Comme c'est un long week-end et que je ne pourrai peut-être pas publier la semaine prochaine (ou alors ce sera le lundi 8), j'ai décidé de publier le chapitre 3 de la partie 2 aujourd'hui.
Bee-gets : C'est ça ! C'est plus grave que le violon (et plus beau). Merci ^^ Oui, le yukata vient des replace plus. J'aime bien faire de petites ref au canon de temps en temps ;) Tu aura ta réponse en temps voulu concernant le ou les auteurs de cette tentative.
Shadow : Tu commences à bien me connaître ;) Moi non plus je n'aime pas les serpents. Par contre... j'ai l'impression que tu me crois plus sadique que je ne le suis...
Bonne lecture !
Le mercenaire d'Iga
« J'ai vu bien assez de choses. »
Nijimura Shûzo avait grandi à Ueno, dans l'ancienne province d'Iga, conquise par les troupes impériales trente ans auparavant. Il faisait partie d'une grande et puissante famille de la ville.
Shûzo avait ainsi intégré la formation au sein de la caserne d'Ueno. Il avait appris l'art des subterfuges, des combats, des tromperies, de l'espionnage et de l'assassinat. Et c'était pour protéger un prince illégitime qu'il était venu à Kyoto.
Seijuro avait peur que Shûzo traine derrière lui à le surveiller toute la journée. Mais le mercenaire savait se faire oublier et était très discret. Et bien qu'il soit sinistre avec ses cheveux noirs et ses vêtements noirs, Seijuro trouvait sa présence rassurante. Il devait reconnaître que son père n'avait pas eu une mauvaise idée.
Shûzo était posté devant sa chambre la nuit et vérifiait à intervalles réguliers que tout allait bien dans la chambre. Il restait debout toute la nuit et même de jour il semblait actif.
-Tu ne dors jamais ? finit par lui demander Seijuro quelques jours après son arrivée.
-C'est ce que je fais croire.
Seijuro sourit.
-L'empereur t'a-t-il également chargé de découvrir qui avait tenté de m'assassiner ?
-Cela fait partie de ma fonction.
-Que fera-tu quand tu auras trouvé ?
Shûzo le dévisagea quelques secondes.
-Cela dépend. Qu'aimeriez-vous que je fasse, votre Altesse ?
-Appelle-moi Seijuro, pour commencer. Ensuite, quand tu trouveras cette ou ces personnes, amène-les-moi.
Le mercenaire acquiesça.
-Dis-moi, à qui as-tu fais serment d'allégeance ?
-Je sers l'empereur.
-Prête-moi allégeance, Nijimura Shûzo.
Le mercenaire se mit à genoux devant le prince.
-Je suis à votre service, votre Altesse.
oOo
La nuit, quand Seijuro n'arrivait pas à dormir, il invitait Shûzo à venir le voir. Il lui parlait alors de tout et rien. Au début, le but n'était pas d'avoir un dialogue, Shûzo se contentait d'écouter les déboires du jeune prince mis de côté par ses frères. Puis, ils se mirent à parler d'eux, à échanger et à même à rire.
Petit à petit, Seijuro invita Shûzo à venir le voir le soir, avant de dormir. Ils se parlaient jusqu'à tard le soir, comparant leurs enfances. Seijuro découvrit sous les traits à priori sévère de Shûzo, quelqu'un de plus amical. Parfois, il le surprenait à le regarder avec tendresse ou encore à se moquer de manies qu'il pouvait avoir, tels que des tics de langage.
-As-tu déjà tué, Shûzo ?
-Heureusement, non.
-Et as-tu déjà vu quelqu'un mourir ?
-La variole n'a pas touché que la capitale, tu sais…
Shûzo laissa l'émotion l'étreindre quelques secondes. En présence de Seijuro, il sortait de son rôle de garde du corps, froid et infaillible pour redevenir le jeune adulte qu'il était.
-Ma sœur n'a pas survécu à la maladie.
-Je suis désolé.
