NDA 28/07/23: Bonsoir à tous et merci d'être encore là pour me lire, ça me touche énormément. Un grand merci aux lecteurs habituels, mais aussi aux nouveaux !

SunsetNo, Anya Krysten, Katymyny, Estella Prime et tous ceux qui suivent l'histoire sans un mot ! C'est grâce à vous que je suis toujours plus motivée !

Une petite note, parce que je ne peux pas vraiment corriger les chapitres précédents à ce sujet sans les virer, et vous avez posté des reviews sur ces derniers.

Le double de Cédric se nomme Fabien, et pas Clément. Clément était une possibilité, mais que je n'ai pas gardé. Le nom m'a échappé à quelques reprises, d'où les erreurs. Voilà.

Aussi, on passe au premier chapitre qui sera presque exclusivement en point de vue extérieur. Il y aura toujours des petits passages où Sacha donnera son ressenti, bien sûr, mais ça permettra vraiment d'offrir une vue d'ensemble.

Je vous souhaite tout de même une bonne lecture à tous ~


Chapitre 20 : Les liens déchirés par fierté.

Sacha était revenue épuisée de son après-midi à la banque. Le passage en wagon l'ayant laissé deux fois sur les rotules, elle avait ensuite dû se prêter à un autre test. Un test auquel elle n'aurait jamais pensé, mais Argus Rusard, oui.

Elle avait fini par comprendre pourquoi il était si connu à la banque de Gringott. Après sa déchéance et son départ de la famille de sa défunte épouse, et avoir obtenu le poste de concierge, il n'avait plus jamais dépensé un seul galion. Son salaire, pas spécialement mirobolant à coté de certains, mais assez important pour un simple concierge, s'accumulait sans discontinuité depuis 32 ans.

Il gagnait une trentaine de galions par mois, pas de mois libre, puisqu'il travaillait aussi en été, et sa fortune s'élevait à 11 mille et 500 galions, sans compter les intérêts levés par la banque à chaque fin d'années. Tout ça pour dire que ce cracmol que personne n'aimait gardait une petite fortune. Et puisqu'il gérait, au passage, les réserves des elfes et en faisait les comptes pour le professeur McGonagall, il était aussi particulièrement retors lorsqu'il s'agissait d'argent, ou de faire valoir ses droits.

Tout ça pour dire qu'il avait convaincu les gobelins de faire passer à Sacha un test de propriété artistique. Frozen était un morceau qui circulait sur toutes les radios sorcières, et était utilisé par tous. Il fallait qu'elle puisse bénéficier de cet envoi par un tiers d'une manière ou d'une autre. Et si le ministère de la magie aurait évidemment refusé de la laisser breveter la chanson, puisqu'elle était encore mineure à leurs yeux, la loi de Gringott sur les œuvres d'arts primait sur celles du ministère.

Il n'y avait pas d'âge pour être un artiste chez eux.

Alors, malgré sa hantise de chanter devant des gens, puisqu'elle ne supportait pas d'être écoutée directement depuis le fameux incident à l'opéra de sa ville, elle s'était forcée. Et pas d'alcool pour la désinhiber ce soir-là. L'énorme corne en lapis-lazuli sur laquelle Sacha avait dû poser sa main pour chanter l'avait analysée et comparée à la version radio de Frozen.

La magie gobeline était vraiment particulière, mais bien plus efficace que celle des sorciers. Dans ce cas-précis, la pierre avait analysé les vibrations de ses cordes vocales en chantant, et comparé aux vibrations magiques produites lors de la diffusion du morceau. Comme l'ensemble se faisait magiquement, il ne pouvait pas y avoir de fraude.

Frozen était désormais enregistrée sous ce nom, et reconnue comme la propriété de Sacha O'Nigay. Quiconque l'utilisant à nouveau, devrait alors payer une taxe à la banque, qui reversait le tout sur le compte récemment ouvert.

