Bonjour à toutes et à tous !

Dans ce chapitre, nous faisons la liaison entre Thor: The Dark World, et Captain America: The Winter Soldier. Autant vous dire qu'il y a du pain sur la planche.

Bonne lecture !


Harry ou de l'éducation

Où un vieil ennemi pointe le bout de ses têtes

Chapitre sept, deuxième partie

Dans sa vie professionnelle, Virginia était douée pour deux choses : gérer Stark Industries et tout ce que cela impliquait, et gérer les retombées médiatiques et politiques du comportement autodestructeur d'un certain Anthony Stark.

À plusieurs reprises elle s'était fait la réflexion que ses deux compétences ultimes étaient étroitement liées, et que former un couple avec son employeur n'était pas la meilleure des stratégies sur le long terme, mais que voulez-vous, parfois ce n'était pas une question de stratégie.

Virginia avait longtemps été grassement payée pour gérer la vie de Tony Stark, mais une fois devenue CEO de Stark Industries et Tony devenu Iron Man, les choses avaient considérablement changé. La première d'entre elles, et la plus importante : Tony devait gérer lui-même sa vie.

Ce n'était pas exact. En réalité, Virginia avait longtemps géré la vie de Tony, en partenariat étroit avec JARVIS, et une fois devenue CEO — en omettant le fiasco Natalie Rushman — JARVIS avait été désigné unique assistant personnel de Monsieur Stark. Mais il était difficile de se débarrasser du jour au lendemain d'habitudes prises sur des années. Heureusement, ses nouvelles fonctions étaient suffisamment prenantes et elle avait vite pris de nouvelles marques et Tony avait appris à faire sans elle.

Puis, ils s'étaient mis ensemble.

Virginia avait conscience d'avoir une chance incroyable : elle était riche. Ses parents étaient eux-mêmes très aisés, mais sa grand-mère maternelle était issue d'un milieu très modeste et Virginia l'avait souvent écoutée raconter sa vie de jeune fille dans une petite ville pauvre du sud des États-Unis. Elle avait raconté la double journée, les salaires de misère pour les femmes, l'absence de certaines commodités, l'arrivée miraculeuse de l'électroménager, avant la rencontre avec son futur mari, jeune homme de bonne famille, qui s'était battu pour épouser une femme qui n'était pas de son rang social.

Donc si Virginia ne connaissait pas dans sa chair la violence patriarcale qui imposait aux femmes de travailler à l'extérieur et à la maison à la fois, elle savait que cette méconnaissance était un privilège. Elle n'avait pas à tenir la maison, elle se tenait grâce à des robots ou des employés de maison qui faisaient ce travail à sa place et à la place de Tony. Pas de charge mentale pour elle, ou très réduite, qui lui permettait de rentrer chez eux et de profiter des moments où elle n'était pas au bureau. Tony était Tony, il arrivait tout de même à la faire sortir de ses gonds, trop déconcentré par ses idées et ses découvertes pour se rappeler leur anniversaire de rencontre, alors que JARVIS veillait au grain et le lui rappelait tous les jours une semaine avant la date fatidique.

En quelques mois, à la tête de Stark Industries, Virginia avait perdu certains réflexes. Elle ne vérifiait plus constamment l'emploi du temps de Tony, ne lui faisait plus de rappel pour ses réunions ou pour les galas où ils étaient attendus. Si elle le faisait, c'était au détour d'une conversation, comme une conjointe à son conjoint pour s'organiser ensemble et non plus comme un devoir d'une assistante pour son patron.

Puis, il y avait eu Harry.

Virginia découvrit qu'être parent, c'était un peu comme être un assistant personnel, mais associé à une responsabilité accrue et un manque total de reconnaissance salariale. Tout en étant le plus beau métier du monde. Allez comprendre.

Avant même d'avoir rencontré le cousin de Tony, qui allait devenir son fils, elle ne savait déjà plus où donner de la tête. Préparer la villa, organiser sa venue, gérer la presse, elle se serait crue revenue quatre ans en arrière, lorsqu'elle gérait la vie de Tony Stark, l'alcool et les conquêtes sexuelles en moins. Elle découvrait qu'être parent était difficile, fatigant et terrifiant.

