Chapitre 7.

« Miss Granger ! entendit-elle Minerva l'appeler, à la fois agacée et désemparée. »

Hermione ferma soudain les paupières, dépitée alors qu'elle venait d'achever un énième calcul sur ses formules.

« Qu'est-ce qu'il a fait, encore ? demanda la sorcière en fermant brutalement son carnet.

_ Vous devriez venir voir dans la Grande Salle. »

Hermione soupira. Cela faisait deux semaines qu'elle était sans arrêt dérangée à tord et à travers. Parfois, Snape était encore dans ses sales humeurs et ses collègues l'appelaient à la rescousse pour le calmer, d'autre, elle devait encore le stopper dans une tentative bizarre de séduction mal placée. En toute franchise, jamais elle n'aurait imaginé son ancien professeur être si inventif pour déclarer sa flamme, c'était déconcertant.

Hier encore, elle avait du se mettre hors d'elle lorsqu'ils s'étaient mis en danger, lui et Ron pour récupérer la voiture d'Arthur Weasley dans la forêt interdite, dans le projet de la dompter et de la lui offrir avec un espèce de gros ruban. Soit disant qu'il aurait « vu ça à la télé ». Pour cet argument, Hermione s'était tourné vers Ron et lui avait passé le savon du siècle. La plupart des fantaisie de Snape étaient souvent tirés de leurs idées communes à la noix, et cela avait le don de rendre son travail d'autant plus difficile.

Hermione ouvrit en grand les deux immenses portes donnant sur la Grande Salle. Elle fut tout bonnement estomaquée lorsqu'elle fit face au spectacle devant elle.

Oui, un spectacle, un vrai, parce que toutes les tables avaient disparu pour laisser place à la réplique d'une tour, entourée de murailles parcourue de lierres. Les élèves de premières, deuxième et troisième années étaient affairés tout autour, et Snape beuglait des directives bizarres à une jeune fille affublée d'une perruque frisotée accompagnée d'un garçon vêtu d'une longue cape noire. Flitwick semblait surexcité devant les élèves de sa chorale quant à lui, installant les divers instruments tout autour de cette scène improvisée.

« Mais qu'est-ce que c'est que ce bordel, souffla Hermione.

_ Oh vous êtes ici ! »

Snape s'avança, ravi vers l'ancienne Gryffondor qui semblait fulminer.

« Vous voulez assister aux répétitions ?

_ Aux répétitions de quoi ?

_ De ma pièce. »

Hermione ferma les paupières en prenant une grande inspiration.

« Non.

_ Oh je vois, vous voulez garder la surprise c'est ça ?

_ En toute connaissance de cause, je peux savoir pourquoi diable Dumbledore vous donne sans arrêt l'autorisation de faire vos conneries ? balança le professeur McGonagall, à bout.

_ J'allais poser la même question sans vulgarité, mais… soupesa Hermione.

_ Hé bien, Minerva, figurez-vous que j'ai un grand pouvoir de persuasion.

_ Albus n'est strictement pas au courant, et vous menacez vos élèves de leurs rendre la vie impossible s'ils ne font pas ce que vous leur ordonnez de faire, c'est ça ?

_ A peu de choses près : oui. »

Hermione soupira.

« Asseyez-vous, on va justement commencer. »

De dépit, Hermione finit par lever les bras au ciel et à s'exécuter. Minerva l'observa faire, décontenancée.

« Je préfère anticiper ce qui risque de m'attendre, se justifia-t-elle. »

Soudain, la salle s'éteignit et le plafond magique éclaira les deux élèves en costume. Hermione souffla d'avance, avant de voir Flitwick guider les violons.

Soudain, avec la musique, les deux élèves se prirent dans les bras et se tournèrent vers d'autres qui, dans la tour en carton pâte, se mirent à chanter en concert d'une voix d'opéra plutôt harmonieuse d'ailleurs.

Aimer c'est ce qu'y a d'plus beau

Aimer c'est monter si haut

Et toucher les ailes des oiseaux

Aimer, c'est ce qu'y a d'plus beau

Hermione se passa la main sur le visage, tentant de se pincer pour s'assurer de ne pas être en plein rêve. Elle entendit Minerva glousser et écouter la pièce avec une attention toute particulière.

