Hello ici ! Bon, ça faisait encore un moment hein, déso... Je ne vais pas me répéter à chaque fois, la page blanche tout ça, c'est la galère, voilà xD

On fait une petite ellipse avec ce chapitre, j'espère que le rendu n'est pas trop bizarre, mais à vrai dire je suis tellement blindée d'insécurités vis-à-vis de cette fic - que j'aime pourtant de tout mon cœur - que je pense que je vais juste arrêter de me poser des questions et me laisser aller... en espérant que vous preniez toujours plaisir à me suivre dans mon yolo absolu et un grand merci à vous si c'est le cas !

[ Petit aparté peut-être inutile : for English-speakers readers who have the courage to use a translator... I'm really, really sorry. The fact that they speak in disgusting slang shouldn't help, I have a real thought for you... If someone, one day, wants (and has the courage...) to translate this story into English, don't hesitate, I will help with great pleasure ! ]


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Le concept même de la routine est un truc que j'ai toujours détesté.

Je sais qu'Papa et Maman adoraient ça et que c'est quelque chose qui déplaît pas forcément à Ace, mais moi, ça a limite tendance à me filer de l'urticaire. C'est pour ça que j'ai un mal de chien avec l'école. Me lever tous les jours pour être au bahut à 8h tapantes, voir les mêmes profs chiants avec leurs mêmes cours chiants, rentrer avec l'même bus blindé, me demander pendant deux heures si j'fais mes devoirs pour finalement décider qu'non, me branler les couilles et aller ensuite me coucher en m'disant qu'on recommence tout ça le lendemain... Pouaaah. C'est vraiment le truc le plus relou du monde.

Mais bizarrement, en c'moment et pour la première fois de ma vie, j'la trouve agréablement réconfortante, cette routine.

Parce que certes, c'est aller en cours et tout le reste, mais c'est aussi rire avec les copains, dessiner des trucs moches avec Usopp pendant la philo, parler de bouffe avec Sanji pendant les pauses, écouter les derniers potins d'la classe rassemblés par Nami... Puis rentrer pour retrouver Ace et ses bras brûlants, regarder des conneries ensemble à la télé, refaire le monde encore et encore, le laisser me refaire le c-

Bon, ça c'est optionnel. Mais ça fait toujours plaisir.

Bref, tout ça pour dire que j'ai retrouvé ma routine. Ma normalité. Et après ce qu'il m'est arrivé il y a trois mois, j'me rends compte comme j'avais cruellement besoin de cette normalité qu'j'ai pourtant toujours exécrée. La routine est devenue rassurante et j'me vautre dedans comme jamais. J'profite de chaque seconde qui passe comme une espèce de second souffle salvateur. J'me suis jamais autant laissé porter par la vie. Le Bac blanc est pourtant dans même pas un mois, mais j'ai pas la foi d'ouvrir un seul bouquin pour réviser. Ma flemme a encore plus de volonté qu'avant pour m'tirer vers le bas, c'est incroyable. Madame Hina me dit qu'c'est normal. Qu'après le traumatisme que j'ai subi, mon cerveau me rappelle douloureusement qu'on a qu'une vie et qu'elle peut être bien plus brève que prévu... Alors, la gâcher en révisant des trucs chiants qui m'serviront même pas quand j'serai adulte, il voit pas l'intérêt. Et pourtant, j'sais que j'me tire une balle dans l'orteil en faisant ça. Parce que j'vais juste finir par redoubler et me retrouver tout seul comme un gland au lycée, dans une classe avec des gens plus jeunes que moi. Tous mes potes partiront en fac en m'laissant derrière, et j'sais d'avance que ça va me déprimer de fou...

J'soupire pour moi-même : trois semaines depuis la rentrée, j'ai bien conscience de ça, et j'me bouge pas les fesses pour autant. Jiji va m'tuer. Même Ace risque de m'tuer.

En parlant du loup, j'sens mon portable vibrer dans ma poche et je sais d'avance que c'est lui. Le prof a l'air de s'faire autant chier que nous, j'pense pas prendre trop de risques à sortir mon tél en scréd pour vérifier. Et effectivement, c'est un bingo gagnant : j'esquisse un sourire face à son éternel petit émoji cœur qui m'informe simplement qu'il vient de s'réveiller.

Il est presque 16h : au calme. J'le trouve même matinal aujourd'hui, hey.

J'lui renvoie le même petit cœur en souriant toujours et j'esquive de très peu les yeux de lynx de Nami derrière moi. Nos regards se croisent au moment où j'remets mon portable dans ma poche et son expression suspicieuse me provoque un frisson d'effroi. J'la fuis rapidement en regardant de nouveau le tableau, pas hyper frais.

Presque trois semaines depuis la rentrée et évidemment, cette fouine a pas manqué mes sourires réguliers particulièrement niais et bien trop heureux quand j'lis certains d'mes messages. Comme elle a pas manqué de relever le seul et unique suçon qu'a réussi à m'laisser Ace sans qu'j'arrive à l'en empêcher. D'habitude, on fait gaffe à c'que ça soit pas visible, mais cette fois-là, on était certainement un peu trop à fond dedans... Ce fut une erreur fatale.

J'esquive les questions d'Nami comme je peux depuis, mais j'vois très bien que le fait que j'lui cache une éventuelle relation la rend dingue. Elle est beaucoup trop curieuse pour mon propre bien, et y'a des jours où ça me fait presque flipper.

La dernière sonnerie de la journée pour nous finit par retentir enfin, telle une bénédiction. Mais j'me rends compte comme j'me réjouis trop vite au moment où j'sens la main de Nami m'agripper douloureusement l'épaule juste avant que j'passe la grille du lycée.

