Bonjour à tous, voici une nouvelle fanfic, j'espère qu'elle vous plaira. N'hésitez pas à me faire part de vos impressions, ça me fait toujours plaisir ! Je ne devrais pas tarder à terminer le dernier chapitre de mon autre fanfic en cours. Bonne lecture
Elle était secouée dans tous les sens. Son ventre était noué, et son estomac menaçait de se vomir lui-même. Elle n'avait pas mangé depuis des jours. Elle n'aurait rien eu à vomir de toute façon, si ce n'est ses entrailles. Les secousses du train n'amélioraient pas la chose, l'odeur de peur mélangée à l'urine et la transpiration ambiante non plus.
La chaleur était insoutenable. Tous enfermés et entassés dans ce wagon lugubre et sombre, ils gémissaient et sanglotaient sans retenue. Elle, elle résistait au désespoir. Elle était Gryffondor. Elle ne devait pas l'oublier, se rappeler son courage. Elle se couvrit les oreilles, essayant d'oublier les pleurs des enfants. Recroquevillée sur elle-même, les genoux serrés contre sa poitrine, elle ignorait le mal-être grandissant dans son ventre.
Elle avait été stupide. Se faire attraper… Elle qui était si intelligente n'avait pas réussi à échapper à une simple escouade de rafleurs. Elle leur avait échappé si longtemps, leur riant au nez… cette fois-ci, ils n'avaient pas raté leur coup.
Elle fuyait depuis deux ans maintenant. Deux ans que Harry avait disparu mystérieusement. Elle avait gardé espoir le plus longtemps possible. Voldemort ne s'était pas déclaré vainqueur de la guerre, et elle avait espéré que Harry réapparaitrait héroïquement.
Elle s'était trompée.
Harry n'était jamais réapparu et l'Ordre du Phénix avait commencé à s'éteindre, lentement mais sûrement. Les mangemorts gagnaient du terrain et Voldemort avait finalement gagné la guerre par forfait du Survivant qui avait disparu. Elle et Ron, ils n'avaient pas voulu abandonner mais sans Harry Potter, leur quête était vaine. Finalement, Ron avait rejoint sa famille avant de fuir le pays. Elle, était restée. Elle ne pouvait pas abandonner. Mais bien vite, la résistance était devenue une simple fuite. Survivre était sa priorité, ne pas être attrapée par les rafleurs, une nécessité.
Mais tout cela n'avait plus lieu d'être. On l'avait attrapée et elle était conduite dans la pire prison pour sangs de bourbe du pays. La prison qui abritait tous les fugitifs nés-moldus qui avaient réussi à échapper aux rafleurs plus d'un an, mais aussi tous ceux participant à la résistance. Celle dans laquelle on envoyait les plus anciens, les plus récalcitrants. Elle faisait partie de ceux-là. Elle était une icône de la résistance. Elle ne s'était jamais fait d'illusions. Elle savait que c'était là qu'on l'enverrait si elle avait le malheur d'être attrapée vivante.
Et cette prison, elle n'était dirigée par nul autre que Drago Malefoy. Sa gorge se noua plus encore. Elle n'aurait pu imaginer pire cauchemar. La mort aurait sans doute été préférable. Elle n'avait pas revu son ennemi de Poudlard depuis qu'ils avaient quitté l'école. Cela remontait à sa sixième année. Il y avait trois ans de cela. Elle se rappelait l'insupportable garçon qu'il était, méchant, mauvais, moqueur, mesquin, sadique. Elle aurait pu en trouver des qualificatifs à sa personnalité désordonnée. Il aurait bien eu besoin d'une thérapie celui-là. Ce n'était qu'un petit lâche qui ne savait qu'invoquer le nom de son père et sa fortune. C'était sans doute cela qui l'avait propulsé au rang de Général de Voldemort, son préféré, à la tête du pire mouroir à sangs de bourbe du pays.
