Disclaimer : Nous ne tirons profit, en aucune façon, de cette histoire. Les personnages de Marvel appartiennent à leurs propriétaires. Nous ne retirons rien de l'histoire qui suit et tous les droits de création des personnages leur appartiennent. En revanche, l'histoire nous appartient.
Rating : T
Genre : Romance / Drama / Angst / Comfort
Personnages : Tony Stark ; Loki ; la plupart des personnages vus dans les films du MCU
Situation temporelle : Démarre en 2012, après que Loki a récupéré le Tesseract dans Avengers Endgame
Bonjour tout le monde !
Navrée, avec les vacances, j'ai complètement perdu le fil de la publication ! Je publie donc ce chapitre "à l'arrache", et j'espère pouvoir répondre à vos prochaines reviews !
Au programme aujourd'hui, Tony qui s'efforce de se remobiliser et fait un premier bilan intérieur de tout ce bordel, une discussion importante avec Steve, et le début de la bataille de Sokovie.
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A celles et ceux qui ont commenté le précédent chapitre, merci beaucoup pour vos review !
Bonne lecture !
Ju' et Kae
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CHAPITRE 36
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Le feu rongeant la chair et l'acier. L'eau coulant sur les pavés. Pierre, métal et sang. Poussière et cendre. Corps ennemis et corps victimes. Coupables et innocents, allongés côte à côte. Tel était le terrible tribut de la guerre.
Et il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour que la Sokovie ne devienne pas un énième champ de bataille.
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« Dix minutes. Préparez-vous. »
Tony s'était précipité dans son atelier. Si lui n'avait pas besoin de se changer ni de s'équiper, contrairement aux autres, il lui restait quelque chose d'indispensable à faire avant d'aller au combat. Mais face à la poignée de cartes cryptées étalée sur son bureau, il sentit son cœur se serrer. Bien sûr qu'il savait que Jarvis n'était plus là, uploadé dans le corps synthétique de sa vision révolutionnaire – Vision, hein ? Steve l'avait désigné comme ça un peu plus tôt. Mouais, pourquoi pas… – et ne serait plus jamais le même. Il n'avait juste pas imaginé devoir le remplacer si vite, moins d'une heure après l'avoir définitivement perdu. Mais il ne pouvait pas aller combattre dans son armure sans l'assistance d'une IA. Non seulement il n'en avait pas l'habitude, lui qui était escorté par Jarvis depuis son premier vol, mais en plus ce dernier gérait le flux de données entrant, un flux permanent et conséquent qui n'aurait pas manquer de le noyer s'il tentait d'y accéder par lui-même, a fortiori alors qu'il était en train de voler ou de se battre.
Son choix se porta finalement sur Friday. C'était stupide, mais après plus de vingt ans passés avec la voix de Jarvis dans les oreilles, il avait besoin de changement. Et choisir une jeunette à l'accent irlandais à couper au couteau en lieu et place de son distingué majordome britannique était justement le genre de changement dont il avait besoin.
« Bonsoir Patron. »
Il ne la téléchargea de que dans le mark-71, il aurait tout le temps de l'uploadé ailleurs plus tard. Après tout, il n'aurait pas besoin d'une nouvelle IA s'il mourait en cours de route… Joie et bonheur, optimisme quand tu nous tiens…
Et puisqu'ils fonçaient tout droit dans un piège mortel, il avait une dernière chose à faire avant de quitter le confort et la sécurité de son atelier pour rejoindre le Quinjet. Saisissant son portable, il tapa rapidement un numéro qu'il n'avait que trop composé au cours des derniers jours et porta l'appareil à son oreille. Comme il s'y attendait, il n'eut pas à attendre avant qu'on ne décroche. Et, sans surprise également, nulle voix ne se fit entendre, attendant qu'il prenne la parole.
« Salut, c'est moi. »
Il grimaça avant même que le dieu ne réplique d'une voix acide.
« Et qui d'autre au juste cela pourrait-il être Stark ? »
Fugitivement, l'ingénieur se souvint des nombreux messages vocaux à la banalité douteuse qu'il avait tenté d'envoyer à Loki, alors que lui-même se reposait chez les Barton, sa première tentative commençant par ces mêmes mots. Et si le message final n'avait pas été des plus délicat – quel euphémisme ! – l'effacement des messages précédents n'était peut-être pas une si mauvaise chose, vu l'agacement manifeste que provoquait ces quelques mots. Malgré lui, il pouffa. Comme une midinette, s'il devait être tout à fait honnête. Merde, ses nerfs étaient complètement en train de lâcher.