- Toujours pas envie de me dire avec qui tu papotes par message pour que ça te rende si heureux... ? me demande-t-elle avec un sourire vicieux jusqu'aux oreilles.

- Avec ta sœur ! Mêle toi d'tes fesses !

Son sourire s'élargit un peu plus et j'comprends que j'viens encore d'me vendre avec cette réaction sur la défensive. Et crotte.

- Toujours pas motivé à nous parler de ce petit crush secret... ? s'amuse Sanji en arrivant derrière. Ça en devient presque vexant.

- Et puis, il faut que tu te rendes compte que tu ne pourras pas garder le secret bien longtemps Luffy, continue Nami, ravie. T'en es bien conscient... ?

Elle et Sanji s'éloignent pour prendre leur chemin pour rentrer, m'offrant tous les deux un regard moqueur. Ils me saoulent.

Moi, j'repars avec Usopp et Chopper pour prendre le bus après qu'on ait salué Zoro. J'ai réussi à convaincre Ace que j'pouvais rentrer tout seul le soir à force d'insister et insister encore, parce que c'est quand même cool d'avoir un peu d'temps pour débriefer la journée avec les copains sur le chemin du retour. Autant l'matin, j'vais pas me plaindre qu'il veuille me déposer en voiture quand j'ai encore la tête dans le fion, mais l'aprèm, même le bus blindé me décourage pas pour passer encore un peu de temps avec eux. Même si là maintenant tout d'suite, j'm'en serais bien passé...

- Tu sais, moi ça ne me dérange que tu veuilles garder ça pour toi... entame Chopper d'une petite voix, c'qui fait que je l'entends à peine dans l'brouhaha ambiant du bus. Mais c'est vrai que c'est un peu bizarre, d'habitude tu nous dis toujours tout...

Usopp me regarde fixement en acquiesçant à ses côtés et j'sais définitivement pas quoi leur répondre. Alors j'me contente de fuir leurs yeux curieux pour observer l'extérieur.

J'aime pas leur mentir, c'est pas moi d'faire ça. Et même avec une demi-vérité, j'saurais pas quoi leur dire... « J'me tape quelqu'un ouais, mais j'peux pas vous dire qui c'est pour une raison que j'peux pas vous dire non plus » ? Même moi j'trouve ça stupide, bizarre et horriblement louche.

- J'veux pas te mettre la pression en disant ça, continue Usopp, mais tu sais très bien que Nami va jamais te lâcher... Et je crois que Zoro commence à s'inquiéter.

- S'inquiéter ? répété-je en haussant un sourcil. Pourquoi il s'inquiéterait ?

- Parce qu'il se dit sûrement que si tu t'acharnes autant à nous cacher une relation, c'est qu'on apprécierait pas de découvrir avec qui tu sors.

J'ai comme un bug et vu la tronche que j'dois faire en fixant mes potes, ils comprennent direct que c'est... Bah, un peu ça, ouais. J'me sens blêmir.

- ... 'Lui dites rien, si'vous plaît...

- Non t'inquiète pas, rigole doucement Chopper. Mais j'espère que ça va, hein... ?

- Mais oui ! Vous faites pas d'bile, j'vis ma meilleure vie moi !

J'les vois hausser un sourcil et j'me rends compte que c'est effectivement p't'être un peu bizarre de dire ça quand on est orphelin depuis trois mois, mais bon. Ils descendent finalement à leur arrêt avant moi et j'les salue en m'disant que la situation est de pire en pire...

J'esquive leurs questions comme j'le peux depuis la fameuse histoire du suçon, mais j'me rends bien compte que j'vais pas tenir longtemps à ce rythme-là. Ça m'fait toujours pas super plaisir de leur cacher que j'suis en couple et super heureux de l'être, mais au-delà des avertissements d'Ace qui m'a plusieurs fois « conseillé » de la boucler, j'me rends bien compte tout seul que ça va être sacrément tandax de le leur dire... J'ai beau les aimer de tout mon cœur et avoir une confiance aveugle en chacun d'entre eux, j'suis pas naïf au point d'croire qu'ils vont juste accepter l'info avec un sourire et passer direct à autre chose en me demandant si j'ai terminé le dernier Zelda. Ça risque plutôt de faire un méga esclandre, comme me l'a dit Ace. Et j'préférerais quand même éviter...

Alors en attendant, j'me roule juste dans mon bonheur dans mon coin. Depuis un mois que j'partage cette nouvelle intimité avec Ace, j'trouve que c'est encore mieux qu'avant, entre nous. Passé toute cette histoire avec Marco qu'on a plus ou moins éclaircie, y'a pas un point noir dans la matrice. J'me sens heureux, impatient comme jamais de rentrer chez moi l'soir pour le retrouver. Évidemment, l'absence de Maman et Papa plane toujours, affreusement pesante et douloureuse par moment, mais l'attitude d'Ace a tendance à grandement alléger ce poids.

