Final Fantasy VII appartient à Square Enix. Merci de ne pas reposter cette histoire ailleurs sans m'en informer. Tout vol ou plagia sera signalé. Merci.


Chapitre 4

Par la suite, Sephiroth resta dans la chambre de Cloud. Conformément à ce que tout le monde voulait, il ne sortait pas et n'avait aucune interaction avec qui que ce soit. Cloud ne pouvait s'empêcher de le regretter, quelque part. Personne d'autre ne croyait qu'il était innocent, à part Reeve et sans doute Vincent, et il avait fini par abandonner l'idée de convaincre qui que ce soit d'autre. Barret avait été intransigeant, que Sephiroth soit innocent ou non, ils auraient dû le tuer pour éviter la menace d'un autre drame. Tifa faisait comme s'il n'existait pas, quittant la pièce dès que Cloud amenait le sujet. Il savait qu'elle refusait d'en parler parce qu'actuellement, elle n'était pas capable d'envisager que l'homme à l'étage n'était pas responsable du meurtre de son père. Cid était parti en disant qu'il mettrait son Hauvent à leur service, si besoin. Yuffie avait essayé de monter les escaliers pour aller tuer l'ancien général dans son sommeil, mais Cloud et Vincent l'en avait toujours empêché. Elle avait fini par partir du bar en disant qu'elle finirait par se venger d'une manière ou d'une autre et Nanaki était sorti à sa suite en disant qu'il allait essayer de la raisonner. Cloud avait laissé la jeune ninja dire sans intervenir, mais il doutait qu'elle réussisse, pour la simple et bonne raison que Sephiroth n'était pas le genre d'adversaire qu'on pouvait surprendre. Et si on ajoutait à ça le fait qu'il ne dormait quasiment pas, Cloud savait que Yuffie allait uniquement se faire blesser si Sephiroth décidait de riposter. Même s'il y avait très peu de chances. L'ancien général passait une grande partie de son temps allongé par terre, sur le futon que Cloud lui avait installé. Il passait des heures à regarder la fenêtre en silence. Cloud était parfois obligé de le rappeler à l'ordre pour qu'il aille se doucher ou manger.

Il avait pris sur lui de lui parler, mais Sephiroth ne lui facilitait pas la tâche. L'argenté ne répondait souvent que par monosyllabe. À un moment, Cloud en avait eu marre et s'était énervé, et alors qu'il pensait que l'autre homme rentrerait dans le conflit, il n'avait fait que s'excuser en regardant le sol et en promettant d'essayer. Ça lui faisait mal au cœur de le voir dans cet état-là, il avait l'impression qu'on lui avait retiré son âme et qu'il ne restait qu'une coquille vide. Seulement l'enveloppe charnelle d'un homme qui ne savait pas vivre.

Heureusement, après plusieurs jours, Cloud avait fini par trouver une alternative. Il avait racheté une vieille maison en ruine et y avait déménagé Sephiroth le jour même. La maison, qui avait connu certainement des jours meilleurs, était inhabitée depuis des années, selon la femme qui lui avait vendu. Au milieu de nulle part, elle avait été la proie des intempéries depuis que ses grands-parents y étaient morts, trente ans avant. Quand ils y étaient entrés, une fuite d'eau coulait du plafond, des murs avaient été détruits et ce qui restait du mobilier avait été ravagé, soit par des animaux sauvages, soit par de jeunes squatters en manque d'adrénaline. Quand il vit l'étendue des dégâts, Cloud avait regretté son achat. Même s'il ne savait pas comment agir avec lui, parce qu'il ne connaissait que les hurlements pour communiquer avec son double et parce qu'il n'était pas doué pour les discussions calmes et posées, il souhaitait sincèrement que l'ancien général aille mieux. Et lui acheter une bicoque en ruine, ça ne l'aidait pas tellement.

- Tu crois que je pourrais la retaper ? Demanda simplement Sephiroth.

