Note d'auteur :

Cette fanfiction (tome 6) reprend la trame de JK Rowling et la détourne pour relater l'histoire d'un OC (Megan) de son propre point de vue. La trame originale appartient donc à JK, seul ce qui relève de Megan m'appartient.

N'hésitez pas à laisser des reviews, la critique est constructive et ça fait toujours plaisir (et des encouragements) de savoir qu'il y a des lecteurs :)

A tout hasard, je suis également à la recherche d'une Beta reader, donc n'hésitez pas à me contacter si ça vous intéresse (ma Beta préférée - Floriane si tu lis ce message *cœur cœur* - est actuellement overbookée donc elle ne pourra pas relire systématiquement les chapitres avant publication).


1

AEGIDIUS BYRNE

La maison de Aegidius Byrne était un repaire parfait. En plein cœur de Manchester, quatrième ville la plus peuplée du Royaume-Uni, elle présentait l'avantage de pouvoir se fondre dans la masse. Contrairement au Square Grimmaurd, la bâtisse n'était pas invisible à quiconque ne connaîtrait pas son existence, mais les Moldus passaient devant elle sans y prêter attention, n'accordant aucun intérêt à toutes ces façades identiques et mornes. Un sorcier ne s'y serait pas attardé non plus. Le vieil oncle était peut-être paranoïaque, mais il avait intelligemment protégé sa baraque. Impossible de suspecter qui vivait là.

Replaçant derrière son oreille l'une de ses longues mèches noires, elle froissa entre ses doigts le post-it où figurait l'adresse, le fourra dans la poche arrière de son jean puis poussa le portillon qui délimitait la propriété. La végétation était négligemment entretenue, du lierre dévorait la façade, serpentant entre les fenêtres jusqu'à se glisser sous les ardoises du toit. La brique rouge était salie par les intempéries. Lorsqu'elle gravit les trois marches du perron et se présenta devant la solide porte de bois, des voix étouffées lui parvinrent au milieu de la cacophonie des klaxons et des moteurs qui retentissaient dans les rues voisines. La jeune fille leva la main et frappa trois coups sûrs. Les voix s'interrompirent aussitôt. Il y eut quelques secondes de silence puis une explosion.

Les fenêtres volèrent en éclats. La devanture de la maison fut soufflée de l'intérieur. L'adolescente fut propulsée en arrière, son dos heurta le portillon qui ploya sous la violence du choc et elle finit sa course quelques mètres plus loin, sur le trottoir, écrasée sous la lourde porte.

- Reste là, mon garçon !

Un homme d'une quatre-vingtaine d'années au crâne chauve sur lequel subsistaient quelques mèches blanches éparses se précipita hors de la maison, sa baguette brandie, le regard étincelant. Les manches de sa robe brune étaient retroussées, les pans virevoltant autour de ses chevilles tandis qu'il se hâtait vers l'intruse. Bien qu'assommée et meurtrie par l'explosion, les oreilles sifflantes et la vision floue, la jeune fille n'avait pas l'intention de se laisser tuer aussi facilement. L'espace d'une fraction de seconde, elle se coupa du monde extérieur, plongeant dans l'obscurité de la magie qui bouillonnait en elle, en canalisa une partie et la laissa jaillir hors d'elle. La porte qui l'écrasait s'arracha à elle et fut projetée en direction du vieil homme.

- Impedimenta !

D'un geste vif de sa baguette, Aegidius Byrne dévia le dangereux projectile de sa trajectoire, mais ce court laps de temps avait permis à la jeune fille de dégainer sa propre baguette et de la pointer dans sa direction, prête à défendre chèrement sa peau, bien que toujours étendue au sol parmi les décombres.

- Eh ! Stop ! Stop, c'est Megan !

Un jeune homme aux yeux bleus perçants surgit des décombres de la maison et se précipita entre les deux protagonistes pour s'interposer, les bras écartés. Aegidius Byrne fronça les sourcils, mais aucun des deux sorciers ne baissa sa baguette.

