Chapitre 6 : Different Paths You Might Take
Legolas ne tarda à prendre congé de Dame Miredhel. Il était encore tôt, et il avait promis de revoir Celeborn et d'autres elfes lors d'un conseil. Approchant des appartements de Celeborn, il pouvait déjà voir, à travers les portes ouvertes, un grand nombre d'elfes rassemblés. Il en reconnut certains ; mais pour beaucoup d'entre eux, ce ne fut pas le cas. Celeborn rappela la réunion à l'ordre, et Legolas balaya du regard l'assemblée. Gilgafier et Gilfier, assis à côté de Celeborn, près du centre de la salle, sous trois fenêtres en forme d'arches. Dame Galadriel illuminait la gauche de Celeborn.
Même dans l'après-midi chaud et ensoleillé, elle semblait émettre de la lumière. Legolas ne pouvait pas s'empêcher de se perdre dans ses yeux, d'un bleu plus foncé que les siens, obscurcis par le passage des années. Haldir se tenait légèrement en arrière, à la gauche du Seigneur et de la Dame, de manière protectrice. Farothin était présent ainsi que les frères Belegil et Sulindal. Legolas aperçut Eledhel qui leva la main de ses genoux dans un subtil geste signifiant "que s'est-il passé ? ".
« — Nous parlerons plus tard. », articula en silence Legolas mais il sourit pour lui assurer que tout allait bien.
Celeborn commença la réunion et se plaça devant les elfes.
« —Nous vous avons réuni ici pour discuter du sort de notre peuple. La protection de l'anneau de la Dame envers ces bois n'est plus. Sa capacité à protéger et à maintenir notre ville diminue depuis la destruction de l'Anneau Unique. »
Beaucoup de ses sujets échangèrent des regards inquiets ou murmurèrent doucement avec leurs voisins. Lassé, Celeborn se rassit et prit la main de Galadriel.
« — N'ayez crainte, mes enfants, car même ce moment de notre histoire a été prévu par les Valar. »
Sa voix, grave et sonore, apaisa le conseil, dissipant le sentiment d'insécurité.
« — Vous avez le choix, poursuivit-elle. Se trouvent devant vous trois chemins que vous pourriez choisir. Le premier est de se rendre aux Havres et de naviguer vers Valinor. C'est le choix que j'ai fait. »
Elle se tourna vers son mari.
« — J'ai choisi de rester ici, déclara Celeborn. Si votre cœur n'est pas encore fatigué de la Terre du Milieu, alors vous pouvez choisir de rester dans le Bois D'Or auprès de moi ; hélas, sa beauté devrait diminuer en votre absence, ma Dame.
— Il reste un dernier chemin accessible à tous, déclara la Dame. Méfiez-vous, celui-ci n'est pas pour les las ou les timides. Beaucoup de périls se trouveront sur le chemin de ceux qui voudraient parcourir les routes vers l'Ithilien. Je l'ai vu. »
Elle regarda vers Legolas et l'incita à se lever.
« — Membres du conseil,déclara Legolas à la foule. J'ai voyagé sur ces routes vers l'Ithilien. Bien que Sauron ait été annihilé, la menace de ses sbires continue d'assombrir ces belles contrées. Je ne peux ni garantir votre sécurité en toute bonne foi, ni savoir quels dangers nous pourrions rencontrer. Je peux seulement faire appel à vous maintenant, aux coeurs les plus courageux et les plus forts, à se joindre à moi pour forger un nouveau départ.
— Nous ne vous recommanderons pas de rester ou de partir. Je vais seulement vous conseiller de faire confiance à votre cœur car vous allez rencontrer votre destinée. », déclara Galadriel.
Elle se leva de son siège.
« — Tous sont ici en tant que représentants de leurs maisons et de leurs proches. Allez vers eux, et répandez ce que vous avez appris lors de ce Conseil afin que tous puissent aussi choisir. »
Les membres du Conseil se séparèrent. De nombreux elfes s'attardèrent pour discuter, débattant du sort qui les attendait. Legolas chercha conseil auprès de Celeborn. Il trouva aisément sa tête argentée dans la foule.
« — Seigneur Celeborn, pourrais-je m'entretenir un moment avec vous ?, demanda Legolas.
— Bien sûr, Legolas, répondit-il. Vous avez fait preuve beaucoup de perspicacité en parlant à mon peuple. Je pense qu'il est judicieux de les avoir informés des dangers éminents. »
Les yeux de Celeborn étaient plein de sagesse. Il avait vu la montée et la chute de plusieurs grandes maisons elfiques de la Terre du Milieu, témoin de la tragédie, de la destruction, de l'amour et de l'espoir. Il sourit, l'air nostalgique.
