Le Maître et le Docteur. L'un espère sauver l'autre et l'autre espère être à la hauteur. Pendant longtemps, Missy, le Maître a répandu le chaos dans l'univers, mais maintenant elle a la ferme intention de changer. Elle veut changer pour le Docteur, son seul et plus cher ami. Ce qui les lie est bien plus complexe qu'il n'y paraît. Amour ? Amitié ? Ils savent juste qu'ils seront toujours là, l'un pour l'autre.
Se base sur l'idée originelle de la série, selon laquelle Missy ne meurt pas et est enceinte.
DISCLAMER : Cet univers et ces personnages ne m'appartiennent pas… malheureusement :'(
BONNE LECTURE ^^
– Chapitre 1 – Jusqu'à la fin…
« L'amitié est un fil d'or qui ne se brise qu'à la mort. » – ANONYME
Le moment était venu. Elle ne pouvait plus reculer l'échéance. Il devait savoir. Elle devait lui avouer. C'était maintenant ou jamais. Elle avait enfin réussi à se débarrasser de son incarnation passée, mais pour cela, elle avait laissé croire à son Docteur qu'elle l'avait abandonné. Elle devait lui avouer tout. Lui avouer ce qu'elle venait de faire, ce qu'elle avait décidé et ce qu'elle lui cachait depuis quelques semaines. Mais elle n'avait pas encore le courage d'affronter son regard déçu et sceptique. Il s'était montré simultanément si dur et si doux envers elle, depuis ces soixante dernières années. Il fallait qu'elle trouve le courage d'être totalement honnête avec son ami… Honnête comme elle ne s'était jamais autorisée à l'être jusqu'ici. D'autant plus que d'ici, justement, elle voyait et sentait très bien sa tristesse, sa déception et sa colère.
Elle le voyait, lui. Il était dos à elle et discutait avec Nardole et une enfant. Les cœurs de Missy se serrèrent en songeant que cette enfant était, aux yeux de ses créations, un potentiel Cyberman. Un parfait Cyberman. Les enfants étaient si parfaits pour ces cyborgs. Et cela lui faisait mal. Un tel processus infligé à des Humains était déjà ignoble, alors l'infliger à des enfants… Elle posa une main sur son ventre, songeant rapidement à la vie qu'elle portait en elle. Elle avait envie de pleurer alors que l'idée que son propre enfant soit en danger comme cette fille la frappait avec violence. Peut-être était-ce son nouvel instinct maternel qui la poussait à une telle pensée, mais elle s'assurerait que cette enfant soit en sécurité avant que l'armée de Cybermen n'arrive. Elle y veillerait personnellement.
Un mouvement attira son attention. C'était Nardole. Il la fixait, paniqué, et essayait d'attirer l'attention du Docteur sur elle. Mais ce dernier était bien trop occupé avec la petite fille. Missy prit une profonde inspiration. Elle devait le faire. Un mot. Un simple mot pour le forcer à la regarder. De toute manière, elle savait qu'il avait senti sa présence.
– Docteur ? appela-t-elle d'une voix étonnement faible.
D'ordinaire, elle était assurée, même avec son ami avec qui elle pouvait, pourtant, se montrer vulnérable. Elle se maudit intérieurement de paraître aussi faible devant les autres. Ce n'était pas un problème de l'être devant son ami d'enfance, mais ça le devenait dès qu'il y avait des gens avec lui. Le Docteur s'éloigna de Nardole et de la petite fille à qui il venait de confier… une pomme. Il était vraiment étrange.
– Missy ? Votre alter ego masculin s'est enfui sans vous ?
S'appuyant sur son grand bâton, il se dirigea vers son amie d'enfance. Lui faisait-elle à nouveau une terrible farce ? Était-elle vraiment revenue ? Était-ce par nécessité ? Ou avait-elle choisi de revenir vers lui ? Avait-elle vraiment changé comme il l'avait cru ? L'espoir se mêlait à nouveau à la douleur. Il avait pensé la perdre lorsqu'elle était partie. Il avait vraiment eu peur de perdre à nouveau son amie après toutes ces années d'espoir. Mais il s'était également senti soulagé. Une partie de lui était soulagée de se dire que son amie était en sécurité, maintenant. Mais elle ne l'était plus. Maintenant, en cette seconde, elle était debout face à lui et en danger. Et il était à nouveau partagé entre joie et angoisse. Pourquoi n'était-elle pas partie ? Pourquoi ne s'était-elle pas mise en sécurité comme il l'avait pensé ?
