Si vous me suivez sur les réseaux sociaux, vous le saviez : j'ai tenté ma chance pour le NaNo. Et comme je dois bien aimer souffrir, j'y ai ajouté le Sicktember, afin d'avoir un thème chaque jour (c'est comme l'Inktober, sauf que ça se passe en septembre et que les thèmes tournent autour des maladies). Il y a peu de règles, mais l'une des principales est que ça doit rester tout public. Comme il y aura quelques gros mots, je l'ai un peu tordu.
Les cinq thèmes bonus seront postés à part car ça s'établit dans un univers alternatif. Et, s'il y a matière, la nuit de noces x)
Je sais qu'en VF Lavio dit "jeune héros", mais comme ils ont le même âge, je trouve ça bizarre et j'ai préféré récupérer la version anglaise (M. Hero).
Pour le contexte, ce Link est le héros de la légende, donc celui d'a Link to the Past, les Oracles, Link's Awakening, a Link Between the Worlds et Tri Force Heroes.
Disclaimer : La légende de Zelda appartient à Nintendo.
Bonne lecture !
"Est-ce que tu sais comment prendre soin d'une personne malade ?"
Depuis bientôt trois jours, M. le Héros n'avait pas quitté sa chambre, s'y terrant comme un ours en hibernation. Quand il osait parfois taper timidement à sa porte, un grondement s'y échappait, borborygme menaçant qui paraissait éclater en une quinte de toux qui était étouffée rapidement.
- J'ai apporté la soupe, je la dépose devant la porte, d'accord ? prévint Lavio.
Il échangea le plateau précédent avec celui qu'il tenait et quitta le couloir, conscient que le propriétaire des lieux n'ouvrira la porte que s'il était hors de vue, refusant d'être surpris d'une manière ou d'une autre.
Retournant dans la cuisine qu'il avait quitté, il empila la vaisselle sale et sortit le chaudron du feu, offrant un peu de repos à la soupe dont il nourrissait Link depuis qu'il s'était barricadé dans sa chambre, tout autre aliment ayant été refusé.
À ce souvenir, il se tordit les lèvres, son appréhension lui sautant de nouveau à la gorge et la serra avec force. Il ignorait tout ce qui pouvait se passer de l'autre côté de ce satané panneau de bois et dans quel état se trouvait être le héros d'Hyrule ! Peut-être était-il en pleine agonie ? Serait-ce l'un de ses éléments magiques ou maudits qui se serait détraqué et l'aurait pollué ?
Lavio avait toujours été quelqu'un d'anxieux. Être anxieux voulait dire être sur ses gardes. Être sur ses gardes signifiait la vie sauve. C'était donc un état qu'il cultivait pratiquement, conscient de la plupart des situations où ça l'avait sauvé. Mais dans la situation actuelle, elle le faisait surtout tourner en rond au rez-de-chaussée en tordant les extrémités de son écharpes ou les oreilles de sa capuche, tout en plantant ses dents dans sa lèvre inférieure, l'arrêtant dans chacune des activités qu'il entamait.
C'était prodigieusement ridicule : M. le Héros n'allait pas sortir subitement de son isolement forcé une fois qu'il aura attaqué tous les ongles de ses mains ! Mais il était incapable de se concentrer sur quelque chose d'aussi basique que le ménage de leur maison commune sans s'interrompre plusieurs dizaines de minutes pour envisager un nombre impressionnants de scenarii catastrophiques sur la condition de son ami, sur ce qu'il allait advenir, ce qu'il fallait faire…
C'est après avoir lavé une demi-douzaine de fois la même assiette qu'il prit la décision d'aller visiter la reine Zelda et ainsi de l'informer de l'état de son jumeau. Peut-être aura-t-elle une idée de ce qui se passait et de ce qu'il fallait faire ? Peut-être que tout allait bien et qu'il se prenait la tête pour rien. Peut-être même était-ce lié à sa nature d'hylien ? Un passage obligatoire pour tous les membres de ce peuple et dont il était ignorant car ne vivant en Hyrule que depuis moins de deux ans et ne fréquentant intimement qu'un seul représentant ? Peut-être qu'ils tenaient des chenilles et que Link était en train de créer un cocon dans lequel il allait se décomposer pour en ressortir magnifié, tel un papillon ?
Ou peut-être qu'il réfléchissait juste trop.
Après qu'il eut toqué à la porte fermée afin de prévenir de son départ, il rapporta le plateau vide à la cuisine, siffla Shiro qui prit place sur son épaule et enfila ses bottes.
Son compagnon ébouriffa son plumage avant de s'appliquer à son nettoyage, à son amusement.
Tout entier à ses réflexions chronophages, il avait un peu négligé son ami à plumes, ce qui le faisait culpabiliser. Mais avec un peu de chance, la reine aurait la réponse qui apaisera ses inquiétudes et il pourra reprendre son rythme habituel, ce qui comprenait ses échanges avec Shiro, que ce soit de longues heures de tendresse ou juste parler avec lui, quelque fut le sujet.
Passer les lourdes portes toujours ouvertes du château le sortit de ses pensées et le bruit provenant de l'entraînement des soldats commença à résonner, le faisant regretter son initiative. Ses mains tremblaient presque lorsque le garde l'interpela pour s'enquérir de la raison de sa présence.
Pourquoi était-il seulement là, franchement ? Déranger sa majesté le Reine Zelda parce que son hôte jouait les ermites ? Link n'a jamais été le gars le plus social d'Hyrule, c'était sans doute une simple crise de misanthropie ordinaire, provoquée par sa présence constante dans ce qu'il devait considérer comme son refuge coupé du monde… Le mieux, ce serait que Lavio fasse demi-tour, rassemble ses affaires et s'absente pour une durée encore inconnue, ce qui lui permettrait de se réapproprier sa propre maison comme il l'entendait pendant ce temps. Il n'aura qu'à lui faire signe quand il pourra rentrer ! S'il le voulait toujours…
Fort de cette décision, il prit une profonde inspiration et allait s'excuser auprès du garde pour l'avoir inutilement dérangé, mais il se dégonfla rapidement quand Impa surgit de nulle part et le salua.
