NDA 31/07/2021 : Et cette fois j'ai réussi ! Je suis en temps et en heure pour ce second chapitre ! On entre vraiment dans le vif du sujet, l'univers tant attendu nous ouvre enfin ses portes, pour le meilleur et surtout pour le pire.
En même temps je n'ai plus d'excuses, là, j'ai huit chapitres d'avance, et j'ai terminé mon déménagement. Ou presque. Bref. J'espère que celui là vous plaira, et comme ça fait peu de temps que l'autre a été posté, je vais seulement réclamer quelques reviews, khi khi khi !
Oui, c'est le rire d'un renard qui s'étouffe. Mais chut ! xD
Une bonne lecture à vous !
Chapitre 2 : Des années de retard
Je suis morte une première fois en 2015.
Ça parait insensé, mais mon cœur s'est arrêté le 2 Juin 2015, sous les coups de mon compagnon du moment. Un policier dangereux et beaucoup trop possessif, qui avait passé six mois à me couper du monde et me séquestrer chez lui. Lorsque mon cœur était reparti, je m'étais levée, avec l'intime conviction, que cet homme-là, que je connaissais pourtant, n'était pas celui qui venait de me battre à mort parce que j'avais dit non pour coucher avec lui.
Le contexte était le même, l'appartement aussi, et Chadney, la petite chatte couleur chocolat qui y habitait, aussi. Mais cet homme-là n'était pas le même, ou plutôt, je ne me sentais pas comme si j'étais celle qu'il dépeignait. Il s'excusait, disait que c'était l'alcool, mais qu'il comprenait que je ne veuille rien faire ce soir, qu'il ne voulait pas me faire de mal. Et tout ce dont je me souvenais, c'était des paroles de Lyanna, qui me disait que le seul moyen de partir, serait de le rendre incapable de m'aimer. Qu'il refuse de lui-même que je reste.
Alors j'avais rendu les coups, avec l'effroyable sensation que je ne frappais pas mon copain, mais quelqu'un d'autre. Que ce meurtrier en herbe, n'était pas le mien. Je défendais une fille, c'était certain. Mais cette fille, ce n'était pas moi. Je lui avais crié dessus, hurlé même, qu'aucune femme ne devait subir ce que je lui faisais subir, qu'il était un monstre, et que son abus de pouvoir devait cesser. Qu'il ne méritait pas que je m'arrête, vu qu'il n'avait pas cessé de frapper. Et puis, alors qu'il se recroquevillait dans l'entrée, j'ai lâché l'affaire. J'ai fait mon sac, avec cette même désagréable sensation que je n'étais pas moi, et je suis partie.
En reprenant conscience, quelques secondes plus tôt, je ressentais de nouveau cette impression. Comme si mon corps ne m'appartenait pas, et que l'endroit où j'étais, n'avait rien de normal ou de réel. En 2015, après avoir réussi à me libérer de Manu, j'avais pris conscience de mes nouveaux dons, et poursuivi mes études avec ce pouvoir étrange que de lire l'avenir à travers des rêves fous. J'étais persuadée que c'était un autre monde. Mais tout avait été trop proche du mien pour que je puisse réellement y faire quelque chose. Était-ce vrai ? Ou avais-je seulement pris conscience de mes capacités à cet instant-là, en changeant ma vision de moi-même ? Je ne l'avais jamais su.
Là, c'était pareil.
Jusqu'à l'arrivée de la douleur. Je me souvenais très bien de mon opération dorsale, et de cette impression de déchirure dans la colonne. Ici, c'était tout mon corps qui se déchirait. Je n'ai pas pu m'empêcher de crier. Mais aucun son ne sortit de ma bouche. Je pus seulement sentir les larmes couler sur mes joues. Dans le noir total, la douleur me paraissait augmenter en crescendo. Il fallait que je bouge, que je sorte, que je respire plus fort, m'étire… Je devais faire quelque chose. Mais aucun de mes muscles ne réagissaient. J'étais paralysée…
J'ai dû sombrer, car j'ai repris conscience de nouveau sans m'être rendue compte que j'étais partie. Cette fois-ci, je n'avais presque plus mal, seulement l'impression écœurante d'être entourée de cotons, et pas uniquement physiquement. Je flottais dans du coton. Je pouvais produire le même effet avec de fortes doses de Laroxyl. Autrement dit, j'étais droguée. Oui… Je résiste à ce genre de produit. Mon corps me dit merde, j'ai des nausées, la tête qui tourne, et je suis totalement amorphe, mais mon esprit est toujours parfaitement alerte.
