Chapitre 8.
Il était 19 heures, et le repas avait commencé depuis à peine quelques minutes, pour une fois, sans encombre.
Minerva observait Snape du coin de l'oeil, l'air méfiant. Depuis quelques jours, elle le suivait de prés, plus ou moins discrètement, plus ou moins clairement. Elle devait l'avouer : elle était effrayée à l'idée que Snape soit à ce point vulnérable. La dernière fois qu'elle l'avait vu dans une situation pareille, le pauvre garçon était âgé de 17 ans à peine et ressortait d'une crise existentielle et amoureuse tragique.
Elle avait gardé un oeil sur lui, peut-être distant à cette époque, comme plusieurs de ses professeurs, car le pauvre Severus se faisait harceler par ses camarades, et que, Serpentard ou pas, elle ne pouvait pas fermer les yeux sur ce qu'il se passait au sein de sa classe. Bien qu'Albus ait essayé de temporiser à cette époque la situation, « ce ne sont que des chamailleries de gamins » avait-il dit, Minerva était restée sur ses gardes.
Puis, elle avait aussi eu vent de la situation entre lui et Lily Evans, et l'avait sous estimée, comme ses collègues. Les ruptures amoureuses et autre retournements de situations, à cet âge, elle en avait assisté à plus d'une ! Qui plus est, Voldemort n'avait pas encore pris le pouvoir, la situation des nés moldus demeurait compliquée au sein de la communauté sorcière, et les gosses pouvaient s'avérer bien cruels entre eux. Si elle avait su que cela aurait pu aller aussi loin…
Bien sûr, ce qu'avait dit Severus était inadmissible, mais cela n'avait été apporté par aucun des professeurs et à l'époque, aucune sanction n'était donné face à ce genre de situation. Alors, elle avait fait l'erreur de laisser couler.
Mais, plus de 10 ans plus tard, revoir Snape dans cette position de fragilité lui avait fait reprendre ses anciens réflexes, avec d'autant plus de vigilance. Severus était dans une situation plus complexe encore, mais il demeurait une victime malencontreuse.
« Severus, j'ai vu que vous aidiez Miss Granger à l'élaboration de votre remède. Cette idée vient de vous ? demanda la sorcière, d'un ton faussement innocent.
_ Je lui ai en effet proposé mon assistance, et elle a accepté.
_ Pensez-vous que cela soit bien judicieux ?
_ Bien sûr ! Après tout, Poudlard possède toutes les ressources nécessaires, et cela lui permet de mettre en application ce qu'elle apprend des potions de soins auprès de Pomfresh dans le cadre de son apprentissage.
_ Je ne vous parle pas de ça, trancha Minerva. Est-ce approprié qu'elle profite de votre aide ? En d'autres circonstances, vous l'auriez envoyé sur les roses.
_ En d'autres circonstances, peut-être qu'un autre sorcier serait mort d'avoir été touché par cette potion.
_ Et en d'autres circonstances, peut-être que Miss Granger se serait fait expulsée manu militari pour s'être amusée à élaborer un philtre aussi dangereux, fulmina-t-elle.
_ L'Amortencia fait partie des potions interdites par le congrès magique ? Je ne crois pas.
_ Elle le devrait pourtant, nous avons bien vu ce que ses effets ont engendré en la personne de Voldemort, ajouta la sorcière.
_ Ce n'est pas moi qui fait les lois, Minerva. Alors que proposez-vous donc ? Que je n'adresse plus la parole à Miss Granger jusqu'à ce qu'elle trouve un remède toute seule, à moins que je ne me pointe dans le bureau du Ministère pour élaborer un projet de texte entourant l'usage des philtres d'amour ? ironisa-t-il.
_ Et si vous commenciez par prendre vos distances ? Je refuse que vous continuiez à approcher cette sorcière.
_ Vous vous foutez de moi j'espère ?
_ Vers où pensez-vous que cela vous mène, mmmh ? Vous restez à ses côtés, appréciant sa présence, vous en délectant même, et ensuite ? Elle vous fera du mal, et de nouveau, vous finirez anéanti. J'y ai assisté une fois, Severus et si vous êtes incapable de vous protéger, moi je le ferais à votre place.
