Chapitre 26 : Until Now
Un mélange incongru de colère et de culpabilité imprégnait les humeurs de Miredhel et de Legolas alors qu'ils se regardaient sans souffler mot. Aucun des deux ne savait comment réagir. Ce fut finalement la Dame qui parla en premier.
Elle s'entendit chuchoter d'une voix qui lui était presque étrangère :
« — Allez-vous partir ?»
C'était plus une affirmation qu'une question, car elle savait désormais avec certitude qu'il partait.
L'air misérable, il répondit quand même, hochant la tête.
« —Miredhel, j'allais vous le dire de vive voix…»
Elle l'interrompit aussitôt.
« —Quand ? Demain ? Quand vous serez parti ?»
Elle secoua la tête.
« —J'ai la chance d'avoir un frère qui m'informe de ces petits détails.
—Je ne vois pas pourquoi vous seriez autant affectée par mon départ. Nous sommes, selon vos mots, "de simples amis", clarifia-t-il.
— Vous voulez dire que nous sommes plus que n'importe quel ami, Legolas.
— Ce n'est pas ce que vous vouliez faire croire à votre frère, dit-il.
— Je suis désolée que mes paroles vous aient fait de la peine. Ce n'était pas mon intention.
— Quelle que soit votre intention, pourquoi ne pas simplement dire la vérité ?
— Comment osez…», s'exclama Miredhel.
Elle s'interrompit, serrant ses doigts dans son poing jusqu'à ce qu'elle puisse sentir ses ongles s'enfoncer dans sa paume. Elle prit une profonde inspiration et détourna brusquement ses yeux de lui, vers la cime des arbres et les trouées bleutées du ciel à travers la canopée. Legolas croisa les bras devant sa poitrine, attendant la réponse. Elle expira lentement puis baissa les yeux sur son visage, ses lèvres se dessinant en une fine ligne.
« — J'ai vraiment pensé que vous étiez de ceux, très cher prince, qui possédaient la vertu de toujours dire la vérité. »
Son ton neutre sonnait amer, ses yeux le mirent au défi de parler : s'excuser ou se justifier.
« —Je ne vous ai jamais menti.», dit-il prudemment.
En échange de ce regard glacial, il lui rendit un regard si doux, si apaisé et sans expression, comme un lac ondoyant qui embrasse pour la première fois la bise de l'hiver.
Miredhel frissonna malgré elle, et même si elle ne voulait pas détourner le regard, sa fierté était bien trop grande pour cela, sa colère disparut face à sa mélancolie.
« — Mais vous..(sa voix vacilla) vous n'avez pas été honnête avec moi.
— Non, j'aurais dû vous en parler, confirma-t-il.
—Pourquoi ne l'avez-vous pas fait?», lui demanda-t-elle simplement.
Pourquoi ne lui avait-il pas dit? Que craignait-il en lui révélant la vérité? Legolas savait qu'il y avait beaucoup de sujets dont il préférait ne pas parler, trop de sujets qu'il ne voulait pas aborder. Son regard vacilla, et, pour la première fois, son masque jeune et fier tomba et il apparut aux yeux de Miredhel comme quelqu'un qui avait été trop confronté à la mort et aux épreuves. Sa question avait vidé toute énergie en lui, comme le sang qui suinte d'une blessure. Il sentit tout le poids de ses longues années, sa relation avec son père, la guerre et l'appel de la mer qui le submergeaient alors qu'il réfléchissait à sa réponse.
La mer.
Legolas ferma les yeux et il put à nouveau entendre les mouettes. Les mouettes, leurs plaintes au milieu du fracas des vagues, et il se dit que la jeune elfe qui l'avait aidé à oublier l'avait forcé à se souvenir de ceci. Il soupira et se détourna d'elle. Elle ne devait pas remarquer sa douleur, sa faiblesse.
Il se frotta le front puis dit calmement.