Et comme les gobelins ne laissaient jamais passer une occasion de prendre de l'argent, maître Barbald et maître Tusroc - qui s'occupait de l'authentification des artefacts et œuvres d'arts - avaient mis en place un enchantement qui se déclenchait dès qu'une personne voulait utiliser la chanson nouvellement brevetée. La RITM avait donc reçu, moins de dix secondes après le sort, une farandole de courriers pour la taxe en question.

Ça avait été dur, et l'avait mise bien mal à l'aise, mais Sacha n'allait pas cracher sur cette rentrée d'argent supplémentaire.

À présent sous la douche, elle se permettait enfin de souffler un coup. Rincer la sueur ne permettait cependant pas de faire partir l'inquiétude et ses préoccupations. Ce compte était un véritable premier pas vers l'émancipation, et avec, tout l'enfer que ça allait être. N'être personne, tout en ayant une identité bien précise, dans un monde plus fermé que le ku klux clan, ça allait donner.

Rester dans le monde sorcier ne serait pas possible, une fois émancipée, parce que la famille de l'autre Sacha la chercherait. Elle serait bien sûr, obligée de s'y rendre tant qu'elle n'aurait pas trouvé un moyen de rentrer dans son monde, mais pour un logement, elle regarderait coté moldu, c'était évident. Vivre chez les moldus, était pour elle plus évident.

Et pendant que Sacha angoissait toute seule sous l'eau, quelque chose d'autre était en train de se produire, et n'allait pas tarder à lui tomber dessus.

Fred avait traversé tout Poudlard en long, en large et en travers. Dès qu'il avait appris le retour de Rusard - qui l'avait engueulé pour avoir couru dans les couloirs - le rouquin s'était mis en tête de visiter tous les coins fétiches de Sacha. La cuisine, les arcades près de la cour, la bibliothèque, et bien sûr, l'alcôve du 3e étage avec vue sur le parc. Mais elle était introuvable. Il n'avait pas non plus trouvé Luna, alors il s'était rabattu sur l'idée qu'elle était peut-être dans l'antre du dragon.

Et Bingo, puisqu'il entendait l'eau couler derrière la petite porte cachée par la table de chevet. Était-il rassuré de la savoir en vie ? Oui. Savait-il ce qu'il allait lui dire ? Absolument pas. Et son cœur tambourinait encore dans sa cage thoracique. Comment pouvait-on annoncer à une ex qui ne se souvient de rien, que son nouveau copain est un mage noir ? Il n'y avait pas de manuel pour ce genre de choses.

Profitant d'un moment de répit, avant de devoir s'expliquer, il s'assit sur le bord du lit, se prenant la tête entre les mains. Il était paumé par toute cette situation. D'ordinaire, Fred aimait rire, préparer des farces à plus ou moins grandes échelles, aider ses camarades à sécher les cours - de préférence en usant de leurs créations, et faire des paris avec tout le monde. Il aimait jouer au Quidditch, fracasser les serpentards, regarder les jolies filles…

Une jolie fille.

Qui n'était pourtant plus celle qu'il avait embrassé et touché pendant des semaines. Le rappel fut comme un seau d'eau froide sur sa tête. Cette Sacha sous la douche n'était pas une femme ayant perdu la mémoire. Il le savait. Sa peau, son parfum, son être, tout était différent. Elle n'avait que l'apparence de Sacha O'Nigay, et le nom… Ce qu'il ne pouvait pas expliquer, malgré les clignotements sur la carte du maraudeur qu'ils empruntaient à Harry ces derniers temps.

L'autre aussi, son nom clignotait sur la carte. Est-ce que cela signifiait que leur identité était cachée par un sortilège plus puissant que celui des maraudeurs ? Fred n'avait pas envie d'imaginer que ses idoles puissent avoir été dupées. Puis… Qui voudrait porter le même nom que celui du mage noir ? C'était insensé !