Cloud le regarda. Il avait l'air de scanner la pièce, analysant chaque morceau de bois.

- Oui. Elle est à toi.

L'ancien général avait légèrement souri.

- Je suis désolé, dit Cloud qui sentait le besoin de se justifier. Je ne pensais pas qu'elle serait autant en ruine.

- Ce n'est pas grave. Ça me fera quelque chose à faire.

Il rajouta d'une voix éteinte.

- Ça serra bien de construire quelque chose, pour une fois.

Cloud l'aida à enlever tout le mobilier en ruine. À la fin de la journée, ils choisirent la pièce la moins ravagée pour y dormir. Allongé dans le noir, Cloud ne dormait pas. Il écoutait la respiration de l'autre homme en se demandant quand il allait s'endormir. Malgré son envie de l'aider et sa détermination à mettre son ressenti de côté, il ne pouvait s'empêcher de se méfier. Les vieilles habitudes ont la vie dure.

- Je ne sais même pas comment je vais faire, murmura Sephiroth.

- Hum ? Demanda Cloud.

- Tu ne dors pas ?

- Non.

Sephiroth soupira.

- J'étais en train de me dire que je ne savais pas comment j'allais retaper la maison. Je n'ai pas d'argent. Même si je la construis de mes mains, je n'ai pas le matériel nécessaire pour le faire, ni ne pourrais les tailler sans outils. Mais je ne pourrais pas en acheter...

- Puisque tu n'as pas d'argent, finit Cloud.

Il chercha une solution.

- Je pourrais t'en prêter.

- C'est vrai ?

- À condition que tu me rembourses.

Il essaya de taire les souvenirs de ses amis qui le traitaient de pingre.

- Ça va de soi. Mais... Je ne sais pas comment faire. Je veux dire, je n'ai pas de travail. Diriger l'armée, c'est la seule chose que je sais faire et... Il n'y a plus d'armée.

- C'est pas le boulot qui manque, dit Cloud.

Il se tut en réfléchissant.

- Tu peux devenir mercenaire. Tu tues les monstres qui rôdent près des zones habitées et tu touches la prime.

- Oui, c'est vrai.

Il entendit Sephiroth se retourner.

- Quelque chose ne va pas ? Demanda Cloud.

- Rien, tu as raison. Je pourrais être mercenaire.

- Mais ?

Sephiroth soupira.

- Je n'ai plus envie de tuer.

- Je ne te parle pas de tuer des gens, mais des monstres.

- C'est pareil. À la fin de la journée, tu finis couvert d'entrailles.

Cloud soupira.

- Alors je ne sais pas... Tu n'as pas des passions ?

- Non.

- Tu faisais quoi, quand tu bossais pas ?

- Je dormais.

- Et ?

- Et j'allais prendre mon service.

- Et quand tu étais en week-end ?

- Je n'en prenais pas.

- Et des vacances ?

- Non plus.

Cloud le regarda. Il faisait nuit noire dehors et encore plus sombre à l'intérieur, mais avec toutes les substances qu'on lui avait injectées, il n'avait jamais besoin de lumière pour y voir.

- Tu as déjà eu un moment de libre, dans ta vie ?

- Pas vraiment. Les seuls moments que j'avais, c'est quand je sautais le déjeuner ou le dîner pour aller voir Angeal ou Genesis.

- Les deux autres Première Classe ?

- Oui.

- J'ignorais que tu étais ami avec eux.

- Nous avons fait la campagne du Wutaï ensemble. Ça nous a beaucoup rapprochés.

- J'imagine, mais je pensais que c'était plus des collègues que des amis.

Dans l'obscurité, il vit Sephiroth le regarder et froncer les sourcils.

- Parce que je suis sans cœur ?

Cloud se redressa. Visiblement, l'ancien général se sentait insulté.

- C'est pas ce que j'ai dit.

Mais c'est ce que je pensais.

Sephiroth se redressa et s'assit.