« — Je suis désolé, ma dame. J'aurais dû vous dire ces choses. Je ne peux vous donner aucune raison ni pour justifier mes actes, ni pour excuser mon comportement. »
Il se sentait si honteux, si incroyablement égoïste qu'il ne lui avait pas annoncé la nouvelle ce matin simplement parce qu'il voulait cacher ses sentiments. Comme un guerrier qui envelopperait ses armes de velours, les cachant de la vue d'autrui, espérant soulager la douleur des souvenirs ensanglantés et des rêves sombres qui anéantissent toute paix intérieure. Legolas avait évité toute pensée ou toute mention des conclusions du conseil. Il avait espéré oublier , mais désormais il savait qu'il ne le pouvait pas. Son silence avait été un désir de lisser les bords acérés de son propre mécontentement. Comme il devait lui paraître insupportable. Son cœur brûlait de répugnance et elle devait sûrement le voir maintenant : il se sentait honteux.
Mais, au lieu de se sentir dégoûtée, elle tendit gentiment une main vers son épaule.
« —Legolas, voulez-vous m'en faire part maintenant ? Je préfère encore que ce soit vous qui me portez les nouvelles.»
Sa main dériva vers la sienne à l'endroit où elle reposait et s'y attarda un très bref instant.
« — Il n'y a rien que je puisse dire que vous n'ayez déjà entendu d'Eledhel.»
Derrière lui, il pouvait entendre murmurer :
« —Legolas, s'il vous plaît. Que je n'entende pas encore cette nouvelle des autres. Ne souhaitez-vous pas me faire votre annonce ? »
Il s'éloigna de ce contact, jetant rapidement un coup d'œil en arrière. Bien que la nostalgie consumait son coeur, il se sentait incapable de la mériter.
'C'était tout simplement trop', pensa-t-il.
Le devoir l'appelait à se concentrer uniquement sur la protection du Gondor et succès en résultant pour l'Ithilien. Le désir de la mer l'appelait à quitter ces côtes. Son père l'appelait à rester fidèle à Eryn Lesgalen.
Désormais, Miredhel revendiquait également son cœur. Legolas se sentait tiraillé dans tous les sens, mais il avait promis le rêve d'Ihilien à son peuple et l'allégeance au Gondor et à Aragorn. Il ne pouvait pas les oublier.
« — Je pars demain, Miredhel. Il est de mon devoir de le faire. Telle est ma volonté.
— Et votre volonté nous concernant, Legolas?, demanda-t-elle.
—Selon vous, il n'y a pas de nous, répondit-il, l'air vide, faisant disparaître toute émotion dans sa voix.
Chaque fibre en lui criait en signe de protestation qu'il ne devait pas la quitter, que c'était mal, une terrible erreur.
Les yeux de Miredhel se plissèrent d'incrédulité à ses paroles. D'une manière ou d'une autre, elle avait fait cela. A peine quelques heures auparavant, ils avaient été si heureux ensemble. Il avait tenté de lui donner sa chevalière. A présent, il avait l'intention de la laisser derrière. Peut-être que Limaer avait eu raison dans ses ragots concernant Legolas et ses dames. Maintenant , Miredhel pouvait ajouter son nom à la liste toujours croissante des jeunes filles tombées sous son charme. Elle méprisait ses propres actes et elle-même pour lui avoir accorder sa confiance. Puis une autre partie d 'elle -même voulait vraiment être à nouveau tenue dans ses bras, mais cela ne pouvait être possible. Rien ne pouvait être fait maintenant, s'il voulait partir, alors Miredhel le laisserait partir. Elle se sentait dangereusement à deux doigts de s'effondrer devant lui, et elle ne laisserait pas au prince la satisfaction de son affect sur elle. Ses yeux brillaient et elle se força à parler d'une voix claire et forte.