– Plus ou moins, répondit-elle avec un léger sourire. Mais il n'a pas vraiment eu son mot à dire.
Missy fit un clin d'œil et parcourut la distance qui la séparait de son Docteur. Elle voulait simplement lui parler. Lui dire tout ce qu'elle avait sur le cœur, le rassurer et lui assurer qu'il pourrait avoir confiance en elle à l'avenir. Elle voulait seulement pouvoir lui assurer que tout irait bien, maintenant. Mais comment pouvait-elle savoir que tout irait bien ? Une armée… Son armée dont elle avait perdu le contrôle. Elle ne pouvait garantir que son amitié et sa sincérité. Et elle espérait que ce serait suffisant pour l'instant.
– Vraiment ? interrogea-t-il en haussant les sourcils.
– Je n'ai jamais voulu vous abandonner. Vous aviez raison. J'ai changé, avoua-t-elle, les larmes aux yeux.
Elle avait plus pleuré ces dernières décennies que pendant des siècles entiers. Et elle devait ce désagrément à son ami. Son ami qui s'était évertué à la faire changer. À lui faire entendre « la musique », comme il disait si bien. À présent, elle comprenait mieux le sens du mot « compassion ». Elle avait promis au Docteur de faire le bien et c'était ce qu'elle avait la ferme intention de faire. Et pourtant il lui était très difficile de devoir mettre de côté son instinct de survie et de protection. Parce que oui, en tant que future mère, elle trouvait sa décision complètement stupide et irresponsable. Elle aurait dû tout mettre en œuvre pour protéger ce petit être qui n'avait pas encore vu le jour. Pendant un instant, l'idée d'avoir pris la mauvaise décision lui effleura l'esprit. Mais elle la repoussa vite. Elle était là pour le Docteur, pour l'aider, pour avoir une chance de le sauver.
– J'espère que vous ne me mentez pas.
La tristesse dans sa voix fit mal aux cœurs de Missy. Elle avait tant espéré ne pas lui avoir fait si mal en le laissant plus tôt. Mais ça n'avait été qu'un espoir. Parce qu'au fond d'elle, elle savait le mal que cela lui faisait à chaque fois qu'elle agissait ainsi. Parce qu'elle aussi avait déjà ressenti un tel sentiment lorsqu'elle espérait convaincre le Docteur de se laisser aller et de faire le mal avec elle. Elle aussi connaissait ce sentiment d'espoir déçu.
– Je ne le veux pas. Je ne veux plus avoir à vous mentir, Docteur. Je veux être honnête avec vous. J'espère que vous me croirez, comme vous pensiez que je pouvais changer. Je devais accompagner ma version masculine. C'était le moment de ma régénération.
Les yeux du Docteur brillèrent. Elle lui avait confié à plusieurs reprises ne pas se souvenir de sa régénération en femme. Tout s'expliquait, maintenant. Elle ne pouvait pas s'en souvenir si elle l'avait provoquée elle-même. Les lois du Temps. Mais maintenant que le moment était venu, elle s'en souvenait. Il le fallait pour ne pas créer de paradoxe. Il ne put empêcher un petit sourire d'étirer ses lèvres. Il était heureux qu'elle soit là, près de lui, même pour le pire. Et il était heureux qu'elle soit là de son plein gré. Il était infiniment heureux que rien ne l'ait forcée à rester auprès de lui.
– Sommes-nous à nouveau amis ? demanda-t-elle, une larme coulant sur sa joue.
– Je ne partirai pas d'ici sans avoir aidé ces gens, prévint-il.
– Alors je ne partirai pas non plus, assura-t-elle.