Shûzo haussa les épaules, comme si ça ne lui faisait plus rien. Cette disparition le meurtrissait encore. Sa sœur avait été son modèle durant son enfance. Elle était plus intelligente, plus optimiste, plus joyeuse que lui. Elle était promise à un brillant avenir mais la maladie y avait mis fin. Peu après, Shûzo avait intégré la caserne. Il n'avait pas eu le temps de pleurer sa sœur.
-Tu n'as pas à être désolé. Ce sont des choses qui arrivent. Néanmoins, mesure la chance que tu as d'avoir autant de frères.
Seijuro ne répondit pas. Il n'était pas de l'avis de Shûzo. Daiki et Shintarô le détestait. Atsushi restaient à ses côtés, mais pour combien de temps encore sera-t-il son allié ? N'allait-il pas se lasser de le défendre ? Qu'est-ce que cela lui apportait ? Quant à Tetsuya, il vivait très mal le fait de devoir constamment choisir entre Daiki et Seijuro. Un jour, il allait devoir faire un choix et Seijuro le redoutait.
-Est-ce que tu tuerais pour moi ? demandât Seijuro.
-Oui. Je suis là pour ça. Si quelqu'un essais de te tuer, je l'éliminerai.
-Tu en sera vraiment capable ?
-Cela a toujours été le but de mes entrainements. Toi, tu as bien été formé pour devenir empereur, non ?
Seijuro baissa les yeux.
-Oui… mais cela suffira-t-il à faire de moi un empereur ?
Shûzo se rapprocha de lui.
-Est-ce que c'est ce que tu veux ?
-Oui ! Bien sûr ! C'est… sinon, je serai né pour rien. J'aurai fait… ce que j'ai fait pour rien. Et puis, je ne veux pas donner raison à mes frères. Ni décevoir l'empereur ou ma mère.
-J'ai l'impression que tu le dois, plus que tu ne le souhaite.
-Tu dis n'importe quoi !
-Soit.
Shûzo se leva et quitta la chambre après avoir souhaité une bonne nuit à Seijuro. Le garçon bougonna en se glissant sous sa couverture. Shûzo ne pouvait pas comprendre, se disait-il. Ça ne servait rien qu'il essais de lui expliquer. L'empereur comptait sur lui. Il était le seul à pouvoir lui faire honneur. Ses frères ne pourraient jamais ne serait-ce que l'égaler. Et les cours de tir à l'arc qu'ils suivaient depuis quelques mois lui donnait raison.
Les entraînements physiques ne dataient pas de la tentative d'assassinat envers Seijuro. Depuis plusieurs années les garçons apprenaient à manier le sabre. Mais depuis un an, les cours de géographie et de langue étaient lentement remplacés par des leçons d'arts martiaux, de sabre et de tir à l'arc.
Au tir, Seijuro était le meilleur. Il mettait toujours dans le mille ses quatre flèches. Comme Shintarô était très adroit, le garçon pensait qu'il serait son principal rival. Mais celui-ci était nul. De même que Tetsuya. Finalement, les seuls à pouvoir rivaliser un tant soit peu avec lui étaient Daiki et Atsushi. Mais ce dernier ne donnait le meilleur de lui-même que lorsqu'il y avait compétition entre les garçons. Sinon, comme d'habitude, il s'en fichait.
Il se trouvait que la raison de la nullité de Shintarô était sa vue déplorable. Mais au fur et à mesure des entraînements, il mit en place des stratagèmes pour parvenir à mieux viser. A force, il finissait par bien visualiser où se trouvait la cible et à être de plus en plus précis. Alors, lors de la mise en place des cibles, quand Seijuro devait s'en occuper, il décalait systématiquement celle de Shintarô afin de lui faire perdre ses repères.