« Puis-je connaitre la source de votre amusement ? »
Peut-être pas le meilleur moment pour craquer en fait. Plus tard, beaucoup plus tard, quand tout ce bordel serait terminé, il irait se bourrer la gueule et ricanerait comme un bossu pour éviter de chialer comme un môme. Ou peut-être qu'il irait simplement se vautrer sur le canapé de son atelier, à parler dans le vide en espérant que quelqu'un l'écoute. Sans pouvoir s'en empêcher, Tony sourit doucement. Qu'est-ce qu'il racontait, évidement, qu'il serait là. Probablement à se foutre de lui, mais il l'écouterait. Il serait là.
« Longue histoire. Trop longue pour être racontée maintenant. Un autre jour peut-être, si t'es toujours intéressé ? »
« Dans ce cas, que me vaut le déplaisir de cet appel ? »
« Juste t'informer de nos prochains mouvements. On quitte New-York et on va en Sokovie, où se terre Ultron. On a un plan pour l'éliminer une bonne fois pour toute. » Ce qui n'était… pas tout à fait vrai pour le moment. Mais il y travaillait !
« Et… pour Jarvis ? » demanda le dieu avec un tact surprenant. « Sa nouvelle incarnation ? »
« Ça fera l'affaire. »
Il avait pas spécialement prévu de s'attarder sur le sujet pour l'instant, lui-même incertain de ce qu'il ressentait. Pour autant, il était reconnaissant au dieu d'avoir demandé… et de ne pas insister.
« Ne vous faites pas tuer Stark, vous avez encore de longues explications à fournir si vous ne souhaitez pas finir lentement éviscéré. »
« T'inquiète, je compte bien survivre à Ultron et ses sbires, puis à toi et ta colère. Colère légitime d'ailleurs, je tiens à le préciser, contrairement à l'autre connard qui veut me buter sans la moindre raison valable. »
« Survivre à ma colère ? Un exploit dont bien peu peuvent se targuer, vous en avez conscience ? »
« Voyons, quand ai-je jamais été comme les autres ? »
Seul un bip répétitif lui répondit, signe que la communication avait été rompue. Tony ne retint pas un franc éclat de rire, se laissant brièvement aller sur son siège avant de se redresser. Et c'est plus serein qu'il n'aurait imaginé l'être vu les circonstances qu'il gagna le toit où, comme c'est étonnant, Steve et Bruce étaient déjà présents. Le scientifique lui n'avait pas à se changer et rien à préparer après tout. Quant à Steve… et bien, le Cap était invariablement le premier prêt, quelles que soient les circonstances, ce qui était foutrement agaçant.
Par contre, son humeur presque légère contrastait d'autant plus avec la mine sérieuse de ses camarades, aussi se força-t-il à éloigner de son esprit la conversation qu'il venait d'avoir avec son foutu colocataire pour se joindre à la discussion en cours.
« On ne survivra pas tous, » disait Bruce, la mine sombre. « Statistiquement, face à un ennemi si nombreux… »
« Mathématiquement, une probabilité nulle ne signifie pas que c'est impossible, » contra-t-il aussitôt. « Et si nos chances de succès sont minces, elles existent bel et bien. Si tu ne crois en rien d'autres, crois aux mathématiques, » dit-il, posant une main sur son épaule.
« S'il reste un seul de ces soldats de plomb dans la nature, tout sera perdu. »
« Je n'ai rien de prévu demain soir, » rétorqua Steve avec un sourire en coin.
Tony roula des yeux, mais il n'en était pas moins reconnaissant pour cette tentative de blague qui avait le mérite de détendre l'atmosphère, aussi pitoyable soit-elle.
« C'est moi qui l'affronterai le premier, » reprit-il. « Après tout, c'est à Iron Man qu'il veut s'en prendre d'abord, non ? »
« Absolument, » confirma Vision – va pour Vision, définitivement – en passant derrière eux pour monter dans l'appareil. « Vous êtes sa bête noire. »
Et bien. Voilà qui avait le mérite d'être clair.
« D'autres suggestions ? »
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Le survol de l'Atlantique se fit dans un silence pesant. A intervalles réguliers, les jumeaux Maximoff le regardaient avec un rien de colère dans les yeux – ce qu'il allait quand même falloir qu'on lui explique – et lui-même leur rendait leurs regards avec mépris. Clairement, rien n'était oublié, d'un côté ou de l'autre, et encore moins pardonné. Franchement, il doutait que ce le soit un jour.