- Vanilla m'avait dit que vous étiez un vieux paranoïaque, mais je ne m'attendais pas exactement à ça, grommela Megan.

- Vous-Savez-Qui est revenu, vous vous attendiez à quoi ? répliqua le vieil homme sur le même ton. Et qu'est-ce qui me prouve que vous êtes bien l'amie de Callaghan ?

- Je viens de vous le dire, c'est elle, insista le jeune homme.

- Ou bien c'est un Mangemort qui a pris du Polynectar, ne te fie pas aux apparences, mon garçon !

Sa baguette était toujours pointée vers Megan, qui tenait également la sienne, prête à se défendre, tout en tentant péniblement de se relever au milieu des briques brisées et des éclats de verre. Cal leva les yeux au ciel.

- Rappelle-toi ce que je t'ai appris, le sermonna fermement Byrne. Maintenant vas-y, pose ta question.

Avec un profond soupir de résignation, Cal se tourna vers Megan, dont les membres tremblaient étrangement, incapable de parvenir à se remettre sur ses pieds après la violence du choc.

- Qu'est-ce que tu m'as offert à Noël ?

Megan, qui ne lâchait pas Byrne et sa baguette brandie du regard, jeta un coup d'œil à Cal, qui l'observait sans crainte.

- Quoi ?

- Réponds juste à la question, pour prouver que c'est bien toi, l'invita doucement le jeune homme. Personne d'autre ne sait ce que c'est.

- Une montre qui te permet de voir dans le noir. C'est celle que tu as au poignet en ce moment.

Cal sourit en baissant les yeux sur l'artefact puis se retourna vers Byrne pour lui adresser un clin d'œil. La tension retomba aussitôt. L'oncle de Vanilla baissa sa baguette, puis Megan l'imita. Aussitôt, Cal s'empressa de s'approcher de son amie pour l'aider à se remettre sur pieds.

- Ça va ? Tu es blessée ?

- Ah oui, c'est vrai, pardon, dit négligemment Byrne.

Il donna un coup de baguette en direction de Megan. Aussitôt, les briques reprirent leur place sur la façade de la maison, les milliards d'éclats de verre reconstituèrent les fenêtres, le portillon se redressa et la porte reprit sa place. Les traces de coups et les blessures de Megan disparurent, la poussière qui colorait ses cheveux s'évapora et elle se retrouva sur ses pieds sur le perron. Dans la rue, les passants n'avaient pas cillé et continuaient de circuler comme si de rien n'était. Megan fronça les sourcils.

- Illusion ?

- Évidemment, tu serais morte écrasée, sinon ! s'exclama Aegidius Byrne. Et puis ça aurait mis les Moldus du quartier dans tous leurs états et on aurait eu le ministère sur les bras. Heureusement, la Trace ne fonctionne pas ici, c'est un petit stratagème fort utile que Vanilla appréciait beaucoup dans son enfance…

- La Trace ne fonctionne pas ici ? répéta Megan, dissimulant avec peine avec son incrédulité.

- Bien sûr que non, je n'allais pas laisser ces pourris du gouvernement espionner ce qu'il se passe chez moi ! Nous sommes encore dans un pays libre, non ?

- Si c'était si simple, la Trace ne fonctionnerait nulle part, répliqua la jeune fille, qui réfléchissait déjà à un moyen de s'approprier cette solution miracle.

- Heureusement, je suis un très bon sorcier. Désolé pour tout ça, ajouta Byrne au sujet de la fausse explosion, tu aurais dû t'annoncer avant d'arriver.

- Je t'avais dit que je viendrais te voir, répliqua Megan en se tournant vers Cal.

- Je ne t'attendais pas si tôt, se justifia le jeune homme.

- C'était une sacrée prouesse d'avoir réussi à me jeter ma propre porte à la figure sans avoir sorti ta baguette, commenta Byrne qui observait à présent Megan de son regard étincelant.

- Je suis une très bonne sorcière.

Une forme de méfiance flotta dans les yeux de l'oncle de Vanilla, puis il frappa dans ses mains avec un claquement sonore.

