Lorsqu'elle rentra au Terrier, Ron se montra froid et distant, mais Hermione préféra l'ignorer. Elle répondit aux questions de Harry, qui s'intéressa à la reconstruction de Poudlard et à l'organisation de ses cours futurs, et Hermione remarqua une étincelle d'envie dans ses yeux verts.
S'assurant qu'ils étaient seuls, elle murmura avec un sourire.
— Tu peux toujours envoyer un hibou au professeur McGonagall. Elle serait ravie de te retrouver.
Harry se mordilla la lèvre un long moment, puis il soupira.
— Je ne sais pas. Beaucoup de monde s'attend à ce que je sois… auror. C'est ce que Kingsley m'a dit, en tout cas. Je… j'ai dit ça à McGonagall sur un coup de tête, parce que mon père et Sirius étaient aurors eux-mêmes, mais je n'ai pas vraiment…
Hermione soupira et l'attira dans ses bras.
— Oh Harry… Tu devrais t'éloigner un peu pour réfléchir seul à ce que tu veux, toi. Tu as gagné le droit de maîtriser ta propre vie, tu sais. Tu ne peux pas… juste suivre la voie que des inconnus tracent pour toi, ou tu ne seras jamais heureux.
Harry détourna le regard avant de murmurer, amer.
— Je suis fatigué de me battre, Hermione. Je crois que… suivre le courant est bien plus facile.
Hermione réprima au mieux son indignation, mais elle ne put s'empêcher de se montrer farouchement défensive.
— Je me battrai pour toi aussi, s'il le faut. Fais-le pour moi, Harry, d'accord ? Réfléchis juste à ce que tu veux vraiment. Je n'ai aucun doute sur le fait que tu seras un Auror merveilleux, mais j'aimerais que tu sois certain que tu seras heureux.
Harry renifla légèrement, ému, et il déposa un baiser tendre sur sa joue en lui soufflant un remerciement.
Ron arriva à cet instant et il se figea, avant de se rembrunir.
— Qu'est-ce qui se passe, ici ?
Hermione roula des yeux, refusant de se sentir coupable ou de se justifier. Elle avait souvent répété à Ron qu'elle voyait Harry comme un frère, mais il préférait soupçonner le pire. Harry lui sourit tranquillement.
— Je posais des questions à Hermione au sujet de Poudlard. Tu imagines, ils ont déjà tout reconstruit !
Ron grimaça, un éclair de colère passant dans son regard bleu.
— Bon sang, Harry ! Ne l'encourage pas, toi aussi !
Hermione renifla, avant de répondre sèchement, les poings serrés.
— Il n'y a rien à encourager, ma décision est prise ! Il me semble que je suis majeure et apte à décider ce qui est le mieux pour mon propre avenir.
Ron écarquilla les yeux, surpris, mais Hermione n'attendit pas sa réponse, partant à grands pas.
Jusqu'à la fin de l'été, l'ambiance resta lourde au Terrier. Ron tentait de faire plier Hermione en se montrant tour à tour terriblement collant, puis distant, sans jamais clarifier leur relation. Les rares baisers échangés avaient lieu loin des regards et se faisaient de plus en plus rares, Hermione évitant désormais de se retrouver seule avec Ron.
Devant sa famille, le jeune homme se comportait avec Hermione comme il l'avait toujours fait, comme s'ils étaient amis uniquement.
Molly regardait Hermione avec désapprobation, les lèvres pincées, mais elle ne faisait jamais le moindre commentaire. À la place, elle profitait des repas pour ressasser ses souvenirs, clamant qu'élever ses enfants avait été la période la plus gratifiante de sa vie.
Hermione restait imperméable, l'écoutant poliment, mais sans dévier de ses idées, déterminée.
Le drame suivant ne fut pas du fait de Hermione, mais de Harry. Ce dernier avait gardé un contact étroit avec Kingsley Shakelbolt, désormais ministre de la Magie. Ils correspondaient presque quotidiennement et Harry restait très discret sur le contenu de leurs échanges, malgré la curiosité presque maladive de Ron.
Ce dernier ne cessait de lui rappeler qu'ils allaient devenir Aurors ensemble et qu'ils seraient probablement coéquipiers pour lui soutirer des détails, mais Harry haussait les épaules en affirmant que ce n'était pas à propos de leur avenir. Bien que très curieuse également, Hermione préférait ne rien demander, attendant que Harry soit décidé à parler.
Un matin, Harry partit seul, à l'aube, sans prévenir personne. Il avait juste laissé un mot qu'il avait des courses à faire, et Hermione observa avec un peu d'incrédulité la famille Weasley faire des hypothèses sur sa disparition soudaine. Ron et Ginny semblaient furieux d'avoir été laissés en arrière, tandis que Molly se tordait les mains en s'inquiétant de sa sécurité.
À son retour, il eut à faire face à la majeure partie de la famille Weasley et Hermione crut que Harry allait se mettre en colère. À la place, il resta calme et rappela qu'il était majeur et libre. Il avait fait ce qu'on attendait de lui et il n'avait plus de comptes à rendre à personne.
Le sujet fut provisoirement clos, mais la lueur malicieuse dans le regard de Harry fit penser à Hermione que l'enfer ne tarderait pas à se déchaîner au sein du Terrier.
Effectivement, l'enfer se déchaîna.
Lorsque la Gazette arriva, pendant le petit déjeuner, Ginny se mit à hurler comme une banshee en voyant les titres. Harry continua de manger, imperturbable, alors que Hermione observait le chaos se répandre, médusée. Molly et Arthur avaient le visage fermé, et ils fixaient Harry en attendant des explications. Percy marmonnait, visiblement furieux, en secouant la tête et en fusillant Harry du regard. Ron s'empara du journal et commença à beugler, le teint rouge brique, sans obtenir la moindre réaction de Harry.
Seul George resta silencieux, le regard fixé sur son assiette, perdu dans ses pensées. Bill et Charlie auraient peut-être pu calmer leurs cadets, mais ils étaient rentrés chez eux.
Hermione attira le journal d'un accio agacé et découvrit la cause de tout ce remue-ménage, se rendant compte qu'elle n'était pas réellement étonnée.
Harry s'était rendu au Ministère la veille et il avait témoigné devant le Magenmagot en faveur de Drago Malefoy et de tous les autres enfants de Mangemorts. Il avait apparemment fait un discours passionné, rappelant au monde magique qu'ils ne pouvaient pas être tenus pour responsables des actes de leurs parents quand personne dans le monde magique n'avait pris la peine de leur tendre la main et de leur proposer un autre chemin que celui imposé par leur éducation.
Son vibrant plaidoyer avait été efficace puisqu'aucun jeune ne fut inquiété, pas même Malefoy qui avait pourtant porté la marque des Ténèbres.
Hermione se mordilla la lèvre, indécise, mais elle adressa rapidement un sourire à Harry, lui assurant son soutien. Même si elle n'avait aucune affinité avec Malefoy et les autres Serpentard, elle devait reconnaître que Harry avait raison : aucun d'entre eux ne méritait la prison pour avoir suivi leur éducation. Ils n'avaient jamais rien connu d'autre et en ostracisant la maison Serpentard, ils avaient tous contribué à les pousser vers Voldemort et ses idéologies nauséabondes.
