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Partie 2/2 : THE PRISON
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Je suis restée une bonne et longue semaine à bord du 'Valiant'. Tout se déroula plus ou moins de la même façon que lors de mon premier jour. J'avais une immense chambre pour moi toute seule, des magnifiques robes à porter, des déjeuners et des dîners en compagnie du Maître et de ses étranges autres invités. J'ai découvert que les Toclafanes pouvaient communiquer et ils parlaient du Maître d'une manière très dithyrambique, contrairement à Tish, et sa maman Francine. Tish a mentionné sa sœur Martha, la compagne du Docteur, l'homme âgé dans le fauteuil roulant, qui n'a pas toujours été comme ça.
De ce que les gens me murmuraient avec peur, tout était de la faute du Maître. C'était un Super-Vilain qui dominait le Monde, gardait prisonnier son ennemi, un survivant de Gallifrey, tout en emprisonnant aussi le Captain Jack Harkness.
Mais alors... Pourquoi semblait-il si différent avec moi ?
Un énième soir où le Maître m'avait raccompagné à ma chambre, il m'avait avoué, penaud, que la belle blonde qui se trouvait autour de la table était en réalité sa femme.
J'ignorais qu'il était marié, il ne portait pas d'alliance. Son explication semblait logique, bien qu'assez triste :
Il n'avait épousé Lucy que pour gagner les élections, pour se faire bien voir par le peuple Anglais. Il ne l'aimait pas.
Et ça, je l'avais très bien compris, car il me le répétait sans cesse pour ne pas que je l'oublie. J'en ignorais la raison, bien sûr, mais à mesure que les jours passaient, je commençais à me poser des questions. Non pas au sujet des allégations à l'encontre du Maître, mais au sujet de mes...
… Sentiments à son égard ?
Et, par ricochet, de ses sentiments à lui à mon égard...
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Quinze jours après mon arrivée dans ce vaisseau, je me suis réveillée dans mon immense lit. Mes bleus commençaient à partir, mes cicatrices ne se voyaient presque plus en-dessous des belles robes que je portais à longueur de journée.
D'ailleurs, ce jour-là, j'ai opté pour une parure merveilleuse, sur plusieurs tons de rose poudré, avec des manches courtes, des bretelles de fleurs pourpres qui tombaient sur mes épaules, le pan s'arrêtait au-dessus de mes chevilles de façon à voir mes étranges souliers de verre qui ornaient mes pieds. Le tissu de la robe en soie fin virevoltait à chacun de mes mouvements. Des motifs en dorures argentées agrémentaient la tunique avec plusieurs paillettes imprimées dans le tissu, dont les éclats scintillaient sous les rayons du soleil au milieu du ciel. Ma longue tresse tombait jusqu'à mes hanches et j'avais enfin mis une fine couronne en or blanc sur ma tête. Mon armoire en était remplie et je voulais les essayer depuis un moment déjà.
J'ai soulevé délicatement le pan de ma robe pour déambuler un peu intimidée dans les longs couloirs.
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J'arrivais enfin à me diriger dans ce labyrinthe d'argent métallique sans Tish pour m'accompagner. Comme souvent, lorsque je marchais au milieu des couloirs, un Toclafane virevolta au-dessus de ma tête. J'avais réellement l'impression d'être une Princesse Disney, avec son animal de compagnie improbable pour vivre des aventures.
Telle Ariel et Polochon. Jasmine et Rajah. Belle et le Chandelier.
Je discutais avec mon nouvel ami sphérique, de tout et de rien comme souvent, pendant qu'il me guidait vers l'immense bibliothèque qui devait se trouver à bord du 'Valiant'. Je riais aux éclats, lorsqu'au détour d'un énième corridor, je suis tombée nez à nez sur...
- Maître ! m'écriais-je. Désolée, je ne t'ai pas entendu arriver.
Il posa ses yeux sur moi et baissa son regard pour m'admirer des pieds à la tête. Puis, il rougit et déglutit péniblement, avant de bégayer :
- Alisone... Tu... Tu es... Ravissante, ce matin...
Je souris et il reprit, pensant qu'il venait de dire quelque chose de mal :
- Comme tous les matins, bien sûr ! Comme tous les jours... Magnifique...
Je rougis à mon tour, en marmonnant :
- M-Merci... Maître... Tu es élégant aussi, dans ton costume... Comme toujours...
Quelques longues secondes de silence passèrent et le Maître leva la tête pour parler avec le Toclafane :
- Tu peux rejoindre les autres, je vais m'occuper de notre petite Princesse...