« — Je vois beaucoup de moi-même en vous, jeune prince. Un amour pour la Terre du Milieu et l'ambition de vouloir l'améliorer. Seulement, j'ai eu le grand amour et la foi d'une belle elfe pour m'en donner la force. »
Les yeux de Celeborn se dirigèrent vers Galadriel et s'assombrirent.
« — Il n'y aura plus jamais quelqu'un comme elle. »
Celeborn et Legolas quittèrent la grande chambre et marchèrent ensemble vers le bureau de Celeborn. C'était une petite pièce, encombrée mais agréable, remplie de parchemins, de rouleaux soigneusement empilés, croquis de la faune, et occasionnellement d'armes encadrées ornant les murs.
« — Je pense ne pas me tromper en devinant que cela ne concerne pas les rouleaux de Belthuin, commenta Celeborn tandis que le prince et lui s'asseyaient.
— Mon Seigneur, j'étais en train de finaliser mes plans pour le voyage et souhaitais vous consulter. A l'origine, j'avais espéré revenir à la Forêt Noire, rassembler les gens de mon peuple dans le château de mon père, et ensuite me diriger vers l'Ithilien.
— Oui, continuez, incita Celeborn.
— Mais maintenant, je pense que la distance ajoutée à travers la forêt ajouterait au voyage des risques supplémentaires. Au lieu de cela, je voudrais vous demander la permission d'envoyer des messagers dans le bois vert, pour faire savoir à mon peuple que nous les rejoindrons sur le bord sud de Eryn Lasgalen.
— Je pense que c'est une bonne idée. La Dame partira bientôt pour Rivendel. Elle et Elrond souhaitaient atteindre les Havres dans les derniers jours de l'automne. J'ai horreur de voir autant de départs à la fois, mais ce serait peut-être mieux de cette façon. Legolas, vous feriez bien de voyager avant les premières gelées.
— Je suis d'accord. », déclara Legolas.
Il remarqua une collection de croquis sur une table encombrée. Certains des dessins représentaient de magnifiques mellyrn, des études complexes de plantes, et des vignettes de Caras Galadhon.
« — Oh, dit Legolas, en reconnaissant quelque chose de familier. Est-ce le jardin au cœur de la cité ? »
Celeborn regarda le dessin.
« — Ah oui. Les gens l'appellent le cercle des 'amants'. J'apprécie beaucoup la végétation qui s'y trouve, bien que la plupart des Galadhrim y sont attachés pour d'autres raisons ...»
Il sourit, savourant peut-être de vieux souvenirs.
Legolas, à l'inverse, se sentit mal à l'aise. Le cercle des 'amants'! pensa-il, assez lamentablement. Et si quelqu'un l'avait vu là-bas avec Miredhel ? La dernière chose qu'il voulait, c'était attiser des ragots. Il pouvait sentir ses oreilles brûler et il regarda avec méfiance Celeborn. Savait-il quoi que ce soit de sa rencontre avec elle ?
« Bien sûr que non, se dit Legolas. Ne sois pas stupide. Il ne s'est rien passé de toute façon. »
Il était temps pour lui de prendre congé.
« — Eh bien, mon seigneur, je vous remercie pour vos conseils. Ils sont les bienvenus. Vous verrais-je au concours de tir à l'arc demain ? », fit Legolas avant de se diriger vers la porte.
Avec une lueur dans les yeux, Celeborn examina le jeune elfe.
« — Bien sûr, prince Legolas. Nous l'attendons avec impatience. »
Le prince se détendit et commença à partir.
« — Juste un instant… », dit Celeborn.
Legolas s'arrêta, ses épaules raidies.
« — Avant de prendre congé, jeune sir, je dois vraiment savoir : quel est son nom ?
— Quel nom ?, demanda avec innocence Legolas, en grimaçant.
— La jeune dame que vous avez dû voir dans ce jardin. La même à laquelle vous pensiez à l'instant et pour laquelle vous rougissiez quand j'ai parlé du cercle des amants. Qui est-elle ? »
Celeborn essaya de le regarder sérieusement, mais ses yeux émettaient une étrange lueur sans réserve.
« — Cacher un secret à la Dame ou vous semble être une tâche impossible, observa Legolas. Je n'avais pas connaissance de l'histoire romantique du jardin. De plus, c'est seulement une amie. Ni même une amie, une connaissance.
— Je vois, nota Celeborn. Mais vous ne m'avez toujours pas dit son nom. Ne vous sentez pas embarrassé, Legolas. Je suis simplement intéressé de voir laquelle de nos jeunes dames a attiré votre attention. »
Legolas marcha à l'intérieur du bureau, car il ne voulait pas que ses mots ou ceux de Celeborn soient entendus. Il baissa donc la voix.
« — En vérité, Seigneur Celeborn, je pense que je ne devrais peut-être pas m'engager avec quelqu'un en ce moment. Mon cœur est prêt, mais mon esprit ne l'est pas. Je ne devrais pas négliger mon devoir envers Ithilien. Je ne veux pas perdre mon objectif de vue.
