Chapitre 37 : Blessure silencieuse
Note : Je trouve qu'Emily en fait beaucoup trop auprès de Jarod. Elle a besoin d'un homme ! Qu'en pensez-vous ? Ne ratez pas le prochain chapitre. Enfin des découvertes vont être faites… Chutttt. Je n'en dis pas plus !
Hôtel d'Oxford, Pennsylvanie
Dans la chambre d'hôtel d'Oxford en Pennsylvanie, Mlle Parker et Jarod se tenaient face à face. Tous deux savaient que le temps tant redouté était arrivé, celui de se quitter à nouveau. Le caméléon était déchiré à l'idée de laisser la jeune femme derrière lui. Chaque adieu était une plaie pour lui. Une plaie dont il avait du mal à cicatriser tout comme elle. Il aspirait par le nez de façon plus ou moins bruyante, rassemblant son courage, bien que sa voix devenait instable, il en prononça ces quelques paroles bouleversantes :
« Voilà Parker, chacun de nous va repartir de son côté, encore une fois. Combien de temps allons-nous devoir supporter ça ?
- Aussi longtemps que toi et moi, nous en serons capables, Jarod.
- Je ne suis pas sûr d'être capable de supporter cette situation plus longtemps.
- Pourtant, il va falloir que tu le supportes si tu veux que l'on reste ensemble.
- Tu pourrais peut-être venir avec moi.
- Ou ça, dans l'Ohio ? Non, Jarod. On a dit que tu devais passer du temps, seul, avec ta famille pour que tu puisses apprendre à mieux la connaître. Prends tout ton temps. On se revoit à ton retour.
- Allons, Parker. Je vois bien que ça ne va pas. Tu sais, je ne serai parti que quelques jours. On se reverra très vite.
- C'est que… J'ai besoin de tes bras pour me rattraper.
- Parker, si tu tombes, je serai toujours là pour te rattraper et si tu es perdue, appelle-moi, je te reviendrai.
- J'espère que tout ira bien pour toi.
- Dis-moi que dirais-tu de se retrouver chaque week-end à l'hôtel de New-York ?
- Oui ! Pourquoi pas. Oui, si tu m'y attends, je te promets que je reviendrai à chaque week-end, là-bas à New-York, ses mots résonnaient comme une déclaration d'amour, un serment sculpté dans le marbre.
- C'est une promesse. Bien, il vaut mieux que je parte le premier. N'oublie pas que je suis fou amoureux de toi et que tu vas terriblement me manquer.
- Jarod, je… Appelle-moi. » avait-elle dit en l'embrassant.
Elle souriait avec une certaine réserve, tandis qu'une goutte d'eau solitaire traçait son chemin sur sa joue. Ils trouvaient une certaine consolation dans cette promesse de se retrouver régulièrement. L'hôtel de New-York était devenu leur seul refuge, un lieu où ils pouvaient échapper ne serait-ce que temporairement aux responsabilités et aux dangers qui guettaient leurs vies. La Miss chercha à graver chaque détail de son visage dans sa mémoire. Les mots se bousculaient dans sa gorge, mais les larmes qui avaient déjà menacé de déborder l'empêchaient de s'exprimer pleinement. Jarod, lui, avait le cœur si lourd qu'il sentait le poids de la situation s'abattre sur lui. Leur étreinte se faisait plus intense, se regardant une toute dernière fois avec une mélancolie déchirante. Enfin, ils se détachèrent l'un de l'autre à contrecœur alors que leurs pas devenaient progressivement plus lointains.
Le Centre, Blue Cove, Delaware
Quelques jours s'étaient écoulés depuis le départ de Jarod d'Oxford en Pennsylvanie. Alors que les recherches intensives pour retrouver le bébé Parker s'étaient révélées infructueuses, et ce, en dépit des efforts déployés par Mlle Parker, Jarod et leur petite équipe, l'enfant restait toujours introuvable. Leurs investigations avaient abouti à une impasse. L'espoir s'étiolait peu à peu, laissant une sensation d'impuissance planer sur elle. Contraints par les circonstances, ils avaient été obligés de remettre leur petit week-end romantique à plus tard. Chacun était reparti vers son propre chemin, Jarod vers sa famille à Avon, dans l'Ohio, et Mlle Parker, chez elle, à Blue Cove, dans le Delaware. La distance qui les éloignait l'un de l'autre semblait insurmontable, ajoutant encore un peu plus d'amertume à leur séparation.