Outre les jumeaux, Vision – dont le nom avait été approuvé par tous, à commencer par le principal concerné – l'avait longuement observé. Mais Tony ne se sentait pas le courage d'aller à lui, d'entendre cette voix si proche de celle de Jarvis lui parler avec un détachement et une froideur émotionnelle que l'IA n'avait plus eu depuis ses débuts. Alors okay, il était lâche, et il avait depuis longtemps fait de l'évitement une véritable spécialité, pour ne pas dire qu'il l'avait élevé au rang d'art. Mais la situation était déjà suffisamment compliquée sans que les autres aient à se préoccuper de ses états d'âmes. Qu'importe que lui-même soit pour ainsi dire en deuil…
En attendant, Thor était le seul qui discutait avec Vision – monologuait tout seul, pour être tout à fait exact – Et si les mots « puissances cosmiques » avaient attiré son attention – faut dire qu'il en connaissait à présent un rayon sur le sujet – il craignait trop de se trouver face à l'androïde pour se joindre à la conversation. Bruce s'était quant à lui isolé avec son casque et sa musique, comme avant chaque mission. Et quand on se souvenait des résultats de sa dernière intervention sur le terrain… Ouais, on comprenait les traits crispés du docteur.
Ne restait donc que Steve, qui n'avait pas quitté le poste de pilotage depuis le décollage. Si Clint lui avait un temps tenu compagnie, l'archer était depuis parti se reposer, grappillant quelques précieuses minutes de sommeil avant la bataille. Et après trois longues heures à pianoter distraitement sur sa tablette – il n'était même pas certain de pouvoir dire sur quoi il avait travaillé – l'heure était venu de crever l'abcès. Il pensait attendre de finir la mission, mais ce silence insupportable le tuait à petit feu, et lui mettait les nerfs en pelote. Il s'était rarement – pour ne pas dire jamais – brouillé à ce point avec ses coéquipiers, si on omettait leurs débuts houleux sur l'héliporteur, et Tony découvrait qu'il détestait ça avec passion. Et puis, de manière plus terre à terre, il n'imaginait même pas comment ça pourrait fonctionner sur le terrain avec cette ambiance glauquissime.
Il se laissa donc tomber avec lourdeur dans le siège du copilote, pour se tourner vers son coéquipier. Mais, le prenant par surprise, ce dernier fut le premier à prendre la parole.
« Pourquoi ? »
« Quoi ? »
Tony ne comprit pas la question, posée d'une voix neutre et sans que Steve ne daigne poser les yeux sur lui.
« Pourquoi t'as fait ça ? »
Que répondre à ça ? Il n'était même pas certain qu'ils parlent de la même chose alors… De longues secondes silencieuse s'écoulèrent avant que Steve ne soupire face à son manque de réponse. Le Cap activa finalement le pilotage automatique et se tourna vers lui.
« Contrairement à ce que j'ai pensé lorsque nous nous sommes rencontrés, et que j'ai longtemps continué à penser d'ailleurs, tu n'as rien d'un inconscient. Insouciant, oui. Négligent, souvent. Imprudent, beaucoup trop. Surtout quand il s'agit de ta vie d'ailleurs ! Mais inconscient ? Non, tu ne l'es pas. »
« Qu'est-ce que t'essayes de me dire au juste ? » rétorqua-t-il en croisant les bras, sur la défensive.
« Je peux… comprendre l'idée derrière Ultron, je crois. Et si je ne suis pas d'accord sur la forme, sur le fond en revanche… Les intentions derrière étaient bonnes, en dépit de… et bien, tout le reste. »
« Merci, » souffla-t-il, faisant hausser un sourcil surpris à Steve. « Je sais qu'Ultron, ça a merdé à un point cataclysmique… Mais je sais pourquoi je l'ai fait, dans quel but, et même avec le recul… J'arrive pas à me dire qu'il s'agissait d'une mauvaise idée. Alors c'est important que… bah, que tu me dises qu'il y avait du bon, au milieu de tout ce merdier. »
Steve hocha simplement la tête, mais tout son visage se détendit tandis qu'il esquissait un mince sourire. Sourire qui retomba bien vite, alors que les yeux bleus retrouvaient tout leur sérieux.