Le Seigneur du Temps tendit sa main gauche à Missy. Si elle revenait pour l'aider dans une situation aussi désastreuse, alors qu'elle avait eu la possibilité de partir, elle méritait sa confiance et son affection. La Dame du Temps sourit à travers ses larmes. Il lui faisait à nouveau confiance. Elle avait tant douté, après l'avoir abandonné au profit de son homologue masculin. Elle prit sa main et la serra avec douceur. Elle ne le laisserait plus jamais. Son destin était de rester auprès de lui. Mais il lui restait quelque chose à lui avouer. Quelque chose qu'elle aurait préféré lui confier en un jour plus paisible. Mais elle n'avait aucune certitude que ce jour viendrait.
– Avez-vous autre chose à me dire ? s'inquiéta le Docteur.
– En effet. Mais je… je ne sais pas comment vous l'annoncer. Peut-être pourrions-nous nous asseoir ? tenta Missy en désignant une pile de rondin de bois.
Son ami était suffisamment faible. Il avait tenté de le cacher à ses compagnons, ses animaux de compagnie, mais elle, elle avait vu et elle avait compris. Il était en pleine régénération. Elle le sentait qui essayait de contenir son énergie régénératrice. Elle sentait cette dernière émaner de lui avec difficulté pour essayer de le maintenir en vie.
Les deux Seigneurs du Temps s'assirent, toujours main dans la main. Lui qui n'avait jamais été tactile – en particulier avec cette dernière apparence – ne semblait plus vouloir la lâcher. Il avait toujours été ainsi, à prendre soin d'elle, même lorsqu'elle ne le méritait pas. Mais aujourd'hui, elle espérait bien le mériter.
– Missy, je dois d'abord vous prévenir que nous disposons d'un temps limité, alors il va falloir faire vite, l'informa le Docteur.
Cela ne facilitait pas la tâche de Missy. Ce qu'elle avait à lui annoncer ne devrait pas être fait ainsi, à la va-vite. Pas après ceux qu'ils avaient tous deux perdus. Peut-être ne devrait-elle pas lui en parler ? Et si elle perdait l'enfant et qu'eux restaient en vie ? Se le pardonnerait-elle ? Lui pardonnerait-il ? Le mal qu'elle pourrait lui causer…
– Missy ? s'inquiéta l'Écossais qui n'en était pas vraiment un.
Elle prit une inspiration, puis deux, puis trois. Oui, il avait le droit de savoir.
– Je ne voulais pas vous l'annoncer ainsi, mais je n'ai pas d'autre choix. C'est le moment ou jamais, comme disent les Humains, rit-elle. Je ne peux pas vous laisser dans l'ignorance plus longtemps puisque cela vous concerne également. Voilà ! Je… je vais avoir un enfant, reprit-elle rapidement.
Elle sentit la pression sur sa main se faire plus forte. Elle osait à peine le regarder. Quelle annonce, en pareilles circonstances… Elle jeta un coup d'œil à son vieil ami. Ses sourcils étaient froncés. Il ne la regardait pas. Il réfléchissait. Mais elle sentait qu'il refusait de la regarder. Parce que s'il la regardait dans les yeux, il comprendrait plus vite la portée de son annonce. Parce que s'il la regardait dans les yeux, il ne pourrait pas lui cacher avoir déjà compris. Et parce que s'il la regardait dans les yeux, il ne pourrait pas douter un seul instant de l'origine de cet enfant.
– En quoi… cela me concerne-t-il ? interrogea le Seigneur du Temps.
Missy écarquilla les yeux. Pourquoi jouait-il à l'imbécile ? Il ne voulait vraiment pas comprendre ce qu'elle venait de lui annoncer. Peut-être ne voulait-il simplement pas faire le lien entre cette nuit unique, mais intense qu'ils avaient passés ensemble récemment ? Non, elle savait qu'il ne voulait pas faire ce lien. Elle savait qu'il refusait catégoriquement de risquer la vie de son dernier enfant. Elle savait qu'il refusait l'idée de perdre à nouveau un enfant si tôt. Bien sûr, elle ne s'était pas attendue à ce qu'il le prenne bien. Mais elle s'était sentie obligée de le lui confier. Elle voulait qu'il le sache, non pour lui faire du mal, mais bien par affection. Elle lui devait la vérité.