La porte s'ouvrit. Le rouquin releva la tête, prêt à s'excuser d'être venu ici sans prévenir, mais ce n'était pas celle de la salle de bain qu'on venait de pousser. Une robe de sorcière noire était repliée sur le bras de l'intrus, de haute qualité, et arborait un blason vert et argent. Fred s'empourpra d'abord, avant de sortir sa baguette par réflexe. L'autre fit de même.

« Qu'est-ce que tu fiches ici ? »

« Je pourrais te retourner la question, Weasley. Lequel es-tu d'ailleurs ? »

« Va te faire foutre, Malfoy. » Le blond leva un sourcil avant d'étirer un sourire moqueur.

« C'est tout ce dont tu es capable ? C'est pauvre comme insulte… Mais je suppose que c'est associé à toute ta famille. »

La porte s'ouvrit encore. Cette fois, c'était bel et bien la salle de bain. Mais Sacha, plongée dans ses pensées, n'avait pas perçues la présence des deux jeunes hommes. Aussi, elle débarqua enroulée dans une serviette qui couvrait juste assez sa poitrine et le haut de ses cuisses. La chevelure encore ruisselante d'eau, elle s'arrêta sur le palier, serra la serviette qui couvrait son corps d'une main, et fixa, ahurie, Fred, puis Draco.

« Fred, pourquoi tu es là ? »

« Pourquoi je suis… ? » Il ne termina pas sa phrase. La chappe de plombs qu'il ressentait lui tomber dessus l'avait coupé dans son élan.

Pourquoi lui, il était ici ? Malfoy ne gênait pas ? Et sa tenue… Et lui qui était si décontracté. Il en oublia la raison de sa venue. Après tout, pourquoi la protéger ? Hein ? Elle faisait venir Malfoy pendant sa douche, Voldemort au bal, tout comme elle avait préférée Zabini à lui. Elle aimait les hommes dangereux, mauvais, à n'en plus douter. Et ça lui fit mal. Il n'était qu'une erreur de parcours !

« Je m'inquiétais pour toi, voilà pourquoi je suis là. Mais visiblement j'ai été trop con une fois de plus. » Il parlait désormais d'un ton froid, et sentir sa rage n'était pas difficile. Amuse-toi bien, avec Malfoy. Mais ne m'adresse plus… » Malfoy voulut lui jeter une nouvelle pique, et Sacha dire quelque chose, mais tous furent coupés.

Une fois encore, la porte s'ouvrit, celle qui menait à l'infirmerie. Sauf que cette fois, c'était le dragon en personne.

« Par Merlin ! Miss O'Nigay, puis-je savoir pourquoi deux adolescents de sexe masculins se trouvent dans votre chambre ? Et pendant que vous êtes… »

« Si vous étiez arrivées quelques secondes plus tard, j'aurais peut-être eu le temps de le découvrir. » Affirma Sacha en resserrant le bord de sa serviette.

Mais c'était une mauvaise idée de provoquer de cette manière. Une très mauvaise. Et Poppy n'aimait pas du tout ce qu'elle voyait. Bien sûr, elle n'avait pas toutes les cartes en mains, pourquoi Sacha était à moitié nue devant eux, pourquoi eux étaient ici, dont l'un avec sa robe de sorcier en moins. Non. L'infirmière avait sauté sur les conclusions les plus logiques. Trois adolescents dans une chambre sans surveillance. La folie des hormones, elle savait ce que c'était.

« Je vais de ce pas prévenir vos directeurs de maison, ne bougez pas ! »

« Quoi ? Mais on a… » Mais Draco n'eut pas le temps de finir que trois sorts leur foncèrent dessus à la vitesse de l'éclair. Deux mauves, et un gris. Et sur ce dernier acte, elle claqua la porte.