« Ce que je ne comprends pas, ce que je ne cautionne pas, c'est la façon dont si peu de temps après que tout est déraillé, tu décides de récidiver et de réactiver un projet similaire, de jouer avec ces forces dont tu as eu la preuve qu'elles nous dépassaient… Alors même que nous n'avons pas fini de réparer les dégâts causés la première fois. »
« Justement, rien n'était réglé. Ultron n'était pas arrêté, il ne l'est toujours pas d'ailleurs. Mais comment avais-tu envisagé que nous luttions contre lui au juste ? »
« Développe ? »
Patiemment, Tony entreprit alors de lui raconter son expédition en Norvège, au Nexus, la façon dont il avait traqué leur mystérieux hacker et comment il avait retrouvé Jarvis. La façon dont celui-ci avait su lutter contre Ultron et faire jeu égal avec leur ennemi, ce qu'aucun d'entre eux n'avait été capable de faire. Et même si l'ingénieur devait simplifier à outrance ses explications pour ne pas perdre son ami – certes bien adapté au XXIème siècle désormais, mais ce genre de termes techniques n'était pas à la portée du premier venu, même natif de cette époque – il voyait bien le Cap adopter progressivement le même raisonnement que lui et arriver à la même conclusion.
« Nous n'avions aucun moyen d'arrêter Ultron, » conclut-il après de longues minutes où Steve l'avait globalement laissé parler seul, se contentant de brèves questions à l'occasion. « Détruire une à une ses armures ? Oui, bien sûr, même si nous sommes en très large infériorité numérique comme n'a pas manqué de le rappeler Bruce. Mais détruire une entité numérique plus rapide qu'aucun humain ne peut l'être ? Alors j'ai choisi de miser sur le seul qui avait une petite chance de le battre. J'avais aucune garantie, on savait pas à quel point le système d'Ultron avait été implanté dans le corps, et si Jarvis saurait le supplanter. Pour ce que j'en sais, on aurait pu se retrouver avec deux Ultron à combattre au lieu d'un seul. C'était un pari risqué, je sais, pas la peine que tu me le dises. Mais c'était la seule option à notre portée. Enfin, de mon point de vue. Et du tiens ? »
« J'entends tes arguments Tony, je te jure que je le fais. Mais tu as pris cette décision seul, avec tous les risques qu'elle comportait, en notre nom à tous. Et c'est nous tous qui allons devoir assumer les conséquences de ce choix, quelles qu'elles soient. Pas seulement toi, Jarvis ou Vision. »
« Je sais. J'assume cette décision, comme chacun de mes putains de choix, passés et à venir. Et si c'était à refaire, je le referai, et plus encore maintenant que je sais ce qui a émergé du caisson. Quel que soit le résultat final de cette bataille, Vision représente notre meilleure chance de victoire. »
« Prions pour que tu ais raison. »
Son ami alla pour se lever, mais Tony le retint brièvement par le bras. Puisqu'il était question « d'assumer ces choix », il avait une dernière chose à ajouter. Et si Steve ne saisirait probablement jamais la portée de ses mots – ou du moins, pas avant très longtemps, il l'espérait – lui ressentait le besoin de les prononcer.
« Steve ? » l'appela-t-il, attendant d'être certain d'avoir son attention avant de poursuivre. « Je m'arrêterai pas là, tu en as bien conscience n'est-ce pas ? Le projet Ultron a foiré, et en beauté qui plus est. Mais c'était une mise en œuvre, une seule, au sein d'un plan beaucoup plus vaste. Un maudit palliatif à des idées trop ambitieuses, des idées auxquelles j'ai cru devoir renoncer. »
Tumaco avait laissé des traces, dans son âme et dans son esprit. Mais se lancer à corps perdu dans un « palliatif » à Oméga était facilement une des pires idées qu'il n'ait jamais eues, et de loin. Un palliatif… Pallier à ses manquements, pensait-il à ce moment. Franchement, il méritait des claques. Oméga était ambitieux, il l'avait su dès le débat. Hautement complexe et grandiose à la fois. Il leur faudrait des années pour parvenir à le mettre en œuvre. Et ils y arriveraient, ensemble. Il voulait, il devait y croire.
« Mais je sais où je me tiens à présent, et mon objectif est plus clair que jamais. Je n'abandonnerai, pas maintenant, pas après tout ce que j'ai risqué et sacrifié pour ça. Essayeras-tu de m'en empêcher ? »
« Tu sais bien que non. Si nous ne sommes pas souvent d'accord sur la forme que doit prendre notre mission, nous avons les mêmes intentions. Essaye juste de ne pas créer un nouveau robot tueur, et tout ira bien ! » finit-il avec un petit sourire ironique, mais pas moins sincère.