- À vos ordres, Maître.
La sphère disparue et le Maître me tendit sa main. J'ai donc glissé la mienne dans la sienne et je pouvais déjà sentir son esprit se calmer et ses tambours se ralentir. Il se rapprocha plus près encore de moi, j'ai plongé avec plaisir dans ses yeux couleur automne. Il murmura :
- Tu souhaitais te rendre où, comme ça ?
- À la bibliothèque. Lire quelques livres pour m'occuper.
Un voile de tristesse traversa le regard de l'homme, lorsqu'il comprit :
- Oh, Love, tu dois t'ennuyer ici. Je... Je n'y avais pas pensé. La télévision dans ta chambre ne fonctionne plus ?
Ce fut à mon tour de tiquer et d'avouer timidement :
- Je l'ignore. Je ne sais pas me servir d'une télévision... Mais, au moins, je sais lire.
Il esquissa un sourire.
Ce fameux petit sourire si espiègle que j'aimais de plus en plus. Nous reprîmes notre marche dans le couloir et il me dit :
- Pour me faire pardonner, laisse-moi te conduire à la librairie du vaisseau. Je pense que tu aimeras les ouvrages qu'elle contient.
Le trajet ne fut pas si long, malgré les nombreux tours et détours, mais j'aimais la compagnie du Maître, le temps passait plus vite avec lui.
Trop vite.
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La pagaille commença un simple jour, à 15h tapante, lorsque le Docteur a essayé de voler et d'utiliser le Tournevis Laser contre le Maître. Mais, comme ce dernier avait posé un Contrôle Isomorphique dessus, empêchant quiconque de s'en servir à part lui-même, le plan échoua rapidement. Par vengeance, le Maître utilisa son gadget sur le Docteur, qui rétrécit encore et encore en vieillissant toujours plus. Depuis, le Maître gardait son ennemi dans une cage à oiseau, au milieu de la grande salle. La première fois que je le vis, lors du dîner, je pus facilement décrypter la tristesse dans les yeux du pauvre Docteur. Alors, lorsque le Maître me raccompagna jusqu'à ma chambre après le repas, je n'ai pas pu m'abstenir de lui demander :
- Maître ? Est-ce que le Docteur va bien ? J'ai l'impression qu'il est... Triste...
Il esquissa un sourire :
- Tu t'inquiètes toujours pour mes invités... Le Docteur et moi, nous ne voyons pas l'Univers de la même façon... Et... Il ne me comprend pas. Il ne comprend pas ma folie. Il ne comprend pas à quel point les tambours... Les tambours...
Il ferma les yeux et serra sa main dans la mienne, pour calmer les quatre rythmes infernaux. Puis, il posa son front contre le mien, toujours les yeux clos, il chuchota :
- Je ne sais pas comment, ni pourquoi, tu peux calmer les tambours, Love... Mais, je suis heureux que tu puisses le faire...
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Puis, tout bascula quelques jours plus tard. Je portais toujours une merveilleuse robe, jaune, cette fois-ci, semblable à celle de Belle, mais en bien moins imposante. Un serre-tête en or blanc, avec des entrelacs celtiques, agrémentait ma coiffure, qui était toujours une longue tresse cascadant dans mon dos. Après le déjeuner, une fois passé 13h, le Maître m'accompagna à la bibliothèque. Sur le chemin, il ralentit pour me demander, un peu timidement :
- Alisone... Love... Tu ne m'as jamais dit qui était l'horrible Humain qui te pourchassait le jour où nous nous sommes rencontrés ?
Je me suis arrêtée net, au milieu du corridor. Comme le Maître me tenait toujours par la main, pour calmer ses Démons, il s'arrêta également et tourna son visage vers moi :
- Love ?
- J'ai été enlevé à ma famille, lorsque j'étais petite. Une organisation étrange m'a kidnappé pour faire des tests sur moi. Ils disaient que j'avais un Q.I intéressant pour des expériences scientifiques à réaliser. Plus j'essayais de m'évader et plus ils me droguaient. Mais, j'ai réussi. Le jour où tu m'as trouvé. Un des 'nettoyeurs', les hommes de main du Directeur, devait me récupérer. Mais, Dieu merci, tu es intervenu à temps...
Je pus facilement voir de la colère, de la rage, traverser le regard du Seigneur du Temps. Il se rapprocha de moi, son visage n'était qu'à quelques centimètres du mien, lorsqu'il murmura :
- Combien en restent-ils ? De ces... Monstres ?