— Vous êtes dévoué, Legolas, et vous serez un bon souverain. Ne perdez pas de vue vos propres envies. L'amour vous rendra plus fort, et non plus faible, si tel est votre état d'esprit.
— Encore une fois, je vous remercie, Seigneur Celeborn ... pour votre gentillesse. »
Legolas s'inclina et sortit.
Il marchait dans le couloir, cheminant à travers les marches et les couloirs qui s'étendaient d'un mallorn géant à un autre. Il chercha Eledhel pour lui faire savoir ce qui s'était déroulé lors de sa rencontre avec Miredhel. Il venait à peine de commencer à monter une autre série d'escaliers en spirale quand il entendit un appel d'en-bas.
« — Mon Seigneur ! Prince Legolas ! »
C'étaient Belegil et Sulindad. Ils agitaient leurs bras, dans l'espoir d'attirer son attention. Legolas revint en arrière, faisant signe qu'il se joignait à eux.
« — Qu'avez-vous pensé du Conseil ?, demanda-t-il.
— J'ai été surpris d'entendre que la Dame avait l'intention de partir si tôt, déclara Belegil. En vérité, je ne croyais pas qu'elle partirait avant plusieurs années.
— Je suis d'accord, mon frère, dit Sulindal qui les rejoignit. Votre voyage paraissait bien sombre lorsqu'elle en parlait, mon seigneur. Dame Galadriel a la capacité de prédiction, vous savez. »
Legolas acquiesça.
« — Je le sais bien, Sulindal, mais je ne pense pas qu'elle encouragerait une mission dont elle aurait vu une fin désastreuse.
— Oui, mais ce sera dangereux. Il ne sert à rien de le nier, déclara Belegil. Les routes sont ouvertes à l'aventure, prince, et nous allons affronter le danger ensemble.
— D'autres ont rejoint notre cause, mon seigneur. J'ai parlé avec quelques guerriers qui ont promis ainsi que quelques dames.
— Voilà une bonne chose, dit Belegil, ses yeux souriants. Plus il y a de dames, mieux c'est.
— En parlant de dames, ajouta Sulindal. Nous avons appris que Dame Miredhel et vous avaient été vus au cercle des 'amants'. »
Legolas gémit et porta sa main à son visage.
« — Deux guerriers elfes tels que vous n'ont-ils pas d'autres choses plus importantes à penser ? Où avez-vous entendu parler de cela ? »
Belegil et Sulindal échangèrent des regards.
« — Cela doit être vrai, alors, mon frère.
— Il ne l'a pas nié.
— Bien sûr, elle a un tempérament fougueux.
— Oui, quel tempérament.
— Son humeur est pire que celle d'Eledhel.
— Ah, mais il n'a pas la moitié de sa beauté ! »
Les frères auraient continué, si Legolas n'avait pas placé ses mains sur le devant.
« — Il suffit !, siffla-t-il. Je ne veux pas que tout le Bois d'Or le sache. Je l'ai rencontré là-bas ; mais ce n'est que dans le but de m'excuser pour des paroles hâtives. Oh, j'avais raison de craindre que cela n'alimente les commérages. Maintenant, où avez-vous entendu cela ?
— N'ayez pas peur, Prince. Nous l'avons entendu d'Eledhel lui-même ! Il est à votre recherche, de toute façon. »
Legolas les regarda abasourdi. Son visage, qui avait été plutôt rouge, prit un teint moucheté désagréable.
« — Vous ne pouviez pas me le dire avant, non ? »
Il regarda les frères. Ils évitèrent le contact visuel et craignaient qu'ils aient poussé leur plaisanterie trop loin avec le prince. Un silence gêné s'installa entre les elfes. Pourtant, Legolas ne pouvait s'empêcher de rire et mit sa main sur l'épaule de Belegil.
« — Ne craignez rien, mes frères ! A partir de maintenant, vous ne devez pas m'appeler « monsieur» ou « mon seigneur », mais seulement Legolas, car je sais que nous allons devenir des amis proches. »
Belegil et Sulindal étaient visiblement tous deux soulagés. Sulindal parla alors le premier :
« — Alors, laissez-nous vous accompagner, Legolas, pour le déjeuner. Eledhel nous y rencontrera là-bas. Il est occupé pour le moment à terminer de préparer le tournoi de demain. »
Les trois rencontrèrent Eledhel dans la salle à manger des guerriers. La salle à manger accueillait une myriade d'elfes allant des plus jeunes en formation jusqu'aux des vétérans aguerris. Legolas se plaisait à contempler les elflings avec leurs tenues de combat et portant des protège-poignets, leurs pieds balançant dans le vide sur les petits bancs, et leurs armes de novices - petites épées de formation, arcs, et carquois. Certains des elfings s'arrêtèrent de manger pour le regarder, bouche bée. Ils avaient entendu parler de ce prince parmi les elfes, qui avait représenté leur race dans la Compagnie. Legolas n'avait jamais vraiment apprécié être pointé du doigt quand il était plus jeune, pour sa noblesse ou les actes accomplis, et ce sentiment persistait à l'âge adulte. Malgré tout, Legolas s'abaissa pour se mettre au niveau des enfants.