_ J'ignorais avoir réclamer une chose pareille, trancha Snape, profondément irrité. »
Le ton entre les deux professeurs commençait à monter, doucement mais surement. Ainsi, Flitwick se fit plus petit encore qu'il ne l'était déjà, se tassant dans son siège, tandis qu'Albus semblait suivre la conversation d'une oreille distraite, et que les autres professeurs tentaient de ne pas croiser leurs regards.
« Vous n'avez pas toute votre tête pour me donner votre accord.
_ Aimer quelqu'un vous exempt de tout discernement ?
_ Ne faites pas l'autruche, les sentiments que vous pensez éprouver pour Miss Granger nuisent à votre stabilité mentale et émotionnelle, et vous empêchent de prendre les bonnes décisions.
_ Mais dis donc Minerva, c'est que vous seriez à deux doigts de me mettre sous tutelle !
_ Severus, arrêtez donc de vous énerver contre moi. Je n'y peux rien si vous avez perdu la tête le jour où Miss Granger vous est tombée dessus.
_ Vous avez fini de me faire des remontrances ? releva Snape d'un ton caustique.
_ J'en aurais terminé quand je serais sûre que vous avez bien la tête sur les épaules. »
Snape sembla montrer soudain les dents. Il serra le bord de la table avec force, tandis que Minerva, elle, refusait de lâcher le morceau.
Enfin merde, elle connaissait Severus depuis qu'il était gosse ! Et ils avaient traversé tellement de choses, de la haine à la collaboration. Elle devait avouer qu'elle tenait à son collègue plus qu'elle ne le devrait, sans doute.
« Minerva, gronda-t-il d'une voix sombre. Vous n'êtes pas ma mère. »
McGonagall ouvrit la bouche, puis la referma soudain, vexée. La sorcière afficha une drôle de tête, mais resta silencieuse. Puis, elle finit par partir du repas, écoeurée.
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« Vous vous rendez compte de ce qu'il m'a dit ?! s'emporta le professeur McGonagall, dans le bureau de Dumbledore qui avait toujours été une oreille si attentive.
_ Que vous n'étiez pas sa mère.
_ Mais enfin, balbutia la vieille sorcière. C'est inadmissible.
_ Minerva, Severus a raison. Il n'est pas votre progéniture. »
La sorcière s'apprêta à protester, avant que la porte ne toque. Albus s'excusa alors, et cela permit à Minerva de songer un peu à ces paroles.
Etait-elle trop protectrice ? Cette histoire lui avait permis de se rendre compte que son collègue comptait beaucoup à ses yeux… Et qu'il n'était pas toujours le bourreau de quelqu'un. Peut-être s'était-elle trop impliquée ?
« Minerva ? »
La sorcière cligna des yeux avant de sortir de ses rêveries.
« Horace ?! Mais enfin, qu'est-ce que vous faites ici ?
_ Oh, je… Albus, vous ne lui avez rien dit ?
_ Me dire quoi enfin ?
_ Je compte faire remplacer temporairement le professeur Snape, prononça Albus. »
Le professeur McGonagall se tourna soudain vers le directeur de Poudlard, totalement ahurie. La bouche semi ouverte, elle était devenue blanche comme un mort. Elle devait rêver, forcément rêver.
« Vous allez… le renvoyer ? reformula-t-elle, tout à fait outrée.
_ Non, j'examine juste la possibilité de… l'écarter de son poste durant un temps.
_ Mais enfin Albus, comment pouvez-vous lui faire ça ? Après tout ce qu'il a fait pour vous !
_ Ce n'est pas de gaieté de coeur que j'envisage cette possibilité, Minerva, trancha le professeur Dumbledore. »
L'enseignante en métamorphose fixa le directeur, tout bonnement éberluée. Horace quant à lui, semblait mal à l'aise, et grimaçait une fois installé sur son siège. Mais Albus tenait à mettre les points sur les i, comme toujours.
« Vous rendez-vous compte que Severus est en train d'harceler une élève ? »
Minerva resta plantée sur place, estomaquée par l'usage de ce mot « un peu fort ».