Elle avait entendu parler de ses « exploits » tout au long de son périple. Des histoires monstrueuses à son sujet parcouraient le pays. Elle avait toujours su qu'il était mesquin, mais elle ne le pensait pas si dérangé. Il haïssait les sangs de bourbe et il ne se privait pas de leur faire subir les pires sévices. Au fond, elle espérait un peu que sa réputation soit exagérée.
Un long sifflement manqua de la faire sursauter, mais tout ce qu'elle put faire, ce fut relever la tête. Elle était dans ce wagon depuis des heures. Elle mourait de soif et de faim. Surtout de soif. Sa bouche était pâteuse, sèche et ses lèvres craquelées. Les portes coulissantes du wagon s'ouvrirent dans un grincement strident et la lumière du soleil les éblouit brusquement. Elle papillonna des yeux, essayant de s'habituer à la soudaine lueur. Elle n'eut pas le temps de recouvrir la vue qu'on la tirait hors du wagon. Elle manqua de s'écrouler à genoux. Elle se sentait trop faible. Son corps tremblait de la tête aux pieds. Elle n'aurait su dire s'il s'agissait de peur ou parce qu'elle n'avait pas mangé depuis des jours. Et la soif … Elle ne la supportait plus. Sa langue avait une texture étrange dans sa bouche. Elle ne rêvait que d'une chose : d'eau.
- Avance, grogna un rafleur en lui donnant un coup de matraque dans le dos.
Elle accusa le coup, grimaçant. Elle se redressa, se forçant à suivre le cortège mortuaire. On les poussa dans une gigantesque salle assez peu aménagée. Les murs et le sol étaient nus, gris et poussiéreux comme un lendemain de travaux. Les seules ouvertures étaient brutes, agrémentées de barreaux pour s'assurer qu'aucun des sangs de bourbe ne puisse s'échapper. Deux gardes entouraient l'unique sortie par laquelle les prisonniers étaient entrés. Leur regard plein de dégout parcourait les loques qui pleuraient, geignaient et suppliaient pour être épargnées.
Elle ne savait pas combien de temps elle avait passé dans cette salle. Peu à peu, la pièce s'était vidée, emportant chacun à leur tour les prisonniers. Elle savait comment cela se passait. Tous les nés-moldus le savaient. A l'arrivée dans un camp, on triait les sangs de bourbe. On ne gardait que les plus robustes, les plus intéressants. Les autres, ils étaient tués. Sans le moindre état d'âme.
- Lève-toi ! aboya un garde.
Elle le scruta un moment en obtempérant. Elle l'avait déjà vu. C'était l'un des mangemorts présents au ministère de la magie lors de sa cinquième année. Il la poussa dans une autre pièce, bien plus petite. Une table avait été dressée pour unique mobilier, et derrière elle, trois hommes. Elle ne connaissait pas le plus vieux, mais les deux plus jeunes ne lui étaient pas inconnus. Blaise Zabini était assis à côté de Drago Malefoy, l'air passablement ennuyé par l'exercice de la sélection. Drago Malefoy ne semblait pas beaucoup plus intéressé, grattant sur son parchemin.
Il releva les yeux et elle crut y déceler une lueur de surprise. Alors il ne savait pas qu'elle avait été capturée ? Et emmenée dans cette prison de malheur ? Elle avait du mal à y croire. Malefoy se trouvait dans les petits papiers du mage noir, il devait être au courant de chaque mouvement sur le territoire.
Presque aussitôt, son regard s'endurcit. Son regard bleu se teinta de gris, fermé. Il y avait quelque chose d'effrayant dans ses yeux. Incapable de se contenir, elle détourna le regard.
Il avait changé. Il n'avait plus rien à voir avec le poltron de Poudlard qui pleurait après son père dès qu'il était contrarié. Non, le Malefoy face à elle, il semblait plus dur, plus froid, plus sadique que jamais. Il dégageait quelque chose de sombre qui la mettait mal à l'aise.
- Hermione Granger. Nous vous attendions.
C'était le plus âgé qui avait parlé, et il ricana. Son nom le faisait rire peut-être ?