Parce que oui : Ace. Ça serait un peu bizarre et abusé de dire que j'le reconnais plus ces dernières semaines, et pourtant. Je l'ai jamais vu aussi rayonnant, aussi souriant et autant au taquet pour tout. Après, bien sûr qu'il a pas perdu son habitude de passer ses journées à fumer, vautré dans l'canapé, mais ça dure jamais bien longtemps une fois que j'suis rentré. Quand j'suis là, il finit toujours par me proposer des trucs cools à faire. Qu'on chille, qu'on geeke ou qu'on sorte, les moments d'ennuis sont devenus super rares et j'me gave de ses rires joyeux qui viennent régulièrement me chatouiller les tympans. J'dis pas que mon frère est chiant d'habitude, j'dis juste que c'est probablement la première fois que j'le vois aussi longtemps en forme sans aucun coup d'bad à l'horizon. On dirait que notre relation lui donne des ailes, lui insuffle une force capable de déplacer des montagnes. Même oncle Shanks lui a fait la remarque quand il est venu manger à la maison, le week-end dernier. Que ça lui faisait super plaisir de le voir comme ça, même s'il a demandé à lui parler seul à seul un peu plus tard dans la journée... C'était bizarre de voir Shanks aussi heureux qu'inquiet dès qu'il posait les yeux sur mon frère, mais bon... Cette discussion a pas eu l'air d'entacher la bonne humeur d'Ace et c'est tant mieux. Il continue de s'enjailler sur son tout nouveau projet d'investir dans un bar avec l'argent de nos parents auquel on a enfin eu accès. Parfois, j'me dis qu'il part beaucoup trop loin dans son délire parce que ça doit quand même être quelque chose de gérer un bar tout seul de A à Z... Mais le voir comme ça me rend tellement heureux que j'préfère rien dire et l'laisser rêver. Pour c'que j'y connais, en plus.

La routine est donc de nouveau là. Différente, étrangement rassurante, mais elle est là. Et j'l'apprécie d'autant plus de m'offrir en ce jour la magnifique vision d'un Ace torse-nu et trempé de gouttes de sueur, en train de faire ses abdos dans notre salon au moment où j'rentre.

- Waoh... Quel accueil ! commenté-je en ricanant alors que j'me plante dans l'entrée pour le mater.

Il s'arrête net et rit, encore essoufflé.

- Qu'est-c'tu racontes, j'suis même pas tout à fait à poil...

- Ça peut s'arranger, ça... soufflé-je en abandonnant nonchalamment mon sac par terre alors que j'me passe la langue sur les lèvres d'envie.

J'adore le regard lubrique qu'il me renvoie aussitôt et il m'en faut pas plus pour dégager mes tongs et mon blouson et m'jeter sur lui.

Mes genoux heurtent le sol de part et d'autre de ses cuisses tandis que j'attrape son visage en coupe pour lui dévorer la bouche. Il m'répond autant qu'il ricane et ça m'fait sourire malgré moi.

- À peine rentré et tu veux déjà me sauter dessus ? La journée a été aussi chiante que ça ?

- Pas forcément, mais tu m'aides pas, là, soufflé-je tout en caressant son torse légèrement humide. Et fais pas style que t'as pas fait exprès de commencer ton sport maintenant pour que ça arrive... !

Son rire résonne contre mes lèvres qui se promènent le long de sa pomme d'Adam et ce son est définitivement du bonbon pour mes oreilles.

- C'est pas ma faute Lu', t'es si facile à allumer...

Je me redresse brusquement pour lui envoyer un regard choqué.

- C'est toi qui dis ça ?! Si on t'écoutait, tu m'sauterais dessus à chaque fois qu't'aperçois mes fesses !

Nouvel éclat de rire avant qu'ses doigts se referment sur lesdites fesses et que ses dents viennent maltraiter la peau d'mon cou, accompagnées d'un soupir de désir.

- En même temps... T'es tellement sexy...

J'essaie d'réprimer un frisson. Je savais pas qu'j't'étais sexy avant qu'Ace me le répète quinze fois par jour, mais apparemment il le pense fermement. J'ai encore du mal à m'en convaincre, mais c'est pas désagréable de l'entendre régulièrement d'la bouche de la personne que j'aime le plus au monde...

On s'désire tout autant l'un que l'autre et ça a quelque chose de grisant. C'est la première fois que j'suis aussi à l'aise et décomplexé qu'ça avec quelqu'un dans l'intimité. Avec Barto' par exemple, j'avais pas la même facilité à m'incruster dans son caleçon pour le toucher que j'l'ai avec Ace. J'savais pourtant qu'il me repoussait jamais, mais quand même : j'étais bizarrement pas aussi à l'aise. P't'être que c'est parce qu'on a l'habitude depuis bien longtemps de cette proximité physique, avec Ace. P't'être parce qu'on s'connaît déjà sur le bout des doigts, p't'être parce qu'il est plus âgé qu'moi... Mais j'me sens libre comme jamais quand j'l'ai entre les mains. Libre d'explorer sa peau, de mémoriser ses réactions, de m'noyer dans son expressivité... Il dit que moi j'suis expressif, mais il s'est franchement pas vu, et encore moins entendu. Ses soupirs deviennent affreusement sexys dès qu'on s'rapproche, mon prénom en boucle dans sa bouche m'a jamais autant excité. Et son gémissement de plaisir quand j'fais glisser mes lèvres sur son gland me donne juste envie de recommencer encore, et encore, et encore. Parce que j'me lasserai jamais de l'entendre.

Le sexe a pris une toute autre dimension dans ma tête durant ce dernier mois. C'que je considérais jusque-là juste comme une activité bien sympa est devenue essentielle avec Ace. Quand il s'enfonce en moi autant avec ses doigts qu'avec sa queue, quand il fait tout pour m'arracher des cris d'plaisir pendant que ses yeux cherchent désespérément à s'accrocher aux miens, j'ai l'impression qu'le temps s'arrête. Cette bulle protectrice qui nous entoure quand on est que tous les deux semble se rétrécir pour nous envelopper encore plus près, encore plus confortablement et elle met le reste du monde en pause. Il y a beaucoup trop de douceur dans nos gestes, beaucoup trop d'réconfort dans nos étreintes. C'est trop puissant et trop beau à la fois. La réalité paraît ne plus pouvoir nous atteindre et y'a plus que c'plaisir pur et Ace. Ace, Ace, Ace et encore Ace.