- Tout le monde à l'intérieur, maintenant, les pressa-t-il. Personne ne traîne dehors, surtout en ce moment ! Callaghan, passe devant mon garçon, si une nouvelle venue entre seule, les sorts anti-intrusion vont se déclencher.

Megan hocha lentement la tête, satisfaite d'avoir confié Cal à quelqu'un d'aussi scrupuleux sur les mesures de sécurité.

L'intérieur de la maison était vieillot mais chaleureux. De hautes étagères remplies de livres se dressaient dans la majeure partie des pièces, entre fauteuils moelleux et tableaux anciens. La plupart traitaient des méthodes de défense contre les forces du mal, d'autres évoquaient les nombreux complots que le ministère de la magie aurait dissimulé aux sorciers (il y avait d'ailleurs une pile d'exemplaires du Chicaneur dans les cabinets), d'autres enfin détaillaient les différentes formes de menace qui guettaient les sorciers au quotidien. Vieux fou.

- Vous m'avez appelé Callaghan en dehors de la maison, fit observer le jeune homme d'un ton moqueur, tandis que tous trois s'installaient dans le salon du rez-de-chaussée.

- Je t'ai déjà dit que le périmètre est sûr jusqu'au portillon, le sermonna Aegidius Byrne. Ne cherche pas la petite bête, Arzel.

- Arzel ? répéta Megan. C'est ton nom d'emprunt, Cal ? C'est affreux.

- C'était le nom de mon grand-père, indiqua le vieux sorcier.

- Votre grand-père avait un nom affreux.

Byrne observa Megan en silence pendant quelques secondes. La jeune fille soutint son regard sans ciller, jusqu'à ce que le vieil homme renifle d'un air dédaigneux et se retourne vers Cal.

- Alors tu vas faire tes valises ?

- Je ne sais pas, c'est le cas ? s'enquit Cal en se tournant vers Megan.

- On ne part pas tout de suite, non. Quand vous l'avez dit, Byrne, Voldemort est de retour –

Le vieil homme poussa un cri étranglé et sursauta si fort que ses genoux renversèrent la table basse qui se trouvait devant lui et renversa sur le tapis tressé trois récipients remplis de ce que Megan avait identifié comme étant des philtres de grand-mère destinés à éloigner les mauvais esprits.

- Par tous les mages, qu'est-ce qui te prend, tu es folle ? éructa-t-il, les mains crispées sur la poitrine.

- Il n'y a aucune raison de ne pas prononcer son nom.

- Ça porte l'œil !

- C'est du flanc. Vous croyez quoi, qu'il nous entend ? Ça se saurait.

- Si les choses tournent mal aujourd'hui, il ne faudra pas s'étonner ! tempêta Aegidius.

Megan leva les yeux au ciel puis reporta son attention sur Cal, qui n'avait pas réagi. Moldu, il n'avait jamais appris à craindre le nom de Voldemort, et il semblait habitué aux vives réactions de son hôte.

- Il est de retour depuis un an, reprit-elle, je te l'avais dit à Noël, mais le ministre n'a accepté d'enlever la bouse de dragon qu'il avait dans les yeux qu'il y a quelques jours, quand il l'a eu sous les yeux au beau milieu du ministère. Ce n'était pas dans les plans de Voldemort…

- PAR TOUS LES DIABLOTINS !

- … que son retour soit révélé au grand jour, poursuivit Megan, imperturbable. Mais maintenant, il va arrêter de se cacher, ce qui veut dire qu'il va y avoir des morts, beaucoup de morts. Cal, tu étais en sécurité ici, et ça je m'en souviendrai, Byrne, précisa Megan en hochant la tête en direction du vieil homme, mais ça n'est plus suffisant maintenant.

- Tu… Tu penses qu'il va venir me chercher ? s'enquit Cal, mal à l'aise. Pour t'atteindre ? J'ai beaucoup réfléchi à tout ça et je ne comprends pas bien pourquoi ce type voudrait s'en prendre à toi. Quel rapport avec toi ?