- Et vous, quel est votre nom ? Excusez-moi, mais… je n'ai jamais entendu parler de vous, dit-elle avec une arrogance non-dissimulée.
Le sourire du vieil homme s'effaça aussitôt, et elle entendit une sorte de rire froid sur le côté. Ses épaules se tendirent alors qu'elle se risquait à jeter un coup d'œil à Drago Malefoy qui avait ri. C'était effrayant.
- A votre place, je ne jouerais pas à ça, gronda l'homme âgé. Vous n'êtes pas en position de force.
Elle ne répondit rien. Il avait raison et elle n'avait pas envie plus que ça de finir dans une fosse commune.
- Un talent particulier qui permettrait de sauver ta misérable vie ? siffla brusquement Malefoy.
Il n'avait pas changé. Il avait la même voix trainante qu'elle détestait tant à l'époque.
- Réponds, sang de bourbe.
- Rien de particulier, dit-elle entre ses dents. Rien qui ne vous intéresse.
Malefoy se redressa brusquement, se rapprochant jusqu'à n'être qu'à un pas d'elle. Elle se sentait en danger et elle devait prendre sur elle pour ne pas reculer. Plutôt mourir que de lui montrer qu'elle avait peur de lui. Ici, il était tout puissant. Il pouvait la réduire à néant. Lui faire subir les pires horreurs qui puissent exister. Il tendit sa bouteille d'eau qu'il tenait entre ses mains sous son nez et Hermione loucha dessus.
- Est-ce que tu as soif, Granger ?
Elle releva prudemment les yeux. Etait-ce une question piège ? Cela ne l'étonnerait pas de lui. Elle passa sa langue sur ses lèvres sèches et craquelées. Elle crevait de soif. Alors l'idée du piège lui échappa et elle hocha doucement de la tête. Le sourire moqueur de Malefoy s'effaça aussitôt, son regard gris se fit orageux. Sa bouche s'ouvrit et déversa un torrent glacé :
- Réponds-moi quand je te parle.
Elle frissonna, terrifiée. Il n'était pas si sombre à l'époque de Poudlard. Il n'était pas si effrayant.
- Je … Oui, j'ai soif.
- Monsieur, siffla-t-il.
Elle dut se retenir de toutes ses forces pour ne pas l'insulter de tous les noms. Il jubilait. Il profitait de l'ascendant qu'il avait sur elle pour l'humilier, la réduire plus bas que terre.
- Oui… Monsieur.
Elle avait bredouillé et elle se détestait pour ça. Il éveillait en elle une terreur telle qu'elle n'osait protester. Son courage s'était évaporé, envolé avec sa dignité. Elle avait envie de hurler sa colère et sa rage mais se retint.
Elle avait trop soif. Elle ne pouvait pas mentir, et Malefoy saurait se venger si elle osait le braver. Elle avait la sensation qu'elle allait mourir de soif d'ici quelques instants s'il n'y avait pas de liquide qui coulait dans sa gorge urgemment. Elle en perdait son sens de la préservation qui lui murmurait de ne pas accepter l'eau de Malefoy qui devait être empoissonnée. Ou il allait lui jeter à la figure, elle ne savait pas.
Et pourtant, à la surprise générale, il lui tendit la bouteille. Même Zabini et le vieil homme ne s'y attendaient pas. Hermione tendit la main, hésitant une seconde à lui prendre la bouteille en plastique. Elle leva un regard incertain vers le garçon. Son regard était impénétrable, froid. Sans trop savoir si elle agissait comme il le fallait, elle attrapa la bouteille, effleurant les doigts glacés de Malefoy. Il ne protesta pas, mais quelque chose passa dans son regard. Elle n'était pas capable de dire quoi. Il relâcha la bouteille et Hermione la porta à ses lèvres. Elle but goulument, n'ayant jamais autant apprécié l'eau. Le vieil homme, toujours installé derrière la table, la regardait avec mépris, mais elle n'en avait que faire. Pour l'instant, elle avait besoin d'eau. En trois gorgées, la bouteille était vide.