Je fis 'non' de la tête, révélant ainsi que je ne savais pas, je n'étais pas sûr du nombre exact.
- Je l'ignore... Des centaines... Sûrement...
Il souffla de désespoir, puis reprit :
- Me donnes-tu la permission de...
Il se tut, ferma les yeux et réfléchit.
- De... ? questionnais-je.
- … de tous les tuer... lâcha-t-il enfin. Donne-moi la permission de tous les tuer, Love.
Mon cœur rata un battement. Mon esprit se figea. Seule ma bouche fonctionna encore :
- Accordée.
Il sourit et se pencha vers moi pour m'embrasser.
Enfin.
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Il resta avec moi durant les deux heures suivantes à la bibliothèque, tantôt à prendre note des informations que je lui donnais concernant mes ravisseurs, tantôt à me rassurer en m'embrassant. Je ne vais pas vous mentir, avec la vie que j'ai eue, ses baisers étaient les premiers pour moi...
Cependant, quelque chose brisa cette découverte. Une alarme stridente retentit dans tout le vaisseau. Le Maître tiqua et leva les yeux au plafond. Un Toclafane entra en trombe dans la salle, en disant aussi rapidement que sa voix robotique le lui permettait :
- Maître, nous avons un problème avec le Captain Jack Harkness.
Le Seigneur du Temps tenta de cacher sa panique, mais je pus facilement entendre sa voix trembler :
- Quel genre de problème ?
- Le Captain Jack Harkness s'est échappé.
Le Maître blêmit.
- Non. Le Docteur...
Il me lâcha les doigts pour se lever d'un bond, mais à peine eut-il fait ça, qu'il planqua ses mains sur son crâne, en hurlant de douleur.
Les tambours.
Un, deux, trois, quatre.
J'ai rapidement agrippé sa main gauche pour que ses Démons se calment. Cela fonctionna, il put respirer à nouveau et dire :
- Allons à la grande salle.
Main dans la main, nous suivîmes le Toclafane.
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Une fois que nous entrâmes dans la grande salle, toujours main dans la main, je pus découvrir le Captain en train d'ouvrir la cage du Docteur, tandis que Tish serrait dans ses bras Martha, sa sœur, qui venait de se faufiler sur le vaisseau en cachette.
De toute évidence.
Je sentis la main du Maître trembler dans la mienne, encore plus lorsque Martha sourit jusqu'aux oreilles en exposant son plan à son ennemi. Durant plus d'un an, elle avait fait le tour du Monde pour parler du Docteur à tous les Humains de la planète, pour qu'ils pensent à lui, prononcent son nom le même jour, en même temps et au même moment. Pour que leur amour pour lui le sauve du Maître.
Et cela fonctionna parfaitement...
Un vortex scintillant entoura le Docteur, et plus les gens hurlaient son nom, plus il retrouvait sa taille normale. La main du Maître trembla dans la mienne, avec plus d'intensité encore lorsqu'il s'écria :
- NON ! NON !
Pour la première fois, je pus découvrir la véritable forme du Docteur :
Il était grand, très grand, et très mince, une silhouette longiligne qui portait un élégant costume brun à fines rayures bleues, des Converses blanches aux pieds, et de hauts cheveux châtain qui partaient dans tous les sens. Il avait les yeux sombres et des taches de rousseur sur son visage mince.
En proie à une terreur évidente, le Maître glissa une main dans la poche de sa veste pour en sortir son Tournevis Laser le plus rapidement possible, et ensuite le pointer sur son ennemi, tirant sur lui. Mais l'éclaire orangé ne toucha pas l'autre Seigneur du Temps, car le vortex qui l'entourait encore lui procurait un bouclier magique. Le Docteur se régénérait en avançant vers le Maître, tout en parlant d'une voix calme et sereine :
- Penses-tu que l'Espèce Humaine est toujours aussi faible et inutile, lorsqu'elle est pourtant capable d'accomplir ça ?
Horrifié par la situation, le Maître pointa son Laser vers Martha, s'il ne pouvait pas blesser son ennemi, il allait blesser ses amis. Mais le Docteur comprit la manœuvre, et en utilisant son vortex, il arracha le gadget des mains du Maître sans même le toucher. L'arme glissa à l'autre bout de la salle, laissant le Maître apeuré comme un enfant.
Il recula lentement, tout en restant devant moi comme pour me protéger et il plaida vers son ennemi qui avançait de plus en plus vers nous :
- Tu sais ce que je vais te dire, n'est-ce pas ?