« Albus, je n'irais pas jusqu'à parler de harcèlement…
_ Il la poursuit dans tout le château, cherchant 1001 stratagèmes pour lui faire part de ses sentiments, Miss Granger est à bout. Réalisez-vous devant quelle problématique je me trouve au moins ?
_ De l'Amortencia expérimentale et terriblement surdosée lui est tombée dessus, Albus, rappela la sorcière. Ce n'est pas volontaire de sa part !
_ Cela n'enlève en rien le problème, Minerva. Je ne peux laisser un professeur s'enticher d'une étudiante, sous ce toit. Je ne peux tolérer ce genre d'agissements, alors que j'ai été si clément, trop clément, par le passé.
_ Mais enfin, Albus, Miss Granger n'est plus élève au sein de Poudlard ! tenta-t-elle de défendre.
_ Elle réside ici, elle reste sous ma responsabilité. Le professeur Snape a toujours un droit de regard sur son mémoire, et la possibilité, je dirais même, l'obligation d'apporter un avis éclairé à Madame Selwyn sur l'avancement de ses travaux. Or, je doute qu'il y soit habilité. Et je me dois de protéger Miss Granger.
_ Severus ne lui fera aucun mal, potion ou pas.
_ Vous vous en portez garante, peut-être ?
_ Hé bien, oui ! finit par balancer Minerva, la voix tremblante. »
Horace leva la tête vers la sorcière, un sourcil relevé.
« Minerva, je comprends que vous teniez à Severus.
_ Ce n'est pas la question. Cette décision risque de l'anéantir. Vous n'imaginez pas ce que la guerre lui a causé, il s'est toujours donné corps et âme pour tout, pour la sécurité de Potter, et même lorsque vous étiez au plus mal entre la vie et la mort Albus, il a prit votre place au poste de directeur malgré les vilaines rumeurs qui courraient et auxquelles j'ai naïvement cru.
_ Vous savez, nous nous sentons tous plus ou moins coupable de ce que Severus a pu endurer. »
Le professeur McGonagall cligna des yeux vers Horace Slughorn, peu sûre de bien entendre. Il y avait eu cet épisode affreux où, après être tombé de la tour d'astronomie, Albus avait été maintenu en vie par l'ordre dans un lieu secret. Tout le monde avait accusé Severus d'être à l'origine de son état de santé si précaire et les apparences n'avaient pas joué en sa faveur.
Après avoir appris son rôle dans tout cela, McGonagall s'en était tant voulu ! Dire qu'elle s'en était prise à lui, dire qu'elle lui avait lancé une myriade de sorts terribles, dire qu'elle l'avait insulté de lâche. Oh oui, si elle pouvait revenir en arrière, et lui apporter tout le soutien et la confiance dont il aurait pu avoir besoin, elle le ferait sans hésiter.
Oui, elle avait trahi Severus Snape, son plus cher collègue, ce garçon qu'elle avait connu adolescent et qui avait toujours été malheureux d'une façon ou d'une autre, et même si elle avait essayé de se racheter avec le petit Harry en le couvrant de cadeau, même si elle s'était excusé un nombre incalculable de fois après de Severus, elle continuait de s'en vouloir. Alors peut-être bien… qu'elle essayait de se racheter.
« J'ai eu vent de cette histoire de philtre d'amour, et je m'y suis moi-même penché. Sa formule est extrêmement complexe, lâcha Slughorn.
_ Miss Granger s'en occupe de tout coeur, elle trouvera une solution. Elle a réussi à rendre ses souvenirs à ses propres parents après un sort d'amnésie tout aussi puissant, je vous le rappelle.
_ Ce n'est pas parce que cette jeune fille est forte, que je dois la laisser gérer seule une situation pareille, souffla Albus. Vous ne pouvez me contredire Minerva, nous avons fait la même bêtise avec Severus, nous qui le trouvions assez mature à l'époque pour avoir la force de gérer sa situation à l'école, sa situation personnelle…
_ Le contexte est différent ! le défendit-elle, bec et ongles. Albus, je ne peux pas revenir en arrière sur mon attitude , mais vous non plus ! Ne l'enfoncez pas d'avantage.