« —Namarië, Legolas et que les Valar vous accordent la paix dans ce voyage. »
Legolas observa son visage et entendit ses mots, et l'elfe déglutit sèchement. Son côté raisonnable le poussait désormais à s'éloigner, à la quitter. Il pourrait en trouver une autre plus tard. Il n'avait jamais eu aucun problème à le faire par le passé. Le prince avait toujours suivi ce credo, et il n'avait pas remis en question sa valeur. Jusqu'à maintenant.
Car, quand il se tourna par erreur vers un dernier regard afin de la mémoriser, Legolas vit Miredhel avec sa manche pressée contre ses yeux, qu'elle repoussa à la hâte.
Sa raison ne cessait de crier.
« —Partez maintenant ! Il y en aura d'autres ! Il y en a toujours eu ! »
Pourtant, les pieds de Legolas le trahirent, il ne put trouver en lui la force de s'éloigner, et le prince souffla pour lui-même.
'D'autres, mais pas comme elle.'
Il prit soudain conscience qu'il avait besoin d'elle, il trouva le pouvoir de bouger à nouveau.
Il fit brusquement volte face dans son élan et s'avança vers elle.
« — Miredhel, je suis désolé. Encore une fois. Je n'aurais pas dû parler ainsi. Je ne peux pas vous quitter, pas comme ça...pas le moins du monde, dit-il, le regard attristé.
Il avait peur de sa réponse.
« —Pardonnez-moi.», murmura-t-il, désespérément désireux de la prendre dans ses bras et de l'embrasser langoureusement, de l'embrasser et de la tenir jusqu'à ce qu'elle lui pardonne. L'intuition elfique de Legolas, cependant, le mit en garde et au lieu de cela, il se tint devant elle, humble, en silence.
Miredhel pensa à tout ce qu'elle pourrait lui dire. Son amitié lui procurait une telle joie, et son affection lui apportait plus encore. Il exerçait une terrible emprise sur elle, et elle compris à ce moment ce qu'elle ressentait. Elle avait besoin de lui.
Elle connaissait le chagrin. Miredhel avait goûté à la douleur de la séparation avec la mort d'Annariel. Depuis lors, elle s'était efforcée de ne plus avoir de lien assez profond , assez fort pour lui fendre le cœur. Jusqu'à présent.
Elle tendit la main vers lui et passa un doigt sur sa joue lisse. Sa caresse lui donnait des raisons d'espérer face à son désespoir. Ses yeux s'éclairèrent et il s'empressa de la regarder, penchant sa tête vers son toucher.
« —Tout ce que je veux, c'est en savoir plus sur vous, pour mieux vous comprendre. Ouvrez-moi votre coeur et vous aurez le mien. Je vous en prie, s'il vous plaît..»
Il recula devant ses mots, ce contact et secoua la tête.
« —Miredhel, j'entends mes propres pensées et je les trouve répugnantes. Je n'ose pas vous les dire.
— Vous ne me faites pas confiance alors, l'accusa-t-elle.
— Non, ma dame, mais je ne veux pas vous accabler de ma douleur….de ma faiblesse.», dit-il.
Elle commença à comprendre, car ses paroles semblaient familières à celles que lui soufflait son cœur.
« —J'ai cru bêtement cela une fois, reconnut-elle . J'ai gardé mon chagrin pour moi, enfermé dans l'obscurité de mes propres pensées. C'est une route plus sûre sans aucun doute….»
A ce souvenir, son regard s'assombrit. Legolas repensa aux soirées qui avaient précédé durant lesquelles elle lui avait confié l'histoire de son amie disparue.
« —...mais plus solitaire, Legolas, acheva-t-elle.
— Je n'ai jamais été du genre à parler de mes propres griefs, rétorqua-t-il. La force réside dans le silence.»
Il leva fièrement la tête et incarna chaque centimètre du Thranduil qu'il imitait mais Miredhel n'en fut pas impressionnée. Au lieu de cela, elle pencha la tête avec une expression blessée sur son visage.
« —Alors vous devez vraiment me penser très faible..», dit-elle avec déception.