– Docteur, je n'ai côtoyé personne en plus de soixante ans. Le seul homme que je voyais régulièrement c'était vous. À votre avis, pourquoi cela vous concerne-t-il ? répliqua-t-elle.
Elle se devait d'être dure. De lui faire comprendre qu'il ne pouvait pas fuir la réalité et nier les faits. Il devait comprendre et vite. Le temps leur était compté.
– Vous auriez dû partir avec lui… murmura-t-il simplement, l'air abattu.
Ces mots, lui avaient coûté. Le Seigneur du Temps aurait préféré ne pas avoir à les dire. Il aurait préféré retourner à la joie qui avait été la sienne lorsqu'il avait compris qu'il avait retrouvé son amie d'enfance. Il aurait préféré ne pas se dire que les principes moraux qu'il avait inculqués à Missy pendant ces dernières années avaient probablement condamné leur enfant à naître. Une nouvelle fois, la culpabilité s'immisçait dans chaque fibre de son corps.
– Vous n'êtes pas sérieux ? Vous n'avez cessé de me répéter que je devais faire le bien et maintenant que j'essaie, vous me dîtes que j'aurais dû fuir ?
Elle se leva d'un bond pour regarder le Docteur dans les yeux. Bien sûr, elle comprenait cette réflexion. Elle-même y avait pensé. Mais c'était trop tard pour regretter sa décision.
– Mais vous aviez raison : je ne peux pas gagner. Je ne peux pas… garantir votre sécurité ou celle de notre enfant, fit-il avec plus de véhémence.
– Et vous aviez dit que l'important n'était pas de gagner mais de faire ce qui était juste ! protesta-t-elle.
– Mais pas aux dépens de notre enfant, Missy. S'il n'est pas trop tard, je vous envoie avec Nardole et les enfants.
Le Docteur se leva vivement. Il ne pouvait pas se permettre de les perdre tous les deux. Pour une fois, rien que pour une fois, il aurait préféré que le Maître le trahisse à nouveau. Ça aurait été la seule garantie pour l'avenir de son amie et de leur enfant.
– Certainement pas. Sans parler de l'intense agacement qu'il me procure, je préfère mourir en faisant le bien, plutôt que de continuer sans vous. Vous êtes mon seul ami. Le seul qui peut croire en moi, même quand moi, je n'y crois pas. Vous êtes le seul à faire ressortir le bien en moi. Qu'arriverait-il à notre enfant si je m'en occupais seule ? Serais-je capable de continuer alors que vous n'êtes plus là pour me rappeler ces agaçants principes de moralité ?
– Missy, je n'avais pas prévu de survivre à ce qui arrive. Je pensais mourir en essayant de protéger ces gens. Je ne sais pas le moins du monde comment vous protéger des Cybermen.
Il plongea son regard clair et empli de désespoir dans celui de sa plus ancienne amie. Il devait à tout prix lui faire comprendre la gravité de la situation. Il en était sûr, sa régénération ne lui avait pas échappé, mais autre chose. Le fait qu'il n'avait pas envisagé de survivre, de continuer après cette bataille. Il pensait mourir en faisant ce qu'il avait toujours fait : en protégeant des innocents. Il pensait mettre Nardole et les habitants en sécurité plus haut dans le vaisseau. Il pensait que le Maître et Missy étaient partis se mettre en sécurité. Il pensait que seule Bill, qui était devenue un Cyberman, allait être à ses côtés pour éliminer le plus de Cybermen possible. Il ne pensait pas devoir protéger son amie enceinte de lui. Il avait tout prévu, sauf cela.