Nous avons reculé jusqu'à toucher le mur derrière nous. Nous n'avions plus nulle par où aller, où nous cacher. Nous étions acculés entre le mur et le Docteur, lui-même entouré de ses amis. Même les Toclafanes ne pouvaient pas nous venir en aide. Personne ne le pouvait.
Et ce fut la première fois depuis que j'avais mis les pieds sur 'The Valiant' que je ressentis une terreur intense.
Comme celle du Maître.
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Pendant que le Captain Jack Harkness détruisit le Paradoxe que le Maître avait créé avec le T.A.R.D.I.S du Docteur, ce dernier effaça l'année 2007 fraîchement écoulée, en revenant dans le temps, après que le Maître eut gagné les élections, mais avant l'arrivé des Toclafanes.
Je n'eus même pas l'occasion de leur dire adieu, ils disparurent tous avec le Paradoxe Temporel. J'étais triste, moi qui avais parlé à l'un d'eux durant plusieurs semaines.
Lorsque tout s'arrêta, le Docteur toisa le Maître et il avoua, avec une sincérité déconcertante :
- Je te pardonne.
Mon souffle se coupa.
Le Maître resta sans voix. Sa main serra plus fortement la mienne, les doigts tremblants encore.
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Le Docteur serra fort Martha et sa famille dans ses bras, heureux de les retrouver sain et sauf. Et pendant qu'ils étaient occupés dans leurs retrouvailles, le Maître essaya de s'enfuir en me tirant vers lui, me tenant toujours par la main. J'étais presque catatonique, je n'arrivais plus à penser, ni à comprendre, ni même à réaliser ce qu'il se passait sous mes yeux.
Tout venait de basculer en si peu de temps.
En quelques minutes.
Alors que nous étions proches de la sortie, le Captain Jack Harkness entra en trombe dans la grande salle, nous barrant ainsi le passage et il mit le Maître en joug, en narguant :
- Oh, pas si vite.
Nous rentrâmes derechef dans la salle, avec un Jack plutôt énervé qui nous menaçait de son arme.
Le Maître essaya de faire bouclier en se mettant devant moi et en demandant au Docteur :
- Qu'est-ce que tu comptes faire de moi ?
Il n'avait pas dit 'nous', probablement pour me rendre invisible. Ce qui fonctionna quelques secondes, lorsque le Docteur s'approcha de lui, lentement, mais sereinement :
- Tu vas rester avec moi. Je suis responsable de toi, maintenant. Nous sommes les deux seuls Seigneurs du Temps restant dans tout l'Univers...
Mon cœur rata un battement.
Je pouvais presque entendre les tambours revenir en force dans l'esprit du Maître terrorisé :
Un, deux, trois, quatre.
Malgré toute la bonne volonté du Maître pour me faire disparaître dans son dos, ma longue robe jaune ne laissait aucun doute quant à ma présence.
De fait, le Docteur pencha la tête sur le côté pour me faire face. Il me sourit gentiment, en me disant :
- Oh, hello. Tout va bien, Alisone. Tu peux laisser le Maître...
Le Docteur s'approcha de moi pour me prendre par le poignet, mon seul poignet de libre, pour m'enlever des bras du Maître, mais je ne me laissai pas faire. Au lieu de cela, je me suis collée un peu plus près du Premier Ministre, retirant mon poignet des doigts du Docteur pour les enrouler autour du bras du Maître, qui me serra fort contre lui, en lâchant avec colère à l'intention de son ennemi :
- Ne la touche pas.
Le Docteur tiqua.
Il passa un étrange regard interrogateur du Maître à moi, pour finalement s'arrêter à ma hauteur :
- Alisone ?
Mon cœur battait la chamade, mon corps tremblait, mais je réussis à marmonner :
- Je... Je veux rester... Avec le Maître...
Le Docteur jeta un nouveau regard interrogateur, en direction du Captain Jack Harkness cette fois-ci. Enfin, ce fut Tish qui se dirigea vers moi...
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Ce soir-là, je me suis retrouvée seule, enfermée dans ma chambre. Alors, pour m'occuper face à l'inconnu de la situation, je me suis changée. J'ai quitté ma robe jaune, pour une parure un peu plus simple, d'un rose pâle, avec plusieurs étoffes de blanc et aux entrelacs de dentelles argentés. J'avais retiré ma tiare, gardant seulement mes longs cheveux châtains noués en une longue tresse. Puis, j'ai attendu sur le lit que Tish vienne déverrouiller ma porte.