« Et merde. » Cette fois, le juron était féminin. « Elle nous a tous bloqués, qu'est-ce qu'elle s'imaginait ? »

« Probablement ce que Weasley a cru en premier lieu. »

« La ferme, Malfoy. » Fred tourna la tête vers Sacha, les joues désormais roses en comprenant qu'il s'était fourvoyé. Du moins il était en train de l'espérer. Sauf que quelque chose clochait, avec la brunette. « Une minute. Je pensais que les sorts faisaient de moins en moins d'effet sur toi ? »

« Tiens, c'est vrai, pourquoi tu es bloquée ? »

« Parce que Pomfresh est bien plus intelligente que la quasi-totalité des sorciers. »

« Je vais essayer de ne pas prendre ça comme un outrage à ma personne, et simplement me dire que c'est une logique abstraite. » Commenta le blond. Mais Fred fit plusieurs signes de la tête, le seul bout de lui encore capable de bouger. Ce qui était un miracle, vue sa position, jambes écartées en un pas, le dos vrillé.

« Elle a solidifié ma serviette. Mes mains sont coincées dans les plis et je ne peux plus bouger. Voilà comment elle a fait. »

« C'est… »

« Vicieux. Serpentard même. Parce que tu restes à moitié nue devant deux adolescents de sexe masculins. »

« T'as fini ? Sérieusement, Malfoy, je ne sais pas comment tu fais pour te supporter… » Elle tiqua sur sa propre phrase, avant de froncer les sourcils et secouer la tête.

« Et moi qui venais gentiment te dire que j'avais fait tout ce que tu m'as demandé… » Et avec un sourire narquois, il ajouta en fixant le rouquin. « Et même plus… » Fred serra les poings, et s'époumona une fois encore.

« Qu'est-ce que tu sous-entends, Malfoy ? Je te jure que… »

Mais Sacha commençait à en avoir marre. Elle avait mal à la tête, elle était fatiguée, affamée - elle aurait tué pour un bol de soupe mixte comme elle se faisait à la fac - et les garçons commençaient sérieusement à lui prendre la tête.

« Ça suffit ! » Ils se turent, frissonnant, tandis que la pièce perdait quelques degrés de manière inconnue. « Qu'est-ce que tu voulais dire, par plus encore, Malfoy ? » Le garçon, toujours digne malgré la corde invisible qui le retenait prisonnier, inspira longuement, avant de faire son rapport.

« J'ai raccompagné personnellement Luna à la salle commune de Serdaigle après t'avoir vu tout à l'heure. Tu avais raison sur tes anciennes copines, donc je me suis permis de récupérer ses affaires de cours, les remettre en état, et punir les coupables. »

Si Fred était soulagé d'apprendre que Malfoy n'avait absolument aucun lien proche avec Sacha, la culpabilité vint se loger dans son ventre. Ginny les avait prévenus, comme ils étaient introuvables, Sacha avait demandé de l'aide à Malfoy pour protéger la Serdaigle de 3e année. Et ce dernier avait fait de l'excellent travail.

« Punis les coupables ? Qu'est-ce que tu as fait ? »

« Rien qui ne soit nécessaire que tu saches. Mais elles ne recommenceront pas immédiatement. »

La brune voila son regard, avant de soupirer de soulagement. Luna était en sécurité pour la nuit, c'était déjà ça.

« Merci… Malfoy. »

« Ne me remercie pas, ce n'était pas gratuit. J'attends ce que tu me dois. »

« Et on peut savoir ce que tu lui dois ? » La colère reprenait ses droits sur Fred, qui n'aimait vraiment pas les insinuations du serpentard. Avait-elle dû offrir ses faveurs pour qu'il protège son amie ?

« Des informations. Calme-toi, Weasley, je ne vais pas me jeter sur ta petite amie. J'ai des standards plus élevés quand il s'agit de choisir une femme. »

« Sérieusement, vous me gonflez tous les deux. Malfoy, on parlera plus tard. Fred… Ecoutes, je ne sais pas ce que tu t'es dit à propos de moi, mais je vais bien. J'étais juste sortie pour affaire, et je ne voulais pas laisser Luna seule. Maintenant, non, je ne couche pas avec Malfoy ! »

« Salazar m'en préserve ! »

« Ta gueule ! » L'écho des deux voix, Serdaigle et Gryffondor, fit rouler des yeux au blond.