- Merci, murmura-t-elle difficilement.
Le regard de Malefoy s'assombrit et elle rajouta précipitamment :
- Monsieur.
Il sourit à moitié, si on pouvait appeler ça un sourire, et ça lui fit bizarre. Elle n'était qu'un animal à ses yeux. Elle le voyait dans son regard.
- Tu apprends vite, sang de bourbe. Et baisse les yeux.
Hermione obéit avec difficulté, mais obtempéra tout de même. Ce sale petit con avait décidé de la rabaisser plus bas que terre.
- Alors, talents particuliers ? On t'écoute.
- J'ai n'ai pas de talent. Monsieur.
Elle serrait de toutes ses forces la bouteille entre ses doigts, la faisant craquer désagréablement. Elle était petite, maigrichonne, trop faible.
- Allons, Granger, ne mens pas. Tu as une capacité incroyable pour ingurgiter des connaissances plus inutiles les unes que les autres.
Elle déglutit, incapable de trouver une réponse adéquate. Le regard de Malefoy se fit orageux et elle ouvrit la bouche. A son grand damne, ce fut un son brisé et apeuré qui en sortit.
- Oui.
Malefoy détourna le regard et dodelina de la tête, l'air incertain. Le cœur de Hermione battait à toute allure. Elle savait que son destin se jouait à cet instant. Elle savait que l'humeur du Serpentard serait ce qui déterminerait son avenir ou sa mort.
- Porte de gauche, dit-il finalement. Et n'oublie pas qui je suis, sang de bourbe.
Hermione frissonna et n'eut pas le temps de répondre, un gardien la tirant déjà en arrière pour lui faire passer la porte de gauche. Avant qu'elle ne comprenne ce qui se passait, un torrent d'eau glacée s'écroula sur ses épaules, tranchant avec la chaleur écrasante de l'extérieur et du wagon qui l'avait transporté pendant plusieurs heures. Une seconde, elle crut s'évanouir, sans trop savoir s'il s'agissait du choc thermique ou de la peur soudaine quand elle sentit l'eau frapper ses épaules. Elle s'était vu mourir l'espace d'une seconde.
Elle n'eut pas le temps de tergiverser, sortit de la pièce-douche, trempée et tremblotante. Un homme avec un long tablier de caoutchouc lui fit signe de s'asseoir sur l'unique tabouret de la pièce carrelée du sol au plafond. Une masse de cheveux impressionnante couvrait le sol. L'homme approcha une grosse paire de ciseaux de la chevelure de Hermione qui eut un mouvement de recul.
L'homme, hideux, grimaça, lui jetant un coup d'œil menaçant. Il n'avait pas besoin de parler, la menace était claire : si elle osait résister, il n'allait pas couper que ses cheveux. Hermione accepta alors sa défaite, observant l'œuvre monstrueuse de son « coiffeur » dans le miroir piqué de rouille contre le mur à deux mètres d'elle. Ses longs cheveux bruns indomptables tombaient au sol, sans vie, alors qu'il ne lui restait plus qu'une dizaine de centimètres de longueur. Ses cheveux courts bouclaient plus que jamais, lui donnant l'air ébouriffé. Elle avait l'air d'un garçon avec cette coupe de cheveux, dans ses vêtements usés et sans forme. Elle essaya d'oublier le sanglot coincé dans sa gorge.
Ce n'était que des cheveux après tout.
Elle rejoignit la pièce suivante où trois piles distinctes se trouvaient : une pile de jeans, une pile de chemises et une pyramide de chaussures nouées par leurs lacets. Un homme la jaugea du regard avant de lui jeter un jeans raboté de trop nombreuses fois et trop grand, une chemise blanche avec des tâches rouges douteuses et enfin une paire de grosses boots trop grandes et usées jusqu'à la moelle.
- Enfile ça, marmonna-t-il.
Hermione se retourna, un peu pudique, et l'homme ricana.
- Comme si une sang de bourbe comme toi valait la peine qu'on la regarde.