Les yeux de Legolas s'écarquillèrent et il attrapa fermement sa main.
« —Non, non, je ne voudrais pas du tout que vous croyez cela..»
Il se pencha vers elle et prit son autre main.
« — Je ne vous ai jamais vu plus forte que lorsque vous vous êtes confié à moi cette nuit-là, Miredhel...»
Ses joues s'empourprèrent légèrement et il lui serra fermement les mains.
« — Le pensez-vous vraiment, Legolas ?, demanda-t -elle.
— Oui, je le pense.
— Alors pourquoi ne parlez-vous pas ? Rejoignez-moi donc sur cette route solitaire.», dit-elle , frottant ses pouces sur le dessus de ses mains de manière rassurante.
Legolas secoua la tête .
« — C'est différent, Miredhel. Vous imaginez certaines choses à mon sujet ? Je voudrais…
— Peu de choses pourraient changer mon jugement vous concernant. Sachez cela.», dit Miredhel et elle le tira pour l'emmener dans une étreinte serrée. Elle l'embrassa sur la joue puis sur le menton, puis il rencontra ses lèvres dans un baiser inspirant confiance, réconfort et désir.
Legolas s'éloigna le premier et la regarda avidement.
« —Je n'ai jamais eu besoin de rien avant, ni de personne….», dit-il faiblement.
Ses yeux devinrent aussi sombres que la nuit, tandis que la lumière et l'espoir dans son regard pouvaient lutter contre Eärandil et être plus brillant encore. Il inspira, son cœur palpitait de façon effrénée, seule la foi dans ses yeux lui donna la force de persévérer.
« —Jusqu'à maintenant. Je ne vous laisserai pas partir, Miredhel, même au prix le plus élevé..»
Il enroula ses bras autour d'elle dans une folle étreinte puis la prit par la main et la conduisit sur le chemin qui traversait les bois.
« —Marchez avec moi, Miredhel, et je vous dirai ce que vous voulez savoir..»
Il la conduisit dans une clairière épaisse avec des branches moussues et des lichens gris vert. Dans ce groupe d'arbres s'étendant de leurs branches et feuilles élevées vers le ciel, Legolas commença à parler de la réunion du conseil. Il décrivit la tentative d'attaque d'Eledhel contre le capitaine d'Adrendil, et ils rirent tous les deux, mais quand il eut été question de son père, Legolas se montra beaucoup plus réticent. Miredhel le remarqua, bien sûr.
« —Je ne connais presque rien de votre famille, Legolas, mais de toute évidence, vous vous souciez beaucoup d'eux. Pourquoi n'en parlez -vous pas plus souvent?
—Je parle d'eux , Miredhel.», protesta Legolas.
Miredhel arqua un seul sourcil.
« — Pensez cela si vous le souhaitez mais je ne sais même pas combien de frères ou de soeurs vous avez !
—Deux soeurs, un frère.», répondit-il.
Il lui fit un petit sourire juste pour montrer que cela ne le dérangeait pas d'en parler.
Miredhel lui rendit son sourire, mais fronça les sourcils.
« —Le prince Oromer que j'ai rencontré. Mais où sont vos sœurs?
— Elles sont au palais.», répondit brièvement Legolas.
Son sourire s'évanouit. Il ne voulait pas penser à la discussion qu'il avait eue avec son père. Il ne voulait pas se souvenir de la raison pour laquelle ils se trouvaient là bas. Ou le fait que son père pense qu'il était trop faible pour leur faire ses adieux ! Legolas ferma les yeux et déglutit. Peut être que cette idée d'en parler n'était pas une si bonne idée.
Miredhel pinça les lèvres à la réaction de son ami. Ses sœurs étaient manifestement un sujet douloureux pour lui, et elle s'en voulu d'avoir apporté le sujet sur la table. Elle commença à s'excuser mais Legolas secoua la tête.
« —Non, Miredhel. Vous n'avez rien à vous reprocher. Sachez que je veux vous confier ces choses. Je viens de…»
Il soupira.
