Chapitre 8: Un coeur qui nous comprend
"Un jour tu sentiras peut-être
Le prix d'un coeur qui nous comprend,
Le bien qu'on trouve à le connaître,
Et ce qu'on souffre en le perdant."
Alfred de Musset
6 février 2001 | 03:25
Hermione se réveille en hurlant.
La fièvre, brutale et dévastatrice , s'est emparée de son corps et l'a fait délirer.
Elle voit des ombres sombres qui tournent autour de son lit. Elle entend des rires sinistres et lugubres qui résonnent dans la pièce. Elle sent des mains qui palpent et griffent son visage et des doigts qui s'enroulent autour de ses chevilles.
Sa peau est couverte de transpiration. Humide et collante.
Elle sanglote en silence, incapable de se défendre. Son visage est baigné de larmes.
Les ombres s'approchent et ricanent.
Et puis soudain, tout s'évapore. Les silhouettes, les voix.
Il n'y a plus qu'un souffle calme contre son oreille qui lui murmure des mots apaisants. Une main douce qui caresse ses cheveux et l'odeur de linge frais qui apaise son esprit torturé.
Elle se fond dans l'étreinte. Reconnaissante pour cette parenthèse de réconfort.
7 février 2001 | 10:12
Elle est assise au centre de son lit. Dehors, une violente tempête de neige fait rage et obscurcie le ciel. Elle observe les flocons qui frappent avec férocité contre les carreaux des fenêtres pendant que Prim étale avec précaution une nouvelle couche de baume cicatrisant sur ses plaies.
8 février 2001 | 19:36
Elle n'a pas encore trouver le courage d'affronter son reflet.
Lorsque Malfoy pénètre dans sa chambre, suivi de près par Artie qui lui apporte son dîner, la sorcière est immobile devant son armoire. Elle se tient face au miroir, les yeux fermés, l'appréhension rongeant ses os.
Elle détourne le regard avec précipitation lorsqu'elle entend la porte s'ouvrir. Artie dépose son plateau sur le bureau et s'empresse de quitter la pièce. Malfoy en revanche s'avance lentement vers elle.
Hermione n'a jamais été très soucieuse de son apparence. Pourtant, elle redoute plus que jamais d'être à jamais marqué par la torture de Bellatrix.
" - Tout va bien ?" Demande-t-il, un pli soucieux barrant son front.
La jeune femme inspire tout en fixant ses pieds dissimulés sous d'épaisses chaussettes en laine.
" - J'ai peur de voir le résultat," admet-elle à contrecœur comme si elle avouait cela sous la contrainte.
Draco s'approche prudemment dans sa direction. Il contourne la silhouette gracile de la jeune femme et se fige un instant, hésitant.
La pièce est faiblement éclairée par la lueur des bougies. Dehors, le ciel est noir. La tempête de neige qui traverse la région depuis trois jours ne s'est pas encore calmée, comme si la météo était le reflet de toutes les émotions contradictoires qui traversent la Gryffondor et le Serpentard depuis l'intrusion de Bellatrix au Manoir.
Il se place derrière elle. Son regard s'attarde sur la nuque dénudée d'Hermione. Lentement, il relève son pull et dévoile les nombreuses cicatrices rougeâtres qui parsèment la peau de son dos.
Après une analyse minutieuse, il déclare :
" - Les plaies semblent bien cicatriser. Tu as de la chance ; connaissant Bellatrix… Le fouet aurait pu être imprégné de magie noire. Je pense qu'avec le temps et en continuant d'appliquer le baume, les cicatrices devraient être à peine perceptibles."
Les doigts du blond s'attardent quelques secondes de trop sur sa peau saine. Hermione tremble à son contact et sa respiration devient irrégulière.
La main de Draco glisse le long de sa taille et se pose sur sa hanche afin de la faire dévier, la forçant à changer de position pour que son dos soit exposé en direction du miroir.
Hermione entrouvre les lèvres pour protester mais sa voix meurt lorsqu'elle réalise que sa main est toujours contre sa hanche. Le contact de sa peau contre la sienne l'inonde d'une étrange chaleur.
Elle devrait le repousser mais elle ne le fait pas. Au lieu de cela, elle relève la tête et plonge son regard dans les orbes métalliques de Draco.
Durant un court instant, le monde qui l'entoure s'évapore. Elle n'est plus prisonnière, ils ne sont plus en guerre. Il n'y a qu'elle et ses pensées confuses. Car c'est la toute première fois qu'ils sont aussi proches l'un de l'autre. La toute première fois qu'il la regarde ainsi - comme si elle était réelle - . La toute première fois qu'il est à court de mots en sa présence.
Le rythme cardiaque d'Hermione s'affole.
Putain mais qu'est-ce qui m'arrive ?
Elle est certaine que cela porte un nom. Ce doit être un symptôme courant, ça semble évident. Quelque chose qui s'apparente à " L'agneau affaiblit réconforté par le chasseur sera plus tendre . "
Heureusement, la réalité la rattrape comme un coup de massue. Le choc est d'une violence extrême. Elle détourne le regard et recule de plusieurs pas, brisant le lien sans la moindre hésitation. Elle tourne la tête et affronte son reflet ; la conséquence de sa détention. Le fruit de sa pénitence. Le témoignage de sa présence.