J'ferme les yeux alors qu'il s'enfonce doucement en moi, pour pas avoir à l'regarder. J'y arrive toujours pas, mais de toute façon, j'en ai pas besoin : il est partout autour de moi. J'sens sa peau contre la mienne, son odeur dans mes narines, ses soupirs dans ma bouche, sa chaleur entre mes cuisses...

J'ai beau retourner ça dans tous les sens dans ma tête, j'comprends pas comment ça peut être mal. J'comprends pas comment autant d'plaisir et d'bonheur peuvent être dangereux ou mauvais pour nous, pour la seule raison qu'on est frères. Ça change pourtant rien... Ou plutôt si, ça change tout : c'est mieux encore.

Ace accélère subitement le rythme et coupe court à mes pensées un peu trop distraites. J'redonne plutôt mon attention au bruit de ses hanches qui claquent contre mes cuisses, de sa main qui caresse passionnément mes cheveux et surtout – surtout -, de sa queue qui me maltraite de plaisir. J'entends à peine ma voix qui résonne sur les murs du salon, trop assourdi par le bien-être pour le moment. J'laisse Ace me priver d'air autant en m'embrassant comme s'il allait en crever qu'avec ses doigts qui s'enfoncent dans mon cou. C'est un délire un peu chelou que j'avais déjà vu dans des pornos, mais j'aime bien. Il me fait jamais mal, il serre juste pour serrer, comme s'il avait peur que j'm'enfuie. Je vois pas trop pour quelle raison j'voudrais m'enfuir alors qu'il est encore en train d'm'envoyer au sixième ciel, mais s'il kiffe ça... J'lui fais tellement confiance et j'suis tellement bien entre ses mains que j'suis d'accord pour le laisser me faire absolument tout c'qu'il veut, de toute façon. Si on devait pas s'cacher comme ça, j'le laisserais me marquer autant qu'il en a envie, comme moi j'le marque. Quand j'entends que chaque coup d'ongle qui crisse sur sa peau le fait encore plus gémir, j'vois pas trop pourquoi j'devrais m'arrêter.

J'ai encore l'impression de devenir dingue quand j'ai terminé d'me répandre sur mon ventre dans mes cris étranglés et qu'il continue pourtant d'm'assaillir. Il m'a abandonné pour se redresser et amplifier son mouvement et j'ai encore le réflexe d'me planquer le visage de mes bras. Même si ça m'empêche pas d'sentir son regard ardent sur moi. Ses yeux me brûlent la peau aussi douloureusement que délicieusement et bon sang, j'aimerais tellement avoir l'courage de le regarder aussi en retour...

Je tente un coup d'œil maintenant que mon orgasme est un peu redescendu et que j'retrouve mes esprits, et ça loupe pas : j'tombe instantanément sur les prunelles brillantes d'Ace, qui s'voilent un peu plus quand il aperçoit mon visage légèrement découvert. Le sourire en coin qu'il m'offre me fait encore plus tomber pour lui et j'ai envie d'le remercier à genoux de s'coller de nouveau à moi pour m'permettre de l'embrasser à en perdre haleine.

Encore une fois, mon prénom échoue contre ma langue.

- Luffy... Luffy...

Il se détache de mon visage pour venir attaquer ma nuque avec ses dents, sa tête collée à mon épaule alors que j'sens son cœur contre moi s'emballer. J'le sens venir. J'le sens à la moindre parcelle de son corps qui s'contracte, et bon sang c'est trop grisant.

- Putain Luffy... Je t'aime tellement...

Mes yeux se rouvrent en grand sur le plafond alors que sa voix est partie dans les aigus pour accompagner son orgasme. Il étouffe son cri contre la chair de mon épaule et j'le laisse s'en remettre, figé. Figé parce qu'à c'moment précis, y'a mon cerveau qui s'est subitement réveillé.

C'est pas la première fois que j'entends Ace me dire qu'il m'aime. Il me le répète régulièrement depuis qu'j'ai facilement 10 ans et j'me suis jamais privé de lui répondre avec enthousiasme. J'l'aime plus que tout, c'est mon grand-frère adoré... Et il me l'a de nouveau dit quelques fois depuis qu'on est ensemble. Il me l'a dit, toujours avec ce même ton, avec ce même regard qu'il a toujours eu pour moi, alors ça m'semblait normal.

... Mais c'est pas normal, hein ?

À cet instant, cette scène me rappelle la première fois que Barto' m'a dit qu'il m'aimait. Il m'avait pas regardé non plus et il était super rouge quand j'ai enfin pu voir son visage. Ça m'a fait plus rire qu'autre chose, j'l'avais trouvé mignon. Même si au final j'lui avais jamais répondu et que j'l'ai fait cocu même pas deux semaines après, mais c'est pas trop la question.

La question, là... C'est que j'viens enfin de percevoir l'autre limite que l'nouvel aspect de notre relation avec Ace amène.

L'amour.

Comment j'aime Ace aujourd'hui, au juste... ? Et lui, comment est-ce qu'il m'aime... ? Parce que j'suis quasiment sûr qu'on aime pas son frère comme on aime son mec. Nami, Usopp et Sanji me l'ont assez répété quand ils essayaient d'me faire comprendre ce que c'était qu'aimer quelqu'un. J'ai jamais été amoureux, je sais pas c'que ça fait...

... Je sais pas comment j'aime Ace.

Et lui, je sais pas comment il m'aime. Et j'ai l'impression que... Ouais. Sa manière de me regarder comme il me regarde à cet instant, alors qu'il retrouve ses esprits et qu'il me couve de ses yeux encore plus noirs que d'habitude, son pouce en train de caresser tendrement ma joue...

- Lu'... Ça va pas ?

... Il m'aime déjà plus juste comme on aime un frère, hein... ?