Cette histoire prenait trop de place dans la vie de la jeune femme, elle ressentait l'urgence de retrouver le petit disparu et de le mettre à l'abri du Centre, cette organisation secrète à laquelle ils étaient tous liés. Et malgré tous les moyens et les ressources employés, ils avaient été incapables de le localiser. C'était une voie sans issue. Chaque jour qui passait sans trouver sa trace renforçait sa frustration. Dans son bureau, Mlle Parker, debout, devant la fenêtre, les bras croisés, observait le paysage de Blue Cove. Les doutes et les questions tournaient sans cesse dans son esprit, hantée par l'image de son petit frère, perdu et apeuré. Petit frère ? Elle secoua la tête. Chaque nuit, elle se demandait où il pouvait bien être, si quelqu'un prenait soin de lui, et pourquoi avait-il été privé de l'amour et de l'affection qu'il méritait, le reverrait-elle un jour ? Son désir de prendre soin de lui était si brûlant, d'un feu qui consumait son âme. D'un feu qui ne pouvait être éteint. Le téléphone sonna, la tirant de ses pensées. Mlle Parker décrocha et entendit la voix de Sydney de l'autre côté de la ligne. Il lui donna un bref compte rendu des dernières tentatives de leur dernière investigation, mais les nouvelles étaient toujours aussi décevantes, insatisfaisantes. Sa frustration se transforma en colère lorsqu'il lui annonça une autre mauvaise nouvelle, Sam, son nettoyeur de confiance, manquait à l'appel. Alors qu'elle espérait trouver un peu de semblant de normalité dans son environnement habituel, cette information inattendue la noya dans l'incertitude et l'inquiétude. Sam travaillait pour elle depuis de nombreuses années, elle le savait loyal et toujours présent pour effacer les traces de ses actions et protéger ses secrets. Sa disparition soudaine souleva de nombreuses questions quant à son sort et les raisons qui pourraient expliquer son absence. Elle suspecta immédiatement Lyle d'être impliqué dans cette affaire. Elle connaissait le caractère manipulateur et cruel de son jumeau et ne pouvait s'empêcher d'imaginer que ce dernier était derrière cette mésaventure, utilisant, de ce fait, Sam comme un moyen de l'atteindre émotionnellement. Cela ne faisait que représenter un obstacle supplémentaire dans la recherche du bébé Parker. Elle se préparait à mener sa propre enquête, une fois de plus, tout en restant sur ses gardes, consciente des risques qu'elle encourait. Elle s'occuperait de Lyle et Sam ultérieurement.
La jeune femme avait un besoin immédiat de faire quelque chose de plus concret pour avancer. Résolue à prendre les choses en main, elle décida de commencer par fouiller les archives personnelles de son défunt père, ceux qui se situaient ici dans ce bâtiment d'une froideur à lui coller la migraine. Peut-être y trouverait-elle un indice, un détail oublié qui pourrait la mener à son frère. Elle prit l'ascenseur jusqu'aux niveaux inférieurs du Centre, où étaient conservés les dossiers les plus sensibles et les plus confidentiels. À la lueur tamisée des couloirs, Mlle Parker parcourut les allées de classeurs, épluchant les documents, les uns après les autres. Elle savait que son père avait dissimulé de nombreux secrets, et elle était prête à tout pour les découvrir. Les heures passèrent, mais elle ne trouva rien d'utile, seulement des rapports redondants et des informations déjà connues. Dépitée, elle referma, les larmes aux yeux, le dernier dossier s'appuyant contre le mur. Une vague de découragement la terrassait, cependant, elle refusa de se laisser abattre. Elle se jura de continuer à enquêter, à tout faire pour le récupérer. Les recherches avaient peut-être échoué jusqu'à présent, seulement elle n'était pas prête à l'abandonner.
Maison Bellcrest, Avon, Ohio 36772
Quelques jours plus tôt. Lorsque Jarod était revenu dans sa famille. Tout le monde l'avait accueilli à bras ouverts avec une tendresse pour le moins surprenante. Son visage portait encore les stigmates de la tempête émotionnelle qu'il avait traversée tantôt. Là-bas, il éprouva une joie immense en apercevant Margaret. La scène se déroula dans le salon douillet et bien chaleureux. Quand Jarod entra, sa mère, les yeux embués de larmes de bonheur, se précipita vers lui pour l'enlacer avec force. Leurs bras se serraient autour de leurs corps échangeant un regard complice, un lien indéfectible qui transcendait les mots et renforçait leur lien familial. Jarod se sentait rempli d'une affection si familière et pourtant oubliée. Elle lui exprima à quel point elle était heureuse de le revoir, de le savoir en sécurité et de pouvoir le tenir dans ses bras à nouveau. Le sourire radieux de Margaret illumina toute la pièce, tandis que Jarod était soulagé de la savoir auprès des siens. Elle paraissait si tranquille. Tous les autres membres de la joyeuse tribu étaient tous réunis pour célébrer son retour. Son père, son frère Ethan, sa sœur Emily et même son clone, qui avait sa propre personnalité distincte, manifestant à tour de rôle leur contentement de le revoir. Le Major Charles, plein de fierté, le serra dans ses bras lui offrant des paroles de soutien, lui rappelant à quel point il était aimé et combien sa présence était précieuse pour eux tous. Ethan, son frère, lui donna une tape amicale sur l'épaule alors qu'Emily, sa sœur, après une brève hésitation, lui sauta au cou avec enthousiasme. Quant à son clone, qui avait toujours eu une relation particulière avec Jarod, lui adressa un sourire sincère, une reconnaissance silencieuse. Le caméléon avait décidé de ne pas brusquer sa relation avec sa mère et de mettre de côté les questions en suspens. Un après-midi, alors que l'atmosphère était paisible, Jarod prit l'initiative de s'ouvrir à sa famille sur ce qu'il avait vécu ces derniers temps, sa relation avec le Centre, Sydney et Mlle Parker, les deux êtres qui l'avaient aidé à surmonter cette épreuve. Les regards curieux et attentifs étaient braqués sur lui, prêts à écouter ce qu'il avait à dire.