Hermione ne répondit rien. A vrai dire, sa gorge était trop nouée pour qu'elle puisse répondre. Elle réussit à garder son débardeur sous sa chemise. Elle dut retrousser plusieurs fois les ourlets de son jeans troué et laça ses chaussures, lentement, se doutant du prochain calvaire qui l'attendait.
Dans la salle suivante, se trouvaient six tatoueurs disposés de part et d'autre de la pièce. Tous occupés à tatouer des gens comme elle, les cheveux fraichement coupés. Ils les marquaient. Comme des bêtes. Tétanisée, elle ne pouvait pas croire à ce qu'elle voyait. Les tatoueurs n'y mettaient aucune délicatesse, marquant leurs victimes comme de vulgaires moutons. L'un d'eux se leva et fit signe à Hermione d'approcher, ayant fini de martyriser l'une de ses victimes qui tenait une compresse imbibée de sang. Elle eut un mouvement de recul, incapable d'avancer, de subir un tel acte. C'était trop rabaissant.
Son dos heurta quelque chose et deux mains se posèrent sur ses épaules. Elle tourna la tête et tomba nez à nez avec Malefoy. Terrifiant. Elle eut un sursaut et s'éloigna pour rejoindre le tatoueur qui était bien moins menaçant que Malefoy. Elle s'assit sur le petit tabouret inconfortable. Il attrapa violemment son poignet, tournant sa paume de la main vers le ciel et approcha le stylo à pointe de l'intérieur de son bras, juste sous son coude. La petite machine s'activa, vibrant bruyamment et Hermione arracha son bras avant que la pointe ne touche sa peau immaculée.
- Laisse, je vais m'en occuper, dit Malefoy avec une pointe de colère dans la voix.
Hermione se raidit. Elle n'avait pas envie de se retrouver face à lui. Elle n'avait pas envie qu'il la marque.
Sans un mot, le tatoueur s'écarta avec un signe de tête respectueux pour Malefoy. Même cet homme semblait terrifié par Malefoy. Hermione fixait son bourreau alors que celui-ci relevait ses manches. La marque noire sur son bras sauta aux yeux de Hermione. La marque des ténèbres, plus noire que jamais. Il surprit son regard, et sourit à moitié, froidement. Sa main gauche attrapa son poignet de ses longs doigts fins et froids. La marque était plus visible que jamais et elle avait du mal à ne pas la regarder.
- Ça te fascine, Granger ? Est-ce que tu as perdu tout instinct de conservation pour oser la regarder si longtemps ?
Il exposa l'intérieur du bras de Hermione qui frissonna, alors qu'il glissait son index sur les veines qui transparaissaient sous sa peau.
- Ça fait bizarre de voir une marque pareille sur quelqu'un. Surtout sur quelqu'un que j'ai connu, murmura-t-elle.
Il la sonda du regard, mais ne répondit rien. Il ne la reprit pas et perdit son sourire vicieux. Elle eut un mouvement de recul lorsque le stylo approcha de sa peau. Il fronça les sourcils.
- Ne t'avise pas de me résister, gronda-t-il.
Elle grimaça lorsque la pointe toucha sa peau, la piquant des centaines de fois pour la marquer à vie. Sa peau fine était tiraillée. La poigne de Malefoy se resserra autour de son poignet.
- Et réponds-moi quand je te parle.
- Ça fait mal, Malefoy.
Comme pour la punir d'oser l'appeler par son nom, la pointe s'enfonça un peu plus, la faisant couiner de douleur.
- Ce n'est qu'un début, ça, Granger.
Il essuya les quelques gouttes de sang sur son bras, entourant le tatouage frais d'une compresse qui avait l'air moins utilisé que les autres, un peu plus propre.
- Tu vivras bien pire. Je vais m'en assurer.