- C-c'est rien... mens-je comme un idiot alors que j'me sens rougir et que j'fuis son regard en plissant le nez.

J'le vois hausser un sourcil, évidemment pas convaincu une seule seconde. Il dépose un bisou sur mon front et s'retire de moi lentement avant de s'asseoir à mes côtés, l'œil dans l'vague.

- ... J'avais pas prévu ce genre de séance de sport, plaisante-t-il d'un ton léger.

Mon sourire amusé est timide, même moi j'le sens. Mais 'faut me laisser l'temps de faire le tri dans ma tête. C'que j'viens de ressentir est beaucoup trop bizarre.

Qu'on s'mette d'accord : j'ai pas envie d'me plaindre qu'Ace est un rapide avec les sentiments, au contraire... En fait, si c'est vraiment ça, j'suis juste... dégoûté d'être encore à la traîne. Même dans une relation aussi cool et tranquille que celle-là, même avec mon propre frère que j'aime déjà comme un dingue... L'amour vient toujours pas. C'est quoi mon fichu problème, sérieux...

- Dis-moi ce que t'as, Lu'.

J'tourne la tête vers Ace en reconnaissant son ton légèrement autoritaire. Il me regarde l'air de dire qu'il veut la vérité et maintenant. J'suis sûr qu'il est encore en train d'se faire un max de films alors que c'est... pas grand-chose.

- C'est rien... soufflé-je dans une grimace en me redressant pour me lever. J'réfléchis à un truc...

- Ben justement, c'est que ça doit être vraiment important pour que tu réfléchisses pendant le cul, insiste-t-il alors que son expression se fait de plus en plus impatiente.

- T'énerves pas... J'vais prendre une douche pour m'remettre les idées en place et promis, on en parle.

J'me dépêche de fuir vers la salle de bain pour lui échapper, mais t'façon il me laisse partir. J'l'entends juste soupirer lourdement derrière moi. J'le visualise déjà remettre son froc et aller se poser dans l'canapé pour fumer en m'attendant, impatient. P't'être même stressé.

Ça faisait longtemps qu'il avait pas réagi comme ça, tiens. À redevenir grognon pour pas grand-chose. J'le sentais déjà un peu moins enjoué ces derniers jours, mais j'y avais pas fait plus attention qu'ça. Il a le droit d'avoir ses humeurs comme tout l'monde... Mais j'avoue que c'est quand même plus agréable de lui parler quand il est dans un bon mood. Quand il est énervé, ça donne simplement l'impression d'mettre un coup de poing dans un mur de béton et d'juste sentir ses doigts péter sous l'choc. J'sais pas comment aborder l'truc, en plus... Est-ce que j'me ramène et que j'lui demande :

- Comment est-ce que tu m'aimes, en fait ?

Ses yeux s'écarquillent en grand sur moi alors que j'suis encore en train d'enfiler mon boxer sur le pas d'la salle de bain, tout propre...

J'ai encore parlé trop vite avant d'réfléchir. J'en peux plus d'moi.

- ... Quoi ?

J'tire une grimace de dépit : j'suis incapable de réfléchir et de préparer une conversation, c'est dingue. J'me fatigue tout seul.

- Euuh... Ouais nan mais c'était super mal tourné...

- ... C'est à ça qu'tu réfléchissais ? me demande-t-il quand même alors qu'il paraît toujours remué.

- ... Ouais...

J'me gratte la tête, le regard ailleurs. Mais quand j'reviens sur lui, j'le vois rougir. Oh nan, mais naaaan... La dernière fois que j'l'ai vu rougir, c'était quand on s'est mis ensemble et c'était déjà assez chelou comme ça. Recommence pas Ace, s'te plaît...

- ... Tu m'demandes ça par rapport à ce que j'ai dit, au moins... ?

J'hausse un sourcil. Bah ça. Il s'rappelle finalement. J'avais l'impression qu'il oubliait ou qu'il faisait pas trop gaffe à chaque fois qu'il me le disait, mais apparemment non... Vu sa réaction, j'me demande même si c'était pas lui qui espérait qu'ce soit moi qui n'y fasse pas attention ou qui oublie...

J'viens m'asseoir à côté d'lui et lui frotte la cuisse. Le rouge sur ses joues fait ressortir ses tâches de rousseurs et ça met encore plus en valeur son collier de perles, c'est rigolo.

- C'est pas grave Ace, ça m'dérange pas. J'me disais juste... T'es tellement naturel pour m'dire ça...

- A-ah oui... ? Naturel, hein... ? bafouille-t-il en fuyant mon regard.

- Ben ouais. À chaque fois qu'tu me le dis. Bon, moi aussi j'suis sûrement naturel quand j'te le dis, mais j'sais pas... J'viens d'me rendre compte que ça sonne pas d'la même façon, dans ta bouche.

Il rougit encore plus et ne répond rien. J'fais la moue : ça m'gonfle. Sa réaction est complètement disproportionnée... Il va s'transformer en tomate, si ça continue.

- Aaaaaace, c'est pas un reproche hein... ! précisé-je en m'approchant de lui alors que j'continue de frotter sa cuisse.

- J-je sais bien, crétin ! bégaie-t-il avant d'me prendre subitement dans ses bras.

Il me serre contre lui à m'en étouffer. J'comprends absolument rien à c'qu'il s'passe... Est-ce qu'il est gêné à l'idée que j'me sois rendu compte qu'il avait de vrais sentiments pour moi... ?

J'me sens me décomposer alors que j'réponds mollement à son étreinte. Présenté comme ça, c'est encore plus bizarre... J'comprends pas pourquoi j'y ai pas pensé plus tôt, j'réfléchis vraiment à rien. Évidemment qu'on allait pas garder tous les aspects d'notre relation uniquement fraternelle, si on dépassait la limite… Ça devait faire partie des problématiques que j'avais repoussées au fond d'moi au moment où j'lui ai sauté dessus à Noël et que j'ai jamais remises sur le tapis.