La chaleur accumulée dans ses joues s'estompent et son visage devient livide à la vue de sa peau meurtrie par les cicatrices. Elle se mord violemment les lèvres lorsque la morsure des larmes vient piquer ses yeux. Elle a vu pire. Elle a soigné des blessures bien plus immondes que celle-ci. Pourtant, les plaies encore à vif lui retourne l'estomac et elle s'empresse de baisser son pull pour les dissimuler.
Elle se sent souillée, mutilée, humiliée. Tout ça à cause de lui.
Soudain, la présence de Draco devient insupportable. Sa voix. Son odeur. Son regard. Son toucher. C'est trop - pas assez - .
Elle trébuche vers l'arrière, reculant jusqu'à ce que ses mollets rencontrent le rebord du lit. Ses yeux s'emplissent de larmes et elle fait tout son possible pour les contenir.
" - Pars. Pars, s'il te plait…"
Son murmure est à peine audible.
Le sorcier hoche la tête et quitte la pièce en silence.
Lorsque la porte se referme derrière lui, Hermione tombe à genoux sur le parquet et éclate en sanglots.
09 février 2001 | 14:03
Elle passe la journée dans sa chambre à fixer l'horizon. La neige a enseveli le parc et la fontaine centrale est à peine visible sous l'épaisse couche blanchâtre.
09 février 2001 | 23:08
La tempête est terminée. Le ciel est clair et les étoiles brillent comme des millions de paillettes parsemant le ciel.
Malfoy est parti. Elle l'a vu longer l'allée principale en direction du portail, peu après 19h00. Elle pourrait tenter de s'enfuir, mais elle est trop lâche. Alors elle se contente de fixer la lune étincelante en pensant à des choses futiles.
Demain, elle fera des biscuits. Peut-être qu'elle pourra les recouvrir de glaçage à la vanille ?
10 février 2001 | 11:20
La douleur de son dos s'est enfin apaisée. Le processus de cicatrisation a débuté.
Hermione a quitté son lit, pour le plus grand bonheur de Prim, et s'est rendue dans les cuisines afin de s'occuper l'esprit.
Elle a fabriqué deux douzaines de biscuits à la vanille et à la cannelle puis elle s'est assise sur le comptoir et en a englouti cinq en fixant les tomettes sous ses pieds d'un regard vide.
Ensuite, elle est remontée dans sa chambre. Elle a fait couler un bain puis elle s'est assise dans la baignoire et elle a pleuré silencieusement jusqu'à ce que l'eau soit froide.
11 février 2001 | 13:28
Son geôlier est de retour.
Il a rejoint Hermione dans la bibliothèque peu après le déjeuner. Il a fixé l'assiette de biscuit à la cannelle d'un œil critique avant de se rabattre sur ceux à la vanille.
Hermione a observée la scène en silence, le regard dissimulé derrière son roman.
Draco s'est assis sur le canapé se trouvant à l'extrémité de l'espace et a commencé à lire comme si de rien était.
La brunette a tenté de reporter son attention sur sa lecture mais pour une raison inconnue, elle en a été incapable. Alors elle s'est contentée d'étudier silencieusement chaque mouvement de l'homme lui faisant face.
11 février 2001 | 13:28
" - Où est-elle ?" Demande soudain Hermione.
" - Qui donc ?" Grogne Draco en repoussant le journal de sous ses yeux.
La jeune femme prend une grande inspiration, comme si elle redoutait la suite de la conversation qu'elle a elle-même amené.
" - Bellatrix."
Le blond se penche en avant et étudie un instant l'expression soucieuse de son ancienne camarade de classe. Il hésite, puis finit par répondre d'une voix calme :
" - J'ai brouillé son esprit."
Hermione détourne le regard lorsqu'elle sent les larmes inonder ses yeux. - Est-ce que ça sera suffisant ? - Elle se sent faible et pathétique, mais l'événement est récent et le simple fait d'y repenser ravive la douleur de son corps.
" - Je ne pouvais pas la tuer," justifie-t-il après un bref moment de silence.
La brune hausse un sourcil ; curieuse de savoir ou va mener la conversation. Car contre toute attente, Malfoy continu sans qu'elle n'ait besoin de le demander :
" - Si je l'avais fait, le Seigneur des Ténèbres aurait trouvé cela suspect. Il aurait mené l'enquête. Cela aurait fini par se savoir. Les choses se seraient compliquées pour… nous. Elle fait partie des plus fidèles, il a confiance en elle. Sa présence à ses côtés est essentielle."
La jeune femme fixe les flammes qui dansent dans l'âtre de la cheminée.
" - Pourquoi m'as-tu sauvé ?"
Malfoy se tourne vers la fenêtre. Il observe la neige qui s'étend à perte de vue, les bras croisés contre son torse.
" - Tu aurais préféré que je la laisse te tuer ?" Demande-t-il en omettant de répondre à sa question.
" - Est-ce que cela aurait changé quelque chose ?" Rétorque Hermione.