Elle frissonna, serrant la compresse contre son bras douloureux. Elle prit son courage à deux mains, alors que Malefoy s'éloignait. Elle suivit le petit groupe qui partait en direction de la dernière porte. Ils ressemblaient tous à des moutons effrayés, entassés les uns contre les autres, se serrant en espérant pouvoir se protéger mutuellement. Mais Hermione savait que c'était vain. Ils étaient tous condamnés à mourir dans d'atroces conditions, d'épuisement, de faim ou de maladie infectieuse. C'était un simple mouroir.
Ils arrivèrent dans ce qui semblait être la vraie prison. Des centaines de personnes fourmillaient, vêtus de bleu et de blanc sale. Le regard bas, les cheveux coupés court, le teint cireux et le regard cerné, ils trottaient pour rejoindre nerveusement le lieu où ils devaient se trouver. Tout était terne. Les murs gris et blancs s'élevaient à plusieurs mètres de haut. La prison semblait être un véritable dédale de couloirs constellés de portes grillagées.
- Je vais vous conduire à vos cellules respectives. Lorsque j'appellerai votre numéro, vous vous avancerez et je vous donnerai votre couchette et votre affectation.
Le garçon qui avait parlé n'était autre que Crabbe. Jamais elle ne l'avait vu prononcer une phrase si longue. Il avait toujours cet affreux air benêt. Mais dans un tel endroit, il semblait bien plus terrifiant qu'à Poudlard. Il appela un premier détenu qui s'avança timidement. Il fut affecté aux plantations et bien que Hermione ne sût vraiment ce que cela représentait, les autres détenus passant à côté d'eux, avaient tous eu cette même moue, celle qui signifiait que cela n'allait pas être facile. Peu à peu le groupe diminua.
Hermione souleva la compresse sur son bras, ayant l'idée de se renseigner sur le numéro qui lui avait été attribuée. Sa gorge se serra, et un relent de haine manqua de la faire sortir de ses gonds.
- Euh… DM ? Il y a un DM parmi vous ?
Crabbe semblait un peu surpris par cet identifiant inhabituel. Tout le monde avait un numéro alors pourquoi ces deux lettres sur sa liste ? Hermione avança, les dents serrées. Malefoy était un bel abruti. Cruel. Il lui avait tatoué ses initiales.
- Couchette du milieu, Granger, dit Crabbe en souriant comprenant soudainement l'étrangeté de cet identifiant. Transport.
Hermione ne répondit rien, la gorge serrée. Elle déglutit difficilement en apercevant la minuscule cellule. Elle était étroite et haute de plafond, juste assez large pour que des lits triples y soient glissés. Il n'était même pas possible de passer dans la couchette du dessous tant le mur était proche du matelas épais de quelques centimètres à peine. Une fois la porte de barreaux refermée, il n'était plus possible d'emprunter l'échelle qui permettait de quitter cet endroit qui déclencherait des crises de claustrophobie à n'importe qui. Hermione devait l'avouer, c'était ingénieux. On avait mis trois cellules en une. Elle grimaça un peu en montant dans sa couchette ou deux couvertures élimées avaient été disposées à la place d'une. Sans doute parce qu'elle avait le droit à la fenêtre sans vitre. Cet hiver, le froid la tuerait certainement. Ce n'est pas les deux toiles de jute qui servaient de couvertures qui allaient la maintenir au chaud.
Il faisait déjà nuit noire dehors, et en cette période d'été, cela devait dire qu'il était assez tard. Hermione avait perdu toute notion du temps dans le train. Elle retira ses chaussures qui lui faisaient déjà mal aux pieds et se couvrit du mieux qu'elle put, déboutonnant sa chemise pour dormir plus à l'aise.
Fixant le plancher de métal qui servait de sommier à son voisin du dessus, elle réfléchissait. Où était sa baguette ? Le rafleur lui avait prise. Elle avait sans doute été détruite. Elle déglutit douloureusement, triste. On lui avait retiré ce qui faisait d'elle une sorcière, et ça lui faisait du mal. Elle ne méritait pas ça.
De toute façon, elle n'aurait certainement pas le temps de se morfondre. Cette prison était connue pour user à toute vitesse ses détenus. Et Malefoy…quelles atrocités prévoyait-il de lui faire subir ?