_ Pourtant, il faut bien trouver une solution, souffla le directeur.
_ Je peux reprendre le flambeau en ce qui concerne la notation de Miss Granger, d'autant plus qu'elle se trouve en cursus universitaire, se porta volontaire le professeur Slughorn. »
Minerva et Albus se regardèrent de connivence.
« Maintenant, le statut de professeur de Severus n'est plus un problème, non ? demanda Minerva.
_ Bien sûr que si.
_ Mais Albus… tapa du pied Minerva, excédée.
_ La seule façon pour que Severus ne soit plus professeur, c'est de lui imposer un congé, trancha le directeur.
_ Vous savez, chez les moldus, ils emploient des mesures d'éloignement… »
Minerva et Albus se tournèrent de nouveau vers Horace, interloqué.
« J'ai dis quelque chose qu'il ne fallait pas ? minauda le professeur de potions.
_ Des mesures d'éloignement vous dites ?
_ Vous ne songez tout de même pas à ça ! s'en offusqua la sorcière.
_ En quoi consistent-elles ? demanda le directeur, ignorant les protestations de sa collègue.
_ Eloigner la personne posant problème, pour rendre la vie des deux individus plus supportable.
_ Et comment pourrions-nous nous y prendre ? demanda Albus en se plongeant en arrière dans son siège.
_Un sort ?
_ Un sort ?! »
Minerva fulmina pour de bon.
« Vous savez ce qu'il va se passer si vous faites ça ? Vous allez vous retrouver avec un Severus au bord du suicide.
_ Vous y allez fort.
_ C'est pourtant un risque, je l'admets, concéda Horace.
_ Vraiment ? percuta le directeur.
_ Albus, Severus est sous Amortencia, et je crains qu'il n'y survive pas si nous devons l'éloigner de Miss Granger de manière forcée.
_ Je pense que j'ai une idée, finit par soupirer Minerva. Ce n'est pas la meilleure, sans doute, mais elle vaut ce qu'elle vaut… »
Minerva prit une profonde inspiration, avant de la laisser lentement sortir de son nez.
« Nous pourrions réguler leurs contacts nous-même.
_ Que voulez-vous dire ? se pencha Horace, intéressé.
_ Si Severus ou Miss Granger l'apprennent, nous sommes dans de beaux draps alors, nous devrons faire ça discrètement. Je propose que nous les laissions collaborer sur la potion, sur certain temps d'enseignement de Severus. Je ferais aussi venir Madame Selwyn, et Pompom. Ainsi, nous pourrons contrôler leurs interactions, les surveiller, en quelque sorte. Pour le reste, si Severus ne parvient pas à se contrôler, alors nous aviseront. Ces temps seront les seuls durant lesquels il pourra se trouver en compagnie de Miss Granger, et je lui fais confiance pour ce qu'il s'agit de le cadrer s'il le faut. Mais en cas de problème, elle sera entourée. Et si cela dépasse ce cadre, alors nous ferons quelque chose. »
Albus garda le regard dans le vide, considérant cette proposition, avant d'acquiescer.
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Madame Selwyn était un femme imposante, mais aussi si sévère qu'elle faisait parfois trembler Hermione, plus encore que n'aurait pu le faire Snape.
Etait-ce du à son besoin irrépressible de validation académique ? Aucune idée. Dans tous les cas, Hermione avait senti les poils de ses bras se dresser lorsqu'elle avait rencontré son regard noir, à peine la porte du laboratoire de potions ouverte.
« Miss Granger, ponctua-t-elle sévèrement. »
Hermione s'était figée, comme une statue de cire.
Madame Selwyn était bien plus petite qu'elle, assez maigre, mais bon sang, elle pourrait la tuer d'une parole. C'était une formidable enseignante, mais elle était assez… sévère. Cela ne l'avait guère étonné que Snape l'encourage à la suivre d'ailleurs.
« Madame Selwyn, tenta de dédramatiser Hermione. Vous, à Poudlard ? Quelle aubaine.
_ Vous m'en direz tant, siffla-t-elle. J'ai appris pour votre petit… incident.