Le refrain se répétait encore et encore, et Hermione se cachait les yeux, tentant de voir quand même dans les interstices de ses doigts avant de le regretter dans l'immédiat.

Mais où allait-il pêcher des idées pareilles, elle se posait sérieusement la question. Elle voyait d'ici une réplique d'elle tout à fait grossière, chanter ces paroles absolument abominables avec cette version Ali Express de Snape d'un air concentré, sans compter sur le véritable Snape qui, en arrière plan, surveillait la pièce d'un regard de maître en suivant les paroles acapella.

Non, vraiment, si elle ne trouvait pas vite un remède, elle allait y laisser sa peau, ou la sienne. En tout cas, il finirait pas y avoir un mort, c'était certain.

« Je vais le tuer, chuchota Hermione, toujours planquée derrière ses mains pour échapper au spectacle.

_ Laissez le finir avant, je veux garder cette scène gravée dans ma mémoire pour me venger une fois que vous aurez trouver un remède, lâcha Minerva, tout à fait emballée. »

Hermione grogna comme un animal, avant que la chanson ne se termine sur un plan encore plus horrible que le reste, à savoir lui, la demandant en mariage d'un genou à terre.

« Alors, alors ? se retourna soudain Flitwick, excité comme une puce, sa baguette de maitre de chorale toujours en l'air. Je vous avoue, je me suis surpassé.

_ C'était très beau Filius, laissa échapper Minerva en applaudissant.

_ Dites-moi que je rêve s'il vous plait, murmura Hermione.

_ Moi qui vous avez appelé pour le déloger, je commence à me dire que ce n'est peut-être pas la peine finalement.

_ Vous rigolez ou quoi ? »

Hermione se leva soudain, debout comme un ressors avant de s'avancer vers Snape et de le chopper par le col.

« Vous arrêtez ce désastre, maintenant ! ordonnât-elle d'une voix furieuse.

_ Quoi ? Ça ne vous plait pas ? »

Le regard d'Hermione lui lança soudain des éclairs, et sans décolérer, Snape se défendit en levant les mains devant lui comme un criminel en train de se rendre.

« Ecoutez, de base, j'étais parti sur le lac des cygnes. Je sais, c'était un peu plus classe, mais aucun de ces cornichons ne savaient aligner un pas de danse classique. Dommage, car l'orchestre était incroyable là dessus.

_ J'ai dis non ! Bon sang, mais professeur Snape…

_ Severus, corrigea-t-il pour la énième fois.

_ Professeur Snape, répéta Hermione, agacée, c'est la potion. C'est uniquement la potion, elle vous fait disjoncter. J'ai besoin que vous fassiez un minimum d'efforts, parce que je suis en train de devenir complètement dingue avec vos histoires ! »

Minerva les voyait se disputer au loin, mais n'entendait rien de ce qu'ils se disaient. Elle avait appris à faire confiance à son ancienne élève pour gérer la situation.

Snape prit une inspiration. Il fixa Hermione étrangement.

Dans le fond, une partie de lui savait. Oui, il savait que rien n'était rationnel dans son attitude, et c'était peut-être sa malédiction à lui. Il se donnait de maigres objectifs, jour après jour. Mais rien ne fonctionnait, en dépit de tout son self control, et Merlin qu'il en avait beaucoup. Snape songeait même avoir été chanceux que cette potion lui soit tombé dessus, qui sait si elle n'aurait pas tout bonnement tué un sorcier moins aguerri.

« Je fais déjà des efforts, finit-il par avouer.

_ Des efforts ? Vous venez de monter une comédie musicale à ma gloire.

_ C'est une bataille de tous les jours, vous n'imaginez pas, souffla-t-il.

_ Je vous demande juste d'en faire moins, juste un peu moins, supplia-t-elle.

_ J'essaie de faire moins, je sais que ce n'est pas évident à voir de prime abord, tiqua Snape, ses paroles ponctuées d'une grimace.

