Une fine brume s'enroule autour des immeubles et des édifices, progressivement engloutissant le ciel. Sur le balcon de l'hôtel, Otabek contemple le brouillard qui s'étend dans les rues, une cigarette à la main. La saison de patinage débutera dans moins de vingt-quatre heures.
— Hé, Beka ? T'es là ?
Otabek secoue sa cigarette en direction de Yuri.
— Une petite pause cigarette.
À Vancouver, le climat est plus doux qu'à Moscou, où les premières neiges ont déjà fait leur apparition. Ils profitent des derniers rayons de soleil sur la terrasse de leur chambre. Yuri enfile un pull, celui avec le gros logo Metallica qu'il n'a jamais rendu à Otabek, puis rejoint ce dernier avec deux tasses de café.
— Tu arrives à point nommé, dit Otabek. J'ai quelque chose pour toi.
Sans plus attendre, Otabek pose les tasses, saisit la main de Yuri et le rapproche de lui. Levant leurs doigts entrelacés, il lui montre le bracelet qui orne son poignet.
— J'ai pensé que tu aimerais avoir un porte-bonheur pour demain.
— Encore un bracelet ? demande Yuri.
— Pas tout à fait.
Malgré la distance qui les a séparés, Otabek a toujours voulu rester connecté à Yuri. Il veut symboliser ce lien qui, tout comme le bracelet, n'a jamais été rompu. Il relâche la main de Yuri, fouille dans sa poche et sort un petit écrin bordeaux. Yuri laisse échapper un rire nerveux.
— Je suis encore trop jeune pour me marier !
— Ouvre-le, répond Otabek en arquant un sourcil.
Yuri obéit. À l'intérieur du velours se trouve une bague en or jaune ornée de diamants qui reflètent timidement les premières lueurs de l'aube.
— Incroyable, tu es vraiment devenu romantique à force de côtoyer Vitya.
— Tu n'aimes pas ?
— Tu plaisantes ? Elle est vraiment géniale.
Yuri laisse Otabek glisser la bague à son doigt. La tête d'une panthère se referme autour de sa phalange, ses yeux en émeraude rappelant le regard de Yuri.
— J'ai puisé mon inspiration dans les bijoux de ma mère, explique Otabek. Les diamants qui entourent l'anneau étaient à elle. Je pense que mon père les lui a offerts lors d'un voyage à l'étranger pour l'un de leurs anniversaires de mariage, ou quelque chose comme ça. Ma mère savait que j'aimais les choses qui brillent, alors c'est moi qui les ai hérités.
— Quoi ? Mais… Tu voulais pas les garder pour toi ?
Avec un sourire, il dévoile une seconde bague au design similaire à la première, mais en or blanc, offrant une teinte grise semblable à de l'argent.
— Comme ça, on sera assortis ! s'amuse Yuri.
Ils entrelacent à nouveau leurs doigts, les bagues jumelles se faisant face.
— Je suppose que t'es pas dérangé par le fait que je retourne sur la glace sans toi ? demande Yuri après un silence.
— Ça me manquera toujours, mais… Le fait que je ne sois pas sur la glace ne signifie pas que je ne trouve pas ma place ici.
Autour d'eux, la brume matinale s'intensifie, annonçant le retour de l'hiver et dissimulant la ville derrière un rideau blanc… Otabek est impatient de découvrir ce qui se cache derrière ; il a compétitionné pendant quinze longues années et il en est fier, mais il a besoin de passer à autre chose pour s'épanouir. Il fêtera ses vingt-neuf ans dans quatre jours. Pour la plupart des gens, c'est le début d'une vie… Et, finalement, ils ont raison. Malgré le monde aux couleurs délavées dans lequel il évolue, il commence peu à peu à tracer son chemin.
— Hé, Yura ? J'ai une question.
— Ouais ?
— Concernant le possible futur mariage, c'est un oui ou un non, alors ?
Yuri donne un coup de poing à l'épaule d'Otabek, mais il ne peut pas cacher la teinte rosée qui colore ses joues. Profitant de la gêne de Yuri, Otabek le tire vers lui. Ses lèvres sont douces et gercées contre les siennes, et son sourire est le plus beau qu'Otabek ait jamais vu.