_ Oh. Oui. L'incident, grimaça la jeune femme, mal à l'aise. »
Hermione finit par entrer entièrement dans la pièce. Elle vit Snape concentré sur ses notes, et son coeur rata un battement. Le sorcier se tourna lentement vers la porte, plissant les yeux vers elle.
« Puis-je savoir comment une telle chose a pu arriver ?
_ C'était un accident, un terrible accident, bafouilla Hermione, se tenant nerveusement le front avant de dégager quelques mèches de cheveux.
_ Si j'ai bien compris le rapport envoyé par Albus, nous parlons d'Amortencia, du moins, une formule expérimentale. N'êtes-vous pas ici pour travailler avec Pomfresh sur les potions de soins ?
_ Oui, mais…
_ Ce poste est très important Miss Granger. Depuis la fin de la guerre, Poudlard est réputé pour son infirmerie et la qualité de ses soins. Alors, puis-je savoir pourquoi est-ce que vous étiez en train de travailliez sur autre chose que…
_ Miss Granger cherchait un remède. »
Hermione cligna des yeux vers la voix qui venait de gronder à sa droite. Elle releva la tête, pour voir Snape les surplomber, et déglutit avec difficulté. Voilà que deux de ses pires professeurs s'apprêtaient à se crêper le chignon pour ses bêtises.
Hermione détourna ses yeux de madame Selwyn, plus par crainte qu'autre chose. Elle sentit les doigts de Snape lui frôler le dos et frissonna en lui jetant un coup d'oeil un peu curieux, avant de se reprendre. C'était comme si son coeur s'apprêtait à sortir de sa poitrine.
« Elle cherchait un remède pour les philtres d'amour. En réalité, voyez-vous, ces potions sont extrêmement dangereuse et non réglementées. Nous avons tous fait l'expérience de l'individu qui a été engendré à travers cette potion.
_ Certes. Mais pourquoi être parti sur un philtre aussi concentré ? demanda Selwyn, suspicieuse.
_ Pour que l'anti potion le soit tout autant. »
Hermione se mordit la lèvre, et Selwyn observa Severus du coin de l'œil. L'homme ne laissa rien transparaître, mais la Gryffondor à ses côtés n'arrivait plus à se sortir cette frayeur de son estomac.
Seigneur, et si Selwyn finissait par ne plus lui faire confiance ? Et si elle annulait tout bonnement son apprentissage ?! Que ferait-elle par la suite ?
C'était une telle chance d'être une de ses élèves, elle recevait si peu de monde dans ses classes. Hermione tritura ses ongles à l'appris des regards, mais son souffle se calma peu à peu, sans qu'elle ne comprenne trop comment avant de remarquer que le pouce du maître des potions traçaient de minuscules cercles au centre de son dos. Hermione expira alors l'air trop contenu dans ses poumons.
« Bien, finit par céder sa maîtresse d'apprentissage. Mais si vous voulez vous lancer dans un anti-potion, j'attends de cet effort qu'il soit le sujet de votre mémoire. Après avoir vu vos notes et essais, cela ne risque pas d'être une sinécure.
_ C'était mon intention, ponctua Hermione.
_ Bien sur, vous pouvez réclamer que Pomfresh vous seconde, cela pourra vous aider dans l'étude des administrations diverses de potions.
_ Administra… »
Hermione eut un regard dans le vide. Oh.
Oh, elle était sûre de tenir une idée.
« Bien, si vous n'avez pas besoin de moi. J'attend ce mémoire d'ici deux mois, Mademoiselle Granger. »
Hermione acquiesça et les deux comparses observèrent Madame Selwyn s'éloigner avant de partir prestement, de sa démarche fière et assurée.
« Il s'est passé quelque chose entre vous et elle ? demanda Hermione, les yeux dans le vide.
_ Quoi ? Non enfin !
_ Je trouve que vous vous ressemblez un peu.
_ Déjà que je ne peux pas me supporter, ce n'est pas pour me coltiner un double de moi-même. »
Hermione rit un peu, avant de se secouer la tête.
« Vous aviez une idée, l'interrompit Snape.