C'est le plus terrible d'ailleurs. J'ai déjà tenté de combiner les médicaments avec de l'alcool, je cherchais l'effet euphorique que tout le monde décrit avec exagération. La seule chose que j'ai eu, c'était cette sensation affreuse de devoir rejoindre les toilettes avant de me pisser dessus, tout en sachant que mes jambes ne supporteraient pas mon poids. Pas de joie, de rire fou, ni d'euphorie niaise. Juste la perte de contrôle de mon corps, et ma haine de cette faiblesse en retour.
Et là c'était exactement pareil.
Sans la vessie pleine, bien évidemment. Et heureusement, au final, parce que je n'arrivais pas à ouvrir les yeux, ni bouger les doigts. Il y avait une immense chappe de plomb qui me recouvrait toute entière. Alors j'ai tenté de parler… Et ça s'est révélé très peu fructueux au final. J'avais la bouche pâteuse, et je n'arrivais pas à articuler non plus. J'étais faible et à la merci de tous.
« Il…plait… Aid… » Niveau compréhension, on repassera.
« Ne vous en faites pas, Miss O'Nigay, tout ira bien… Les potions font effets, et vous pourrez vous relever dans quelques heures… »
J'ai dit que j'avais horreur des infirmières ? Non ? Bah maintenant c'est fait. Tout va bien, soyez sage, ne bougez pas… Evidemment, on ne bouge pas, on est sous perfusion, sous morphine à haute dose ou tellement torturé par une opération que notre corps refuse de bouger. Mais tout ira bien ! Oui, si elle le dit. Des fois j'aimerais qu'elles soient à notre place juste une seconde, cette seconde qu'elles gardent silencieuses jusqu'à sortir une réplique débile visant à nous rassurer et ne réussissant qu'à nous énerver encore plus.
Par contre, elle a dû fumer… C'est quoi cette histoire de potion ? Ou alors elle me prend pour une idiote parce qu'on lui a raconté que je me suis jetée sous les roues d'une voiture. Remarque, c'est presque ça, si on oublie le fait que j'ai poussé l'homme que j'aimais dans le fossé pour lui éviter le choc. Et maintenant que j'y pense… Je ne le sens plus… C'est peut-être l'effet des tranquillisants, mais je ne sens plus sa présence, et je ne capte plus ses battements de cœur… Je ne le ressens plus…
Et la panique me submergea.
J'ai dû ouvrir les yeux, quelques heures plus tard de nouveau, mais cette fois, j'étais consciente, et je pouvais voir ce qui m'entourait. La pièce était assez étroite, toute blanche, évidemment, et ça puait les produits antiseptiques. Mais je pouvais sentir, en dessous de cette couche, toutes les maladies, et la mort qui restait figée, en alerte, dans ce genre d'endroit. Moi, je reposais dans un petit lit métallique, bien loin des lits médicalisés auquel j'étais habituée, et il y a avait une lampe de chevet qui éclairait de façon plutôt faiblarde, la pièce.
Mais ce qui me dérangeait le plus, c'était la présence de mes parents dans la pièce. Ils auraient pu être n'importe où, mais pas ici, au même endroit… Et encore moins aussi proches. Ma mère avait son habituelle crinière indomptable de cheveux frisés blonds, digne des ashkénazes, mais sa tenue ne ressemblait en rien à ce que je la voyais porter depuis des années. Une longue robe, rouge, avec des manches à volants, s'arrêtant aux épaules…
Non en fait, ce qui me gênait, ce n'était pas sa robe. C'était elle. Ma mère était entière. Elle n'avait pas de cicatrice sur le visage, aucune sur ses bras, et elle ne semblait pas avoir les jambes arquées sous sa robe. Elle était plus fine aussi, elle avait plus de poitrine, et son regard noisette me dérangeait. Cette femme n'avait jamais reçu le moteur d'une 204 sur les jambes dans un accident de voiture avec moi. Elle n'était pas ma mère. Et en tournant la tête, les fringues de mon père confirmèrent que lui non plus, n'était pas ce qu'il prétendait être. Mes parents n'étaient pas mes parents.