Mais elle ne changerait cela pour rien au monde, pour deux raisons. D'une part, Harry, évidemment. Le petit garçon était aimant, charmant, pas difficile pour un sou et rendait de l'amour au centuple. D'autre part, parce que Tony avait plus mûri en un an que depuis le premier jour de leur rencontre. Être père lui allait bien. Il prenait son rôle au sérieux, et avait immédiatement intégré Virginia dans toutes les décisions à prendre pour l'avenir de Harry.

Elle n'avait jamais regretté d'avoir accepté de prendre le petit garçon avec eux, ni quand il avait fallu traiter avec le monde sorcier et tous leurs a priori, ni pendant le fiasco provoqué par AIM et Killian, ni quand elle se chargea de limiter les dégâts provoqués par l'apparition de Harry en pleine bataille contre des extra-terrestres.

Une conférence de presse était un spectacle de prestidigitation, et Virginia en était la metteuse en scène. L'objectif était de détourner les regards vers un leurre pour empêcher le public de voir ce qui était vraiment important, et tous les coups étaient permis. Virginia avait donc placé une complice dans la salle.

Longtemps, Virginia et Christine Everhart avaient été ennemies. Avant même la relation éphémère entre Tony et la journaliste, celle-ci s'était spécialisée dans la documentation des exactions de guerre commises avec des armes américaines. Stark Industries était une cible parmi les autres, Hammer, Lockheed Martin et même Boeing étaient dans le viseur de la journaliste.

Puis Christine avait quitté Vanity Fair et avait été embauchée pour être le visage du géant de l'information télévisuel, WHiH World News, tandis que Stark Industries provoquait un mini séisme dans le monde des affaires en arrêtant séance tenante toute production d'arme. L'histoire entre elles aurait pu s'arrêter là, mais le monde des puissants était petit, et leurs enfants étaient scolarisés au même endroit et étaient devenus amis.

Virginia et Christine n'étaient pas devenues amies, et la tension gênante entre la journaliste et Tony n'avait pas disparu, mais les uns et les autres avaient appris à mettre de côté leurs ressentiments pour le bien de leurs enfants. Ce fut donc tout naturellement que Virginia contacta Christine pour lui expliquer la situation — toutes proportions et statut du secret gardés — et lui demander son aide.

Soixante-douze heures après les événements de la Convergence, Virginia était en coulisse pendant que Tony et Jane Foster menaient la conférence de presse dans le hall du Shard. Pour éviter la cohue, seulement une cinquantaine de médias avait été accréditée, et des journalistes de tous les hémisphères se pressaient pour interroger les deux scientifiques.

Tout d'abord, Jane expliqua avec les mots les plus simples possible ce qu'était la Convergence, pourquoi il ne fallait pas en avoir peur et pourquoi les choses avaient mal tourné. Sans trop en dévoiler, elle expliqua son rôle dans l'affaire et pourquoi Loki se trouvait aussi sur place. Enfin, Tony raconta comment Harry était passé à travers un pont d'Einstein-Rosen éphémère qui s'était ouvert au milieu de leur salon pour atterrir en plein Londres, à des milliers de kilomètres. Heureusement protégé par Jane Foster, le petit garçon s'en était tiré avec plus de peur que de mal.

« Vous voulez nous faire croire qu'un trou noir s'est ouvert par hasard dans votre salon pour mener par hasard au milieu de la bataille à Londres ? demanda Christine avec perplexité.

— Oh, je ne prétends pas qu'il s'agisse d'un hasard, répliqua Jane Foster. Le seul hasard dans cette histoire est que la Tour Stark a été construite au mauvais endroit et à la mauvaise hauteur. J'ai pu modéliser l'ouverture des ponts tout autour du globe grâce à des calculs que je ne vais pas exposer ici, mais un article scientifique est en préparation pour ceux que cela intéresse. Si vous voulez bien tourner votre attention sur cet écran, voilà. Nous avons donc l'épicentre du phénomène au-dessus du quartier de Greenwich à Londres, mais avant cela, pendant au moins soixante-douze heures, des phénomènes similaires de plus petite ampleur se sont ouverts tout autour de la planète sur un modèle très particulier. »

L'écran affichait la modélisation d'une planète Terre en trois dimensions, que Jane faisait tourner sur elle-même. Tout autour, des petits points rouges apparaissaient formant une spirale qui commençait à Londres, assez proche du niveau de la mer, pour s'éloigner et s'élever petit à petit. En atteignant New York, la spirale était si haute qu'il était très improbable de croiser la route d'un être humain, sauf si celui-ci se trouvait dans un gratte-ciel.