- Pour faire court et simple, j'ai quelque chose que Voldemort –

- MAIS ÇA SUFFIT !

Byrne bondit sur ses pieds et quitta la pièce d'un air furieux. Megan ne lui prêta aucune attention.

- … quelque chose que Voldemort veut récupérer. Il a trois objectifs principaux : soumettre le pays à son pouvoir, tuer Harry Potter, et récupéré ce que j'ai.

- Et ce que tu « as », comme tu dis, il ne faut pas qu'il l'obtienne ? Quel est l'enjeu ?

- Si Voldemort met la main sur moi, soit il aura les moyens de mettre le monde magique à genoux, soit je serai morte. Ce sera la deuxième option, bien sûr, je ne vais pas le laisser faire.

- Je vois…, murmura Cal en pâlissant. Et ce truc qu'il veut récupérer, il est ici, avec toi ?

Il avait demandé cela à voix basse, comme s'il craignait qu'un Mangemort soit réfugié dans la pièce voisine où Byrne était parti bouder, et surprenne leur conversation.

- Ce « truc » est toujours avec moi, je ne peux pas vraiment m'en séparer, répondit Megan en agitant les mains pour mettre un terme aux questions de son ami. Et étant donné que j'ai été assez bête pour t'installer dans la maison d'Anita et passer du temps avec toi, il pourrait tout à fait essayer de se servir de toi pour m'atteindre. Ou juste te tuer pour me faire du mal. C'est pour ça que je t'ai envoyé ici à Noël dernier, et c'est pour ça qu'il faut que tu t'en ailles, maintenant.

- Mais tu as dit qu'on ne partait pas tout de suite ?

- Non, effectivement, tout simplement parce que je ne sais pas encore à quel endroit tu serais le plus en sécurité, je dois encore y réfléchir.

Le jeune homme ouvrit la bouche pour faire une suggestion, mais il fut interrompu par le retour de son hôte dans le salon. Byrne était désormais vêtu d'une légère cape de voyage, avait coiffé une casquette de golf violette et portait sous le bras un sac de voyage à motifs écossais.

- La maison sera sûrement en ruines à mon retour avec toutes les malédictions que tu as jetées sur nous, jeune fille, mais il faut que j'y aille, annonça-t-il. Mon colloque commence dans quelques heures. Cal, mon garçon, je ne sais pas si tu seras toujours là à mon retour…

- Vous allez quelque part ? l'interrompit Megan, méfiante.

- Cela ne fait pas de moi un hôte irréprochable, je vous le concède, mais j'ai des obligations à l'autre bout de l'Europe. Les temps sont particuliers, comme tu l'as si dangereusement fait remarquer, mon organisation et moi-même avons beaucoup de choses à discuter, et ce colloque est prévu de longue date, je ne peux pas le manquer.

- Quelle organisation ? Quel colloque ?

- Les Sorciers Éclairés ! répondit fièrement Byrne.

- Un rassemblement de vieux fous complotistes, chuchota Cal à l'oreille de Megan.

- Nous nous réunissons en Croatie pour faire le point sur les menaces les plus prégnantes et élaborer des solutions. Si tu es toujours ici à mon retour, je t'en ferai peut-être part, poursuivit Byrne qui n'avait rien entendu. Dans le cas contraire, eh bien, ce n'était pas franchement un plaisir de faire ta connaissance, petite écervelée. Quant à toi, Cal, ta présence a été un véritable charme, j'ai appris tant de choses sur les Moldus ! Tu seras toujours le bienvenu, comme tu le sais. Prends soin de toi, et tâche de survivre à la guerre.

Sur ces bonnes paroles, il quitta la maison à grandes enjambées, claqua la porte derrière lui et transplana dès qu'il eut passé le portillon. Megan tourna vers Cal un regard interrogateur.

- Viens, on va monter dans ma chambre, il fait toujours trop chaud, ici, dit le jeune homme. Aegidius laisse toujours brûler son feu… Au cas où il devrait s'enfuir de toute urgence par la « Poudre de Cheminée ». Tu fais ça souvent, toi, voyager par la cheminée, comme le Père Noël ? Je me souviens que c'est comme ça que tu es venue chez mes parents avec Dumbledore quand on s'est vus pour la première fois – enfin, la deuxième, si on compte la fois où tu as effacé ma mémoire.