— Bonjour jeune homme, qu'est-ce qui t'amène ici ? Es-tu venu rendre visite à notre reine ?
N'ayant pas confiance en sa voix, il hocha vigoureusement la tête, ses mains toujours tremblantes cachées dans ses manches. La vieille femme semblait être au courant de tout ce qui se passait dans le royaume, à se demander comment elle avait pu se retrouver piégé dans ce fichu tableau…
— Suis-moi, une petite pause lui fera le plus grand bien. Les affaires de ce grand royaume n'en prennent aucun, mais comme je le lui répète, se tuer à la tâche ne ralentira pas le rythme pour autant !
Elle fit volte-face sans vérifier qu'il la suivait bien, le forçant à marcher à vive allure pour la rejoindre sans se faire réprimander, bavardant sur les mauvaises habitudes que sa protégée commençait à prendre pour rester à flot durant ses premières années de règne.
Souriant derrière son écharpe, Lavio reconnut certaines que Hilda avait elle-même adopté et qu'il lui reprochait à son tour, l'exhortant à prendre du repos et à lever le pied. Évidemment, Zelda n'avait pas à relever un pays de décennies de mauvaise gestion et de décrépitude, mais il n'en restait pas moins un défi à relever, après l'assassinat de son père et des années de régences.
Faisant fi du regard soupçonneux des gardes, la vieille nourrice ouvrit les portes de l'étude sans se faire annoncer, les refermant après son passage.
— Regarde qui nous viens nous saluer, petit papillon !
— Impaaaa, pleurnicha faussement l'interpellée en relevant la tête de son parchemin.
Elle se figea en reconnaissant le nouveau venu qui nota les taches d'encre parsemant sa robe et les cernes décorant le dessous de ses yeux.
— Impa, pas en public ! claqua-t-elle en se redressant et tentant d'améliorer sa mise.
— Peut-on vraiment considérer Lavio comme du public ? Après tout, vous êtes presque frère et sœur par alliance !
Cette déclaration - et toute son implication sous-jacente - empourpra les joues du pauvre Lorulien qui regretta sa décision, une fois de plus. Il ne manquait plus que Yuga revienne et sa journée serait complète !
— Link et moi ne sommes pas ensemble, marmonna-t-il en fixant le sol.
C'était quelque chose que tous les deux devaient répéter depuis son retour de Lorule et son installation officielle chez le héros. Les gens étaient de telles commères ! N'avaient-ils donc rien de mieux à faire que d'inventer des romances là où elles n'existaient pas ?
De toute façon, pour qu'une relation naisse, il fallait être deux au minimum, et ce n'était pas avec les fréquentes et longues absences de son ami qu'il pouvait construire quoi que ce soit…
— Qu'est-ce qui t'amène ici, Lavio ? reprit Zelda sans prêter attention à sa distraction momentanée.
— Ah, oui, c'est au sujet de Link, justement…
Il entreprit d'expliquer son attitude de la semaine dernière, son soudain refus de quitter sa chambre, son rejet de la plupart des repas, même ses plats préférés, des plus compliqués aux plus simples, et sa conversation se limitant à des grognements de diverses intensités.
Durant son exposition, l'inquiétude de son interlocutrice s'estompa de son visage au profit d'une expression désabusée. Elle reprit sa plume en main et sa lecture.
— On dirait bien que cette tête de mule a de nouveau une angine. Ne te fatigue pas avec ça, il en a tous les ans. Tu sais comme il déteste reconnaître avoir tort, et encore plus quand ça lui retombe dessus. Laisse-lui encore deux jours et il sortira en râlant avec la même voix que lorsqu'il muait. Je regrette presque de rater ça, tiens… ajouta-t-elle pensivement.
Stupéfait par la simplicité de la solution, il resta figé et bouche bée un instant avant de se reprendre et de la remercier en la saluant, retournant auprès de son malade, ne relevant pas le sourire amusé de la Sheikah qui servit une tasse de thé à sa protégée.
— Tête de mule ? C'est amusant, il me semble en connaître une autre, incapable de prendre en compte ses limites et refusant d'accepter ses propres moments de faiblesse, ce qui empire souvent la situation… Mais je dois me tromper.
— Impaaaa, geint Zelda en abandonnant ce qu'elle tenait pour agripper ses tresses. J'ai parfaitement compris la situation ! Mais je dois d'abord gérer les…
— Je doute que les nouveaux parterres de fleurs du château nécessite ton approbation urgente. Je pense plutôt que tu cherches la première excuse possible pour camoufler ta propre angine.
Croisant enfin les yeux de sa vieille nourrice, la jeune souveraine ne put plus cacher son état fiévreux et jeta l'éponge, la laissant l'escorter jusqu'à sa chambre, acceptant enfin de se faire soigner mais pas de s'avouer vaincue, ronchonnant le plus fortement qu'elle pouvait le faire sans que sa gorge ne se resserre.
Son unique réconfort - en plus de ses draps préalablement réchauffés - fut la pensée de son frère jumeau se faisant assiéger par son béguin qui avait sûrement dû exploser sa barricade de fortune pour le secouer dans tous les sens, si elle avait bien cerné le personnage.
Link, de son côté, ne sut déterminer ce qui sera le coupable de sa future damnation, mais il était de l'avis qu'un locataire trop attentionné pourrait l'y pousser…
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