- Je suis désolé. Je suis juste tellement habitué à ce que les gens pensent qu'ils me connaissent parce qu'ils m'ont vu en poster. Ils ne voient que l'image que la ShinRa donne de moi et non qui je suis vraiment. C'est juste... Tellement fatiguant.

Cloud le regarda sans rien dire. Il avait raison. C'est vrai que l'image que lui avait collée la ShinRa était celle d'un homme stoïque, fier, parlant peu, agissant beaucoup. Mais la personne qu'il avait à côté de lui n'avait rien de similaire. Il n'avait rien du héros de guerre dont tous vantaient autrefois les exploits. Il ne parlait pas beaucoup, c'est vrai, mais c'était plus par timidité que par fierté. Il n'avait rien de fier ou de stoïque. Il était fatigué de vivre.

- Je suis désolé, je ne devrais pas me plaindre comme ça.

- Non, je comprends. La vérité, c'est que toi, toi, je ne t'ai jamais rencontré. La toute première fois que je t'ai vu, c'est le jour où tu as dit à Zack qu'on partait à Nibelheim. Mais ce n'était pas toi, c'était... L'autre. Et quand je te regarde...

- Tu vois mon clone.

Cloud soupira.

- Je comprends, dit Sephiroth. Il t'a fait tellement de mal. C'est pour ça que je voulais te voir, la première fois. Je voulais te faire comprendre que je n'étais pas lui, mais...

Il soupira.

- Je n'ai jamais été très doué pour faire comprendre aux autres ce que je ressentais.

- Parce que tu as grandi seul ?

Cloud se dit que c'était une question peut-être un peu trop personnelle, mais depuis qu'il l'avait sorti de sa cellule, il avait envie de le connaître. L'image qu'il avait de lui, étant jeune, n'avait rien à voir avec la réalité.

- Oui, dit Sephiroth d'une voix éteinte. J'ai eu du mal à comprendre le concept d'amitié. Il a fallu...

Il soupira.

- Il a fallu presque un drame pour que je comprenne.

Devant son silence, le blond ne put s'empêcher de demander :

- Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Nous étions en mission. Nous devions infiltrer un camp de rebelles et j'étais jeune, je pensais que rien ne pourrait avoir raison de moi. Je suis entré dans leur QG sans discrétion, et on m'a tiré dessus. Angeal a pris la balle à ma place. J'ai eu beaucoup de cours sur le combat et la stratégie militaire, et rien dans ce que j'ai pu apprendre ne m'avait attendu à ça. On m'a enseigné à suivre les ordres et à réussir mes missions. Pas à avoir des subalternes qui prennent pour moi. Quand j'ai compris ce qu'il avait fait, que je l'ai vu à terre, couvert de sang, j'ai... J'ai abattu tous les rebelles pour être sûr que personne d'autre ne soit blessé. Quand je lui ai demandé pourquoi il avait fait ça, il m'a répondu que j'étais son ami, et que c'était normal.

Il se tut un instant et reprit d'une voix douce.

- C'est là que j'ai compris ce que c'était d'avoir des amis. Et quand ils sont partis...

Il soupira et se retourna dos à Cloud. Le blond n'insista pas et essaya de trouver le sommeil.


Au fur et à mesure des jours qui passaient, les travaux avançaient bien. De temps en temps, Cloud partait faire une livraison et rentrait juste après. Pendant des semaines, il resta là, dans le coin perdu où il avait acheté une maison en ruine pour son pire ennemi. Sa vie venait de prendre un virage inattendu, mais il se surprenait lui-même à vouloir rester là plutôt qu'au bar. Ici, tout lui paraissait plus simple. Les deux hommes discutaient peu, mais ils trouvaient un certain confort dans la présence de l'autre. Ils se comprenaient sans dire un mot. Ça manquait à Cloud. Le silence. Le calme. Au bar, il y avait systématiquement quelqu'un. Soit les enfants, soit des clients, ou même ses amis. Il les aimait tous profondément, mais parfois, il en venait à regretter la tranquillité qu'il avait avant tout ça. Là, tout était tranquille. Personne ne parlait, le seul bruit qu'il entendait était celui de la nature ou celui du feu qu'ils faisaient tous les soirs.