« Qui êtes-vous ? » J'aurais pu faire dans la finesse… Mais voir ces figures-là, si rassurées d'être ensemble et de me voir, ça me fichait la nausée. Ma mère se leva soudainement, et vint saisir ma main pour la tenir entre les siennes. Le contact fut aussi horrible que si quelqu'un d'autre avait voulu abuser de moi, et je me suis retirée de son étreinte.
« Mais enfin… Sacha… C'est moi… Ta maman. » Ses yeux se remplirent de larmes, et elle se mit à rire nerveusement entre deux. Ma maman pleurait aussi comme ça, mais ce n'était pas elle.
« Ah. » Je préfère ne rien dire de plus, et me détourner. « Je ne vous reconnais pas. » C'est presque vrai. Mais maintenant je sais que je ne suis plus là où j'étais avant. Je ne sais pas ce qu'il se passe, autant ce sont encore les produits, mais je ne veux pas savoir non plus. Elle se mit à pleurer, et mon père vint la prendre dans ses bras… ça aussi, c'est dérangeant… Mes parents sont séparés depuis que j'ai trois ans, les voir aussi proche c'est…
« Ne t'en fais pas, ma chérie, les médicomages nous avait prévenu… Le choc avec l'engin moldu aurait pu la tuer, et si elle subit une perte de mémoire, ce n'est que passager… » J'ai entendu la phrase, et j'aurais dû tiquer. Mais tout ce que je retenais, c'était le surnom affectueux qu'il lui avait donné, et mon cœur fit une embardée monumentale.
J'ai tourné vivement la tête sur la gauche, et j'ai rendu le contenu de mon estomac en un jet hideux. Si mon père était encore avec ma mère… Où était ce connard de Bernard ? Où étaient mon petit frère et ma petite sœur ? Soudain, une ombre à surgit devant moi, et j'ai vu un bâton s'agiter. Mon carnage disparu, et l'ombre se révéla être mon père, dans un costume tellement riche et propre que s'en était ridicule.
« Ça va aller, d'accord ? Chérie, appelle la nurse… » Ses bras ont essayé de m'entourer, et je les ais repoussé avec violence.
« Écartez-vous de moi. » Et j'ai été malade une fois encore.
Je ne sais pas si je me suis évanouie, ou si j'étais juste trop mal pour voir ce qu'il se passait. Mais j'ai cligné des yeux, et les faux parents n'étaient plus là. Il n'y avait plus qu'une nurse, et un homme en robe blanche digne de Gandalf, avec un bâton dans la main pointée sur moi.
« Je ne comprends pas, il n'y a aucun signe d'amnésie… Sa tête n'a pas été heurtée par l'auto moldue… »
« Mais monsieur, je vous le dis… Miss O'Nigay n'a pas reconnu ses parents… » L'homme soupira, avant de lancer des éclairs avec son bout de bois sur moi. Et si je n'avais pas été habituée aux phénomènes paranormaux depuis quelques années, j'aurais sursauté d'horreur en le voyant faire.
« Une amnésie psychogène, vous pensez ? » Les éclairs revinrent vers sa baguette, et un bout de papier apparut dans sa main.
« C'est une baguette ? » demandais-je, ignorant leurs recherches. Le doc cligna des yeux, et hocha la tête.
« Peut-être que la mémoire sémantique est toujours fonctionnelle, en effet. » Il se tourna entièrement vers moi. « De quoi vous souvenez-vous, miss O'Nigay ? » Cette manie de m'appeler par mon nom de famille me donne envie de crier… C'est super agaçant.