_ Dites-moi ce qu'il se passe, peut-être que ça peut m'aider. Avez-vous remarqué des changements avec le temps, une baisse quelconque ?

_ Non, rien n'a sensiblement changé.

_ Mais vous ne m'avez jamais dis ce que vous ressentiez vraiment. Qu'est-ce qui vous pousse à devenir aussi imprévisible ? »

Snape déglutit avant d'arborer une faciès plus sérieux, une expression qu'elle connaissait d'avantage sous ses traits habituels.

« C'est… un peu comme vouloir contenir une casserole sur le point de déborder. Une folie, c'est le couvercle qui permet à l'eau de ne pas se répandre trop sur le gaz et envenimer la situation.

_ Vous êtes pourtant d'accord que ce n'est pas vivable.

_ Miss Granger, soupira Snape en fermant les yeux. Que voulez-vous que je vous dise au juste ?

_ Je stagne, chuchota-t-elle, affolée par cette réalité. Je stagne sur un remède, je planche sur des calculs depuis des semaines, en vain. »

Hermione sentit sa respiration s'accélérer, sous les coups du stress. Elle avait vraiment peur de ne jamais réussir à trouver un remède, la potion était si puissante !

« J'aimerai vous aider, je suis aussi concerné que vous. Tout ce que je peux vous conseiller, c'est de…

_ Récolter de nouvelles données et étudier les effets physiques d'une potion plutôt que de tenter de trouver une solution mathématique et détachée du reste. »

Snape leva soudain les sourcils. Il semblait impressionné, par le fait qu'elle l'ait écouté, mais aussi qu'elle veuille suivre un de ses préceptes professionnels.

« Oui… c'est effectivement ce que j'allais vous dire.

_ Je dois connaître les effets réels que la potion a eu sur vous.

_ Donc, vous voulez savoir ? Vous êtes sûre ? »

Hermione acquiesça. Mais Snape n'en était étrangement, que très peu enclin. Il resta ainsi silencieux, hésitant.

« C'est si terrible ? finit-elle par demander au bout de quelques secondes. Je ne suis pas dupe, je vois bien que vous tentez de me le cacher, mêmes ces extravagances ne représentent qu'une distraction pour vous éviter d'y faire face. »

Snape détourna les yeux, par pudeur, pour une fois, honte, désespoir. Cela frappa Hermione, car elle n'était que trop habitué à faire face à un Severus Snape fier et suffisant. Cette fois pourtant, cela semblait réel, vraiment réel.

« Je ne suis pas sur que ce soit pertinent. »

Hermione soupira. Quel paradoxe… Lui qui était prêt à lui déclarer sa flamme de n'importe quelle manière, voilà qu'il refusait désormais de se dévoiler vraiment, avec des mots simples, tout simplement parce qu'il redevenait soudain un peu lui-même.

Peut-être était-ce bon signe, mais cela ne l'aiderait pas à avancer.

« D'accord, murmura-t-elle, résignée. »

Snape la regarda lui tourner le dos, prête à s'en aller. Quel idiot…

« Je vous offrirais le monde, chuchota-t-il soudain. »

Hermione se tourna lentement vers lui de nouveau, pas tendue comme elle l'était habituellement, mais plus surprise.

« J'en serais capable, je m'en sens capable. Je le ferais si je le pouvais. Ce n'est ni une question de charme, ni… ce que vous dégagez, que ce soit votre parfum ou d'autres détails tout aussi désuet. »

Hermione se mordit l'intérieur de la bouche, retenant sa respiration.

« Si vous pensez qu'une jolie robe, une manucure bien faite ou une bouche maquillée me suffisent, si seulement même cela pouvait me suffire, mais ça n'a jamais été le cas. Vous avez ce regard qui pétille devant chaque chose magique qui vous tombe sous les yeux, ces yeux neufs qui ne semblent avoir vu aucune atrocité, ni rencontrer la mort alors que vous l'avez côtoyé de si prés. »

Cette fois, Snape osa enfin affronter son regard sans ciller.

« Peut-être que parfois, je pense que vous le méritez, ce monde, parce que vous êtes du genre à donner votre âme pour une cause juste et que c'est une qualité rare, mais bien peu considérée.