« T'inquiètes pas pour ça. S'il y a bien une leçon que j'ai retenue de tout ce merdier, c'est de ne plus avancer sans sécurités ou garde-fou. La prochaine fois, parce qu'il a toujours une prochaine fois, soyons honnête, il y aura quelqu'un pour m'arrêter. »
Même s'il paraissait vouloir le croire, Steve avait néanmoins l'air dubitatif et posait sur lui un regard inquiet. Encore heureux que le Cap ne sache pas à qui il pensait en disant ces mots, ou il serait beaucoup moins détendu, et ses yeux recéleraient moins d'inquiétude et beaucoup plus d'horreur et de colère.
« Je l'espère Tony. Sincèrement, je l'espère. »
Cette fois, c'est ensemble qu'ils quittèrent leur siège respectif. Et si Tony n'aurait su dire dans quel état d'esprit se trouvait Steve à présent, lui-même était plus serein qu'il ne l'était avant leur conversation. Mieux, il avait retrouvé toute sa détermination, et pas seulement vis-à-vis d'Ultron celui-ci n'était qu'un ennemi à abattre, un conséquent, mais rien de plus. Lui voyait désormais plus loin. Et après avoir passé des semaines – des mois – à se sentir peu à peu déconnecté d'Oméga, il brulait d'envie de s'y atteler de nouveau. Il tirerait des leçons de ses erreurs pour ne pas les répéter, étudierait en détail les moindres variations qui avaient fait vriller le système pour y apporter les modifications nécessaires. Il avait mille idées en tête, qui ne demandaient qu'à être exploitées. Et puis, comme il l'avait dit à Steve, il ne serait pas seul dessus. En tous cas, il ferait tout pour.
Ayant entamé le survol de l'Europe, et s'approchant de fait de leur cible, leur petite bande de héros disparates se rassembla autour de leur leader afin de mettre au point un plan en bonne et due forme. S'ils en avaient tous les grandes lignes sans même en avoir discuté entre eux, il était temps à présent d'entrer dans les détails.
La priorité immédiate était la mise en sureté des civils. Tant qu'ils ignoraient le plan d'Ultron, ils n'avaient d'autre choix que de faire évacuer la ville avant qu'elle ne devienne un champ de bataille. Même en Sokovie, les Avengers étaient connus, et les gens auraient tendance à suivre volontairement leurs instructions – même si la présence de l'Iron Legion la dernière fois n'avait pas été très concluante, il voulait croire que les voir en personne changerait la donne. Maximoff numéro un ferait le tour de la ville en courant pour alerter un maximum de personnes, à commencer par les autorités et les services de polices, et Maximoff numéro deux utiliserait ses pouvoirs pour gentiment inciter les gens à quitter leur domicile séance tenante. Pendant ce temps, Thor et Bruce infiltreraient directement les souterrains de l'ancienne forteresse de Strucker pour découvrir ce que l'IA mijotait et secourir Natasha, tandis que lui-même aurait la lourde tâche d'occuper Ultron et de gagner du temps pour les autres.
« Ultron sait que nous arrivons, et le feu ennemi risque d'être nourri, » récapitula Steve à la fin du briefing. « Nous avons signé en connaissance de cause, mais le peuple de Sokovie ne l'a pas fait lui. Alors notre priorité est de les faire sortir. Tout ce qu'ils demandent, c'est de pouvoir vivre en paix. Ce n'est pas pour aujourd'hui, mais on fera tout ce qu'on peut pour les protéger, et on peut y arriver. On découvre ce qu'a construit Ultron, on trouve Natasha, et on dégage. Ce combat ne concerne que nous. »
Mais alors que tous pensaient avoir entendu la fin du discours et s'apprêtaient à s'isoler chacun de son côté, lui le premier, Steve les prit de court et poursuivit.