Une sirène résonna dans les couloirs de la prison et quelques détenus se mirent à courir dans les couloirs. Les portes à barreaux se refermèrent et les lumières des couloirs s'éteignirent. Hermione s'endormit sans même s'en rendre compte, mais ce ne fut pas un sommeil réparateur. A vrai dire, sa nuit avait été hantée par des cauchemars, tous habités par Drago Malefoy.
Ce fut une sirène semblable à celle de la veille qui la réveilla. Elle enfila rapidement ses chaussures alors que les portes s'ouvraient déversant un flot de détenus dans les couloirs. Hermione sauta à terre, manquant d'écraser la tête qui s'était extirpée de la couchette inférieure.
- Tu pourrais faire attention, marmonna le garçon.
Il releva la tête et Hermione sauta presque de surprise. Ces cheveux roux, elle les aurait reconnus entre tous.
- Fred ?!
- Hermione ?!
Elle n'en croyait pas ses yeux. Tout le monde le pensait mort depuis deux ans. Il avait disparu dans les décombres de Poudlard, et finalement, ils avaient fini par admettre la fatalité : Fred Weasley était mort.
A son regard ahuri, elle comprit qu'il ne s'attendait pas non plus à la voir ici. Il sembla reprendre ses esprits, l'attrapant par le bras pour l'entrainer dans les couloirs à toute vitesse.
- Moins vite ! protesta Hermione.
- Pas le temps, Hermione. Si on ne se dépêche pas, on n'aura rien à manger, grimaça-t-il.
- Tu exagères peut-être un peu, marmonna-t-elle en boutonnant sa chemise.
- Non. Ils en font exprès. Pour nous affamer. Et sans doute nous pousser à nous diviser.
Effectivement une longue queue s'allongeait déjà dans ce qui servait de réfectoire. Si on pouvait appeler ça un réfectoire. De longues tables avaient été dressées, se creusant sous le poids d'énormes marmites fumantes. Il n'y avait pas de tables pour les détenus, simplement des bancs taillés à même le sol. Et il n'y en avait pas assez pour tous les détenus. Beaucoup était assis sur le sol.
Hermione eut le droit à un bol de gruau à l'air peu ragoutant, mais elle ne protesta pas. Elle avait trop faim.
- Tout le monde te pensait mort, dit-elle en s'asseyant à côté de Fred qui mangeait à toute vitesse. Et puis tu n'es pas un né-moldu, qu'est-ce que tu fais là ?
- Il n'y a pas que des nés-moldus. Il y aussi tous ceux qu'on considère comme des traitres à leur sang ou des dangers pour le règne de Tu-sais-qui.
- Oh. D'accord, murmura-t-elle.
- Je ne pensais pas que tu serais capturée… Que deviennent les autres ? demanda Fred, intéressé.
- J'aimerais te le dire. Harry a disparu, Ron est retourné avec sa famille et ils ont fui le pays, il y a des mois.
- Au moins, ils sont vivants…
Hermione se retint de dire qu'elle n'en était pas certaine. Après tout, elle n'avait eu aucune nouvelle. Peut-être avaient-ils été attrapés avant de pouvoir quitter le pays.
- Ils ne seraient jamais partis sans toi, s'ils avaient su, Fred…
Il haussa des épaules, fataliste. Il avait eu le temps d'accepter son sort depuis tout ce temps.
- J'avais disparu. J'ai été capturé par des mangemorts, et on m'a envoyé dans les cachots du manoir Malefoy pendant des mois. Jusqu'à ce que j'atterrisse dans cet endroit ignoble.
Les derniers mots n'avaient été qu'un murmure, à tel point que Hermione avait dû tendre l'oreille pour les entendre. Fred avait perdu de sa superbe, ses cheveux roux s'étaient ternis, coupés à ras, ses joues étaient creuses et son regard n'avait plus rien de malicieux. A vrai dire, il ressemblait beaucoup à George qui ne s'était pas remis de la mort de son frère.