« Moi-même je suis passée par un des ponts ouverts dans Londres, et j'ai dû monter sur un étage pour l'observer. S'il y a eu aussi peu d'incidents, nous en avons recensé moins d'une dizaine sur toute la planète, c'est surtout parce que les portails s'ouvraient à des hauteurs trop importantes, et que la concentration des gratte-ciel est trop faible sauf à des endroits particuliers. Le jeune Harry a manqué de malchance. Il est passé par un pont, à quelques minutes de l'apogée de la Convergence et a donc été aspiré jusqu'à Londres. J'ai pu heureusement le protéger.

— Et nous t'en serons éternellement reconnaissants, Jane, dit Tony avec la franchise la plus totale. »

L'avalanche d'explications scientifiques sembla suffire aux journalistes qui ne posèrent pas plus de questions à ce sujet, mais se concentrèrent sur les répercussions des destructions et des traumatismes psychologiques. Tony fut ravi d'expliquer que son fils était suivi par des professionnels de santé, les meilleurs dans leurs domaines respectifs, et qu'il voyait évidemment un psychologue.

Une bonne partie des explications de Foster était un bon gros mensonge, mais qui pourrait le prouver ? L'objectif de détourner l'attention de Harry vers Foster était réussi, grâce à tous les acteurs sur scène et dans le public. Après la conférence, Virginia ne manqua pas de remercier chaleureusement Christine pour sa question bien placée et l'invita à déjeuner la semaine suivante.

Le retour à New York fut moins éprouvant que ce que Virginia avait craint. Les choses ne revinrent pas à la « normale » puisque rien n'était normal dans leur vie, mais ils s'adaptèrent vite aux changements dans leurs routines respectives. Jasper Sitwell accompagnait Harry à l'école tous les matins. Le petit garçon et l'agent se rejoignaient dans le parking privé du sous-sol de la tour, où un chauffeur du service de sécurité de Stark Industries les conduisait jusqu'à Calhoun. Évidemment, Virginia avait demandé son avis à Clint Barton qui avait qualifié Sitwell d'agent très compétent avec un balai dans le cul.

Virginia et Tony attendirent une bonne semaine avant de remettre l'emploi du temps de Harry à plat. Il était devenu évident que leur fils avait besoin d'aide pour apprendre à utiliser sa magie. Le MACUSA les orienta vers une enseignante à la retraite, la Professeure Eulalie Hicks, qui avait enseigné les Sortilèges à l'école d'Ilvermorny pendant soixante ans, peu importe ce que cela pouvait bien vouloir dire.

Le premier contact se passa très bien. La vieille dame constata la maturité inhabituelle de la magie de Harry et accepta bien volontiers de lui enseigner quelques bases afin de canaliser toute cette énergie. Ils se mirent d'accord pour une rémunération et un planning. Mrs Hicks recommanda une leçon bihebdomadaire, car Harry était encore très jeune. Il ne fallait pas trop mobiliser sa magie avant un certain âge, car elle était encore en développement.

Trouver un créneau horaire fut un peu plus laborieux. D'abord, Virginia et Tony proposèrent de sacrifier un entraînement de handball, mais Harry fut inflexible. Il ne voulait pas que son sport de prédilection lui fût retiré. Un sport d'équipe ne permettait pas à un de ses membres de quitter le groupe aléatoirement. Ses parents furent enchantés de l'écouter argumenter fermement. Virginia avait encore en tête le gamin apeuré, incapable de dire non à un adulte, qu'il avait été quelques mois plus tôt seulement. Les activités autour du leadership portaient leurs fruits, il fut donc décidé que ce fût cette activité-là qui serait amputée d'une séance toutes les deux semaines.

Le mois de décembre s'écoula paisiblement. Harry découvrit Thanksgiving et son cortège de repas plus bourratifs les uns que les autres, mais Virginia était contente et émue de voir ses parents devenir Pop et Nan. Ils gâtaient leur petit-fils à la manière unique des grands-parents. Virginia ne cherchait pas à les décourager. L'expression incrédule de Harry face à chaque gentillesse était révélatrice du manque affectif que seuls deux parents tardifs ne pouvaient combler. Tout le monde était aussi satisfait du travail de Jasper. Il était discret et efficace, sans être intrusif et était devenu en quelques semaines un confident non parental pour Harry.