« D'avoir eu très chaud et de m'être pris une voiture dans la gueule. Vous en avez d'autres ? »
J'ai vu qu'il allait répondre, et je me suis tournée pour lui faire dos. Je n'ai pas envie de parler, je ne veux pas parler avec lui… Alors je me suis recroquevillée sur moi-même, et j'ai fermé les yeux en priant pour disparaitre de cet endroit qui n'était pas chez moi. Je voulais seulement retourner à l'académie, retourner aux cotés des filles, et discuter de nouveau avec Meleth nin. Je voulais ressentir sa chaleur, sa colère, n'importe quoi… Quelque chose qui viendrait de lui…
C'est terrible de se dire à quel point on peut être dépendant d'une personne quand on aime. Dépendant affectueux, oui, mais aussi des mots, de ses soupirs, de son cœur, et de son existence toute entière. Tomber dans les escaliers aurait été une meilleure idée, finalement. Parce que tomber amoureux c'est toujours un calvaire. Mon erreur avec Quentin aurait dû m'en prévenir, mais non… Au moins, ici, aucun risque que je ne me jette sur Manu pour soulager ma peine, et qu'il abuse encore de moi.
Cette fois, je me suis endormie pour de bon…
J'étais de nouveau sur la route du rond-point, à l'isle… Mais cette fois, je n'étais plus moi. Je me voyais avancer en poussant un chariot du super U jusqu'à une voiture grise couverte de boue. Il y avait de quoi nourrir au moins trois adolescents dans le caddie, et des portes clefs ridicules sur mon trousseau. Cependant, je m'arrêtais, et tournais la tête en m'apercevant de la présence d'un trio féminin…
Ça me faisait toujours bizarre de me voir hors de mon corps. En simple spectatrice… Je ne sais même pas pourquoi je revisionne ça… Je l'ai vécu, c'est bon, pas besoin de me faire revoir cet accident monstrueux… Mais d'un point de vue extérieur en plus… à quoi bon ?
Je pouvais nous voir… Lyanna mettant son blouson sur mes épaules, et Elena tentant de me soutenir du mieux qu'elle pouvait… Et puis, je me vois relever la tête, et chercher après mon amour, le téléphone toujours en main…Naturellement, je tourne aussi la tête, ça klaxonne de tous les côtés… Comment n'ai-je pas pu le remarquer ?
Et puis je m'élance… Enfin, la vraie moi s'élance à travers la route. Et elle court vers la silhouette qui se rapproche. De là où je suis, avec mon caddie chargé, je ne vois qu'à peine ce qu'il se passe. Il doit bien y avoir 800 mètres entre cette femme à travers laquelle je regarde, et mon autre moi.
Pourtant je sais ce qu'il va se passer. Je vais m'arrêter une seconde, entre les deux routes, avec l'espoir d'arrêter mon amour dans sa course, je vais comprendre que je ne peux rien dire, et je vais me propulser vers lui pour l'éjecter dans le fossé et prendre sa place. C'est ce que je vois… Mon autre moi pousse le jeune homme avec violence, et se tourne vers la voiture qui tente à peine de freiner…
Mais si le choc a bien lieu, une explosion de fumée noire le remplace, avant de s'élever vers le ciel, et de disparaitre comme un nuage de poussière.
Je cligne des yeux, la chambre d'hôpital est là. J'ai été réveillée en sursaut par une main touchant mon front. Main appartenant à ma fausse mère, que je rejette vivement. Comme elle se recule, j'en profite pour essuyer mon visage avec mes manches et me frotter les yeux.
« Sacha enfin… Je suis ta mère, laisses moi t'aider… » Elle devrait se taire, ça me donne mal à la tête.
« Ça va. J'ai juste besoin d'air. C'est bon. » J'agite la main, comme pour lui dire que ce n'est rien. Je ne sais pas comment était leur Sacha, mais clairement, je ne rentrerai pas dans ce jeu-là. La petite fille chouchoutée par ses parents, j'en ai perdu le rôle à mes trois ans. Et ensuite, je suis devenue la seconde maman des jumeaux, pour aider ma mère encore convalescente et éviter que ma tante ne leur fasse le même lavage de cerveau qu'à moi plus jeune.
