Le week-end qui suivait coïncidait avec un jour de sortie à Pré-au-Lard et Harry avait prévu de s'y présenter.
Hermione avait travaillé toute la matinée du samedi avec Théo à la bibliothèque sur leur devoir de potions — leur binôme fonctionnait très bien et la jeune fille ne regrettait pas d'avoir eu le courage de mélanger leurs maisons — et ils décidèrent tout naturellement de faire le chemin pour le village sorcier ensemble.
Théo n'était pas un grand bavard et ça convenait à Hermione. Ils cheminaient en silence, côte à côte, sans que la situation soit gênante.
À l'entrée du village, cependant, Hermione eut la désagréable surprise de voir Ron, attendant de pied ferme. Connaissant les défauts de son ami, elle murmura à Théo de ne pas faire attention à ce qu'il pourrait dire. Théo hésita, avant de chuchoter, aussi discrètement que possible.
— Tu veux que je m'éloigne de toi ? Je peux faire comme si nous n'étions pas venus ensemble.
Hermione secoua la tête, décidée.
— Absolument pas, Théo. Je n'ai pas honte d'être avec toi et tu ne mérites pas ce genre de chose !
Théo lui sourit avec reconnaissance et Ron choisit cet instant pour approcher, de mauvaise humeur.
— Hermione. Tu n'es pas obligée de faire la charité à ces Mangemorts, tu sais…
La jeune femme pinça les lèvres et se redressa, le fusillant du regard.
— Bonjour Ronald. Je vois que tu te souviens de mon prénom. Je te rappelle que je suis libre de choisir mes amis, même si ça ne te convient pas.
Le teint de Ron s'empourpra brusquement et il fusilla du regard Théo, se retenant de riposter. Hermione sourit au Serpentard, qui semblait un peu inquiet.
— On se rejoint aux trois balais ? Ça ne sera pas long.
Théo hésita un instant avant de hocher la tête et de s'éloigner doucement. Hermione croisa les bras sur sa poitrine, agacée.
— Tu es sérieux ?
Loin de se sentir coupable, Ron grogna, furieux.
— Bon sang, je viens voir ma copine et je la trouve avec un serpent visqueux ! J'aurais dû le frapper pour s'être approché trop près de toi !
Hermione cligna des yeux, incrédule. Elle secoua la tête, prête à corriger les paroles de Ron, mais il continua aussitôt, ne lui laissant pas le loisir de parler.
— D'ailleurs, tu vas peut-être pouvoir m'expliquer pourquoi Harry m'a lâché ? On devait être coéquipiers et il ne s'est pas pointé ! Bon sang, je sais qu'il est le sauveur et tout ça, mais il pourrait faire un effort. On ne va pas lui garder sa place indéfiniment !
Hermione souffla, incrédule.
— Tu n'as pas parlé à Harry récemment ?
Ron grogna.
— Si, on s'est croisé au Terrier, mais on s'est disputé. Il ne veut pas s'occuper de Ginny.
Hermione murmura, perplexe.
— S'occuper de Ginny ? Comment ça ?
Ron lui lança un regard amusé, comme s'il trouvait la question stupide. Puis, il haussa les épaules.
— Comme nous. Ils sont en couple, tu sais. Je lui ai dit qu'on devrait se marier tous les quatre le même jour, tu vois ? Un double mariage, ça serait classe. Mais il traîne des pieds, comme si ma sœur n'était plus assez bien pour lui.
Hermione couina, horrifiée par les paroles de Ron.
— Mariage ? Mais, ils ont rompu, Ron ! Et nous… on n'a jamais…
Ron l'interrompit avec un ricanement.
— Mais non, Harry n'a pas rompu. Il avait juste besoin de retrouver son bon sens. Il faut juste qu'il aille travailler et ensuite, il pourra épouser ma sœur.
Hermione ferma les yeux et prit une grande inspiration. Puis elle secoua la tête.
— Ron. Nous n'avons jamais parlé de mariage ! Bon sang, nous ne nous sommes pas vus depuis une éternité et je n'ai jamais reçu le moindre message de ta part ! Je te rappelle que je compte obtenir mes Aspics et ensuite j'ai ma carrière à construire !
Ron renifla, presque méprisant.
— Bien sûr. Tu vas les avoir tes aspics, tu es brillante. Et puis, pour ta carrière, on va te trouver un truc au Ministère. De toute façon, tu devras arrêter quand on fera les enfants, alors ce n'est pas la peine de s'en faire. Maman t'expliquera ça mieux que moi.
Hermione recula d'un pas, puis elle laissa échapper un hurlement colérique.
— Ça suffit.
Ron cligna des yeux, sincèrement surpris. Il la dévisagea comme si elle était une espèce inconnue d'animal magique et Hermione prit le temps de se calmer un instant avant de parler.
— Ron. Il n'y aura pas de bébé. Pas de mariage. Il n'y a pas de nous. Pas de couple. Tu m'ignores depuis des mois, tu n'as jamais rien dit à tes parents… peu importe. Je compte faire carrière. En politique probablement. J'ai travaillé dur et je refuse d'y renoncer pour ton petit confort égoïste.
Ron recula d'un pas et il secoua la tête.
— Mais tu disais que tu m'aimais ? J'vais avoir un travail, tu sais ? Bien sûr, ça serait mieux si Harry était avec moi, mais on se débrouillera quand même.
Hermione pinça les lèvres, agacée.
— J'appréciais mon ami de Poudlard. Je ne te connais plus et ce que tu me montres aujourd'hui ne me donne pas envie d'en savoir plus, Ron ! Toi et moi, c'est terminé, à condition qu'il y ait eu quelque chose réellement.
Ron se tendit et il secoua la tête, les yeux fous. Il serra les poings et il siffla entre ses dents, avec colère.
— Non ! Tu ne peux pas faire échouer tout notre avenir pour une lubie ! De toute façon, tu n'as pas la moindre chance d'entrer au Ministère. Il faut un appui solide et tu es née de moldus, Hermione. Tu devrais rester avec moi. Pas besoin de tout ça, tu sais. Avec moi, tu pourrais être… l'assistante du ministre, peut-être ? Dans quelques années ?
Hermione secoua la tête une dernière fois, nauséuse, puis elle fixa Ron tristement.
— C'est terminé, Ron. Rentre chez toi.
Elle s'écarta de Ron et avança en direction du centre de Pré-au-Lard, laissant le jeune homme figé sur le bord du chemin, le visage terriblement pâle. Hermione se força à avancer, parce qu'elle ne pouvait rien faire de plus pour lui. Une larme roula sur sa joue, puis une autre, jusqu'à ce que son visage soit ruisselant, alors qu'elle faisait le deuil de cet amour adolescent éphémère.