Mais la conversation dû s'arrêter là. La porte s'ouvrit à la volée, dévoilant le visage rouge de colère de McGonagall. Derrière, bien entendu, se tenait Rogue, et caché par la cape de ce dernier, le petit professeur Flitwick. Sacha soupira par avance. Elle commençait à en avoir marre, des dramas de ce genre à son sujet. Mais comme tous les adultes de cette foutue école la prenait pour une adolescente débile, c'était à prévoir.

Elle allait gagner la réputation d'être une fille facile. Comme au lycée. C'était risible.

oOoOoOo

Il fut décrété que Sacha était visiblement en meilleure santé que ces derniers mois et pouvait donc parfaitement retourner dans son dortoir. C'était un moyen détourné pour la priver d'une chambre solitaire, et ainsi bloquer le passage des garçons. Rogue avait lutté de toutes ses forces pour la garder à l'infirmerie, mais elle ne faisait plus assez de malaises, depuis Yule, pour qu'on appuie sa demande. Et même l'argument pour la faire changer de dortoir, et ainsi ne pas être en compagnie de Pamela Alton et Helen Dawlish, fut repoussé par le directeur.

Les trois coupables de l'histoire écopèrent de retenues, séparées, bien sûr, on n'allait pas prendre le risque de les remettre ensembles !

Et la rumeur comme quoi Sacha O'Nigay sortait avec deux garçons en même temps, qui plus est, conscients de ce fait, traversa toute l'école avant même que ses affaires ne soient toutes dans le dortoir. La jeune femme essaya de penser au fait que son retour dans les dortoirs allait sûrement calmer les deux pestes au sujet de Luna, encore plus que le passage de Malfoy en force dans leur salle commune.

Elle avait fini par apprendre ce qu'il avait fait pour obtenir le calme, et ça l'avait fait sourire. Ce type ne jurait que par son père, et des fois, c'était particulièrement utile. Les deux filles ayant déjà reçu une exclusion temporaire, et plusieurs retenues, il n'aurait pas été difficile pour Lucius Malfoy de les faire expulser définitivement.

Le problème, cependant, à présent qu'elle était de retour chez les Serdaigles, c'était l'ambiance. On la traitait comme une marie-couche-toi-là, stupide et inutile. Et les autres maisons n'étaient pas en rade à ce sujet. Fred n'avait pas été nommé, bien entendu, mais on savait qu'un Gryffondors avait été débauché, aussi, les lions lui tournaient le dos avec encore plus de force qu'avant. Les Serpentards, bien que n'ayant pas de haine personnelle à mettre sur son dos, ne l'appréciaient toujours pas.

Quant à Poufsouffle, si Cédric s'était montré plus gentil et protecteur auparavant avec elle, il grimaçait de nouveau. Sa cousine était une trainée. Voilà ce qu'il voyait. Et lui, en tant que champion du tournoi des quatre sorciers, ne devait pas être vu en sa compagnie. Pour autant, il restait à disposition - en cachette - pour parler de leurs avenirs respectifs. Il lui envoyait même quelques chocolats de temps à autre, venant de sa mère.

Poussant la porte du bureau de Rusard sans ménagement, la brune - qui commençait à retrouver des racines blondes sur le haut de sa tête - se posa sur le fauteuil des invités, croisa les bras sur l'office, et y déposa sa tête. Là-dessus, un hurlement étouffé se fit entendre.

« Tout Poudlard te prend désormais pour une fille de petite vertu… Comment tu te débrouilles pour arriver à un tel résultat en si peu de temps ? » Elle n'entendit aucune compassion de la part de son ami, seulement une légère stupéfaction. Comme s'il n'y croyait toujours pas.

« La poisse. La poisse, la poisse, et encore la poisse. »

« Etait-ce aussi le cas, dans ton monde ? »

Argus évoquait peu souvent, les similitudes et différences, entre son monde et celui de Sacha, pour éviter de la rendre triste. Mais parfois, c'était plus fort que lui. La demoiselle poussa un long soupir, avant de redresser un peu la tête, la gardant sur le côté. À ses pieds, Miss-Teigne se mit à ronronner, espérant rassurer sa petite maitresse.