Mais quand même... Ace, gêné ? Vis-à-vis d'moi ? J'trouve ça super bizarre. Il m'semble que c'est plutôt logique pourtant, que les sentiments se transforment à force... P't'être que comme moi, il y avait pas pensé et il se retrouve con de s'en rendre compte aujourd'hui... Surtout si c'est moi qui le lui a fait comprendre ?

Pfff, trop de questions inutiles... J'pose ma tête sur son épaule et le serre encore un peu plus fort contre moi. J'me vide l'esprit pour juste en profiter, et j'me sens tout de suite expédié au Paradis. La perfection.

Mais quand même... J'ai envie de rappeler à Ace un truc important :

- Moi aussi je t'aime, hein...

.

.

Il ne réalise toujours pas.

J'ai un sourire en le regardant engloutir l'assiette en face de lui. Il n'en a à rien foutre qu'on soit au restaurant et que j'ai voulu l'emmener dans un endroit un peu moins cheap que ce qu'on a toujours eu l'habitude de faire. Aucune raison particulière, j'avais juste envie de nous sortir.

Et peut-être de fuir rapidement les questionnements soudains de Luffy.

Je ne peux pas lui jeter la pierre. C'est une habitude que je commence à choper un peu trop souvent, ces dernières semaines : dès qu'on fait l'amour, je suis tellement heureux que je me fais violence pour ne pas lui répéter en boucle à quel point je l'aime. On pourrait peut-être croire que c'est compliqué à gérer, mais pas vraiment : pas après avoir passé la moitié de ma vie à me retenir de le lui dire alors que c'était complètement inapproprié. Aujourd'hui, je sais que ça passe tranquillement quand je le laisse s'échapper.

Luffy ne réalise juste pas la nuance. Ou du moins... Il ne l'avait pas réalisée jusqu'ici.

Je continue de l'observer batailler contre lui-même pour se retenir de ne pas lécher son assiette en me foutant ouvertement de lui, et je me demande tout de même bien ce qui a subitement déclenché sa réalisation. Je n'ai pas l'impression d'avoir été très différent. Ce n'était pas le premier « je t'aime » que je lui lâchais pendant le sexe, même si je reconnais que celui-là était particulièrement passionné...

C'est entièrement sa faute. Il n'a qu'à pas être aussi... parfait.

- Qu'est-c't'as à me regarder avec ton sourire de débile ?! feule-t-il en fronçant les sourcils.

- T'as de la sauce sur le coin de la bouche, débile.

Il s'essuie en râlant, avec sa manche, évidemment. Ça me fait encore rire.

- T'es sûr que t'as été élevé par Monkey D. Dragon... ? Il t'aurait jamais laissé faire des trucs comme ça en public...

- Cite-moi la dernière fois qu'on a été au resto avec Papa et Maman ! En dehors du McDo et du Flunch !

Je lève les yeux au ciel pour réfléchir, et je dois bien reconnaître qu'il a raison. Les parents n'étaient pas friands de ce genre de sortie, bizarrement...

- C'est plutôt à toi qu'il faudrait faire des réflexions ! me rétorque-t-il subitement. Comment ça s'fait que t'as voulu m'emmener dans un resto genre houppé comme ça et qu'tu sois aussi à l'aise ?!

J'esquisse un sourire en coin alors qu'il m'envoie un regard super suspicieux. Typiquement le genre de moment où j'ai envie de le faire tourner en bourrique en lui inventant une connerie... Et ça serait certainement plus drôle à dire que la vérité.

- ... Marco m'emmenait souvent dans ce genre d'endroit.

Évidemment, il me fait les gros yeux et j'ai l'impression qu'il se décompose un peu. Mais tant pis : depuis sa crise à mon anniversaire, j'ai décidé que je serai complètement honnête avec lui, à présent. Plus d'omission, plus de cachotterie débile qui apporte forcément son lot de problèmes un jour. Je lui dois bien ça. Je n'ai plus envie qu'il se mette dans des états pareils juste parce que je n'arrive pas à assumer mon passé comme un idiot...

Il se met à émietter son bout de pain pour s'occuper les doigts : réflexe d'hyperactif, je connais parfaitement ça. Son cerveau doit sûrement carburer à cent à l'heure et je lâche une moue involontaire : une partie de moi continue de penser fortement que les mensonges sont mieux pour éviter ce genre de réaction.

- ... Ça doit t'faire bizarre de passer d'un daron à... Ben, moi, souffle-t-il en plissant le nez sur ses miettes. J'pourrais être le fils de Marco t'sais...

- Effectivement... ricané-je. Mais j'te rassure, ça a ses bons côtés : au moins, tu passes pas ton temps à me faire la leçon et on s'ennuie jamais avec toi.

Il me regarde de nouveau et je suis ravi de retrouver ses grands yeux qui n'expriment désormais que de la curiosité pure et simple.

- Tu t'ennuyais avec lui... ?

Je réprime un soupir. J'adore ce contraste effarant entre nous : je déteste parler de Marco, mais Luffy a développé, au contraire, une sorte de fascination à son sujet que j'ai du mal à piger. Il a l'air bien plus libéré que moi à parler de ses anciennes relations, vu comme il me cite régulièrement ce Barto' ou Shiraoshi. Et il ne se rend même pas compte d'à quel point les comparaisons régulières deviennent vite agaçantes, voire blessantes, à la longue, mais bon. C'est Luffy, je ne peux pas lui tenir rigueur d'être maladroit dans ses interactions sociales : ça fait intégralement partie de lui, après tout.