Le blond se relève, froissant le journal entre ses doigts.
" - Je sais que tu considères que je suis responsable mais…"
" - Evidemment !" S'écrie Hermione en se redressant à son tour.
La brune fixe le sorcier avec animosité. Un élan de rage la traverse.
" - Tout est de ta faute !" Hurle Hermione. "Tu m'as tout pris ! Comment peux-tu croire le contraire ? Tu n'es qu'un enfant pourri gâté et égoïste ! Tu as volé ma vie pour que je puisse être à ton service ! J'ai abandonné mes amis pour rester aux côtés de ta mère, j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour l'aider et la protéger ! Si je n'avais pas été là, ta chère tante l'aurait massacrée ! Heureusement pour elle, je lui ai servi de distraction. J'ai cru mourir ! J'ai pensé… J'étais persuadée que j'allais crever sous les coups de cette putain de psychopathe ! Alors quoi ? Quoi ? Je devrais te remercier d'être intervenue, lécher tes putains de bottes en cuir de dragon pour te faire comprendre à quel point je te suis reconnaissante ? Tout ne tourne pas autour de toi, Malfoy ! Les gens souffrent pendant que tu sirotes des Whisky avec tes copains mangemorts !"
La colère semble faire bouillir le sang dans ses veines.
La magie qui sommeil dans son corps tressaille et se répand dans la pièce comme une onde de choc. Le mouvement est infime mais il suffit à éteindre les bougies, plongeant la pièce dans une semi-obscurité.
Malfoy ne semble pas s'en soucier. Une rage similaire le traverse.
" - Tu crois que je ne sais pas ce que ça fait ? Tu penses que mes journées consistent à me saouler la gueule ? Tu crois que je ne connais pas la souffrance ?" hurle-t-il à son tour.
Les deux sorciers s'affrontent du regard. La lumière du feu de cheminée vacille.
Sans prévenir, Draco s'approche de la jeune femme. Il retire sa veste puis commence à déboutonner les boutons de sa chemise avec empressement.
Hermione écarquille les yeux tout en trébuchant vers l'arrière. La rage laisse place à la terreur.
Le blond jette violemment sa cravate sur le plancher suivi quelques secondes plus tard de sa chemise. Il continu d'avancer vers la brune, son regard rendu opaque par la colère.
" - Malfoy…" bredouille-t-elle en sentant les larmes inonder à nouveau ses yeux.
Sans prévenir, il la plaque contre le mur et elle cesse de respirer.
" - S'il te plait, ne fais pas ça…"
Elle est prise en étau entre son torse et ses bras qui forment une cage solide autour de son corps.
" - Pas quoi, Granger ?" Demande-t-il d'un ton glacé, son souffle effleurant le lobe de son oreille.
Hermione secoue la tête, refusant de soutenir son regard.
" - Tu penses que je vais te frapper ? Ou mieux, te violer ?"
Elle sursaute en entendant ses mots.
" - Quelle que soit la réponse, s'il te plait, ne le fait pas. Tu vaux mieux que ça…"
" - Tu penses que je serais capable de te violer, Granger ?"
Les lèvres de la brune tremblent et elle est incapable de le regarder en face.
" - Réponds à ma question !"
" - Je… Je ne sais pas," bredouille-t-elle en sentant les larmes perler contre ses cils.
" - PUTAIN!"
La pression l'entourant disparaît soudainement. Lorsqu'elle ouvre les yeux, Draco lui tourne le dos. Une nouvelle vague de magie ébranle la pièce. Cette fois-ci, plusieurs rangés de livres soigneusement triés échouent sur le sol dans un fracas assourdissant.
Hermione essuie ses joues d'un revers de main rageur, prête à profiter de la distraction pour se défendre. Cependant, elle est coupée dans son élan par un détail troublant.
Les mots de Draco, prononcés quelques minutes auparavant, prennent alors tout leur sens.
Il sait.
Il connaît la douleur. Il connaît la torture. Il connaît le châtiment.
Car les affres de la tourmente sont gravés sur sa peau à tout jamais.
Tout comme elle.
Des dizaines de lignes, plus ou moins récentes, parcourent la peau de son dos. Contrairement à elle, les cicatrices débutent au niveau de ses épaules et disparaissent sous son pantalon. Elles sont figées dans la chair, irrégulières et effrayantes.
Hermione s'approche. Elle trébuche sur ses propres pieds. Une multitude d'émotions la submergent. Elle pose la paume de sa main sur son dos, juste entre ses deux trapèzes. Draco se fige mais ne la repousse pas. Des tonnes d'interrogations se bousculent dans son esprit mais elle sait pertinemment que ce n'est pas le moment.
Lentement, elle fait glisser ses doigts le long des marques colorées qui forment un labyrinthe sans fin sur la peau pâle du blond.
Ce dernier frissonne à son contact mais les muscles tendus de son dos se délient à mesure qu'Hermione parcourt son corps.
La brunette inspire ; elle n'avait même pas réalisé qu'elle avait cessé de le faire il y a déjà plusieurs secondes.
" - Merci, Draco. "
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