« Ma chérie… Les médicomages ont dit que ta mémoire était troublée… Nous comprenons que c'est dur pour toi… Mais aucun sort ne peut aider alors… » ça c'est mon père. Il m'appelle mon poussin dans la vraie vie, et attends généralement que je me démerde si j'ai un souci de santé. Parce qu'il ne va pas dépenser ses sous pour rien, hein ! Celui-là a beau être poli, attentionné et inquiet… Me semble vraiment plus dangereux que le mien.
« Nous allons te ramener à la maison… Et probablement, tes amies, ainsi que tes affaires, te rendront la mémoire. » Là, c'est la mère qui parle. Ma mère, elle, aurait éclaté sur les médecins en les traitant d'incompétents, et nous aurait changé d'hôpital pour trouver quelqu'un d'autre. C'est elle qui m'a légué ses dons de divinations dans la précédente vie. Ses rêves ont toujours été justes, mais une fois écrit, elle ne s'en souvient que lorsque l'horreur se produit.
« Donc… On quitte l'hôpital ? » Ma voix tremble un peu. Je n'ai pas envie de rester avec eux, mais je sens que je n'ai pas le choix…
« Oui… Et même si tu ne retrouves pas la mémoire de suite, retourner à Poudlard pourra t'aider… » Là. J'ai marqué un arrêt, et je me suis tournée vers mon père, pas certaine d'avoir bien entendu.
« Retourner où ? » Avec un peu de chance il dira autre chose, et tout ira bien dans ce monde débile.
« À Poudlard ma chérie… Ton école… Tu rentres en 4e année dès Septembre… ça aussi tu l'as oublié ? » J'ai cligné des yeux, avant de baisser la tête et de fixer mes mains. Soit, elles n'ont pas changé d'un pouce, soit, on me prend vraiment pour une ado lymphatique et stupide.
Sauf que je ne me souviens que très peu de mes 14 ans… Etant donné qu'on m'a opéré du dos cette année-là, et que je l'ai passé à l'hosto, en rééducation, et bloquée à la ferme pour rattraper mon retard. Donc je ne peux pas dire si j'avais la même tête que maintenant ou non. Je sais juste que j'ai définitivement plus de cicatrices aujourd'hui qu'avant.
Maintenant la gêne. C'est Poudlard.
Je ne peux pas être dans une école de magie fictive où on agite des bâtons pour faire voler des plumes et assommer des trolls. Soyons honnête je ne suis déjà pas capable de gérer le moindre cours dans l'école où j'ai voulu aller. Ce n'est pas celle d'un livre qui va m'aider plus. J'ai dû rater des années de ma vie en une seconde là.
Avant oui, quand je vivais chez ma mère avec mon beau père, mon frère et ma sœur, je voulais aller à Poudlard. Je voulais quitter mon collège où je prenais insultes, remarques, et coups de la part des autres. Où mes amis étaient juste des raclures prêtes à tout pour avoir mon attention financière et mes pâtisseries. Des gens à qui je payais les sorties de cinéma avec l'argent offert pour mes anniversaires, les soirées cosplays, et les japan expo. Et qui, lorsque je me suis retrouvée sans rien, m'ont simplement tourné le dos les uns après les autres.
Mais j'avais grandi. Ce n'est pas à 23 ans, quand on est dépressive, qu'on veut un boulot, un appart pour soi, et rejoindre l'homme qu'on aime, qu'on veut aller à Poudlard. J'ai presque dix ans de trop pour ce qu'ils sont en train de raconter. Non. Non et non. Je ne peux pas aller dans une école de nouveau et encore moins celle-là. C'est du foutage de gueule pur et simple.
Juste parce que je n'y pense plus, c'est bon, j'y ai droit ? faut arrêter de déconner au bout d'un moment. D'autant que non, excusez-moi, mais je n'agiterai pas un bout de bois en citant du latin. Pour info, j'ai fait grec à la fac.
« Sacha tu m'écoutes ? » Pour l'amour du ciel, je pense, tais-toi !