_ Est-ce depuis la potion que vous pensez cela ? »

Snape serra la mâchoire avant de détourner de nouveau les yeux.

« Non, finit-il par avouer. »

Hermione sentit son coeur rater un battement et sa respiration se hacher.

« D'accord, bégaya-elle avant de déglutir.

_ Vous voulez que je vous dise ce qu'il m'arrive ? Vous voulez vraiment que je vous le dise ? »

Hermione hocha la tête, silencieuse.

« Très bien… soupira-t-il. Si seulement je pouvais me cantonner à la sensation mon estomac qui se serre, vous dire que c'est comme tomber d'un précipice chaque jour, dès que je vous vois, ce serait bien plus simple, mais ça ne l'est pas entièrement. C'est devenu viscéral, parce que vous n'êtes pas seulement brillante, ni charmante, je le ressens ainsi. C'est comme si mon âme voulait quitter mon corps pour ne plus vous lâcher. C'est à croire que mon cœur ne m'appartient plus, parce qu'il veut foutre le camp en votre présence. Vous êtes devenu un peu comme m bouffée d'air frais, même si ça peut vous paraître peut-être cliché.

_ Vous n'avez pas besoin de moi, prononça-t-elle d'un murmure. Vous vous suffisiez à vous même avant, essayez d'y songer.

_ Vous parlez de ma vie misérable qui n'avait de sens qu'avec la survie de l'enfant que la femme que j'aimais a eu avec un autre homme ? C'était un peu pathétique. Et d'autant plus que désormais, une potion est visiblement à l'origine de ce que je ressens pourtant au plus profond de moi. Avez-vous déjà penser à ça ? Avez-vous déjà imaginé la possibilité que tout ce que vous pensiez ne soit qu'un mensonge ? »

Hermione soupira, le regard pétillant.

« Pour ma part, comprenez que je ne peux y songer entièrement, lui glissa-t-il.

_ Je sais, je ne vous demande pas de ne pas le faire, lâcha-t-elle en un murmure.

_ Croyez le ou non, c'est sincère lorsque je vous dis que j'aime… votre intelligence, que j'aime votre regard, votre voix, et votre force de caractère, même si vous êtes aussi, complètement folle à lier quand vous vous y mettez. »

La jeune femme baissa alors le visage pour cacher un sourire amusé et flatté à la fois.

« Je… vous aime, comme on pourrait aimer une douce journée ensoleillée de printemps, quand le soleil est haut dans le ciel, à ce point précis où la température idéale vous plonge dans un bien être confortable et irréel, que vous n'aspiriez à rien d'autre que de respirer. »

Hermione leva juste un peu la tête et affronta de nouveau son regard, plus vraiment en colère. Son cœur battait cette fois un peu plus fort et elle semblait perdue et troublée. Ses paroles étaient vraiment belles et elle ne pouvait s'empêcher de s'en sentir profondément touchée.

« C'est si insipide, que de se contenter de dire que j'aime lorsque les mots manquent devant mon cœur qui bat, que ma parole devient soudain vide. Comment voulez vous que je l'exprime après tout ?

_ Mais monsieur, et la potion… finit-elle par minauder.

_ Oui, je sais que l'oubli est inévitable, et que c'est condamné d'avance pour cette raison. Je sais qu'un jour viendra où tout foutra le camp, et pourtant je vous aime. Je vous aime à en crever, dévoila-t-il d'une voix sombre. Et vous savez ce qui a de pire encore que cela ? »

Hermione nia de la tête, s'approchant d'un tout petit pas alors que Snape en fit de même et sur Minerva continuait de les surveiller au loin, de plus en plus suspicieuse.