J'ai rapidement essuyé les larmes de mes joues, je venais de pleurer et je ne voulais pas qu'elle le sache. Lorsque mon amie entra, j'ai remarqué qu'elle ne portait plus la tenue qu'elle devait garder sous le règne du Maître, non, elle avait retrouvé un jean et une chemise sombre. Au moins, elle eut la gentillesse de toquer avant d'ouvrir la porte pour entrer dans ma chambre.
- Alisone ?
J'étais assise sur le lit, et Tish vint s'installer à côté de moi. Je sentais qu'elle voulait me dire plein de choses, mais qu'elle choisissait ses mots avec soin pour ne pas me blesser.
- Comment ça va ?
J'ai ravalé mes larmes pour esquisser un faux sourire en avouant :
- Bien. Où... Où est le Maître ?
Elle tiqua à l'entente de son nom, elle se renfrogna et commença :
- Jack l'a enfermé dans une salle, sur le vaisseau, en attendant que le Docteur répare son T.A.R.D.I.S.
Je n'ai pas compris son dernier mot, j'ai seulement dégluti péniblement en essayant de ne pas éclater en sanglots :
- Et... Et moi... ? Vous allez faire quoi de moi ?
Tish sourit :
- Tu es libre de partir, bien sûr. Tu n'as plus besoin de rester ici !
J'ai secoué la tête :
- Quoi ? Non ! J'étais libre, ici ! J'étais libre avant que vous ne m'enfermiez dans ma chambre ! J'étais libre avec le Maître !
- Oh, Alisone... Tu as probablement le Syndrome de Stockholm, ou même un Syndrome de Stress Post Traumatique...
Elle s'apprêtait à poser une main amicale sur mon genou, mais je me suis reculée en la corrigeant :
- Non ! Non ! Tish, tu... Tu ne comprends pas... Je... Le Maître m'a sauvé la vie... J'étais heureuse avec lui... Avec les Toclafanes ! C'étaient mes amis... Et ils ont tous disparu.
Tish plissa des yeux, elle allait répliquer, mais je ne lui en ai pas laissé le temps...
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J'ai sauté d'un bond de mon lit, je portais des ballerines blanches aux pieds, j'ai relevé le pan de ma robe et j'ai quitté ma chambre à toute allure. J'ai couru dans les couloirs que je connaissais désormais plutôt bien. J'entendis Tish hurler dans mon dos :
- ALISONE ! Attends, reviens !
J'accélérai ma course, la mort aux trousses, comme le jour où le Maître m'avait trouvé dans cette ruelle sombre. Je pensais à lui, mon cœur battait la chamade, je me sentais seule sans le Toclafane au-dessus de ma tête. J'ai continué de courir, je crois bien avoir bousculé Francine, la maman de Tish au détour d'un corridor. Je ne savais pas où je me dirigeais, mais j'y allais quand même.
J'entendais désormais plusieurs pas rapides dans mon dos, puis j'ai ouvert une porte au hasard en priant de toutes mes forces.
Cependant, je ne suis pas croyante et si Dieu existe, il n'a jamais été de mon côté...
La première chose que je vis en rentrant en trombe dans la salle, fut le Docteur et Martha Jones, qui se tenaient au-dessus d'une carte immense. Le Docteur se tourna vers moi, à la fois surpris et inquiet. Une fois que je compris mon erreur, j'ai bien sûr cherché à faire demi-tour en repassant par la porte, mais les bras musclés du Captain Jack Harkness, qui se trouvait juste derrière moi, m'agrippèrent pour me stopper dans ma fuite.
- Oh, pas si vite, Alisone.
- Non !
Je me débattais, mais Jack me retenait sans aucun mal, je n'étais qu'une brindille contre lui. Le Docteur glissa ses mains dans les poches de son pantalon, puis il se dirigea vers moi avec calme, pour me demander :
- Alisone ? Est-ce que tout va bien ?
Tish et Francine firent irruption dans la salle, lorsque je me suis mise à me débattre en hurlant :
- Non ! Pourquoi me retenez-vous prisonnière ?!
Le Docteur tiqua.
Jack réagit aussi en relâchant son étreinte et en révélant :
- Quoi ? Alisone, tu n'es pas notre prisonnière.
Mon cœur rata un battement, mes yeux brillèrent des larmes que j'essayais de retenir depuis trop longtemps déjà. Le Captain me lâcha totalement, mais Tish et Francine me bloquèrent la porte, ma seule sortie. Malgré ma voix tremblotante, je réussis à baragouiner :
- Où... Où est le Maître ? Please...