- Je suis une sorcière, évidemment que j'utilise la Poudre de Cheminette, soupira Megan tandis qu'ils gravissaient les escaliers pour se rendre à l'étage supérieur. Qu'est-ce que c'est que cette organisation dont a parlé Byrne ?

- Lui et les Éclairés – ce sont plutôt des Illuminés, si tu veux mon avis de Moldu – se réunissent tous les mois pour faire le point sur tous les complots qu'ils seraient les seuls à connaître et combattre. Aegidius est souvent absent, je ne l'ai finalement pas beaucoup vu, quand on y pense. Mais c'est un chic type, si on ne fait pas attention à toutes ses lubies. Il a vraiment été généreux avec moi.

Cal poussa la première porte sur leur droite et Megan pénétra dans une grande pièce lumineuse où se dressait un lit énorme. Un chevalet en bois se tenait près d'une des fenêtres et de nombreuses toiles étaient posées contre les murs à même le sol. Le bureau situé dans l'angle croulait sous les tubes de peinture, pinceaux, crayons et chiffons sales. Des vêtements de garçon étaient répandus à travers la pièce m algré la présence d'une imposante armoire ancienne.

- C'est quoi, tous ces trucs qui traînent ?

- C'est… Oh, c'est nul, fais pas attention. Je ne pouvais pas utiliser mon PC ici, à cause de vos ondes magiques qui l'auraient détraqué, ni même mon portable, et Aegidius n'a pas beaucoup de bouquins intéressants à lire (même si c'était super cool de pouvoir lire dans le noir !), et je ne pouvais pas sortir parce que soi-disant je risquais de me faire tuer à chaque coin de rue, donc j'ai commencé à m'ennuyer alors il m'a trouvé ça… J'ai toujours bien aimé dessiner, et c'était sympa d'essayer quelque chose de nouveau pour m'occuper…

Megan souleva la toile qui se trouvait la plus proche d'elle et examina la reproduction saisissante de ce qu'elle reconnut comme étant la couverture illustrée des Créatures abominables des profondeurs. Elle n'avait pas en elle la moindre fibre artistique, mais elle devait reconnaître que le travail était admirable. Elle connaissait Cal depuis plus d'un an, elle avait vécu avec lui, mais elle ignorait qu'il savait et aimait dessiner. Agacée par sa propre insensibilité qui la renvoyait aux mots durs qu'avait prononcé Dumbledore sur son incapacité à aimer quelques jours plus tôt, elle reposa le tableau.

- Comment ça se fait que tu te sois ennuyé ? Je conçois que tu ne pouvais pas te balader ou vaquer à tes occupations de Moldu, mais tu n'étais pas tout seul.

- Je te l'ai dit, Aegidius n'était pas souvent là, à cause de ses réunions de fous.

- Mais il y a Vanilla, non ? J'imagine qu'elle est sortie, elle s'occupe de faire les courses ou quelque chose comme ça ?

- Non, Vanilla… Vanilla est partie il y a quelques mois, déjà.

- Comment ça ?

Cal haussa les épaules, l'air plus mal à l'aise encore que lorsqu'il avait appris que le mage noir le plus redouté de l'histoire contemporaine était susceptible de le traquer pour le tuer.

- Ça n'a pas marché entre elle et moi, se contenta-t-il de répondre, le regard fuyant.

- Je ne comprends pas, où est-ce qu'elle est, en ce moment ?

- Oh, en ce moment-même, je ne sais pas. Elle est rentrée vivre à Stourbridge, chez elle. Ce n'est pas comme si on s'envoyait des SMS, je n'ai pas de nouvelles d'elle. N'aies pas l'air horrifiée comme ça ! ajouta Cal face à la réaction de Megan. On n'était pas ensemble depuis très longtemps, et puis j'ai dix-huit ans, ce n'est pas comme si j'allais me marier avec une de mes premières copines, ça n'a rien d'exceptionnel que ça n'ait pas marché, tu sais ? On n'est pas fâchés, elle n'a pas demandé à son oncle de me mettre dehors, c'est juste fini.

