Harry était resté figé quelques secondes en les dévisageant, notant qu'ils attendaient pour entrer chez lui. L'idée qu'ils puissent leur retirer Peter le rendit fou de rage et il leur claqua la porte au nez, avec violence sans même dire un mot.

Le souffle court, il hurla à pleins poumons, reconnaissant à la magie de leur offrir un logement totalement insonorisé.

— Malefoy !

Drago arriva immédiatement, baguette en main, l'expression mauvaise. Il avait senti la magie de Harry s'agiter, remplissant la maison jusqu'à rendre l'atmosphère presque irrespirable et le hurlement de son compagnon était suffisant pour savoir qu'il avait un problème.

Le voyant adossé à la porte, tremblant et le teint crayeux, il se précipita sur lui. Harry l'agrippa, le serrant presque jusqu'à lui faire mal et chuchota d'un ton pressant.

— Où est Peter ?

Drago hésita brièvement, avant de répondre.

— Je l'ai envoyé surveiller Teddy. Les garçons vont bien, Harry.

Les tremblements de Harry reprirent de plus belle quand quelqu'un frappa à la porte de nouveau. Drago jeta un regard inquiet à la porte, puis secoua la tête.

— Quel est le problème ?

— Il faut les envoyer chez Ron et Hermione. Les garçons. Merde, Drago… je n'ai jamais pensé que…

— Potter !

L'exclamation sèche de Drago frappa Harry comme une gifle et il se redressa avant de se frotter le visage. Puis, il prit une grande inspiration en jetant un regard furieux à la porte.

— Derrière la porte se trouvent deux personnes qui prétendent être les parents biologiques de Peter. Ils sont venus le chercher.

Drago se tendit, les poings serrés, montrant presque les dents. Il siffla, furieux.

— Hors. De. Question.

Harry ferma les yeux un instant et secoua la tête.

— On a besoin de temps. Envoie les garçons chez Ron et Hermione. Ne dis rien à Peter pour le moment, OK ? Ensuite…

Drago grogna.

— Débarrasse-toi d'eux. Dis-leur de revenir. Donne leur rendez-vous quelque part, loin d'ici, pour qu'ils n'aient pas à entrer chez nous. Ensuite, nous irons voir mon père.

Harry déglutit.

— Drago…

Une lueur féroce passa dans le regard gris et il posa les mains sur les épaules de Harry en une prise ferme.

— Harry. Fais-moi confiance, OK ?

Harry ferma les yeux et se détendit, posant son front sur la poitrine de Drago.

— Bien sûr. J'ai confiance en toi.

Ils prirent le luxe d'une étreinte de quelques secondes, avant que Drago ne reparte d'un pas vif pour mettre à l'écart les deux enfants qui vivaient avec eux.

Harry ferma les yeux et s'obligea à repousser toutes ses peurs — à prendre son visage de survivant comme disait Drago — puis il ouvrit sèchement la porte.

Le couple était toujours devant la porte, se disputant visiblement pour savoir quoi faire. Harry les dévisagea avec dégoût puis il prit l'air le plus hautain possible — il lui suffisait de se souvenir de Drago à Poudlard — pour leur adresser la parole.

— Vous apporterez les preuves de votre déclaration demain vers midi au chaudron baveur.

L'homme esquissa une moue agacée, puisqu'il avait visiblement espéré se glisser dans l'intimité du sauveur. La femme battit des cils, essayant de l'attendrir en minaudant.

— Puis-je au moins câliner mon David ? Il me manque tellement…

Harry ne prit même pas la peine de lui répondre. Il lui lança juste un regard noir, laissant sa magie se faire plus présente, presque compacte.

Une lueur effrayée passa sur le visage de la femme et elle trébucha, se rattrapant à l'épaule de son complice. Ce dernier le dévisageait, les yeux plissés, puis il hocha la tête.

— Pas d'embrouille, m'sieur Potter. On vous est reconnaissant d'avoir retrouvé le p'tit, mais si vous n'êtes pas raisonnable, on n'hésitera pas à aller se plaindre au ministère.

Harry eut un sourire froid, presque cruel.

— Faites donc. Ce ne serait pas la première fois que je m'oppose au ministère. Jusqu'à aujourd'hui, ils n'ont jamais gagné.

Les deux inconnus reculèrent, et l'homme, visiblement furieux, attrapa le poignet de la femme pour partir. Il lui jeta un dernier coup d'œil avant de marmonner, par-dessus son épaule.

— Devriez pas sous-estimer les petites gens, Potter.