Celui-ci ne mit pas longtemps à le remarquer et à comprendre qui en était responsable alors il fit de même. Mais si Seijuro pouvait facilement s'adapter aux changements de sa cible grâce à sa bonne vue, ce n'était pas le cas de Shintarô et il se retrouva à la traîne. Jusqu'à ce que Daiki décide de dénoncer le stratagème à Shirogane qui se chargea dès lors de la mise en place des cibles.
Lors de son temps libre, Seijuro continuait de jouer du shamisen. Mais il se mit à passer de plus en temps à discuter avec Shûzo, puis à lui demander de l'entraîner. Le mercenaire connaissait énormément de techniques de combat, notamment à l'arme blanche.
Ces entraînements supplémentaires se déroulant dans la cour de l'aile ouest, il n'était pas rare que Daiki et Shintarô viennent observer. De même que les concubines, qui en profitaient pour commenter.
Shûzo se surprenait à sortir de plus en plus souvent de son rôle de mercenaire et garde pour celui d'ami. Seijuro l'intriguait, le fascinait. Il prenait plaisir à passer du temps en sa compagnie.
oOo
Un jour, alors que la saison des cerisiers commençait, Shûzo remarqua un net changement dans le comportement du garçon. Ce jour-là, il fut très mauvais au tir à l'arc et ne mangea presque rien. Le soir venu, Shûzo décida d'en avoir le cœur net.
-Aujourd'hui était un jour particulier, non ? demandât-il alors que Seijuro finissait de nouer le obi de son yukata de nuit.
-Non.
-Tu es sûr ?
-Puisque je te le dis.
Shûzo soupira. Il avait ramené une bouteille de saké. Shirogane lui avait donné l'autorisation d'en boire un verre le soir.
-Ne me mens pas, Seijuro.
Il vit le garçon rougir et cela le fit sourire. Sa peau pâle se parait de toutes les couleurs selon ses émotions. En sa présence, il semblait incapable de se contrôler. Shûzo trouvait cela adorable. Quand il avait appris qu'il devait aller protéger un prince, il s'attendait à faire face à une figure froide, comme l'empereur. Mais malgré la ressemblance physique, la différence de caractère était bien présente. Seijuro semblait sensible.
Seijuro s'assit sur son futon.
-Je peux avoir un verre ?
-Rappelle-moi ton âge.
-Seize ans. Mais on s'en fiche de mon âge, non ?
-Tu es trop jeune.
-J'ai vu bien assez de choses. Allez, soit sympa…
Shûzo céda et servit un verre de saké à Seijuro qui l'avala d'une traite.
-C'est bon.
-Evidement !
-Je peux en avoir un autre ?
Ils se dévisagèrent longuement.
-Non.
Seijuro soupira.
-Ce n'est pas contre toi, lui expliqua Shûzo. Mais je pense que Shirogane ou l'empereur n'aimeraient pas savoir que je t'ai fait boire. Si tu as quelque chose sur le cœur, parle m'en, plutôt que d'essayer d'oublier avec de l'alcool. Je suis là pour ça.
Le garçon releva les yeux. Son regard rouge, intense, laisse Shûzo perplexe. Il se racla la gorge pour tenter de camoufler la vague de chaleur qui avait traversé son corps de haut en bas.
-Ma mère est morte il y a huit ans. Elle a été assassinée par les concubines. J'ignore précisément ce qui a pu se passer. Le matin, elle a été retrouvée pendue au cerisier de la grande cour.
-Navré de te demander cela, Seijuro, mais es-tu sûr qu'elle a été assassinée ?
-Oui.
Les yeux de Ryota ne mentaient pas.
-Si tu le désires, je peux peut-être essayer de savoir ce qui s'est passé.
Le regard du garçon se chargea d'espoir.
-Vraiment ? demandât-il d'une petite voix.
-Bien sûr.
Shûzo servit un verre de saké et le tendit à Seijuro.
-Cela restera entre nous.
Il sourit et vida le verre avant de le rendre à Shûzo qui, à son tour, se servit. Il posa ses lèvres là où Seijuro les avait misés, puis se leva et lui souhaita une bonne nuit.