Que devait-il faire à présent ? Il ne pouvait pas abandonner Missy, mais il ne pouvait pas non plus la mettre inconsidérément en danger avec leur enfant. Pouvait-il vraiment envisager de se laisser mourir ainsi ? La douleur, la tristesse et l'espoir se battaient avec acharnement les uns contre les autres. Il était si fatigué, si las de vivre. Il avait déjà tant perdu, tant aimé, tant espéré. Cela n'était-il pas le moment de tirer sa dernière révérence ? Pas selon Missy, en tous cas. Elle voulait qu'il vive. Elle voulait qu'il l'aide à devenir quelqu'un de meilleur. Elle voulait qu'il soit là pour voir leur enfant venir au monde, le voir grandir, vieillir, se marier et avoir des enfants à son tour. C'était lui aussi tout ce qu'il avait toujours voulu. C'était ce qu'il avait pu voir avec ses premiers enfants, mais ça ne s'était pourtant pas bien fini. Il les avait perdus si vite, eux et sa benjamine, née grâce à une machine de progénation. Et s'il arrivait quelque chose à cet enfant ? Pourrait-il survivre à la disparition d'un énième enfant ? Il n'était pas sûr de vouloir tenter l'expérience. Et puis, n'était-il pas trop vieux pour cela ? Un enfant à son âge… Ses premières expériences lui semblaient si lointaines. N'avait-il pas déjà eu une vie bien remplie ? Si. Et pourtant, on lui offrait une autre chance. Mais quelle chance ? Survivraient-ils à cette bataille ?
– Docteur ?
Ce dernier réalisa alors, qu'il s'était égaré dans ses pensées. Missy lui prit la main, dans un geste rassurant. Elle avait compris sa détresse, il le sentait. Mais il sentait également sa détresse à elle. Il sentait qu'elle était inquiète, pleine de regrets. Il savait qu'elle doutait d'avoir pris la bonne décision, malgré ce qu'elle lui disait. Il voulut la prendre dans ses bras, la rassurer, la protéger.
– C'est trop tard pour que je fuie. Ils arrivent, murmura-t-elle avec un regard désolé.
Elle regrettait vraiment de l'avoir mis dans une telle situation. Elle regrettait de mettre leur enfant dans une telle situation. Mais elle ne regrettait pas le moins du monde de rester à ses côtés, jusqu'à la mort. C'était ainsi que cela aurait dû toujours être. Le Docteur et elle, ensemble, jusqu'à la fin.
– Docteur ?
Une autre voix se fit entendre derrière eux. Une voix robotique. Une voix inhumaine et pourtant pleine d'émotion. C'était Bill. Sa dernière compagne et l'une de celles qui finissaient le plus tragiquement. Il aurait aimé pouvoir la protéger, elle aussi. Pouvoir lui assurer qu'elle retournerait assister à ses cours. Pouvoir lui assurer qu'elle pourrait revoir son visage dans un miroir. Mais il ne pouvait pas. C'était déjà trop tard pour elle. Et c'était la seule raison pour laquelle il lui avait promis de ne pas s'opposer à son choix. C'était pour cette raison qu'il lui avait promis que s'il ne pouvait pas la récupérer, que si elle ne pouvait plus être elle, alors il l'aiderait à ne plus être du tout. C'était parce qu'il sentait sa douleur. Une douleur inhumaine qui aurait pu la rendre folle si elle en avait pleinement conscience.
– Nardole vient de partir avec le reste des habitants. Les Cybermen arrivent, les informa-t-elle.
Bill tourna son nouveau visage vers Missy, le Maître. La personne responsable de tout ça.
– Que faîtes-vous encore ici ? Vous vous délectez du désastre que vous avez causé ?
Malgré la voix robotique, on pouvait sentir la haine et la colère dans les paroles de l'ancienne jeune femme.
– Elle est revenue pour nous aider, Bill. Et même si c'est très tentant, il faut que vous me trouviez un moyen pour me la mettre en sécurité.
Le Docteur jeta le bâton sur lequel il s'était si longtemps appuyé et sauta face à ses deux amies, un grand sourire aux lèvres, les deux bras levés. C'était le moment d'avoir une idée de génie et bien qu'il n'en ait pas encore une, peut-être qu'en faisant semblant, l'idée de génie se concrétiserait d'elle-même.
– Je vous interdis. Je vous préviens, Docteur, que si vous essayez de m'éloigner, vous ne mourrez pas de la main des Cybermen, mais de la mienne, menaça l'ancienne maîtresse du chaos.