« —Je ne peux pas. Pas maintenant.»
Un sentiment de lassitude s'insinua dans son esprit et il s'assit sur une bûche renversée. Les paroles de son père lui traversèrent l'esprit, lui disant qu'il souffrait du poids de ses émotions. Legolas enfonça ses doigts dans le bois humide à côté de lui, sentant la piqûre et les blessures causées par les échardes dans sa chair. Il ne s'en soucia pas.
« —Je suis désolée, répéta t -elle. Je ne peux pas m'empêcher de vouloir en savoir plus sur vous.
—Non Miredhel. Je suis heureux que vous en preniez l'initiative. Mais, même quand j'étais jeune, mon père a demandé à ce que mon frère Oromer et moi gardions le silence sur les affaires de notre famille, de ne jamais parler de nos préoccupations familiales à personne. Mon père est un bon roi et un dirigeant sage, bien meilleur que je ne pourrais jamais espérer l'être. Il y a longtemps , il m'a dit qu'une fois que la maison d'Oropher sera divisée aux yeux de notre peuple, cette séparation signera sa disparition.
Le regard de Legolas s'assombrit, et il murmura, presque inaudible :
« —C'est précisément ce que j'ai commis, envers mon père, envers mon peuple. »
En un instant, elle fut à ses côtés.
« —Legolas, non. Vous avez fait ce que vous pensiez nécessaire. Votre père doit le savoir aussi. »
Elle enroula son bras autour de sa taille, son autre main guidait son menton pour qu'elle puisse voir ses yeux.
« —Et les sujets de l'Ithilien se considèrent comme les elfes les plus chanceux en vous ayant comme seigneur. J'en connais au moins un.»
Un mince sourire apparut sur les lèvres du prince avant de disparaître.
« —Et je suis très chanceux d'avoir un tel sujet.»
Ses yeux brillaient intensément.
« —Surtout une si belle et si gentille.»
Il s'arrêta pour l'embrasser.
« —Et que je peux embrasser.»
« —Que vous pouvez embrasser, mon seigneur ? Je parlais d'Eledhel ! »
Miredhel rit, et Legolas renâcla puis rit avec elle.
Après cela, il poursuivit et raconta ce qui s'était passé lors de la réunion, mais quand il annonça sa décision de chevaucher prévenir le Gondor, ses yeux s'agrandirent et elle prit sa main.
« —Qui chevauchera avec vous?, demanda-elle avec un soupçon de regret dans sa voix.
—Votre frère, Belegil, Sulindal, certains des gardes forestiers du royaume de mon père. »
Il s'arrêta au milieu du chemin qu'ils avaient parcouru et la regarda très attentivement.
« —Miredhel. Je suis incapable de vous laisser, affirma-t-il, et alors même que les mots avaient été prononcés, il en comprenait la teneur. Chevauchez avec moi.
— Si vous m'aviez demandé une telle chose il y a seulement un jour, j'aurais accepté de
Sa voix s'éteignit et elle se mordit la lèvre de consternation.
« —Je ne vous demanderais jamais cela si je pensais que vous étiez incapable de répondre aux exigences de voyage.», dit Legolas.
Sa voix s'adoucit.
« —Ou si je ne désirais pas vraiment votre compagnie.
—Je n'avais jamais tué, et encore moins vu un orque jusqu'à la nuit dernière, Legolas, protesta-t-elle.
—Je sais, dit-il. J'ai débattu toute la matinée pour savoir si je devais vous demander de m'accompagner ou de rester. Vous êtes une bonne cavalière et vous vous en sortez bien.Je sais que ce ne sera pas un voyage facile. Le voyage sera dur pour atteindre les premières cités et les avertir, et nous devrons peut-être même nous battre.
—Donc c'est simplement ma compétence avec l'arc qui me démarque ?», demanda sournoisement Miredhel.