En un mois et demi, la petite famille avait retrouvé une routine rassurante, ponctuée par des moments drôles ou émouvants. Harry fut même autorisé à inviter ses amis à la Tour pour un après-midi, pendant lequel Jasper augmenta la sécurité avec la même discrétion professionnelle qu'à son habitude.

D'un point de vue moins familial, Virginia fut très occupée par l'élargissement des compétences de la fondation Rescue, créée et financée par Stark Industries. Elle défendait devant les chambres des représentants des États-Unis la fonction d'intérêt public de la fondation qui lui permettrait de s'autonomiser de Stark Industries. L'étape suivante serait de demander l'homologation comme ONG, mais il y avait encore beaucoup de chemin à parcourir.

La fondation Rescue avait attiré l'attention de la Sénatrice républicaine, Libby Atwood. Celle-ci présidait la sous-commission sénatoriale chargée des menaces émergentes et potentielles. En quelques années, le monde avait été mis devant le fait accompli : les extra-terrestres existaient, et certains étaient belliqueux. Il fallait donc répondre à cette menace, mais aussi penser aux conséquences des batailles parfois dantesques qui se déroulaient souvent dans des zones urbanisées. La fondation Rescue retirait une épine du pied du gouvernement américain. En assumant une grande partie des frais de reconstruction, elle faisait économiser des centaines de millions de dollars U.S. en ne réclamant rien aux pouvoirs publics. Rescue était financée exclusivement par des dons de particuliers et de personnes morales, de fonds de pension, en bref uniquement des fonds privés.

Rien ne faisait plus plaisir à la Sénatrice Atwood qui ne jurait que par la réduction des dépenses publiques et la résorption de la dette publique fédérale.

Virginia avait conscience qu'elle n'allait pas pouvoir gérer elle-même la fondation. Comme Bambi ne cessait de le lui rappeler, Samantha Carlisle en était la gestionnaire, pas elle. Cependant, pour les rendez-vous aussi importants, Virginia préférait être présente.

Un déjeuner était plus informel qu'un rendez-vous dans un bureau, et il était plus facile de se laisser embobiner le ventre plein.

Elle se félicita de cette initiative lorsqu'elle vit que la sénatrice n'était pas venue seule. Le sénateur Stern et son sourire mielleux l'accompagnaient. Carlisle était douée, mais elle n'avait pas encore toute l'expérience nécessaire pour traiter avec des gens comme Stern. Tout le monde se serra la main en assurant que non, non, il n'y a aucun mal, même si Stern n'était pas membre de la commission menaces émergente, mais de la commission armement.

Le déjeuner était cordial, et Virginia parvint à louvoyer habilement pour ne pas mentionner Iron Man une seule fois. Stern rongeait son frein et Virginia jubilait. Carlisle s'en sortait bien mieux que ce qu'elle avait imaginé et ils étaient parvenus à un accord oral informel au dessert, quand le téléphone de Virginia bipa dans son sac. Distraitement, elle consulta le SMS reçu, s'attendant à voir un message de Tony lui demandant comment se passait le rendez-vous, mais il s'agissait d'un numéro masqué et ce qu'elle lut lui gela les entrailles.

Fury tué. Je passe en silence radio – Katniss

Elle eut du mal à contenir ses émotions, et ses vis-à-vis s'en rendirent compte.

« Quelque chose ne va pas, Mrs Potts ? demanda Stern avec une considération feinte.

— Rien de grave, assura-t-elle. Mon fils est malade. C'est la première fois qu'il rentre plus tôt de l'école à cause d'une chose aussi simple qu'un mal de ventre, et me voilà tout inquiète. Je ne suis pas encore habituée à tous les aspects de la parentalité.

— Oh, on ne s'y habitue jamais tout à fait, sourit Atwood avec connivence. Si vous voulez rentrer, nous ne vous en tiendrons pas rigueur. Souhaitez un prompt rétablissement à votre fils, Harry, c'est cela ?

— Tout à fait. Merci Madame la Sénatrice. Monsieur le Sénateur. Samantha, je vous appelle demain sans faute. »

Virginia attendit d'être à l'abri dans sa voiture, isolée même de son chauffeur habituel pour appeler Tony. Il n'avait pas plus d'information qu'elle et personne ne répondait.

Un peu plus tard dans la journée, la nouvelle tomba : Captain America et Black Widow étaient des traîtres en fuite.


C'est un petit cliffhanger, j'avoue, mais vous n'êtes pas prêts pour la suite. Pas du tout.

*Rire démoniaque*