« Il y a quelque chose que je dois vous dire, quelque chose qui s'est passé lorsque j'étais à New York.
- Mon fils, tu peux tout nous dire. Nous sommes là pour toi, son père, soucieux, pris place en face de Jarod.
- Il y a quelque temps, j'ai traversé une période très difficile, une crise émotionnelle. Je me sentais perdu, confus et débordé par mes émotions et mes doutes, avait-il avoué en reprenant son souffle. Je ne savais plus où j'en étais. Petit à petit, j'étais en train de sombrer.
- J'étais sûre que quelque chose n'allait pas, je n'aurais jamais dû te laisser là-bas tout seul, Margaret prit les mains de son fils entre les siennes.
- Tu n'aurais rien pu faire, maman. C'est là que sont intervenus Mlle Parker et Sydney. Ils ont été là pour moi, ils m'ont soutenu et aidé à traverser cette épreuve.
- Mlle Parker ? Quel était son rôle dans tout cela ? Non, ne me dis rien ! J'ai compris, il lui lança un clin d'œil.
- Tu n'y es pas Ethan. J'étais vraiment mal en point. Eh oui, Mlle Parker était là à mes côtés. Elle m'a apporté son écoute, ses conseils et son soutien. Tout comme Sydney qui m'a aidé à affronter mes démons intérieurs, à comprendre et à gérer mes émotions. Et grâce à eux, j'ai trouvé la force de continuer et d'avancer.
- Pourquoi a-t-il fallu que tu te tournes vers eux ? demanda Emily, étonnée.
- Parce qu'ils me connaissent, Emily. Ils savent qui je suis, ce que je suis et parce qu'ils savent comment je fonctionne ou encore ce que je peux ressentir.
- Et la faute à qui Jarod ? C'est le Centre, alors ne nous fais pas de reproches !
- Emily, ça suffit ! On aurait dû être plus présent pour toi, Jarod. Je suis désolé que tu aies dû affronter ça.
- Non, papa ne sois pas désolé, ça n'aurait rien changé. Depuis mon évasion du Centre, toute à pris une ampleur que j'en ai oublié le principal, ma santé. Ce n'est pas tout. Je veux vous parler de ma relation avec Mlle Parker. C'est très important pour moi.
- Vas-y, Jarod. Nous t'écoutons, Margaret s'asseyait côté de lui.
- Je sais que vous tous ne l'appréciez pas forcément. À part toi, Ethan, puisqu'elle est ta sœur.
- Tu te trompes, Jarod, personne n'a de griefs contre elle, rétorqua Charles en se servant un verre d'eau.
- Allons, soyons honnêtes. Ne me dites pas que personne n'a de rancœur envers elle ?
- Non, Jarod. C'est envers le Centre que nous avons des rancœurs, pas envers Mlle Parker spécifiquement. Nous savons qu'elle est liée à tout cela, mais en aucune manière, nous ne la tenons responsable de ce qui est arrivé. Elle aussi, c'est une victime tout comme nous.
- Mais tu l'as dit toi-même maman, elle est le Centre, il s'arrêta un bref instant, se leva pour aller à la fenêtre, puis reprit. Je suis sincèrement amoureux d'elle. Elle occupe une place très spéciale dans ma vie, et je ne veux pas avoir à choisir entre elle et ma famille. Ce choix, aussi difficile et déchirant, soit-il, ne serait jamais envisageable pour moi, mais je ne renoncerais jamais à elle. J'espère que vous pouvez le comprendre.
- Jarod, nous t'aimons et nous voulons ton bonheur avant tout. Si Mlle Parker te rend heureux, c'est tout ce qui compte, avait déclaré Margaret.
