de rage, je ne sais même pas pourquoi on discute. Tu ne voulais plus de moi, non ? Tu voulais qu'on se sépare et regarde : nous y sommes. Alors... Tout va pour le mieux, n'est-ce pas ? Pourquoi cette discussion ? Ce n'est pas comme si elle allait changer quoi que ce soit car de toute façon tu refuses de t'expliquer clairement. Alors, sors d'ici. Tout de suite.

-Drago ! Je te prie...

-Sors d'ici ! Hurla-t-il à s'en déchirer les poumons et, sans pouvoir contrer quoique ce soit, Hermione se sentit poussée vers la porte d'entrée par une force contre laquelle elle ne pouvait pas résister. La porte s'ouvrit si violemment qu'elle claqua contre le mur puis se referma tout aussi brusquement une fois qu'elle se trouva sur le seuil. Elle voulut revenir sur ses pas mais un sort de protection se dressait désormais entre l'entrée et elle. Aussi, quand elle voulut prendre la poignée, elle fut projetée au sol à plusieurs mètres de là.

Alors qu'elle se relevait avec difficulté, endolorie de sa chute sur les gravillons de l'allée, elle se rendit compte que le manoir avait disparu. Il avait du lancer le sort de protection dont Harry, Ron et elle se servaient pour camoufler leur tente... Mais lui, avait réussi à dissimuler tout son manoir !

Il fallait qu'elle s'excuse. Comment ? Une lettre ? Il la déchirerait. Aller le trouver à l'hôpital ? Rôder autour de son manoir ? Elle n'en savait rien. En tout cas, ce qui était sûr, c'est qu'aujourd'hui, elle n'arriverait à rien. Il fallait qu'il s'apaise. Alors, elle transplana chez les Weasley. Elle avait besoin d'un bon thé chaud... et de la tarte aux pommes, s'il en restait de la fête d'hier, seuls remède pour réparer son cœur en miettes.

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Le silence autour de moi hurlait. Je ne voulais pas penser à ce qu'il venait de se passer. C'était trop douloureux. Malgré moi, pourtant d'énormes sanglots, comme des gouttes de pluies d'orages s'écrasèrent sur mes joues, incontrôlables.

Enfin, la fatigue de ma nuit blanche et agitée retomba sur moi comme une chape de plomb. J'étais exténué. Alors, je montais d'un pas lourd les marches jusqu'à notre-ma chambre. Je gardais les yeux baissés pour ne pas la voir vidée des effets personnels de celle qui y avait partagé ma vie.

Je m'effondrais enfin, tout habillé sur le lit. Priant pour que le sommeil m'emporte avant que les souvenirs et la tristesse ne me rattrape. Les yeux fermés depuis une ou deux minutes seulement, j'entendis le son le plus réconfortant que je connaisse et, avec lui, une caresse duveteuse contre mon bras.

Le plumours.

Jamais une sensation ne m'avait fait plus plaisir. Il s'allongea sur mon torse, sa tête contre mon menton. Comme à Poudlard, quand il venait me voir la nuit quand sa maîtresse et moi étions en froid.

Je ne me posais pas de question : qu'elle l'ait laissé là à dessein ou non, je m'en fichais. Il était là et désormais elle ne pouvait plus entrer au manoir. L'affaire était réglée... Au moins pour la journée.