Ça arrivait, cependant, qu'ils discutent. Généralement, le soir, pendant le dîner, il arrivait que Sephiroth lui pose des questions sur la vie en général. Où étaient allés les gens qui avaient fui Midgar, ce qui était arrivé à la direction de la ShinRa, ce qu'il était advenu du reste de l'armée. Cloud essayait de lui répondre avec le plus de détails possibles, mais il arrivait que l'ancien général lui pose des questions trop précises pour qu'il y réponde. Comme ce qu'il était advenu du gérant du petit restaurant ''Chez Al'' dans le secteur trois, ou si on avait enfin trouvé la suite de Loveless. Souvent, les questions s'enchaînaient sur des discussions sur divers sujets et si ça avait l'air étrange au début, Cloud s'y était rapidement fait. Quand Sephiroth parlait, pendant un moment, Cloud le regardait, et une partie de lui revoyait son clone le toiser avec mépris, un air supérieur collé sur le visage et un rictus courbant ses lèvres. Et il devait avoir une tête qui ne trompait pas, parce que Sephiroth s'arrêtait généralement de parler. Mais au fur et à mesure que le temps passait, qu'il apprenait à découvrir l'homme derrière les poster, il ne voyait plus son clone. Il ne voyait qu'un homme qu'il n'avait jamais vraiment connu. Un homme qu'il apprenait à découvrir un peu plus chaque jour. Il lui arrivait même d'oublier sa haine pendant un instant. Et rapidement, il réalisa qu'il arrivait à faire la différence. Entre le monstre qui lui avait presque tout pris, et l'homme qui essayait de se reconstruire.

Bien sûr, ça arrivait qu'ils aient des accrocs. Comme la fois où Sephiroth était revenu de la rivière complètement nu. Cloud avait froncé les sourcils en lui demandant pourquoi il se promenait à poil. Immédiatement, la pensée que son némésis essayait de l'atteindre en le séduisant lui traversa l'esprit. Un mouvement dénué d'intérêt, car l'homme était déjà séduisant avec ou sans ses vêtements. Pensée que Cloud aurait préféré mourir plutôt que d'avouer. Mais l'ancien général s'était excusé poliment en lui expliquant que comme Cloud avait été Soldat, lui aussi, il avait pensé qu'il n'était pas gêné par sa nudité. Il s'excusa et alla s'empresser de s'habiller. Et comme il n'avait plus recommencé, il avait compris que l'autre homme n'avait pas menti. Une fois que Sephiroth s'était habillé, Cloud lui avait expliqué qu'il n'avait jamais fait vraiment partie de l'armée, s'étant arrêté à la milice. Sephiroth l'avait écouté poliment et lui avait posé des questions. Mais dès qu'il voyait qu'il était mal à l'aise, il s'était arrêté et avait changé de sujet.

À plusieurs reprises, Sephiroth commit des écarts dans ce goût-là. Mais le blond voyait que ce n'était pas la mise en place d'un plan machiavélique. C'était juste l'ancien général qui apprenait à se comporter comme un être humain normal. Il avait toujours été mis sur un tel piédestal qu'il n'avait jamais vraiment forgé d'autres liens avec qui que ce soit, en dehors de ses collègues. Il n'avait aucune idée de la manière dont il fallait se comporter avec les autres. Cloud se disait parfois que c'est comme si on l'avait mis dans une boite pendant des décennies et qu'on l'avait lâché dans le monde réel il y avait quelques semaines seulement. Quand il lui en avait parlé, Sephiroth était resté silencieux pendant un moment puis l'avait regardé et, souriant légèrement, il lui avait dit que ça résumait bien ce qu'il ressentait.