_ Hé bien… oui, lâcha Hermione, clignant des yeux de surprise. Oui, la réflexion de Madame m'a fait songer à la façon dont cette potion vous avait atteinte. Est-ce que… est-ce que vous avez une trace quelque part, ou une idée de l'endroit où vous auriez pu la recevoir ? »
Snape souleva alors sa manche et Hermione lui prit machinalement la main. Elle vit la trace de deux minuscules gouttes qui avaient décoloré le haut de son poignet, chose qui lui était invisible jusqu'alors en raison des manches si longues de son enseignant.
« Ça me rappelle la marque, murmura-t-elle tout haut.
_ La marque ? Vous parlez de la marque des ténèbres ?
_ Oui, ça n'a jamais été… un « vrai » tatouage, c'était plutôt un sort qui avait des propriétés spécifiques, et qui se diffusait dans la peau. Je le sais car Pompom m'en a parlé.
_ Je vois. Vous avez fait quelques recherches sur ce sujet à ce que je vois.
_ Je... bafouilla-t-elle. Je cherchais à l'éventualité de pouvoir l'effacer un jour.
_ C'est une perspective... interessante à explorer. »
Hermione sourit un peu, satisfaite. Elle savait que ce compliment était sincère.
« Miss Granger je pense qu'une fois que nous auront trouvé le remède, un petit tour au ministère s'imposera.
_ Un tour au ministère ? Mais pourquoi ?
_ Cette potion est bien trop dangereuse. Et en réalité, je commence à penser que tous les philtres d'amour le sont.
_ Vous avez sans doute raison… »
La main d'Hermione ne lâcha pas le poignet de Snape qui plissa les lèvres vers elle.
« Miss Granger ? »
Hermione sursauta et lâcha sa main.
« Oh… Excusez-moi, marmonna-t-elle, mal à l'aise. »
D'un rougissement, Hermione balbutia quelques mots incompréhensibles avant de se détacher complètement de son échange avec le maître des potions. Seulement, une fois arrivée devant sa paillasse sur lequel était posé son carnet de notes, elle se tourna timidement vers Snape qui était rendu dos à elle.
« Professeur ? »
Cette situation était étrange. Hier encore, Snape aurait sautillé comme une gamine surexcitée devant son boys band préféré à ce genre de geste.
« Miss Granger ?
_ Vous pourriez venir voir, juste… deux minutes ? »
Snape fronça les sourcils et s'approcha d'elle jusqu'à arriver à sa hauteur. Toujours assise, Hermione finit par se lever, et se retrouver malencontreusement un peu proche de lui, un peu trop, juste un peu.
« Que… ressentez-vous ? Je veux dire, maintenant. »
Snape ouvrit la bouche, puis la referma. Son visage, aux traits sérieux, et son regard devint plus profond à mesure qu'il observait celui de la jeune femme.
« Je…
_ Vous ?
_ Je… vous… aime. »
Hermione déglutit avec difficulté, car ces mots n'avaient rien à voir avec son ton habituel. Oui, sa voix était plus profonde, plus… « lui », en quelque sorte, et d'autant plus convaincante.
« Mais comment ? murmura-t-elle.
_ Je vous aime… sincèrement. »
Hermione sentit son souffle se couper.
« Professeur, je…
_ Je vous aime comme un malade, ajouta-t-il d'une voix sombre. »
Hypnotisée, Hermione fixa son regard à son tour sur ses lèvres, sur cette bouche qui lui disait toutes ces choses inespérées.
« Je vous aime comme si j'allais crever le lendemain. Vous en voulez en entendre plus ou cela ira ? »
Hermione sourit un peu, de flatterie, de honte aussi, devant son sarcasme et son coeur qui remontait dans sa poitrine. Imperceptiblement, ils s'étaient rapprochés jusqu'à ce qu'il ne reste entre eux que quelques centimètres d'écart, guère plus, assez pour que leurs voix ne se cantonnent qu'à de doux murmures.
« Je crois que je m'en contenterais, lui glissa-t-elle.
_ Vous croyez ? répéta-t-il, espiègle.
_ Professeur Snape, chuchota-t-elle sous un ton de reproche qui ne semblait que peu sincère. Je voulais juste faire une… comparaison, vis à vis des jours précédents.