Martha s'approcha de moi et me dit la même chose que sa sœur quelques minutes auparavant :
- Tu es libre, tu n'as plus besoin de rester avec le Maître, Alisone.
Mon souffle se coupa, j'essayais pourtant d'expliquer :
- Non, non, vous ne comprenez pas. S'il vous plaît, où est-il ? Je veux seulement lui parler. S'il vous plaît...
Ils étaient autant interloqués que perdu, néanmoins le Docteur confessa :
- Viens avec moi, Alisone, je vais te conduire au Maître.
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Le trajet fut silencieux et calme, même si je sentais les coups d'œils que le Docteur jetait sur moi. Cependant, mon cœur ne semblait pas vouloir se ralentir lorsque, enfin, le Docteur s'arrêta devant une porte et, avant de l'ouvrir, il m'annonça :
- Le Maître est dedans. Il y a des gardes, juste au cas où.
Je plissais des yeux :
- Au cas où ? Que penses-tu qu'il compte me faire ?
Je n'attendis pas qu'il ouvre la porte, je l'ai fait moi-même pour la refermer rapidement derrière-moi.
La pièce était plutôt sombre, il y avait effectivement deux gardes armés, un à droite et un à gauche, tandis que devant moi, se tenait le Maître. Néanmoins, ma joie fut de courte durée, lorsque je compris qu'il se tenait derrière des barreaux en fer forgé de couleur ébène. Les lumières tamisées au plafond rendaient l'endroit plus angoissant encore. Lorsque le Maître m'aperçut, il s'est jeté sur les barreaux de sa cellule, enroulant ses doigts de toutes ses forces autour de ces derniers, et s'inquiétant :
- Alisone ? Est-ce que ça va ?
Mon cœur se serra. J'ai posé mes doigts tremblants par-dessus ceux du Maître, entourant les siens tout en me rapprochant au plus près des barreaux. Je pus voir le Seigneur du Temps, qui semblait épuisé au possible, il ne portait plus entièrement son costume, uniquement ses chaussures, son pantalon noir et sa chemise blanche, froissée et sale par endroit, ressortant de sa ceinture.
- Oh, Maître...
Cette fois-ci, je ne pouvais pas retenir mes larmes. À mesure qu'elles coulèrent le long de ma joue, le Maître passa sa main à travers les barreaux pour essuyer mes pleurs.
- Maître, que vont-ils faire de toi ?
Un voile de tristesse traversa le regard de mon amant, qui avoua avec peine :
- Le Docteur veut me garder avec lui dans son T.A.R.D.I.S.
- Quoi... Mais... Qu'est-ce qu'un T.A.R.D.I.S. ? Tout le monde en parle, je ne comprends pas...
- C'est un vaisseau, comme celui-ci, sauf que le sien peut voyager dans le Temps et dans l'Espace. Il veut m'y garder prisonnier, comme un animal de compagnie. Comme ses compagnes. Comme Martha Jones. Comme toutes celles avant elle.
Une nouvelle larme coula le long de ma joue. Je retenais mes sanglots, je luttais contre une énième attaque de panique.
- Non...
J'ai serré plus fortement mes doigts autour de ceux du Maître. Je pouvais voir le soulagement traverser ses yeux, mon toucher calmait ses tambours, sans que je ne comprenne pourquoi.
- Non... Comment... Qu'est-ce que je peux faire pour empêcher ça ?
Il secoua la tête.
- Tu ne peux rien faire... Personne ne le peut. Le Docteur a tellement d'alliés, des amis par millions. Je n'ai personne. À part toi, Love. Mais je refuse qu'il t'arrive quoi que ce soit.
- Je veux rester avec toi. Je n'ai nulle par où aller. Mes ennemis parcourent la Terre entière pour m'enfermer à nouveau.
Étrangement, le Maître sourit.
Il sourit de ce sourire si particulièrement espiègle. Je souris à mon tour, par mimétisme, en demandant néanmoins :
- Quoi ?
- Oh, Love... Je me rends compte à quel point nous sommes similaires toi et moi... Sûrement pour cette raison que... Que je...
Il se tut.
Son sourire disparut, puis il baissa son regard.
- Maître ? Que tu quoi ?
Lorsqu'il releva la tête et qu'il plongea ses yeux noisette dans les miens, je me rendis compte que ses pupilles brillèrent de larmes qu'il retenait lui aussi.
