– Il est là-bas.

Il sauta du véhicule et se mit à courir.

Il sentait son cœur prit dans un étau. Il courut le plus vite possible et jamais il n'avait couru aussi vite de toute sa vie. Il ralentit lorsqu'il vit que le cosy était en équilibre au-dessus du vide. Il regarda autour de lui, évaluant la situation, calculant les risques.

Il était devenu fort dans ce domaine.

Ses collègues ne savaient pas qu'il était doté de cette capacité à tout calculer en quelques secondes. Ils pensaient que son soudain talent en calcul mental lui venait de son accident de foudroiement mais Buck avait toujours eu cette capacité à mesurer chaque risque en un temps record.

C'était pour ça que c'était assez difficile de supporter les reproches de son capitaine face à une de ses « imprudences ». Maddie savait qu'il avait cette faculté depuis l'enfance mais il lui avait demandé de garder le secret.

Personne ne pouvait comprendre.

– Buck ? souffla Eddie en arrivant à ses côtés. Ok, je vais chercher les harnais.

– On n'a pas le temps, lâcha-t-il.

Il retira son manteau et le posa sur le sol.

Puis il défit sa ceinture et la referma avant de la passer sur son bras. Eddie lui jeta un regard de reproche mais il ne lui laissa pas le temps de dire quoi que ce soit. De toute façon il savait très bien que si c'était Christopher qui se retrouvait en équilibre au-dessus du vide, il réagirait de la même façon que lui.

– Qu'est-ce que tu comptes faire ?

– Je vais chercher mon fils, répondit-il en se mettant en position pour descendre.

Il entendit vaguement Eddie demander de l'aide dans sa radio mais il n'attendit pas la réponse. Il s'agrippa à la barrière sur laquelle il accrocha sa ceinture, puis sa jambe pour s'assurer. Il serra la boucle à se couper la circulation du sang.

Puis, il se baissa délicatement et cala le genou de son autre jambe sur le bord friable de la falaise que l'autoroute surplombait. Il essayait de ne pas penser au fait que son bébé avait été projeté par-dessus la rambarde de sécurité et qu'il aurait pu s'écraser en bas.

C'était un miracle qu'il ait atterrit là.

Il ne disait rien se contentant de regarder au-dessus de lui et Buck savait qu'à cet âge-là il n'avait pas encore l'usage d'une vue clair, il se guidait au son et à l'odeur.

Il s'allongea autant que possible, priant pour que sa ceinture le maintienne en sécurité.

Il tendit la main vers la poignée du cosy, s'étendant le plus loin possible au-dessus du vide. Il s'étira un peu plus loin calant son pied contre la barrière et tirant sur la ceinture pour gagner quelques centimètres. Il avait la tête en bas et il savait qu'il devait agir vite avant que le sang ne lui monte au cerveau.

Il sentit soudain des mains lui saisir le pied et il s'élança pour attraper le cosy, qui bascula de son équilibre précaire mais Buck avait déjà refermé son poing dessus.

– Je te tiens mon pote, souffla-t-il sans bouger alors que l'adrénaline affluait en lui. Je te tiens.

Il s'avait qu'Eddie le tiendrait le temps qu'il faudrait.

Il en profita pour vérifier que son fils était bien attaché dans son cosy et sentit Eddie commencer à tirer. Puis des mains attrapèrent la ceinture de son pantalon pour affirmer leur prise et Buck se laissa trainer n'ayant d'yeux que pour son adorable bambin, et ses magnifiques yeux.

Lorsqu'il fut de nouveau sur la terre ferme, il refusa de lâcher le cosy et Eddie dû user de toute sa force de persuasion pour qu'il le laisse lui faire un check-up rapide avant de l'envoyer à l'hôpital.

Bobby ne lui laissa pas le temps d'argumenter et lui ordonna d'aller à l'hôpital.

Il savait que le lendemain, il devrait passer par un remontage de bretelles en règle mais il s'en fichait la seule chose qui comptait c'était que son fils soit en bonne santé.