- C'était pas... Le mec le plus fun que j'ai pu rencontrer, lui réponds-je malgré tout à contrecœur. Tu l'as bien vu de toi-même t'façon : ce type est juste le calme incarné. Je l'ai jamais entendu rire aux éclats en presque un an et demi que j'le connaissais. Et on avait pas grand-chose en commun...

Je le vois froncer les sourcils.

- Bah pourquoi vous sortiez ensemble, alors... ?

Cette fois, mon soupir m'échappe pour de bon.

- J'en sais rien, tu lui poseras la question la prochaine fois qu'tu le croiseras. On parle d'autre chose ?

Ma patience a des limites et je ne suis pas venu ici pour parler de Marco, mais pour profiter de Luffy. Je sais que ça l'intéresse, mais je ne vais pas aller lui parler de ce qui l'énerve, que je sache.

Je le regarde et esquisse un sourire en le voyant essayer d'attirer un serveur plutôt que de s'enfoncer dans son malaise d'avoir compris qu'il me faisait chier avec ses questions. Heureusement pour lui que mon agacement à son égard ne dépasse jamais les dix secondes, il est beaucoup trop adorable pour que je lui en veuille plus longtemps...

Je tends la main pour venir passer doucement mes doigts dans ses cheveux. Qui aurait cru que maintenant que je peux enfin le toucher comme je le veux, mon besoin de contact serait encore plus fort... ? Mes mains passent leur temps sur lui, c'est purement abusé. Le manque est encore plus fort et plus violent que la nicotine s'il dure trop longtemps. Je sais qu'il avait un peu de mal à s'y faire, au début. Encore aujourd'hui, il a souvent des violents gestes d'esquive quand j'ose être trop proche dans un endroit « connu ». Et en un sens, je suppose que je devrais le remercier d'être attentif pour deux : j'ai failli nous cramer deux-trois fois devant Shanks, à sa dernière visite.

Le toucher est devenu bien trop vite un réflexe. Prendre sa main dans la rue, l'embrasser dès que je le peux, multiplier les gestes tendres... Je ne me reconnais pas, mais je nierai si je disais que ça m'étonne. J'ai toujours été particulièrement affectueux avec lui, logique que ça soit encore pire maintenant.

C'est pour cette raison qu'on se barre à l'autre bout de la ville à chaque fois qu'on sort. On a fait presque vingt minutes de trajet juste pour aller dans ce resto, et approcher Luffy quand on descend se faire une session de skate sur les dalles en bas de notre immeuble est tout simplement prohibé, à mon grand regret. Je me fais rire tout seul à mal le vivre : c'est pourtant bien moi qui lui rappelle sans cesse qu'il faut qu'on reste planqués pour le moment.

J'ai beaucoup trop peur qu'on me l'enlève si quelqu'un venait à découvrir le pot-aux-roses. Il faut au moins qu'on tienne jusqu'à mai, pour ses 18 ans. À ce moment-là seulement, je me permettrai d'être un peu moins sur nos gardes. Même si la peur qu'un enfoiré quelconque essaie quand même de nous séparer pour la seule et unique raison que nous sommes frères restera... Et j'ai une pensée persistante pour notre grand-père ou un de ses potes. Je ne leur fais pas confiance du tout. Heureusement que le premier est loin et que les autres ne fouinent pas trop, pour le moment.

Quoi que je n'ai pas trop de nouvelles à ce sujet. Et aux dernières informations que m'a apporté Luffy, la rouquine s'intéressait de près à cette histoire de suçon malheureux qui m'a échappé...

- Au fait, ça s'passe avec tes potes ? lui demandé-je dès que le serveur s'est tiré après avoir pris notre deuxième commande de plat principal – il ne s'y attendait pas je crois, sa tête n'avait pas de prix.

- Ouais, pourquoi ça irait pas ? Zoro veut m'faire la peau en ce moment parce que j'arrête pas d'embêter Choppy et que soi-disant ça l'déconcentre dans ses révisions, pfff...

Je hausse un sourcil amusé : ce chieur...

- Avec toute l'objectivité dont j'suis capable, j'avoue que tu pourrais changer de cible au lieu de t'attaquer au plus faible, sale enfoiré bien digne de moi.

Il se marre comme un abruti.

- Mais je parlais pas d'ça, Lu'... précisé-je en retrouvant mon sérieux. Tu sais...

Je le vois subitement se dandiner de gêne sur sa chaise alors que je suis surpris de la rapidité avec laquelle il a fait le lien.

- ... Justement...

L'inquiétude et la méfiance montent en moi d'un seul coup, prêt à entendre le pire des désastres. Du genre, qu'il leur a tout déballé et que l'enfer va commencer.

- Nami arrête pas d'me surveiller, c'est hyper relou, m'explique-t-il et ça me rassure aussitôt – si ce n'est que ça. Usopp et Chopper m'en ont parlé vite fait tout à l'heure, pour me dire que Zoro commençait à s'inquiéter. Genre, parce qu'il pense que si j'leur cache une relation, ben c'est qu'ils seraient pas contents s'ils apprenaient avec qui j'sors, tu vois...

Oui, je vois. Et maintenant, c'est la colère qui monte violemment en moi. Pourquoi ça ne m'étonne pas un seul instant que le prénom de « Zoro » vienne aussi vite sur le tapis... ? Ce sale fouteur de merde. Plus j'en entends parler, plus je me rends compte qu'il essaie d'un peu trop de s'incruster dans la vie de mon frère pour être honnête. Je revois encore Luffy me dire il n'y a pas si longtemps qu'il le trouvait bien plus sur son dos, ces derniers temps. Comme si la mort de nos parents lui avait subitement fait naître des instincts paternels un peu trop envahissants. Et j'ai beau répéter à Luffy de ne pas trop prendre ce qu'il dit comme parole d'évangile, je connais mon frère par cœur : il leur fait confiance, il tient à eux, alors des conseils pareils de ma part, ça rentre par une oreille et ça ressort par l'autre. Heureusement que je sais qu'il m'écoute moi en priorité, la plupart du temps...