- Sûrement pour cette raison que je suis tombé amoureux de toi.
Mon cœur rata un battement. Mon souffle se coupa.
- I love you, Alisone...
- I love you, too. Master...
Il sourit.
Si les barreaux ne se trouvaient pas entre nous, nous nous serions embrassés.
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J'ai tiré les barres de fer vers moi, comme pour essayer d'ouvrir la cellule. J'ai secoué les barreaux sans parvenir à les bouger, bien évidemment. Les gardes s'agitèrent enfin pour m'invectiver et m'ordonner d'arrêter. En attendant ce boucan, le Docteur entra calmement dans la salle. Le Maître lâcha les barreaux et recula, par réflexe. La terreur tordait son regard pâle et son visage fatigué.
Pendant que le Maître ne quittait pas son ennemi des yeux, ce dernier glissa les mains dans les poches de son pantalon d'une façon nonchalante, comme il avait l'habitude de le faire, puis il s'approcha de nous, vers la cellule.
Il inspira profondément, avant d'avouer, en baissant les yeux :
- Je vous ai entendu...
Le Maître et moi, nous nous sommes jeté un regard interrogateur, lorsque le Docteur releva enfin la tête pour me scruter intensément :
- Alisone... Est-ce que c'est vrai ?
Je tiquai :
- Quoi donc ?
Le Docteur se rapprocha de moi. Je ne pouvais pas reculer, les barreaux de fer me labouraient déjà le dos. À seulement quelques centimètres de moi, un voile d'incompréhension traversa le regard du Docteur :
- Est-ce que tu l'aimes, Alisone ? Est-ce que tu aimes le Maître ?
Mon ventre se noua.
Je sentis les yeux du Maître se poser sur moi.
J'acquiesçai, en révélant à haute voix.
- Oui.
Le Docteur souffla et un silence pesant empli la cellule.
Enfin, le Seigneur du Temps sortit ses mains des poches de son pantalon, pour en glisser une dans l'intérieur de sa veste. Il agrippa son Tournevis Sonic. Le gadget argenté, comme celui du Maître, possédait cependant un embout bleu, et il mit l'arme en joug vers nous. Puis, toujours aussi calmement, il ordonna :
- Alisone, écarte-toi.
Je fis 'non' de la tête.
Une peur soudaine s'empara de moi, de fait, je me suis faufilée devant le Maître, devant les barreaux de la cellule, en suppliant :
- Non ! Docteur... S'il te plaît...
- Alisone, écarte-toi... répéta-t-il.
Je secouai la tête sans bouger d'un seul centimètre, tétanisée de la tête aux pieds.
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Soudain, je sentis les doigts du Maître attraper les miens à travers les barreaux. Il se trouvait juste derrière moi et il me chuchota :
- Obéis au Docteur, Love...
En me tournant vers lui, je découvris ses yeux terrorisés et son visage blême.
Tout en retenant mes sanglots, j'ai obéi en m'écartant lentement de la cellule. Le Maître tenait fermement ma main dans la sienne. Il ferma les yeux pour apprécier le calme avant que le Docteur n'active son Tournevis Sonic. J'ai fermé les miens pour ne pas voir le Maître mourir devant moi.
Le Docteur visa, puis il appuya sur son arme.
Un 'biiiiiiiiiiiiiiiiiip' strident retentit, une lumière bleue émana de l'embout du gadget et mon cœur s'arrêta de battre, mes paupières toujours closes.
Après un long moment, je pouvais toujours sentir les doigts du Maître serrant les miens et un 'clic' se fit entendre. Soudain, en ouvrant un œil, je compris que la porte de la cellule venait de se déverrouiller.
J'ouvris entièrement mes paupières, passant mon regard de la porte ouverte, au Docteur, qui rangeait son Tournevis Sonic dans la poche interne de sa veste. À son tour, le Maître passa son regard étonné de moi à son ennemi, et inversement. Sans trop comprendre, il poussa la porte de la cellule qui s'ouvrit en grand devant nous.
Néanmoins, il leva ses yeux toujours terrifiés vers le Docteur, en bégayant :
- C'est... C'est un... Piège ?
Le Docteur croisa les bras sur sa poitrine et nous scruta le Maître et moi, en avouant avec mystère :
- Non. C'est un test.
Lentement, avec appréhension, le Maître glissa hors de sa cellule pour ensuite me prendre rapidement dans ses bras. Malgré la présence du Docteur, le Maître m'embrassa amoureusement et profita du calme dans sa tête, moi qui pouvais ralentir ses tambours sans ne savoir comment.