« Disons… Pas aussi violent. Mais oui… Après avoir refusé les avances d'un garçon, en seconde, je me suis retrouvée… Avec le mot pute précédent mon prénom, et la réputation d'être une fille qui couche avec tout ce qui bouge. » La grimace du cracmol déforma son visage.

« Dégoutant. »

« C'est toujours plus facile de croire une personne qui est confiante, qu'une fille bizarre, un peu isolée… C'est juste… ça ne faisait même pas une heure qu'on était rentré… Je n'avais pas besoin de ça… Je voulais juste prendre une douche, manger et me coucher. »

Là-dessus, Argus comprenait parfaitement l'épuisement moral subit. Il avait lui-même reprit quelques élèves qui lançaient des remarques ignobles dans son sillage. Et s'il ne pouvait pas véritablement punir les fautifs, la menace de prévenir leur directeur de maison était assez forte, pour faire taire les malotrus. Du moins devant lui.

« Comment ça se passe, dans les dortoirs ? »

« Tu veux dire, est-ce que j'ai envie d'étriper ces filles ? Oui. Est-ce que je dors ? Non… Presque pas… Je ne suis pas en sécurité là-bas, nulle part en fait. Mais c'est pire. J'envisage de dormir dans la salle commune, ça m'éviterait d'avoir les autres sur le dos si je refais un rêve prophétique. »

« Hm… Le souci, c'est que ça laisserait moins de barrière si tu te retrouves entre deux consciences. »

La jeune femme fit la moue, décroisa les bras et se redressa, avant de tapoter ses cuisses. Immédiatement, la chatte écaille de tortue lui grimpa dessus et se roula en boule, ronronnant de plus belle.

« Tu veux dire, si je me balade de nouveau nue dans les couloirs ? » La grimace du concierge revint marquer son visage.

« Oui. Entre autres. Tu ne peux pas essayer de changer de dortoirs ? »

« J'ai essayé… Enfin. Le professeur Rogue a essayé de me faire changer. Mais le directeur a dit non. Alors c'est non. »

Le vieil homme se frotta le menton, avant de regarder la pendule qui était accroché sur sa gauche. La première fois qu'elle avait sonné pour l'heure, le coucou qui en avait jaillit avait fait peur à la jeune femme, qui avait éjecté la chatte de ses genoux avant de se mettre à rire nerveusement sous les feulements mécontents.

« Je vais probablement regretter ce que je vais dire mais… Et si tu changeais quand même ? Si tu échangeais avec une élève plus jeune, par exemple, afin d'être en compagnie de miss Lovegood ? D'une part, tu pourrais protéger ses affaires, et de l'autre, elle pourrait veiller sur tes nuits agitées ? »

« Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait d'Argus Rusard, l'homme le plus à cheval sur le règlement qui soit ? » Le vieil homme roula des yeux, mais étira un maigre sourire.

« Je suis plus vieux, et plus sage. Et puis, je tiens à ce que les élèves, tous les élèves, soient en sécurité dans l'école. Ni miss Lovegood ni toi, ne l'êtes, dans vos dortoirs, pour le moment. » Les coudes sur le bureau, la tête au creux de ses mains, Sacha soupira de plus belle.

« Il faudrait qu'une élève de 3e année accepte de prendre ma place. Et je ne suis pas vraiment très populaire en ce moment, alors… »

« Justement. Utilise-le ? » Proposa Argus, en servant deux tasses de thé.

« Comment ça ? »

« Est-ce qu'une élève de 3e année souhaiterait devenir plus populaire ? Devenir amie avec tes camarades de dortoirs ? Cette élève dira certainement oui pour changer avec toi, ainsi. » Les yeux noisette restèrent ronds comme des soucoupes, devant l'idée du cracmol.