« Ultron pense que nous sommes des monstres, qui empêchent le monde de tourner rond. Il ne s'agit pas seulement de le battre, mais de savoir s'il dit vrai. »
Et si Steve n'avait pas levé les yeux pendant sa tirade – ne visant personne, n'accusant personne – c'est son regard qu'il chercha quand il eut fini. Un regard que Tony soutint avec fermeté. Ils n'étaient pas des monstres, aucun d'entre eux, malgré toutes les réserves qu'il pouvait avoir sur certains de leurs coéquipiers du jour. Ils étaient simplement des humains, avec certes tous les défauts et les imperfections qui allaient avec, mais également leurs qualités, leur valeur et leurs vertus. D'accord, dans le lot il y avait un dieu asgardien et un androïde âgé d'approximativement quatre heures, mais le principe était le même. Plus ou moins.
Ils étaient humains, et imparfaits. Et c'est armés de leurs disparités et de leurs dissemblances qu'ils allaient une bonne fois pour tour mettre un terme au règne de terreur du roi autoproclamé de la Terre : Ultron.
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« T'inquiète, je compte bien survivre à Ultron et ses sbires, puis à toi et ta colère. Colère légitime d'ailleurs, je tiens à le préciser, contrairement à l'autre connard qui veut me buter sans la moindre raison valable, » pérorait gaiement Stark au téléphone, lui faisant hausser un sourcil inquisiteur.
« Survivre à ma colère ? » s'étonna faussement Loki, sa fausse surprise ne maquillant en rien l'acidité de son ton. « Un exploit dont bien peu peuvent se targuer, vous en avez conscience ? »
« Voyons, quand ai-je jamais été comme les autres ? »
Mouché – et refusant d'admettre la validité de l'argument – le dieu choisi de ne pas répondre et raccrocha. Et quoi que toute forme de communication entre eux soit coupé, il pouvait presque entendre l'humain ricaner de sa bêtise à son oreille. Misérable mortel.
Il avait en horreur la façon dont cet insecte, avec les tords qu'il avait, trouvait encore le moyen de parader. Et lui-même qui ne l'avait pas tué pour l'offense infligé, n'était-ce pas pathétique ? Pourquoi, par la barbe d'Odin, pourquoi ne pouvait-il se résoudre à haïr l'humain ? Car même au plus fort de sa colère, c'étaient ses actes infâmes et l'ignominieuse trahison qu'il avait véritablement détesté, et non celui qui avait commis d'innombrables fautes. S'il se refusait à oublier, encore moins à pardonner ces erreurs si la colère était une vieille amie qui n'avait point encore quitté son cœur malgré tout cela et bien plus encore, il n'éprouvait aucune haine.
Au nom de quels sentiments abjects cela pouvait-il être possible ? Le mépris avait guidé leurs premières rencontres, leurs premières heures de travail. Puis l'ingénieur l'avait peu à peu intrigué, et il en était venu à lui accorder un certain crédit. Il avait appris à considérer l'humain en égal, à mesure que fleurissaient respect et confiance. Il avait effleuré du doigt ce qu'il pensait être de l'amitié. En était-ce ? Peut-être. Surement. Ou pas.
Et aujourd'hui, il se trouvait face à une décision difficile à prendre. Ignorer pour de bon ces émotions et claquemurer soigneusement son cœur, comme il l'avait fait à chaque déconvenue, ou prendre le risque de laisser l'humain approcher à nouveau et causer davantage de dégâts. ? Le choix aurait dû être évident, alors pourquoi ne parvenait-il pas à prendre de décision ?
Préoccupé, Loki n'avait plus guère d'intérêt pour son grimoire, pas plus que pour l'écran qu'il avait allumé et paramétré sur une chaine d'informations en continu, dans le cas plus que probable où les Avengers viendraient à faire parler d'eux. Les heures passèrent donc sans qu'il ne tranche véritablement, oscillant sans cesse entre ses deux options, incapable de faire pleinement la lumière sur ce qu'il ressentait ou avait ressenti, par le passé ou encore actuellement.
Incertain de ses émotions, il était toutefois raisonnable de dire que le sentiment qui l'envahit à la vision de la Sokovie s'envolant dans le ciel était de la peur.
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L'évacuation était lancée, et se déroulait plutôt bien, à ce qu'il pouvait en dire. La psychopathe se montrait encore plus flippante qu'elle ne l'était déjà en forçant des centaines de personnes à la fois à quitter leur maison, et Bruce progressait aux côtés de Thor dans les sous-sols de la ville, sans avoir été repéré pour le moment.
Ce qui était parfaitement visible par contre, c'était la masse de personne fuyant le secteur. Impossible pour Ultron de les manquer, ce qui signifiait que c'était à son tour d'entrer en scène.
« Friday, localisation. »
Cinq secondes et des poussières, et son IA lui répondait. Bon temps de réponse pour une première.