« Quoi ? » Oui, ma voix est sèche, mais je me torture, j'aimerais le faire sans son aide.
« Ecoutes… Je sais que c'est dur à entendre tout ça… Mais je suis sûre que Poudlard t'aidera à te souvenir, après tout, ce sont les meilleures années de vies des sorciers… »
Va dire ça à Rogue et on en reparle après… Maman.
« Ok… »
Je crois qu'ils n'ont pas cherché plus loin mon manque d'enthousiasme. Ils ont dû se dire que c'était la fatigue, que j'étais mal à cause de leur accident débiles, que c'est ma mémoire qui m'inquiète. Parents idiots. Je plains votre vraie progéniture. Si elle est un tant soit peu comme moi, elle a carrément dû se jeter sous la voiture pour vous échapper.
Parce que j'aimerais pouvoir faire pareil.
Alors j'ai commencé à mettre au point un plan pour m'échapper une fois que nous serions rentrés à la maison.
Mais je n'ai pas pu. Nous avons transplané avec mes affaires de Ste mangouste jusqu'au domaine O'Nigay, où j'ai rendu mon maigre repas directement sur les pieds de mes chers parents. Fallait prévenir, je suis encore malade, et clairement, les tourbillons de couleurs et j'en passe, ce n'est pas mon trip.
Ils n'ont même pas pris la peine de m'en vouloir. Ils m'ont soulevées, avant d'appeler un elfe de maison, et de lui dire de prendre mes affaires. Je ne m'étonnais pas qu'ils parlent français avec moi, mais qu'ils ordonnent des trucs en anglais à l'elfe, me fit penser que j'avais un souci. Ou bien alors ils avaient une explication de sort débile pour traduire, ou que sais-je ? Le sortilège de babo quelque chose.
Babel.
Pourquoi je me souviens de ça ? Qu'importe, j'ai dû le lire quelque part dans un des bouquins. J'ai mal à la tête.
« C'est possible de rentrer ou faut attendre dans le jardin ? » Je ne me sentais pas bien, j'avais envie de m'enfermer quelque part – de préférence dans le noir – et qu'on me laisse tranquille pour les jours à venir. Mais alors que nous avancions sur le chemin, les quelques cerisiers parsemés me firent un effet bizarre. J'avais l'impression de reconnaitre ce chemin, tout en étant incertaine quant au où, et au quand, je l'avais déjà arpenté. Mais la douleur dans ma tête s'est accentuée à mesure de nos pas.
Et c'est quand la maison m'est apparue que j'ai su que ça n'allait pas du tout. C'était presque la ferme. Je reconnaissais la terrasse dallée avec la grande table de pierre et les bancs au centre, le tombeau fleurit et les rosiers accolés au mur du laboratoire. Sauf que ce n'était clairement pas un laboratoire culinaire, mais un labo de potion…
Le truc qui perturbait en revanche, c'était le préau couvert de vignes, qui tenait encore debout… Les volets gris intacts… Et l'impression que tout était nickel absolument partout. Lorsque nous sommes entrés, la salle à manger était quasiment identique à celle qui se trouvait dans l'ancienne ferme de ma mère. Une table ovale, devant la porte, avec l'immense vaisselier derrière, une autre table pour les différents fruits et condiments lors des repas, sur la droite… Juste avant la porte menant au couloir…
Ce qui changeait en revanche, c'était qu'à la place de la télé, il y a eu une bibliothèque, et que le canapé trônait devant la cheminée. Le cadran solaire en ardoise, lui, était toujours là, et surtout, entier. Il y avait une odeur qui provenait de la cuisine, et c'était la seule chose qui me gardait désormais encore un peu consciente.
Ça sentait bon le poulet… Le poulet à l'ananas précisément… Et c'était une recette que je reconnaissais comme étant celle de mon grand-père maternel, Henry. Clignant des yeux, je me demandais comment cet elfe de maison pouvait la connaitre, puisque je supposais que même cette version-là de papy ne laisserait personne approcher ses précieuses recettes.
Et c'est lorsqu'il est venu nous rejoindre que je me suis sentie partir.