Mais le jour où ils sauront, ça ne sera sûrement plus le même son de cloche. Il suffit qu'un ou deux d'entre eux réagissent virulemment – et je ne doute pas un seul putain d'instant que Zozo en fera partie -, et ils feront tout pour le convaincre d'arrêter ça sur-le-champ. De s'éloigner de moi.

C'est dès maintenant qu'il faut que je travaille Luffy au corps pour être certain qu'il ne les écoutera pas.

- Tu dois pas te laisser faire, Lu'. Tes potes peuvent te donner des conseils, mais ils n'ont pas à te dicter tes choix. Si t'as pas envie de leur parler de quelque chose, c'est complètement ton droit. Te forcer prouverait seulement que ce ne sont pas des vrais potes... Et d'autant plus s'ils te font pas confiance pour te gérer et gérer les gens que tu fréquentes. Alors quoi, t'es juste un gamin à leurs yeux, en fait ?

Je retiens un sourire satisfait à son expression qui devient plus concernée. Je sais que ça fait mouche. Luffy m'a toujours écouté moi avant tous les autres. Il n'y a aucune raison que ça change aujourd'hui. Surtout pas aujourd'hui, maintenant qu'on est plus seuls que jamais.

- ... Au-delà d'ça, c'est vrai que j'leur cache jamais rien, d'habitude... marmonne-t-il un peu pour lui-même.

- Et alors ? Peut-être qu'ils méritent que tu le leur caches... S'ils insistent tellement pour se mêler de ton cul au lieu du leur, j'suis pas certain qu'ils te respectent autant qu'ils le devraient, tu crois pas ?

Il fait la moue. Je sais que j'y vais fort. Mais je sais aussi parfaitement ce que je fais.

- Après... continué-je d'un ton plus doux. Ce sont encore des gamins. C'est un peu normal qu'ils réagissent comme ça...

- Des gamins... ? répète-t-il en haussant les sourcils. Ils sont tous plus vieux qu'moi... 'fin, à part Chopper, et Usopp qui a mon âge, mais c'est pas eux qui sont relous pour le coup.

- Ouais, 18 ans : des gamins. Ils manquent de maturité et de recul pour se rendre compte qu'ils ont pas à s'incruster dans ta vie comme ça... C'est même maintenant qu'ils vont l'apprendre, en fait. Parce que TU vas les éduquer à ne pas le faire, TU vas leur apprendre les limites. T'as pas à leur mentir ni à leur cacher quoi que ce soit, t'as juste à dire que tu ne veux pas en parler et que tu ne veux pas qu'ils s'en mêlent, point. C'est pas bien difficile, que j'sache...

Il médite sur la question. Je sens bien qu'il hésite et que je ne le convaincs pas totalement sur le coup, mais je ne me fais pas de souci : je sais qu'il cogite sur mes paroles. Et que comme d'habitude, il finira pas se dire que j'ai raison.

Ce sont eux les pièces rapportées dans la vie de Luffy après tout, pas moi.

- J'ai pas envie d'éduquer mes potes... boude-t-il. J'suis pas leur père...

- C'est pas éduquer au sens strict, ris-je en venant lui caresser doucement la main. Mais c'est en faisant des erreurs qu'on apprend dans la vie. T'as juste à leur montrer leur erreur. Qu'insister te blesse, en plus de te stresser.

- Ça m'blesse ? me demande-t-il avec des yeux ronds.

- C'est pas l'cas ? J'suis sûr que si.

- J'en ai pas l'impression...

- 'Sûrement parce que tu te rends pas compte. T'as toujours eu du mal à mettre un mot sur tes ressentis négatifs, après tout... Mais d'après tout ce que tu me dis d'eux ces derniers temps, ils t'apportent plus de négatif que de positif... Il faut qu'tu mettes les points sur les « i » maintenant si tu veux pas que ça empire et que ça puisse partir jusqu'à l'engueulade pure et simple... Ou pire : jusqu'à l'embrouille et l'éloignement.

Il cogite de nouveau, je souris en coin : appuyer sur la corde sensible pour faire réagir, c'est ma putain de spécialité. Luffy a une peur bleue de la solitude. Perdre ses potes, ça serait la fin du monde pour lui... Je sais donc que je tape en plein dans le mille.

- ... Tu dois avoir raison... J'ai pas envie de m'embrouiller avec eux parce qu'ils sont trop immatures pour voir qu'ils m'font mal, à insister comme ça. J'leur dirai la prochaine fois.

C'est tellement facile que je ne comprends même pas pourquoi j'ai toujours peur, au fond. Tant que Luffy m'écoutera moi, on ne sera pas séparés.

Et je compte bien continuer de tout faire pour qu'il m'écoute.

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- Kyo - Chaque seconde -

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Je tiens à dire qu'Ace me fatigue énormément. Ce chapitre était censé être juste fluffy fluff entre eux, et voilà qu'il m'échappe encore pour faire son enfoiré... Il peut pas s'en empêcher ma parole, c'est fou ça !

Sinon, je me rends compte toute seule comme une grande que l'enchaînement des chapitres peut paraître un peu décousu en ce moment... Mais j'ai l'impression de ne pas avoir trop le choix si je veux accélérer un peu la narration. Il faut bien que le temps passe pour que la relation des frères évolue. Histoire qu'on passe aux péripéties suivantes...