Legolas rit et secoua la tête, avant de redevenir sérieux.
« —Quand je suis parti ce matin, j'avais décidé que vous deviez rester. Le risque était trop grand, vous étiez beaucoup trop fragile à mes yeux. Mais à présent, je sais que je ne peux pas volontairement vous quitter. Je n'ai ni la force, ni le cœur pour une telle tâche.»
Il la tira de près et fixa les yeux.
« —Partez avec moi, Miredhel. Pour L'Ithilien. Pour moi.
—Ce n'est pas une décision facile, Legolas, mais je n'ai jamais été du genre à me dérober face au danger, quelle que soit ma peur. J'irai avec vous.»
Les bras de Legolas l'enveloppèrent dans une étreinte serrée, la soulevant presque du sol.
« —Je serai toujours à vos côtés, Miredhel. Vous n'avez rien à craindre.», dit-il avec extase.
Elle n'eut qu'une sourire en retour et lui rendit son étreinte, riant à chacun de ses baisers sur sa joue.
« —Mais c'est à ce moment que je suis le plus en danger, déclara Miredhel, mi-plaisantant, mi-sérieuse.
— Vous doutez de ma capacité à vous protéger ?, demanda Legolas, feignant la tristesse.
—Mais qui me protégera de vous?»
Elle secoua la tête et la joie dans ses yeux laissait peu à peu transparaître la passion.
« —Je ne nierai pas que j'ai peur de ...»
Elle agita sa main entre eux.
« —de nous, Legolas. Mais surtout de vous..
—Est-ce pour cela que vous avez nié notre relation devant votre frère?», demanda-t-il soigneusement.
Mriedhel regarda le sol. Elle savait que ses actions avaient infligé de la peine à Legolas, mais elle ne regrettait pas d'avoir caché la vérité à Eledhel. Essayant désespérément de lui faire comprendre, elle aborda le sujet sous un angle différent :
« —Ne vous rendez vous pas compte du nombre de personnes qui parleraient? Spéculeraient ? Je me demande ce qui se passerait entre nous ? Legolas, je veux que ce qui se passe entre nous, reste juste, enfin, entre nous. Pas entre vous et moi et le reste de l'Ithilien.»
Ses yeux le suppliaient.
« —Est ce que c'est si mal de ma part?»
Legolas sentit toute raison s'échapper en un seul coup d'oeil dans ses yeux.
« —Non, ce n'est pas faux, Miredhel, mais…»
Il lui prit la main et l'embrassa doucement de la paume ouverte à la peau douce de son poignet.
« —Je veux le crier depuis la cime des arbres. Ce sont nos amis, Miredhel. Ils en seraient heureux pour nous.
—Je sais, Legolas, mais…»
Sa voix s'éteignit. Elle ne voulait pas admettre que leur liaison serait plus facile à oublier plus tard, surtout si elle était la seule à en avoir connaissance. Il y avait toujours moins de honte dans le secret, moins de gêne, moins de questions.
« —Tôt ou tard, les gens le comprendront, et je préfère que votre frère l'entende de nous plutôt que de la bouche des commères.»
Miredhel savait qu'il avait raison sur ce point et hocha la tête.
« — Eledhel est votre frère, Miredhel, mais il est aussi mon ami. Je voudrais qu'il reste ainsi. Il est un allié très précieux pour le perdre. Je ne veux vraiment pas qu'il pense que j'ai une liaison cachée avec sa sœur. Si vous ne lui parlez pas de nous, alors je le ferai.»
Miredhel soupira.
« — S'il vous plaît. Legolas. Que ce soit notre secret une nuit de plus.
—Cacher des choses comme ça, ce que je ressens pour vous, ce n'est pas dans mon caractère., déclara Legolas, obstiné.
« —S'il vous plaît!?»
Miredhel fit la moue avec ses yeux irrésistibles et un petit sourire s'étirant sur ses lèvres, Legolas sut qu'il céderait à sa requête.