_ Moi je n'en fais aucune, puisque vous me rendez toujours aussi dingue. »
Hermione rit un peu, et elle vit Snape lui sourire. Oh, c'était si rare, et pourtant, si plaisant.
« Vous n'imaginez pas tout le self control dont je dois faire preuve en votre présence, avoua-t'il en se rapprochant plus encore.
_ Oh, vraiment ? demanda-t-elle avec une certaine curiosité ponctué d'un flirt plus ou moins évident, sans qu'elle ne parvienne à s'en empêcher vraiment.
_ Oui, vraiment, vous voulez peut-être une démonstration ? »
Hermione frissonna et Snape le remarqua. Il jeta alors un coup d'œil à ses bras et leva un sourcil, un peu moqueur.
« Il me semble que dans le cadre d'une expérience scientifique, c'est ce qui est attendu, non ?
_ Vous êtes vraiment sournois, le railla-t-elle en pointant son index sur lui, la faisant être plus proche que jamais.
_ Que voulez vous, je suis un Serpentard, ajouta-t-il.
_ Qui vous a dit que j'aimais les Serpentard ? joua-t-elle alors que son nez frôlait le sien.
_ Je suis très doué pour faire accepter toutes les qualités de ma maison, dit-il, espiègle.
_ Je vois… Vous faites un directeur exemplaire.
_ Votre compliment me va droit au coeur, ponctua-t-il en l'approchant plus encore de lui, d'un bras bien placée derrière le bas de son dos. »
La jeune femme hoqueta avant de pouffer d'amusement, sentant la poigne de son professeur enserrer sa taille, et son sourire narquois si proche du sien, bien amusée par cette facette de sa personnalité, bien trop même.
Machinalement, les mains de la jeune femme s'étaient accrochés à sa veste.
« Est-ce cela le self control que vous êtes en train de perdre ? s'amusa-t-elle de son regard rieur.
_ Loin de là, c'est juste un avant gout, lui glissa-t-il.
_ Le reste étant ?
_ Ne me tentez pas, sorcière. »
Hermione rit et sentit son expiration se mélanger à la sienne. Elle pencha la tête, sa bouche rendue à quelques millimètres de la sienne, à peine suffisamment pour sentir son souffle d'ores et déjà se mêler au sien.
« C'est un peu trop tard pour ça, chuchota-t-elle.
_ Et vous me dites joueur ? J'ai bien peur de ne pas être le seul sournois de cette pièce.
_ C'est vous l'expert Professeur, se moqua-t-elle, un brin caustique.
_ Ça vous arrive souvent de vous jouer ainsi d'une pauvre homme ? Ironisa-t-il d'un regard noirci de désir.
_ Oh, mais je ne réserve ce traitement qu'à vous, le rassura-t-elle, mutine. Et je crains que vous ne soyez pas un pauvre homme.
_ Dans cette position, je ne donne pas chère de ma maîtrise, alors je crains que si, malheureusement.
_ Vous allez me faire presque pleurer, minauda-t-elle.
_ Fermez-là. »
Hermione rit une dernière fois, et s'apprêta à ce que Snape l'embrasse, là, tout de suite avant que la porte ne s'ouvre. Un raclement de gorge mal à l'aise les interrompit, et Snape ainsi qu'Hermione se tournèrent vers l'entrée sans pour autant se détacher de leur position.
« Quoi ? aboya Snape. »
Pomfresh se planta alors là, le regard sévère et les mains posées sur ses hanches.
« Je pensais que nous étions là pour vous trouver un remède, pas pour vous aider à rouler des galoches ! balança la magicomage.
_ On ne se roule pas des galoches, reprit Hermione plus sévèrement en se détachant enfin de Snape avant de lisser nerveusement sa jupe longue.
_ Et pourtant, dieu que ce n'est pas l'envie qui nous manque, mmmh ? lui murmura-t-il sarcastique au coin de l'oreille. »
Hermione se mordit la lèvre avant de sourire dans sa direction, espiègle et que Snape ne lui rende son expression avec un sourcil relevé. Poppy leva les yeux au ciel, avant de battre les mains dans le vide.
« Où en étiez-vous au juste ? gronda-t-elle. »