- Tu es en train de me dire que Vanilla est partie depuis des mois et que Byrne n'est quasiment jamais à la maison ? Tu es ici tout seul la plupart du temps ? s'exclama furieusement Megan.

- Oui, et alors ? Contrairement à toi, je sais me faire à manger, et je m'occupe avec la peinture, et quelques bouquins, et puis il y a un elfe de maison, je ne sais pas si tu te rends compte –

- Mais tu es un Moldu, Cal ! tonna Megan. Il y a des Mangemorts qui te cherchent peut-être en ce moment-même, ils auraient pu te retrouver, tu comprends ? Tu aurais fait quoi, hein ? Vanilla est peut-être quiche, et son oncle complètement attaqué de la bouilloire, mais eux au moins savent se servir d'une baguette magique !

Cal écarquilla les yeux, pris de court par la réaction étonnamment violente de son amie. Megan poussa un cri de rage et se détourna de lui pour plonger son regard à travers la fenêtre, en direction de la rue où les passants déambulaient sans crainte, inconscients du danger qui planait au-dessus de leurs têtes. Elle aurait pu arriver ici et ne rien trouver d'autre que le cadavre de Cal.

- Je comptais sur eux pour te protéger, tu comprends ? ajouta-t-elle en tâchant de contrôler sa colère. Si je t'ai envoyé te cacher avec des sorciers, c'est qu'il y a une raison ! Tu ne peux pas rester seul, tu es incapable de te défendre !

- N'importe quoi, répliqua Cal, agacé, en se dirigeant vers sa table de chevet. Aegidius a sécurisé la maison avec beaucoup d'enthousiasme, et puis j'ai pris mes dispositions.

- Tes dispositions ! répéta Megan en éclatant d'un rire sans joie. Et qu'est-ce que c'est, une gélule de cyanure à croquer si Voldemort déboule dans ta chambre ? Byrne a peut-être solidement protégé cet endroit, et c'est pour ça que je t'ai envoyé ici, mais si Voldemort savait exactement où tu te trouves, crois bien qu'il arriverait à percer ses défenses à un moment ou à un autre !

- Ce n'est pas une gélule de cyanure.

Le garçon se retourna vers Megan, et la jeune fille poussa un cri à mi-chemin entre l'incrédulité franche et la moquerie ouverte. Cal tenait à la main un objet lourd en métal gris que Megan identifia comme l'une de ces armes à feu bruyantes et ridicules que maniaient les personnages des films moldus. Un pistolet automatique !

- Tu te moques de moi ? s'écria la jeune fille.

- Ça n'a pas été facile à acheter, surtout avec Aegidius qui ne voulait pas me laisser sortir de la maison, mais j'ai réussi à –

- Mais qu'est-ce que tu crois pouvoir faire avec ça, à part t'arracher une main par accident ?

- J'ai joué à beaucoup de jeux vidéo, je sais viser ! répliqua Cal en rougissant, conscient de la futilité de ses propos.

- Même si tu savais viser, à quoi est-ce que ça pourrait bien te servir ? insista Megan, de plus en plus furieuse.

- À me défendre ! répliqua Cal.

Visiblement vexé, il s'était probablement attendu à ce que Megan soit impressionnée par son initiative et sa capacité à acquérir une arme illégale au nez et à la barbe de son sorcier paranoïaque d'hôte. Mais tout ce que la jeune fille voyait, c'était qu'elle avait failli perdre Cal à son tour.

- À te défendre ! répéta Megan d'une voix forte. Contre des sorciers, avec une arme moldue ?

- Moldue ou non, elle peut tuer ! Les sorciers ne sont pas pare-balles, que je sache ? répliqua Cal, dont la colère montait elle aussi.

- Tire-moi dessus.

Le garçon cilla, pris de court par l'injonction froide et surprenante.