« —Je veux que tout le monde le sache...mais si vous promettez de le dire à Eledhel aujourd'hui, alors je suppose que je peux attendre un jour de plus. »
Il lui sourit.
« —Je pourrais oublier et vous embrasser accidentellement devant tout le monde demain.»
Ses sourcils s'arquèrent de surprise.
« —Legolas ! »
Elle s'exclama puis rit.
« —Je pourrais vous laisser faire.»
Legolas l'attira dans une longue étreinte. Il embrassa son oreille, puis sa joue plusieurs fois, avant de poser légèrement ses lèvres contre les siennes. Il pouvait sentir la douceur et la chaleur de ses yeux , ses bras enroulés autour de son cou, les douces courbes de son corps contre le sien, et il resserra ses bras autour d'elle, approfondissant le baiser, inclinant sa tête d'une autre manière.
Il avait l'impression qu'il aurait pu se noyer dans cette douceur et son goût, mais les sons naturels de forêt disparurent et la lumière du jour s'assombrit comme à la venue d'une tempête. Legolas s'écarta rapidement. Mais, alors même qu'il était en train de le faire, les bois recommencèrnt à bourdonner, et l'obscurité s'était levée. Ses yeux perçants cherchaient dans le ciel des nuages annonciateurs, mais à sa surprise et à sa peur toujours croissante, il n'y en avait pas.
Il jeta un coup d'oeil autour de l'endroit isolé dans lequel ils avaient parlé avant de placer un chaste baiser sur ses lèvres.
« —Je dois y aller maintenant, dit-il en lui serrant la main. Nous étions en réunion et je dois réfléchir à l'itinéraire. Les capitaines vont penser que je me suis perdu.
—Vous êtes vous perdu?, tenta Miredhel espiègle.
—Non, je sais que je suis sur la bonne voie...si vous êtes là avec moi, répondit Legolas. Nous verrons-nous ce soir?»
Elle acquiesça.
« —J'y vais.»
Legolas retourna à sa réunion après avoir demandé à sa dame de retourner dans sa tente et d'y rester. Il n'était pas entièrement sûr de ce qui s'était passé là-bas dans la clairière , et quels que soient les événements étranges, il ne voulait pas que Miredhel soit impliquée.
Cependant, elle avait des plans différents. Miredhel ne voulait certainement pas retourner aussitôt à sa tente, où elle serait sans aucun doute soumise aux interrogations de Limaer pendant de longues heures sans interruption. Elle ne souhaitait pas non plus désobéir aux instructions de Legolas , alors elle finit par décider de revenir après une promenade tranquille et paisible au campement. Miredhel commença à parcourir le périmètre du camp à son rythme, en admirant les arbres et la faune étrange et différente.
Bien qu'elle ait fait de son mieux pour ne pas s'attarder à son sujet, une autre pensée revint sur Legolas. Une grande partie de ce qui s'était passé n'avait ressemblé qu'à un rêve. L'avait-il vraiment fait ? Elle pouvait encore sentir la trace chaude de ses baisers sur sa bouche, le long de son cou, sur sa main, son poignet. Depuis le moment où il l'avait surpris tomber durant l'attaque du dragon, peut-être même plus tôt que cela , son existence même avait été prise dans une brume chaude induite par présence, réconfortante, enivrante. Et quand il n'était pas avec elle, elle avait envie d'être à nouveau avec lui. Elle le reverrait plus tard ce soir, pour le dîner, puis elle se rappela avec consternation qu'ils partiraient tôt le lendemain matin pour se rendre au Gondor. Leurs voyages recommenceraient , cette fois rapidement pour sauver une ville et des gens dont Miredhel n'avait jamais entendu parler.
Et quelque part, le destin sourit avec un signe de tête à la tournure rapide des événements à venir alors que le temps était sur le point de filer encore plus vite, dangereusement. Les options avaient été pesées, le chemin choisi, et maintenant le voyage allait commencer.