– Et en quoi cela nous avancerait-il ? répliqua-t-il vivement en tapant dans ses mains avec un étrange enthousiasme.
– Vous êtes en train de délirer ? s'inquiéta Missy en s'approchant de lui.
– C'est fort probable, mais en pareil cas, je n'ai pas assez de temps pour me montrer plus inventif.
– Vous n'aurez pas besoin de vous montrer inventif, puisque je reste avec vous, Docteur, affirma la Dame du Temps. Je ne partirai pas. Je ne me mettrai pas en sécurité, et ce, peu importe ce que vous ferez. Nous mourrons ensemble ou pas du tout.
– Vous voyez ? coupa Bill. Pourquoi vouloir la mettre en sécurité si elle veut mourir ?
Bill ne cachait pas la rancœur – haine ? – dans sa voix. Comment le Docteur pouvait-il supposer qu'elle accepterait d'aider ou de protéger Missy ? N'était-elle pas capable de se débrouiller seule ? Bill se sentait également attristée à l'idée que le Docteur puisse encore vouloir protéger Missy après ce qu'elle – qu'il ? – lui avait fait. Il lui avait expliqué ce qu'elle représentait à ses yeux. Sa plus vieille amie dans tout l'Univers. Ils avaient grandi ensemble. Le Maître avait même été son premier amour. Et le Docteur était convaincu qu'elle pouvait changer. Mais en était-il vraiment à vouloir, à ce point, la protéger ?
– Merci, ma chère, ironisa la Dame du Temps.
Le Docteur s'approcha de son amie coincée dans cette armure sordide.
– Bill, s'il vous plaît. Je ne vous demanderai pas ça si je n'avais pas une bonne raison. Missy a vraiment changé et regrette ce qu'elle vous a fait. Je ne veux pas qu'elle prenne de risques…
L'ancienne jeune femme lâcha ce qui ressemblait à un soupir et baissa la tête. Le Docteur eut un sourire de remerciement et se plaça devant la future mère de son enfant.
– Missy, je pensais que vous aviez compris, se désespéra-t-il. Je ne pensais pas survivre à ce voyage. Je ne reviendrai pas au TARDIS. Je vais mourir en essayant de protéger ces gens, et ce, même si vous êtes là pour m'aider. Même si vous êtes là, nous serons face à une armée et donc en infériorité numérique. Nous allons mourir et c'est justement ce que je veux vous éviter. Je suis prêt à mourir, et Bill aussi, mais vous ! Vous avez encore des choses à faire, à vivre. Vous devez protéger l'une des plus belles choses qui soient : notre enfant. Comprenez-vous ?
Il prit les mains de son amie – et future mère de son enfant – dans les siennes. Il les serra avec force en communiquant à travers son regard la crainte, la tristesse, la douleur et l'espoir qu'il ressentait. Il voulait qu'elle comprenne et il savait qu'elle pouvait comprendre. Il savait qu'à travers leur lien télépathique, il pouvait lui faire comprendre tout ce qu'il ressentait. Elle seule pouvait le comprendre complètement. Ils se connaissaient depuis toujours, ils avaient passé une grande partie de leur vie ensemble, soit à se battre, soit à s'aimer, d'une quelconque manière. La manière dont ils pouvaient s'aimer, maintenant, était si différente de la manière dont il avait pu aimer sa première femme Arkytior, ou de la manière dont il aimait Rose, ou des sentiments à l'égard de son autre épouse River Song. Certes, il fut un temps où il avait aimé le Maître de cette manière, mais ce n'était plus le cas. Ce n'était plus exactement ces sentiments qui l'habitaient. C'était également différent de l'affection classique qu'il pouvait ressentir pour ses autres meilleures amies, comme Donna, Amy ou Clara… Missy était comme une partie de lui-même. Il ressentait le besoin de la garder près de lui, comme Rose. Mais pouvaient-ils former un couple ? Un couple ? Se projetait-il vraiment dans l'avenir ? Cet enfant avait peut-être réussi à réveiller quelque chose en lui, mais serait-ce suffisant pour vivre ?