« Ce qu'il y a de pire, c'est que c'est humiliant. Humiliant de vous supplier, humiliant d'être fou de vous, car je le suis vraiment, ça l'est parce que c'est devenu vital et que je n'ai trouvé que ces façons dingues d'évacuer la pression. Alors si vous me demandez encore comment je vous aime Miss Granger, comment je vous aime sincèrement, laissez moi vous répondre que toutes les étoiles de ce plafond magique ne suffisent pas à éclairer le ciel comme vous éclairez le mien. »

Hermione la fixa, choquée et troublée et Snape baissa plus encore le volume sonore de sa voix pour qu'elle ne devienne qu'un murmure à peine soufflé. D'un petit pas, Hermione s'avança encore sans même s'en rendre compte et il osa glisser sa main sur son épaule jusqu'à sa nuque, avant que son pouce n'en vienne à caresser la base de sa mâchoire. Et malgré tout, avec une force qui la dépassait, elle se laissait faire.

« Alors je vous le demande maintenant… est ce que ça ferait une grande différence si je vous disais que personne, oui personne au monde ne pourra jamais autant vous aimer que moi ? C'est égoïste, c'est la chose la plus égoïste que je n'ai jamais dites, mais que voulez vous, je n'ai pas assez de courage pour faire comme si ça n'existait pas. La prochaine fois que vous me demanderez alors comment je vous aime, demandez vous aussi comment je respire, car la réponse n'en sera qu'aussi absurde. »

Hermione sentait l'air lui manquer autant que la raison sans doute. Elle se trouvait désormais si proche de lui, plus que la décence ne le voudrait. Elle avait tant l'impression que c'était vrai, s'en était douloureux quelque part, car sa raison lui hurlait qu'elle se trompait.

« Personne ne m'a jamais dis ce genre de choses, souffla-t-elle, touchée.

_ C'est impossible, lui chuchota-t-il en secouant doucement la tête avant d'afficher un maigre rictus. Vous ne me ferez pas croire que personne n'ait pu vous dire ça un jour.

_ Ça vous paraît si dingue ? S'en amusa-t-elle.

_ Oui, mais ce qui semble plus fou encore, c'est de ne toujours pas vous avoir embrasser depuis tout ce temps. »

La gorge de la jeune femme s'assécha et elle ouvrit la bouche, comme pour protester avant de la refermer subitement.

« Vous n'imaginez pas que ce serait possible tout de même, rit-elle doucement, confuse.

_ En quoi ce serait si fou ? Vous êtes une femme depuis bien longtemps, plus mon élève depuis des années, personne ne pourrait m'interdire de le faire.

_ Vous êtes dingue, le professeur Dumbledore va vous tuer si vous commencez à vous amuser à fricoter avec moi de la sorte !

_ Qu'il me tue alors, défia-t-il en un maigre rictus. Admettez que l'idée est tentante, pourtant. »

Elle était à deux doigts de faire tout le contraire, de le supplier de lui en prouver plus encore et de franchir cet interdit là. Ainsi, son regard tomba durant deux ou trois secondes vers la bouche du potionniste qui lui avait ironiquement dit les choses les plus belles qu'elle n'avait jamais entendu, avant qu'un raclement de gorge ne la fasse sursauter.

« Miss Granger ? Appela sévèrement Minerva.

_ Professeur McGonagall ! Je… »

Hermione s'éloigne soudain d'un pas, puis de deux, avec un sentiment de culpabilité tel que son estomac s'en tordit de douleur. Merde, qu'est ce qui lui avait prit ?! Elle était à deux doigts d'avoir tout gober, à deux doigts de songer que la potion n'avait jamais existé et que Snape pensait réellement tout ça. Enfin, il le pensait, oui, mais pas dans le sens où elle aurait préféré qu'il le fasse. Snape quant à lui, détourna le visage et le regard d'un air… perdu. Comme si son discours l'avait tout autant ébranlé.

« Qu'est ce que vous faites au juste ? siffla la professeure en direction de son ancienne élève.

_ Je je… bégaya-t-elle de nouveau.

_ Miss Granger me disait d'arrêter ce genre de fantaisie, intervint Snape. C'est bien ça, n'est ce pas ? »

Snape dirigea un regard insistant et lourd de sens vers la jeune femme qui ouvrit la bouche avant de soudain acquiescer.

« Mmmh oui, oui c'est tout à fait ça, marmonna la sorcière, mal à l'aise.