- Quoi ?

- Tire-moi dessus, allez, vas-y, répéta Megan avec tout le calme dont elle était encore capable.

- Tu es folle, je ne vais pas faire ça ! s'insurgea Cal en reculant, comme pour mettre l'arme hors de portée de son amie.

- Tu veux me prouver que tu es capable de te défendre face à un sorcier, alors vas-y ! insista férocement Megan, qui ne le laisserait pas s'en sortir. Tires. Moi. Dessus.

- Non !

- Fais-le !

- Arrête tes conneries, Demi !

- Je ne m'appelle pas Demi ! Je t'ai menti depuis le début, je t'ai arraché à ta famille qui n'a plus aucune nouvelle de toi depuis des mois, parce que tu es un incapable, un simple Moldu sans défense qui se cache comme un rat et qui n'a pas su garder une petite amie ! Un crétin incapable de sauver sa propre peau s'il le fallait, qui a peur d'une fille qu'il ne connaît même pas et qui ne s'intéresse à lui que quelques mois par an quand elle n'a rien de mieux à faire, tires-moi dessus !

La détonation le fit sursauter et lui arracha un cri de peur, qui s'étrangla dans sa gorge lorsque la balle qui avait jailli du canon de l'arme qu'il avait brandie dans un élan de colère fit demi-tour et vint se planter dans le parquet entre ses deux pieds. Les yeux aussi ronds que le permettait le corps humain, il fixa le morceau de métal fichu entre deux lattes craquelées puis leva la tête vers son amie, sa baguette brandie, le regard flamboyant.

- Megan ! Oh putain, Megan, je t'ai tiré dessus ! s'écria-t-il, horrifié, en se précipitant vers elle. Tu n'as rien ?

Il jeta l'arme sur son lit d'un air dégoûté et attrapa la jeune fille par les épaules pour l'examiner.

- Cette balle aurait pu aller droit dans ton cœur, si je l'avais voulu, répondit Megan d'une voix froide. Si un sorcier décide de te tuer, tu ne pourras rien faire, et si tu t'amuses à brandir cette arme, tu ne feras que lui donner un moyen supplémentaire de te tuer. Sers-toi de ta tête, Davison, tu es un Moldu, tu n'as aucune chance.


L'elfe de maison d'Aegidius Byrne était une créature grise et frêle, vêtue de ce qui semblait être des chutes de rideau en guise de toge. Sa voix fluette allait rapidement agacer Megan, mais elle avait le mérite de se faire discrète la majeure partie du temps et de préparer des repas bien meilleurs que tout ce que la jeune fille aurait pu préparer par elle-même – avec ou sans le livre de cuisine que lui avait offert Cal. Ce dernier était réfugié dans sa chambre depuis leur altercation et avait refusé de participer au dîner. Megan ne s'en était pas formalisée. Elle avait pris un solide petit-déjeuner le matin-même à Poudlard avant le départ pour Londres, mais n'avait avalé qu'un sandwich pour le déjeuner après être enfin parvenue à fausser compagnie à Fred et George qui ne l'avaient pas quittée d'une semelle depuis son arrivée à King's Cross. Que son ami soit vexé ne changeait strictement rien à son appétit.

Mickey, l'elfe, déposa une assiette de pâtes à la crème devant Megan, qui entreprit aussitôt de la vider. Une fois le ventre plein, enfoncée dans un des fauteuils du salon face au feu qui brûlait sans discontinuer dans l'âtre de la cheminée, elle put enfin commencer à réfléchir à la suite des événements. Cal ne pouvait demeurer chez Byrne plus longtemps, surtout s'il était livré à lui-même la majeure partie du temps. Il n'y avait cependant pas moult endroits où il pourrait être véritablement en sécurité. Le premier réflexe de Megan avait été de vouloir l'emmener au Square Grimmaurd, mais cette simple pensée avait réveillé en elle une sourde douleur qu'elle s'efforçait pourtant d'ignorer. Cependant, même s'il avait été émotionnellement envisageable de retourner dans la maison de Sirius, celle-ci avait été évacuée au cours de la semaine, à la preste demande de Dumbledore. La tradition familiale voulait en effet que la maison soit léguée en ligne directe au premier héritier mâle portant le nom de Black. Néanmoins, Sirius était le tout dernier de sa lignée, son frère cadet Regulus s'étant éteint avant lui, et tous deux n'ayant jamais eu d'enfant. Le titre de propriété reviendrait donc très probablement à sa plus proche parente, sa cousine Bellatrix Lestrange. La femme qui l'avait tué. Les poings de Megan se serrèrent inconsciemment. La Mangemort avait une dette envers elle, qu'elle ne pourrait payer qu'en mourant à son tour, lentement et douloureusement.