« Votre homme est dans l'église patron. Je pense qu'il vous attend. »
« Nan, tu crois ? »
Aucune réponse cette fois-ci. Hum, peut-être allait-il devoir réviser sa compréhension du second degré et du sarcasme, et lui donner plus de répartie. Jarv' était doué à ce p'tit jeu et… Merde, c'était carrément pas le moment de penser à ça en fait. Pas le moment du tout.
S'envolant la ville, il mit moins de trente seconde à rejoindre la fameuse église, guidé par les instructions qu'affichait son IA sur l'écran. La pierre se fendilla sous ses pieds tandis qu'il atterrissait sans précaution, mais il ne se faisait pas de soucis à ce sujet. Non seulement le bâtiment était déjà bien abimé – il manquait carrément un bout du toit – mais ayant été choisi par le grand méchant comme le lieu de leur confrontation finale, il doutait qu'il reste debout bien longtemps.
Pierres éboulées jonchant le sol, fenêtres ouvertes à tous les vents, la petite chapelle était affreusement sinistre. L'écho de ses pas trop lourds résonnait autour de lui, mais c'était la seule chose qu'il pouvait entendre, aucun de ses capteurs ne décelant la moindre présence. Où est-ce que ce connard était passé ? Friday se serait-elle trompée ? Malgré son inexpérience des missions sur le terrain, il avait du mal à y croire.
« Tu es venu confesser tes péchés ? »
Qu'est-ce qu'il disait ? Il tourna lentement sur lui-même, gants allumés et paré à faire feu. La voix métallique familière avait résonné partout dans la pièce sans qu'il n'en décèle l'origine, la créature à qui elle appartenait brillant par son absence.
« J'en sais rien, tu disposes de combien de temps ? » lança-t-il, voulant le forcer à apparaitre.
« Plus que toi. »
Sentant une présence dans son dos, il se retourna vivement, pour trouver face à lui un corps de métal… bien plus grand qu'il ne l'avait escompté. Il déglutit, avant de laisser libre court à son sarcasme.
« Euh, tu te serais pas dopé ? Un petit cocktail au vibranium. Tu m'as l'air un peu… comment dire… bouffi ? »
« Tu gagnes du temps pour protéger des humains ? »
« Bah, c'est notre mission, t'as oublié ? »
Parler, parler, encore parler. Chaque minute, des dizaines de civils quittaient le champ de bataille en devenir. La moindre seconde était précieuse. Et s'il n'était pas étonnant qu'Ultron voit clair dans son jeu, ce n'est pas ça qui allait l'empêcher de parler, voir même de continuer à se foutre de sa gueule s'il en avait la moindre occasion. L'ironie avait toujours été un de ses modes de communications préférés, et pour ainsi dire son mode par défaut quand il était mis sous pression. Et son niveau de stress avoisinait actuellement les deux mille pourcents.
« Je suis au-delà de votre mission, je suis libre. »
Mais avant qu'il ait pu moquer la supposé « liberté » de l'androïde, un engin de métal surgit violemment du sol, le forçant à reculer pour éviter les jets de pierre qui volaient. De l'énorme cylindre se détachèrent trois pales qui vinrent arrimer l'appareil au sol.
« Tu croyais être le seul à gagner du temps ? »
Merde. Il avait pas la moindre idée de ce que c'était, ni à quoi ça pouvait bien servir, mais ça puait les ennuis ce truc.
« Voilà le reste du vibranium, fonction encore indéterminée, » commenta aussitôt Friday à son oreille, lançant diagnostiques et analyses sans attendre qu'il ne lui en donne l'ordre. Brave fille.
« C'est ainsi que tu finis Tony. C'est ma conception de la paix. »
Sur le qui-vive, Tony fut surpris de ne voir rien ni personne apparaitre pour se jeter sur celui, ignorant toujours ce à quoi devait servir le truc en face de lui. Bonne surprise cela dit. Mais il ne tarda pas à déchanter en entendant la rumeur de la foule parvenir jusqu'à lui, et ce qui ressemblait sans l'ombre d'un doute à des cris de peur.
Abandonnant sans états d'âme Ultron derrière lui, il s'envola pour découvrir que les robots avaient envahi la ville, s'extrayant du fleuve et sortant du sol pour s'attaquer à la population paniquée et impuissante. Hommes, femmes, enfants, tous commençaient à courir dans tous les sens sous l'effet de la peur et à s'éparpiller pour échapper à la menace.