_ Je vais faire disparaître les décors et remettre… les tables à leur place. »

Hermione secoua sa main dans le vide avant de la porter vers sa bouche, affichant malgré elle un visage rouge de honte et de gravité. Minerva se tourna ainsi vers elle, la mine dure.

« Miss Granger, je serais intransigeante. Il est hors de questions que vous profitiez de la situation.

_ Mais je ne profite de rien du tout ! protesta la concernée, outrée et encore gênée.

_ Je tiens à l'idée que rien ne dérape, vous entendez ? Il est hors de questions que vous perdiez le contrôle, et que vous lui fassiez du mal d'une façon ou d'une autre. Ai-je été claire ? »

Le sang de la jeune femme sembla soudain quitter son visage et elle devint pâle comme un linge. Elle jeta un bref coup d'oeil à son professeur de potions au loin, s'agaçant sur des étudiants, restant le même homme irascible qu'il avait toujours été avant qu'il ne tombe sur son regard et plisse le sien, laissant échapper un faible, si faible rictus sur ses lèvres. Hermione s'apprêta à sourire comme une idiote à son tour avant que McGonagall n'en remette une couche.

« Miss Granger !

_ Quoi ? percuta Hermione. Mais enfin, professeur McGonagall, vous savez que je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour trouver un remède. J'y consacre mes journées et mes nuits aussi, je suis à bout de fatigue !

_ Je ne remet pas cela en cause, mais votre implication. Vous avez un pouvoir certain sur la situation actuelle, veillez à ne pas en abuser. »

Minerva lança un regard dissuasif à Hermione qui fulminait de l'intérieur sans tout à fait le montrer. La jeune femme relâcha la respiration qu'elle avait retenu au départ de sa directrice de maison, ne sachant bien où se mettre. Ses paroles l'avaient bouleversées et elle finit par se pincer l'arête du nez.

Comment pouvait-elle insinuer quelle profitait de Snape ?! Elle ne pourrait jamais rien faire de tel. Il était une victime terrible de sa maladresse, oui, mais ne pas lui hurler dessus à longueur de journée ne voulait pas pour autant dire qu'elle lui ferait faire n'importe quoi !

« Vous allez bien ? entendit-elle d'une voix douce et concernée. »

Snape venait de s'approcher d'elle à pas feutrée, et sa main dans son dos lui provoqua des frissons, d'agréables frissons.

« Oui, enfin… je suppose que oui, finit-elle par soupirer.

_ Vous avez l'air perturbée.

_ Non, nia-t-elle en déglutissant difficilement. Non, ne vous inquiétez pas pour moi.

_ Alors ça, c'est impossible, vous le savez bien, plaisanta-t-il. »

Hermione finit par lui jeter un coup d'oeil et par lui adresser un sourire amusé.

« Vous êtes triste ? demanda soudain Snape d'une drôle de moue.

_ Non…

_ Vous êtes sure ? Parce que je ne suis pas le premier pitre qui vous aidera à rire plutôt que de pleurer, mais bon.

_ Vous voulez pas essayer un truc pour voir ? »

Snape lui adressa une mine faussement sévère, et Hermione finit par en rire, enfin.

« Je suis peut-être dingue de vous, Hermione Granger, mais je sais quand on essaie de m'enguirlander.

_ Vous m'en voyez rassurée.

_ Pour quelle raisons êtes vous préoccupée ? C'est pour la potion ? Vous avez besoin d'aide ?

_ A vrai dire… oui, j'en aurais bien besoin, réalisa-t-elle soudain.

_ Je peux vous rejoindre dans votre laboratoire d'ici une petite heure si vous le souhaitez.

_ Mais, ça ne vous dérange pas ? demanda-t-elle soudain. De concocter cette potion qui est censé annihiler l'autre ?

_ Si vous aider implique de mettre fin à tout ça… songea-t-il tout haut, je pense que je serais capable de faire des concessions. Et puis, on parle d'annuler les effets de cette potion, pas de faire disparaître mes sentiments pour vous. »

Hermione émit un rire sans joie, avant d'acquiescer et de le laisser se dérober à elle. Elle l'observa ainsi s'en aller de la Grande Salle, le coeur serré.