« — Qui sont ces grands guerriers ?, demanda-t-il aux elfings.
— Nous ... nous ne sommes pas des guerriers, mon seigneur. Ce n'est que ma première année de formation à l'épée, balbutia un elfling aux cheveux bouclés.
— J'apprends l'arc, dit une autre petite elfe.
— Et j'espère être aussi douée que vous ... un jour, ajouta-t-elle timidement.
— Eh bien, tu dois travailler très dur et écouter tes maîtres. Dans quelques années, tu gagneras tous les tournois. »
Legolas se leva et ébouriffa les petites boucles de l'elfling.
« — Certains de ces elflings se joindront à nous en Ithilien, dit Sulindal. Eledhel saura sûrement lesquels. Il a une mémoire aussi sûre que le coffre-fort d'un nain. Il est là. Joignons-nous à lui. »
Eledhel était assis à l'une des longues tables à l'arrière de la salle. Il avait déjà fini son repas et était occupé à parcourir un parchemin, tellement préoccupé qu'il n'aperçut ses amis qu'une fois qu'ils furent à ses côtés
« — Vous l'avez-vous donc trouvé ? Bien ! »
Eledhel regarda à nouveau le parchemin, puis Legolas, Belegil et Sulindal s'assirent et se mirent à manger. Legolas remarqua le repas était conforme aux rations standards de la Forêt Noire : viande, pain, légumes, un peu de fromage, vin.
« — Donc Eledhel,dit Legolas entre deux bouchées. N'êtes-vous pas intéressé par ce qui s' est passé avec votre sœur ?
— Oh. »
Eledhel leva les yeux.
« — Je suis désolé, Legolas. Il fallait que je vous en parle, mais je voulais d'abord vérifier cette liste pour m'assurer que je n'avais pas oublié des noms. »
Il parcourut à nouveau la liste, puis la mit de côté.
« — En fait, ma sœur m'a dit tout ce qui s'est passé. Je l'ai vue après la réunion du conseil. Elle était à nouveau elle-même... »
Eledhel leva son verre en direction de Legolas
« — Je dois dire que vous m'impressionnez.
— A-t-elle parlé du pari ?, demanda Legolas.
— Oui, et j'ai fait un autre pari avec elle. Si je sors vainqueur, alors elle doit nous accompagner en Ithilien. »
L'air pensif, il regarda ses amis.
« — Vous devez me laisser gagner demain.
— Abandonner le tournoi ?, murmura Belegil. Je sais bien qu'il s'agit de votre soeur, mais vous pensez vraiment que tout le monde va vous laisser gagner ?
— Haldir, certainement pas, conseilla Sulindal. J'ai entendu qu'il était au terrain de tir à l'arc, presque toute la matinée, à s'entraîner.
— Eledhel, vous êtes plus que capable de gagner ce tournoi. Détendez-vous, mon ami. »
Legolas beurra un morceau de pain pendant qu'il parlait.
« — Un avantage en plus ne sera pas nécessaire, si vous voulez vraiment gagner.
— Facile à dire pour vous, Legolas ! Tous les elfes vous donnent vainqueur. Quel pari avez-vous exactement fait avec ma sœur, à propos ? Elle ne me l'a pas dit. »
Legolas haussa les sourcils.
« — Alors ce n'est pas à moi de le révéler. »
Belegil mit un coup de coude dans les côtes de Sulindal, et les frères échangèrent des regards entendus.
« — D'ailleurs, quand je gagnerai le tournoi demain, l'affaire deviendra de notoriété publique. »
Sur ces mots, Legolas se leva de table.
« — Je vous suggère de rejoindre Haldir au terrain de tir à l'arc. », poursuivit-il.
En quittant la table, Legolas sourit. Pourrait-il vraiment abandonner le jeu pour Eledhel ? Il détestait perdre. Bien sûr, il ne voulait pas être la raison de la séparation d'une famille ... mais peut-être que ce serait mieux si Miredhel restait en Lothlórien. Elle avait admis ouvertement qu'elle ne désirait pas vivre en Ithilien. Elle n'avait aucune compétence la rendant indispensable au voyage. Legolas devait décider d'une perte. Il n'envisagerait de manquer un tir seulement si l Eledhel et lui étaient au coude à coude pour la première place. Il laisserait le tournoi de demain décider.