Dumbledore avait soumis le Square Grimmaurd aux meilleurs enchantements de protection possibles, aussi espérait-il que ceux-ci persisteraient malgré la mort de Sirius et suffiraient à empêcher Bellatrix d'y pénétrer. Qu'elle occupe les lieux de l'ancien quartier général de l'Ordre du Phénix n'était pas en soi un véritable problème, aucun document n'y avait été laissé malgré le départ précipité de ses membres. La véritable difficulté résidait dans le transfert de propriété de la créature qui faisait partie des meubles du Square Grimmaurd : Kreacher. L'elfe de maison avait été tenu à l'écart de toutes les réunions de l'Ordre, mais il détenait inévitablement quantité de renseignement sur les membres et les agissements de la société secrète, et il avait déjà prouvé son enthousiasme à la perspective de les trahir. La colère enfla à nouveau en Megan lorsque lui revinrent à l'esprit les révélations de Dumbledore sur les mensonges de Kreacher qui avaient conduit à la mort de Sirius. Lui aussi, elle le tuerait.

Cette ire ne conduisait cependant nulle part. Megan devait encore trouver un lieu sûr où emmener Cal, aussi furieux soit-il contre elle pour le moment. Elle n'avait pas pu donner d'explications à Fred et George, mais elle s'était promis de s'excuser auprès d'eux lorsqu'elle aurait accompli cette mission qu'elle s'était confiée. Les jumeaux étaient surexcités à l'idée de passer l'été avec elle, tellement fiers d'être enfin des membres de l'Ordre du Phénix et d'avoir ouvert leur fructueuse boutique de farces et attrapes, il n'avait pas été facile de les abandonner sans rien dire, surtout après avoir recueilli auprès d'eux toutes les informations possibles. Mais Megan ne voulait parler de Cal à personne. Seul Sirius avait connu la vérité à son sujet, et Sirius était mort.

Le Terrier n'était donc pas une option envisageable. En outre, les Weasley étaient tous – sauf Percy – des membres de l'Ordre du Phénix, tous vivaient avec une cible dans le dos, leur maison familiale bien connue ne constituait certainement pas une cachette sûre pour Cal. La simple idée de s'y rendre était comme une étreinte étouffante pour Megan. Fréquenter tous ces gens qui avaient eux aussi perdu Sirius mais qui ne souffraient pas autant qu'elle, c'était une épreuve qu'elle souhaitait à tout prix éviter. Poudlard n'était bien sûr pas possible non plus, bien que Cal aurait été ravi de revoir sa sœur. Les Davison n'avaient eu aucune nouvelle de leur fils depuis que celui-ci avait quitté leur maison après Noël, le regard étrangement fuyant et inquiet. Il ne pouvait leur dire où il se rendait, ni pourquoi, pour sa propre protection comme pour la leur. Les ondes magiques étaient bien trop importantes dans la maison de ce fou de Byrne pour qu'il puisse y faire fonctionner le moindre appareil électronique, et il était interdit de faire circuler des hiboux afin d'éviter d'attirer l'attention. Ces consignes étaient dures, mais elles étaient nécessaires, et Cal avait au moins eu le bon sens de les respecter.

La nuit était tombée depuis longtemps lorsque Megan s'endormit dans son fauteuil, la tête pleine de questions, de colère et d'inquiétude.