Harry referma la porte d'entrée et il y posa son front, commençant à trembler alors que l'adrénaline quittait son corps. Presque immédiatement, les bras de Drago s'enroulèrent autour de lui et il se laissa aller, soulagé de ne plus être seul.

Cette pensée suffit à le galvaniser. Il avait une famille. Une famille étrange et recomposée, mais il avait juré de tous les protéger. Drago, Teddy et Peter, ses amis, sa filleule. Les Weasley, les Malefoy et tous ces gosses qui se jetaient sur lui en riant quand il allait les voir.

Il prit une profonde respiration avant de se redresser pour déposer un bref baiser sur les lèvres de Drago.

— Les garçons sont à l'abri ?

Drago eut un rictus moqueur.

— Ouais. Et Peter commence à prendre tes habitudes, il m'a forcé à jurer qu'on lui expliquerait tout avant d'accepter d'obéir.

Harry gloussa nerveusement et adressa un bref clin d'œil à Drago. Ce dernier poursuivit, toujours avec son sourire amusé.

— Et la belette m'a dit de te dire qu'on ne pouvait pas saccager le monde magique pour régler ce problème. Apparemment, il ne tient pas à devoir nous arrêter.

Harry leva un sourcil et Drago haussa les épaules.

— Ils ont vu la Gazette. Ils te connaissent. J'ai glissé un mot à Granger et elle m'a presque mis à la porte pour passer un appel de cheminette.

Harry secoua la tête, la gorge nouée, avec l'impression d'être dans un grand huit émotionnel. Il savait que ses amis seraient toujours là pour lui, mais les voir en action pour protéger le garçon qu'il considérait comme un fils l'émouvait plus que tout. Il se laissa entraîner par Drago vers la cheminée et il entra avec lui dans l'âtre, se collant à lui fermement, les yeux fermés, le laissant les conduire chez ses parents.

Depuis qu'il avait fait sortir Lucius d'Azkaban, Harry n'avait jamais vraiment posé de questions à son compagnon sur la relation qu'il avait avec son père. Il se contentait de le soutenir et de veiller à ce que Lucius ne le blesse pas.

Il se souvenait qu'à Poudlard, Drago ne jurait que par son père. Il lui rapportait tout ce qui se passait à l'école, se plaignait de chaque offense faite à son auguste personne.

Après la disgrâce de Lucius, lorsque Drago avait reçu la marque, il avait semblé ne plus être aussi proche de son père. Jusqu'à montrer un évident mépris pour lui lors de son procès.

Drago avait brillamment repris sa vie en main, mais il avait rayé son père de sa vie. Au moment de faire sortir Lucius de prison, Harry avait hésité, mais il s'était rendu compte que Drago avait besoin de Lucius, d'une façon ou d'une autre. Il ne l'admirait plus, il le repoussait même avec parfois un peu de violence, mais il restait son père. Le héros de son enfance.

Pourtant, face au problème épineux qu'ils avaient, Drago n'avait pas hésité une seule seconde. Il avait immédiatement su que son père pourrait les aider. Harry espérait que c'était vraiment le cas et que l'homme ne ferait rien d'illégal. Rien qui pourrait le renvoyer à Azkaban au moins. Kingsley n'accepterait jamais de fermer les yeux ou de le faire sortir une fois de plus.

À leur arrivée, le manoir était inhabituellement calme. Narcissa lisait dans son fauteuil et elle se redressa avec surprise.

— Drago ? Harry ? Il y a un problème ? Les enfants sont avec leur professeur, mais je peux…

Harry lui offrit un sourire fatigué, mais Drago la coupa, empressé.

— Mère ? Où est Père ?

Narcissa se redressa, le dos droit et les sourcils froncés.

— Dans son bureau. Il y a un problème ?

Harry hocha la tête, la gorge nouée. Aussitôt, elle se leva et les accompagna, pressant l'épaule de Harry au moment où ils arrivaient devant la porte du bureau de Lucius.

Habituellement, c'était Harry qui parlait à Lucius, mais cette fois, ce fut Drago qui expliqua la situation, d'une voix sèche, sans jamais lâcher la main de Harry. Lorsqu'il eut terminé, il y eut un grand silence.

Harry était sur le point d'exploser, serrant les mains en poings, quand Lucius haussa les épaules.

— Ils ne peuvent rien contre vous. Ils ont abandonné leur enfant depuis si longtemps qu'aucun tribunal ne leur donnera la garde de Peter. Ils espèrent soutirer de l'argent, certainement. Qu'ils n'auront pas.