Après notre embrassade, le Maître me garda près de lui et toisa son Némésis, avec effroi et incompréhension :
- Qu'est-ce que tu comptes faire de nous, maintenant ?
J'ai remarqué qu'il avait dit 'nous' et pas 'moi', cette fois-ci.
Le Docteur esquissa un sourire et confessa :
- J'aimerais t'accorder une seconde chance... Avec Alisone...
Je tiquai.
Un ange passa.
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- Quoi ? demandais-je, perdue et perplexe.
Le Maître railla malgré lui en direction du Docteur :
- Oh please, tu ne vas pas me faire croire que tu me libères ? Que tu me laisses partir avec Alisone ?!
- Well...
- J'en étais sûr ! s'énerva mon amoureux.
Le Docteur souffla et, tout en se dirigeant vers nous, expliqua calmement :
- Je ne suis pas fou au point de te rendre ton Tournevis Laser et ton T.A.R.D.I.S. Mais, je consens à te laisser 'The Valiant'. Sans tes esclaves, évidemment.
Le Maître plissa des yeux, attendant une prochaine fourberie de la part de son homologue Seigneur du Temps.
- Pourquoi ? lâcha le Maître, aussi troublé que moi.
Le Docteur sourit :
- Si tu aimes Alisone autant que je le pense, tu peux sûrement devenir une meilleure personne.
Le Maître me jeta un coup d'œil complice puis baissa la tête, en demandant timidement :
- Elle calme les tambours... Comment ça se fait ?
Le Docteur secoua la tête :
- Aucune idée... Cependant, je pense sincèrement que rien n'arrive par hasard. Ni votre rencontre, ni le fait qu'elle peut calmer tes tambours.
Le Maître me jeta un nouveau regard perplexe. Puis, il se tourna derechef vers le Docteur pour essayer de comprendre ce qu'il avait réellement à l'esprit :
- Tu souhaites vraiment me laisser 'The Valiant' ? Pour Alisone et moi ?
Le Docteur ébouriffa encore plus ses hauts cheveux en bataille, tout en révélant :
- Well... De ce que j'ai compris, Alisone a des ennemis sur Terre et toi, tu en as partout dans toutes les galaxies. Il vaut mieux vous laisser en sécurité ici. Pour l'instant.
- 'Pour l'instant' ? reprit mon amant.
Le Docteur souffla un coup puis s'avança lentement vers nous, pour répondre avec sincérité :
- Tu es très intelligent, Maître, tu le sais. Tu pourrais être tellement meilleur, tellement plus. Plus grand, plus fort, plus merveilleux encore. Si seulement tu préférais voyager dans l'Univers au lieu de vouloir le dominer...
Le Maître baissa une nouvelle fois les yeux vers le sol.
Cependant, le Docteur poursuivit :
- Reste sur ce vaisseau avec Alisone tout le temps qu'il faut. Tout le temps qu'il te faudra pour comprendre, grâce à elle, que les Mondes n'ont pas besoin d'être détruit ou diriger... Simplement d'être vu.
Le Maître serra plus fort sa main dans la mienne.
Il m'a souri.
Un sourire que je lui ai rendu, jusqu'à ce que le Docteur disparaisse avec ses gardes, pour enfin nous laisser seuls...
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THE END
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« I don't feel like coming down. »
J'ai eu BEAUCOUP de mal à écrire cette histoire. Non pas à cause du thème, j'ai écrit bien pire...
Ni à cause d'un manque d'idées, j'en ai toujours trois millions qui explosent comme du pop-corn dans ma tête. (Merci mes 'Alters', pour ça...)
Non, l'imagination et la motivation ne sont pas les fléaux qui m'empêchent d'écrire...
Mais la frustration...
Oui, c'est difficile de se mettre au travail lorsque je sais que personne, sauf une personne qui se reconnaîtra, me lira.
Une seule lectrice.
Pour des heures et des heures de travail. Parfois, j'arrive à passer outre, mais parfois, non.
J'ai toujours cette voix dans ma tête qui hurle :
'Non, ça ne sert à rien ! Tout le monde s'en fiche ! Personne ne te lit ! Tu es invisible !'
C'est vrai, bien sûr.
Parfois, la voix est recouverte par celles de Mick et du Maître.
Mais parfois elle prend tout l'écho dans le Palais Mental.
Et durant ces longues périodes, je ne peux plus écrire...
Et ça me tue...
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