- Comment va George ? demanda Fred, comme lisant dans les pensées de Hermione.
- Pas très bien depuis qu'il te pense mort. S'il savait que tu étais là…
- Il ne vaut mieux pas qu'il sache, dit-il sombrement. Il serait capable de venir me chercher, et échouerait inévitablement. Je n'ai pas envie qu'il meure. Ou pire, qu'il se retrouve dans cette prison.
Hermione hocha de la tête. Elle pouvait comprendre Fred. Le silence retomba une seconde alors que Hermione mangeait son gruau en essayant de ne pas prêter attention au gout infame de la mixture dans sa bouche.
- C'est quoi ton numéro ? lui demanda soudainement Fred.
- Mon numéro ?
- Ta marque, insiste-t-il en tirant sur son bras.
Il fronça les sourcils et releva un regard horrifié vers elle.
- DM ?
Hermione baissa la manche de sa chemise, mal à l'aise.
- Comment ça se fait ? Tu devrais avoir un numéro en 10 chiffres…
- Qu'est-ce que ça change ? marmonna Hermione.
- Ça change quelque chose car on aurait pu savoir dans quelle catégorie tu te trouves et donc tes chances de survie.
En voyant l'air perplexe de Hermione, il continua :
- Tu es classée dans une catégorie. Ça va de 1 à 12. Si tu es dans la 12, tu as toutes les chances de survivre dans ce camp, mais si tu es catégorie 1, tes chances sont réduites à maximum quelques semaines de survie. Ils se basent sur ta condition physique, et ce que tu as à offrir. Il y a plus de catégori que de catégorie 12. Les 8 chiffres qui suivent correspondent à ton identifiant. Ça nous aurait aidé à savoir si on estime que tu peux servir à quelque chose dans cette prison. Je ne comprends pas pourquoi ces lettres… Qui s'est occupé de ta marque ?
Hermione était un peu surprise par la bavardise de Fred.
- Malefoy, répondit-elle. C'est sans doute pour ça qu'il a tatoué ses initiales.
Le regard de Fred s'assombrit et son dos se courba. Il jeta un coup d'œil effrayé autour de lui et Hermione le regarda faire avec ahurissement.
- Ne parle pas si fort, dit-il entre ses dents. Il ne vaut mieux pas que les gardes t'entendent parler de lui.
- Mais je n'ai rien dit de mal ! se défendit Hermione.
- Comme si c'était important ici, dit-il sombrement. Ils n'en ont rien à faire. Tout ce qu'ils veulent, c'est trouver un prétexte pour te jeter un petit sortilège d'endoloris ou t'humilier en public. Te tuer un peu plus rapidement que l'affaiblissement que tu vas subir.
Hermione déglutit. Le regard sombre de Fred, son air terrifié, la confortait dans l'idée que tout cela n'était pas une plaisanterie. Fred n'était pas rassurant. Il avait trop souffert et était trop affaibli pour se fatiguer à prendre des pincettes pour lui expliquer ce qu'elle allait vivre pour les quelques semaines à venir.
- N'attire pas l'attention sur toi, c'est le meilleur conseil que je puisse te donner. Malefoy ne t'a jamais apprécié, tu as même été son souffre-douleur pendant longtemps. Il y a fort à parier qu'il va chercher à te faire vivre un enfer, encore plus qu'aux autres. Il n'a plus rien du Drago Malefoy de Poudlard. Il y a quelque chose de sombre en lui. Alors ne te fais pas remarquer, baisse la tête quand tu le croises, fais ce qu'on te dit tant que tu en as la force.
Hermione était muette d'ahurissement. Elle regarda les visages qui l'entouraient. Il n'y avait pas que Fred qui était l'ombre de lui-même. Tous les sorciers qui l'entouraient étaient gris, le dos courbé, la tête basse, trop maigres, trop faibles.
Elle plongea le regard au fond de son bol vide.
- Bienvenue à la prison Malefoy, Hermione, soupira Fred.