Harry hésita, incapable de se détendre.

— Vous êtes certain, Lucius ? Ils exigeaient de repartir avec Peter ce matin…

Narcissa pinça les lèvres et renifla.

— Ils peuvent exiger, bien évidemment. Ils n'obtiendront rien !

Lucius eut un rictus moqueur, observant sa femme avec attention.

— Cissa, ma chère. Voudrais-tu que je fasse appel à… mes fréquentations douteuses ?

Harry leva un sourcil en regardant l'homme, incrédule. Il avait l'impression que Lucius s'amusait et il était prêt à le rappeler sèchement à l'ordre quand Drago lui pressa la main, avec un léger clin d'œil.

Narcissa se pencha et claqua ses mains sur le bureau de Lucius, la bouche pincée en une ligne mince. Elle cracha, furieuse.

— Fais ce que tu veux, mais personne ne touchera à ce garçon. Si Drago le considère comme un fils, ça fait de lui notre petit-fils. Personne ne touche à notre famille.

Drago eut un sourire satisfait et Lucius renifla, un éclat amusé dans son regard bleu. Harry était prêt à parier qu'il aurait fait le nécessaire même sans cette petite comédie, mais visiblement, il préférait agir avec l'aval de son épouse.

Un peu perdu, Harry s'obligea à reprendre son calme et se demanda comment il en était arrivé là, à être au cœur de la famille Malefoy, en toute confiance et reconnaissant pour leur aide.

Lucius attira son attention en agitant vaguement la main.

— Considérez que c'est réglé. Je vais faire en sorte de les écarter de Peter. Ce garçon n'a pas besoin de ces gens près de lui, pas après avoir été… jeté à la rue. Et pour cette chère Rita ? Dois-je intervenir ? C'est son article qui a déclenché tout ça…

Drago plissa le nez.

— Je m'en suis occupé. Cette harpie n'est plus membre de la Gazette et elle n'est pas près de retrouver un travail dans le domaine du journalisme. Cuffe semble redouter que notre famille retire ses investissements de sa feuille de chou…

Harry laissa échapper un ricanement. Il se sentait beaucoup moins inquiet, surtout en voyant la détermination dans le regard gris de Narcissa.

— Je devrais probablement dire que ce n'est pas correct, même si elle a une langue de vipère. Peut-être même que je devrais dire que c'est… excessif. Mais je dois avouer que je me réjouis de son malheur.

Drago l'attira contre lui avec un léger sourire.

— Tu vois, nous ne sommes pas aussi expressifs que la famille Belette, mais nous savons prendre soin les uns des autres.

La voix de Narcissa claqua immédiatement.

— Drago !

Ce dernier soupira et secoua la tête. Voyant le regard perplexe de Harry, il roula des yeux.

— Ma mère pense que c'est vexant pour toi… Que je parle de la bel… de Weasley de cette façon.

Harry explosa de rire, incapable de rester sérieux au ton boudeur de Drago. Les yeux brillants de malice, il se pencha légèrement vers lui.

— Si tu commences à te montrer amical avec Ron et à l'appeler par son prénom, il va définitivement faire une attaque.

Drago l'attira contre lui pour embrasser avec tendresse sa tempe, repoussant ses cheveux indisciplinés avec douceur. Harry ne put s'empêcher de lui sourire en croisant son regard et comme toujours, son cœur se réchauffa. Il pouvait y lire toute l'affection que Drago avait pour lui et cette pointe de complicité entre eux. Ils avaient parcouru un long chemin, mais chaque dispute qu'ils avaient eue en valait le coup pour en arriver à une telle harmonie.

Harry cligna les yeux et croisa le regard de Lucius qui les observait pensivement. L'homme avait les sourcils légèrement froncés, mais il ne fit pas le moindre commentaire, souriant juste quand les deux jeunes hommes prirent congé pour aller récupérer Teddy et Peter.

Narcissa les enlaça tous les deux et leur fit promettre de venir dîner dans la semaine, avec les garçons. Les enfants qui vivaient au Manoir demandaient souvent des nouvelles de Peter, puisqu'il avait été leur seul point de repère pendant toutes ces années. L'adolescent venait les voir régulièrement, mais un dîner familial serait la parfaite occasion de se retrouver pour un moment agréable et Harry en fut le premier ravi.

Après avoir pris congé, ils entrèrent une fois de plus dans la cheminée ensemble, pour se rendre chez Hermione et Ron. Ils n'eurent pas besoin de le dire à haute voix pour savoir qu'ils avaient tous les deux hâte de récupérer leurs garçons.