« Mon dieu, Argus, tu es un génie ! » Le vieillard eu un sourire plus prononcé, et tendit une tasse à sa comparse.

« Je sais. Maintenant bois ton foutu Earl Grey, que Nora me l'envoie exprès pour que je te le prépare, depuis ton retour à Serdaigle. »

Sacha eu un grand sourire, et s'empressa de porter le breuvage à sa bouche, savourant l'extrait de bergamote qui s'envolait dans la brume de saveur. Nora, la petite elfe, n'avait pas apprécié que sa protégée soit renvoyée dans la fausse aux lions. Enfin, aux aigles. Aussi, elle mettait un point d'honneur à faire apparaître de plus en plus de thé, chez Argus, pour qu'il puisse l'accueillir comme il se doit, lors de leurs rendez-vous quotidiens. Elle ajoutait à cela, des cookies aux pépites de chocolats et noisettes, ainsi que des spéculoos, sous conseil de la demoiselle, et qui plaisaient désormais énormément à Rusard.

Quant au vieil homme, il était bien plus vivant que jamais. Plus chaleureux aussi, en privé. Il se montrait ouvert, sérieux, et particulièrement assidu dans les recherches sur les mondes parallèles et le druidisme. Il avait une piste, d'ailleurs, mais il préférait en savoir plus, avant d'en parler à la jeune femme. Les faux espoirs n'étaient pas les bienvenus pour elle.

« J'ai rendez-vous avec ton professeur de potion, tout à l'heure. » Lui informa-t-il. Sacha s'étouffa avec son biscuit trempé de thé.

« Pourquoi donc ? »

« Pour ta sécurité. Nous ne sommes pas nombreux à avoir vu que tu avais quelques… Soucis de sommeil et de magie réels. Il s'inquiète sincèrement, et il a visiblement compris que moi aussi. »

« Aïe… Tu me demandes quoi lui dire, c'est ça ? »

« C'est ça. Il va bien falloir en parler à un autre adulte que moi, à un moment donné… » Les yeux terrorisés de la jeune femme lui firent reformuler sa phrase. « De ton émancipation, Sélène… Pas de ton statut d'héritière. Je ne suis pas fou au point de te vendre. »

« Désolée… Moment de stress. »

« J'ai remarqué. Non. Ton émancipation devra être de toutes façons, signée par une figure d'autorité issue de l'école où tu étudies. Un professeur minimum, quatre seraient mieux. L'avantage d'un directeur de maison, c'est que d'un point de vue juridique, il compte pour deux, même si ce n'est pas celui affilié à la tienne. »

« Je vois… »

« Tu n'aimes pas le professeur Rogue. » C'était un constat qu'il s'était fait depuis longtemps maintenant.

« Pas vraiment… Disons que je sens que mon cas l'intéresse, et ce n'est pas très bon signe… »

« Parce que c'était un mangemort ? » Ce rappel lui fila la nausée. Un mangemort… Il y en avait un parmi les professeurs, et il ne fallait surtout pas qu'il comprenne sa différence avec les autres élèves. Parce que celui-là, contrairement au professeur Rogue, ou à Karkaroff, était vraiment dangereux.

« Pas… Non. Pour être honnêtes, là-dessus, ce n'est pas lui qui me fait peur. Mais qu'une personne aussi puissante et intelligente que lui s'intéresse à ma situation, ce n'est pas bon. Si le directeur lui-même apprenait ce que je suis… »

« Tu ne penses pas que tu dramatises un peu ? Ce n'est pas un monstre non plus, même s'il aime tout contrôler dans l'école, il ne te fera pas de mal. »

« Tu ne sais pas ce que je sais… Crois moi, si jamais le directeur l'apprend, ce serait… » Elle ne termina pas sa phrase, mais Argus connaissait déjà la réponse.

« Sur une échelle de 1 à dix, sachant que le 1, c'est que tout va bien, et le 10, on va mourir dans d'atroces souffrances. Où places tu la découverte de ton cas par le professeur Rogue ? » C'était une question qu'il lui posait de plus en plus fréquemment, pour la rassurer, d'abord, mais aussi pour pouvoir mettre des limites à leurs plans.