Il eut à peine le temps de croiser le regard inquiet d'Eddie avant que les portes ne se referment. Quand il arriva à l'hôpital, il fut séparé de son fils et dû se contenter de la salle d'attente qu'il arpenta en long, en large et en travers.

– Buck ! appela soudain Eddie en arrivant. Comment il va ?

– Je ne sais pas, admit-il. Ils ne me disent rien. Comment vont Connor et Kameron ?

– De ce que je sais Kameron a été admise avec une hémorragie cérébrale importante.

– Merde. Elle va s'en sortir ?

– Je n'en sais rien, Buck.

– Et Connor ?

Eddie sembla chercher ses mots et Buck pu lire dans son silence.

Il ressentit de la douleur et de l'incrédulité. Il n'arrivait pas à comprendre comment mais il savait que Connor était mort.

– Buck, je...

– Ouais, c'est... Ok je... je crois que j'ai besoin de quelques minutes.

– Bien sûr.

Buck s'installa sur une chaise et tenta de mettre de l'ordre dans ses idées.

Ce matin, il avait cru que son rêve lui était à tout jamais inaccessible. Puis, Eddie était arrivé et il lui avait redonné espoir. Buck était conscient que son meilleur ami lui avait proposer cette solution en se moquant du sacrifice qu'il faisait.

En l'épousant, Eddie se fermait à la possibilité d'avoir une belle histoire d'amour et Buck se trouvait égoïste d'avoir accepté. Mais il voulait tellement devenir père, avoir en enfant à lui.

Et maintenant Connor était mort et son bébé n'avait plus de père et Buck ne savait pas s'il était triste ou soulagé. C'était un tel bordel dans sa tête et il n'arrivait pas à faire le tri.

Sa jambe se mit à tressauter.

Il n'arrivait plus à contenir son énergie nerveuse. Dans son enfance, les médecins avaient dit à ses parents qu'il était sûrement hyperactif, puis seulement téméraire.

Quelle bande d'abrutis !

Personne n'avait jamais compris qui il était parce que personne ne l'avait jamais regardé réellement. Personne excepté Maddie qui le connaissait mieux que personne et qui lui avait dit qu'il n'avait pas besoin d'avoir une étiquette pour être quelqu'un.

Et maintenant, Buck sentait son cerveau tourner à plein régime et son inactivité le rendait fou. Il avait besoin de bouger, d'oublier ce qui se passait. Connor était mort, Kameron certainement dans un coma artificiellement provoqué pour prendre le temps de guérir. Il ne restait plus que lui pour prendre soin de son fils et il était terrifié.

Il sentit soudain la main d'Eddie se glisser dans la sienne.

Le silence se fit dans son esprit. Il s'immobilisa sans que son cerveau ne lui en donne l'ordre et il ne comprenait pas comment c'était possible.

Ce n'était jamais arrivé auparavant.

Bien sûr, Eddie arrivait à le calmer comme personne et c'était pour ça qu'il était toujours si proche de lui, qu'il recherchait autant le contact mais jamais une simple touche de sa part n'avait arrêté son cerveau de cette façon.

Il tourna son regard vers lui et Eddie lui fit un petit sourire en coin, pour lui signaler qu'il était là, qu'il le soutenait.

Buck lui en était reconnaissant.

– M. Buckley ? demanda soudain une infirmière.

Buck se releva d'un bond et entraina Eddie avec lui car il ne lui avait pas lâché la main.

– Oui, c'est... C'est moi.

– Evan va bien, tous les scans sont clairs, il est en parfaite santé. J'ai vu qu'en cas d'incapacité des parents, vous étiez son tuteur légal.

– Je... ouais. Comment va Kameron ? Sa mère ?

– Elle est toujours en chirurgie mais le petit Evan vous attend.

Buck était indécis.

Il ne savait pas quoi faire. Eddie lui serra la main et il croisa son regard. Son meilleur ami l'encouragea du regard et Buck fut apaisé.