– Vous avez fini ? chuchota Missy, son souffle caressant le visage de son ami d'enfance.
– Oui, dit-il avec plus de fermeté, leurs mains toujours entrelacées.
– Bien ! Parce que je vais quand-même rester et me battre à vos côtés. Et avant que vous ne m'abreuviez encore d'un discours passionné, permettez-moi de vous dire que ça ne change absolument rien. Il est trop tard. Et quand bien même il ne le serait pas, je vous rappelle que notre espèce dispose d'une capacité particulière appelée la régénération.
– Et le bébé ?
– Je maîtrise mieux mon processus de régénération et mon énergie régénératrice que vous, Docteur. Notre bébé ira bien, même après une régénération. Je ferai tout pour le préserver, croyez-moi. Je ne veux pas gâcher cette seconde chance. Un enfant… avec vous. C'est plus que ce que je pensais mériter après tout ce que j'ai fait à l'Univers… à vous…
Les yeux de la Dame du Temps brillèrent à nouveau. Elle dégagea ses mains et les posa délicatement sur le visage du père de son futur enfant. Elle eut un sourire triste. L'heure n'était plus aux débats. L'heure était au combat. Elle ne pouvait que lui donner un dernier cadeau avant la fin. Elle posa ses lèvres sur les siennes pendant quelques secondes. Que la fin soit immédiate ou dans plusieurs siècles.
– Quel bébé ? Vous lui avez fait un enfant, Docteur ? interrogea Bill, brisant la bulle dans laquelle semblaient s'être enfermés les deux extraterrestres.
Le Docteur s'éloigna de Missy, la bouche ouverte. C'était bien le moment de devoir se justifier, devoir justifier ses actes et ses décisions. Ils étaient sur le point de mourir. Ils devaient se battre.
– Je suis désolé si je vous déçois, Bill. En d'autres circonstances, je vous aurais tout expliqué, j'aurais pris le temps pour que vous compreniez. Mais nous n'avons pas le temps. Les Cybermen arrivent et avec eux, notre mort prochaine. Si, par miracle, nous nous en sortons, je prendrai ce temps qu'il nous manque cruellement.
– Docteur ! fut la seule réponse de Bill.
Il ne comprit pas tout de suite la raison de ce cri, ni pourquoi Missy le projeta sur le sol immédiatement après.
– C'est pas passé loin, sourit cette dernière, allongée de tout son long sur son ami.
Il jeta un regard derrière lui. Les Cybermen affluaient. Il empoigna son tournevis sonique et vit Missy serrer fortement son parapluie sonique contre elle. Il sentait une certaine peur venant d'elle. Il sentait son angoisse et sa terreur. Elle l'aida à se relever alors que Bill détruisait un Cyberman.
– Bon, on y va, fit le Docteur.
– Attendez, murmura Missy, se souvenant soudain de quelque chose qu'elle estimait comme étant important.
– Je croyais que vous aviez choisi de rester vous battre avec nous, s'enquit l'Écossais, songeant immédiatement que son amie voulait s'enfuir.
– Non, c'est pas ça. La petite fille avec qui vous parliez quand je suis arrivée…
– Elle est en sécurité avec Nardole, répondit la voix mécanique de Bill.
Missy laissa échapper un soupir de soulagement. Elle se plongea une dernière fois dans le regard clair du père de son enfant et lui transmis tout ce qu'elle pouvait ressentir. Espoir. Amour. Tristesse. Culpabilité. Douleur. Colère. Désespoir. Peur. Elle leva son bras et dirigea son parapluie sonique vers un Cyberman.
– Sans espoir… Sans témoins… Sans récompense… murmura le Docteur en faisant un pas en avant, gardant toujours une prise ferme sur la main de son amie.
– Motivant votre petit discours, ironisa Missy en pressant une dernière fois son corps contre celui du père de son enfant.
Si la fin était aujourd'hui, ils seraient vraiment ensemble jusqu'à la fin.
J'espère que vous avez aimé ce premier chapitre ! :)
Le prochain s'appellera : "Dernière Bataille ?"