« Courrez ! » entendit-il Steve s'exclamer, bientôt appuyé par Maximoff, qu'il savait être avec Clint et lui : « Évacuez le pont ! »
Le pont était la principale voie d'accès à Novi Grad, et donc un axe d'évacuation majeur. Ultron était intelligent, il ne pouvait pas lui retirer ça : évidemment que l'IA allait tenter de clôturer au plus tôt cette voie de sortie, si possible dans le sang. Malheureusement, il ne pouvait aller les aider, il n'y avait aucun membre de l'équipe dans le secteur de l'église, mais le quartier était loin d'être vide d'occupants pour autant.
« Friday, coupe les com', tant qu'il s'agit pas de transmettre des infos. Vision, à toi de jouer. »
« Reçu monsieur Stark. »
« Friday, branche-moi sur l'oreillette de Vision, je veux entendre ce qu'ils se disent. »
« Bien patron. »
Il avait beau faire confiance à Vision – à peu près, plus ou moins – il n'était pas complètement inconscient comme l'avait souligné Steve un peu plus tôt, et préférait suivre la conversation en direct pour avoir une idée de la façon dont les choses tournaient. Malheureusement, il ne pouvait consacrer à la conversation qu'une oreille lointaine, pris pour cible par des robots qui s'étaient jetés sur lui à l'instant où ils l'avaient vu apparaitre.
« Ultron. »
Il y eut un silence pesant. Tony ne pouvait qu'imaginer ce qui se déroulait dans cette petite église, mais il espérait vraiment avoir réussi à déconcentrer Ultron en le mettant face au corps qu'il avait voulu s'attribuer.
« Ma vision… cette fois ils m'auront réellement tout pris… »
Gagné ! Ultron semblait presque démuni face à cette vision – ah ah, jeu de mot, qu'est-ce qu'on se marre… - mais il ne parvenait à en être attristé. Le moindre avantage était à prendre, et tout ce qui déstabilisait leur ennemi en faisait partie.
« Tu as fixé les règles, tu peux les changer, » tenta de parlementer Ja… Vision, parlant d'un calme et solennelle. Comme si ça avait la moindre chance de marcher dans le cas présent !
« Très bien. »
Quoi ? Mais avant qu'il n'ait le temps de s'insurger, stupéfait, il fut projeté contre un mur par un robot plus hardi que les autres. Profitant de son moment de faiblesse, ils furent bientôt cinq sur lui, et il n'eut d'autres choix que de déployer l'artillerie lourde. Ce n'était peut-être que des robots sans âme, mais ils étaient vicieux, attaquant les jointures de son armure quand ce n'était pas directement le réacteur ark au milieu de sa poitrine.
Moins de deux minutes et il s'était dégagé, s'engouffrant dans une ruelle étroite pour mener la chasse aux fuyards. Et il n'avait pas la moindre idée de ce qui se passait dans l'église.
« Friday, comment va Vision ? Est-ce que ça marche ? »
« Ça fonctionne patron, il supprime Ultron d'internet. Il ne s'échappera pas en ligne. »
Tony transmit l'information aux autres, et même s'il n'eut droit qu'à quelques grognements indistincts en guise de réponse, il savait que tous avaient pris l'annonce pour ce qu'elle était : une bonne nouvelle. Mais alors que lui-même se réjouissait de ce coup dur porté à l'ennemi, détruisant joyeusement les carcasses robotiques face à lui, il sursauta face au cri de rage qui ne pouvait venir que d'une seule personne : Ultron.
« Tu m'as déconnecté ! »
Mais avant qu'il ne puisse jubiler de l'entendre à ce point atteint par les actes de Vision, l'IA folle de rage exhala une menace sourde.
« Tu crois que ça me gêne ? Tu m'as coupé de mon monde : je vais te couper du tien. »
Tony n'avait pas la moindre idée de ce que signifiait concrètement cette menace, mais il se méfiait bien trop d'Ultron pour la prendre à la légère. Bientôt, il sentit le sol vibrer sous ses pieds, comme en proie à un violent tremblement de terre. Scannant le sol sous lui, il ne parvint pourtant pas à analyser les données qui clignotaient sur son écran.
« Friday ? » demanda Tony, craignant ce que son IA allait lui dire. Et en vérité ? La réponse fut encore pire que ce qu'il avait imaginé.
« La Sokovie part faire une balade. »