« Pfff… Je dirais… 7… » Argus pâlit.

« Et pour le directeur ? »

« 13. » C'était bien au-dessus de la limite.

« Je vais voir avec lui… Naturellement, il a connaissance de tes troubles du sommeil, même s'il n'en connaît pas l'origine. Ton changement de dortoirs caché sera appuyé je pense. Sans compter qu'il fera des rondes plus près, aussi, au cas où. » Il prit une gorgée de thé. « Est-ce que ça te conviendrait ? » La brune hocha la tête.

« Oui… En même temps, il me surveille, autant que ce soit toi qui lui parles, moi ça ne passerait pas. »

« Et pour Malfoy ? » Sacha releva la tête un peu brutalement.

« Malfoy ? Quoi ? Pourquoi ? » Le vieil homme leva un sourcil intrigué.

« Je pensais à Madame Malfoy, qui t'a fait parvenir sa carte d'avocate… Tu as fait quelque chose à son fils ? Que tu perds tous tes moyens ? » la brune rosit, avant de secouer la tête.

« Non. C'est juste… Je lui ai promis une information en échange d'un service qu'il n'a plus réclamé depuis le carnage de samedi. »

« Donc, tu t'inquiètes… Que voulait-il savoir ? »

« Qui est Meleth nin… » Il n'eut pas besoin de plus pour comprendre pourquoi la jeune femme était à fleur de peau, au sujet du serpentard.

Si seulement, il n'y avait qu'avec lui, que c'était tendu.

Depuis l'affaire trouple de l'infirmerie, Fred non plus, ne lui adressait plus la parole. Il agissait encore plus bizarrement, même. Certes, les jumeaux ne la fuyaient plus autant, mais lorsqu'il daignait lui répondre - puisqu'il était décidé à l'ignorer autant que possible - c'était avec froideur.

Sacha avait conscience qu'elle n'avait pas encore trouvé de cadeaux de noël à hauteur du sien, et refuser totalement de lui parler de ce que Malfoy était venu demander, le lendemain de leur altercation, ne lui avait pas plu. Il avait pris ça pour un foutage de gueule, un manque de confiance flagrant.

Fred était trop fier pour admettre que ça l'avait blessé qu'une fille aussi incroyable qu'elle, aussi vraie, puisse être plus proche de Malfoy, que de lui. Il était venu par inquiétude, pas par intérêt, contrairement au serpent. Et c'était à lui qu'elle avait demandé des comptes. Elle n'était même pas curieuse de savoir pourquoi il s'était inquiété pour elle. Rien. Alors, au lieu de lui dire l'identité de son partenaire de danse au bal, il s'était tut.

Et maintenant, ça le rongeait de l'intérieur. Mais au lieu de s'excuser, et de dire vraiment ce qu'il avait sur le cœur, il l'envoyait bouler lorsqu'elle essayait de communiquer. Plusieurs fois, il avait même envoyé George à sa place. C'était ainsi qu'il avait compris que Sacha n'avait pas besoin de les voir tous les deux pour les reconnaître. Elle savait. Là encore, c'était un mystère non résolu.

Assis sur le canapé de la salle commune des lions, Fred jouait avec sa baguette, pendant que George et Lee discutait de leur nouveau projet. Dans leur dos, papotant avec Katie et Alicia, Ginny lui jetait fréquemment des coups d'œil assassin. Il savait très bien pourquoi. Elle le tenait responsable du danger encouru par Sacha. Et depuis mardi, en, fait, lorsqu'il avait admis de pas lui en avoir parlé, elle menaçait de le faire elle-même.

Il soupira, avant de répondre machinalement à son reflet, et leur meilleur ami, sur comment améliorer le goût de leur crème canari. L'idée d'un caramel sur fond de vanille le tentait bien, mais un goût plus surprenant pouvait aussi être de mise.