- Je suis désolée, je ne peux pas faire comme si tout allait bien. Je trouve cette relation difficile à accepter, Jarod, Emily se leva brusquement pour le rejoindre. Non, mais suis-je la seule ici à voir que cette femme t'a complètement retourné le cerveau ?
- Emily, je comprends que tu puisses avoir des appréhensions, mais je t'en prie, essaie de voir au-delà de tes préjugés. Elle ne m'a pas "retourné le cerveau", comme tu dis. Mlle Parker est une personne incroyable. Mes sentiments pour elle sont bien réels et je ne peux pas ignorer ce que je ressens.
- Tu es si amoureux d'elle que tu ne vois même pas qu'elle te manipule. Que feras-tu si elle décidait de te ramener au Centre ? Je refuse de voir mon frère s'investir autant avec une personne qui est liée à tout ce que nous avons vécu à cause d'eux. Je veux juste que tu sois prudent et que tu ne te fasses pas encore plus de mal.
- Emily, je te demande de me faire confiance et de respecter ma décision. Je suis conscient des risques, mais je suis prêt à les affronter pour vivre ma vie selon mes propres choix. Et j'espère qu'avec le temps, tu pourras accepter cette relation. » Emily quitta le salon, furieuse laissant Jarod avec le reste de la famille.
Les jardins du Centre, Blue Cove, Delaware
Elle déambulait seule dans les jardins du Centre, un lieu qui aurait dû être une oasis de sérénité, mais qui ne faisait qu'accentuer sa solitude. Perdue dans ses pensées, elle errait sans but précis, ses pas rythmés par une agitation sans fin. Son regard était vide, traduisant la douleur qui déchirait son cœur déjà meurtri. Devant elle, une étendue d'eau miroitante contrastait avec la noirceur qui dominait son esprit. Les arbres majestueux s'élevaient fièrement, leurs feuilles fournissaient une ombre épaisse et attristante tandis que l'absence de fleurs dans cet espace semblait symboliser parfaitement le caractère austère qu'était le Centre. Les pelouses impeccables, d'un vert éclatant, s'étendaient à perte de vue, invitant à la contemplation néanmoins dénuées de toute présence humaine paraissant inhospitalière. Chaque bruissement des feuilles, chaque souffle du vent semblait lui rappeler cruellement son amant. Le Centre, aussi imposant que sinistre, se dressait à l'arrière-plan. Ses murs de béton grisâtres reflétaient la froideur qui imprégnait l'organisation. Les fenêtres impénétrables, dépourvues de toute vie, renforçaient l'atmosphère oppressante qui régnait à l'intérieur. Dans ce tableau exempt de couleurs, Mlle Parker était une figure esseulée, égarée parmi les sentiers sinueux. Les rayons du soleil, perçaient à travers les branches des arbres, formant ainsi des motifs irréguliers sur le sol. Alors qu'elle continuait sa marche, le silence était seulement troublé par le chant lointain des oiseaux, comme des murmures désincarnés qui semblaient vouloir se moquer d'elle. Sydney, ami fidèle et confident l'observait à distance. Il était temps pour lui d'offrir une épaule sur laquelle elle pourrait se reposer. Il s'approcha d'elle avec précaution. Elle leva les yeux vers lui.
« Vous voulez en parler ?
- Vous allez me prendre pour une dingue.
- C'est au sujet du petit ?
- Non ! N'allez pas imaginer que je me fiche de ce qu'il pourrait lui arriver, non bien au contraire. Ce n'était pas à lui à qui je pensais. C'est à Jarod, elle cacha sa gêne dans ses mains.
- Écoutez, j'ai demandé à Broots de ralentir les recherches le concernant et de ne se concentrer que sur le bébé. Malgré tout, même si je me doute que vous savez où Jarod se trouve, vous savez qu'on ne peut pas empêcher le Centre de retrouver sa trace.
- Non, mais on peut retarder sa poursuite. C'est le moins qu'on puisse faire pour lui. Le Centre lui a volé sa vie et la seule chose qu'il demande en retour, c'est de passer du temps avec sa famille. Alors laissons-le tranquille !
- Qu'est-ce qu'il se passe ?
- Aujourd'hui, il aurait dû m'appeler, il ne l'a pas fait. Vous a-t-il laissé un message ou… ?
- Il vous manque, c'est ça ?
- Disons que je voudrais avoir de ses nouvelles.
- Maintenant qu'il est parti, vous êtes seule, confrontée à un immense vide. Vous avez l'impression qu'il vous a abandonnée.
- Non, je vous en prie. Ne m'analysez pas.
- Pourquoi ne pas l'appeler ?
- En fait, c'est très difficile pour moi. J'ai toujours gardé mes sentiments enfouis, cachés entre ces quatre murs alors l'appeler pour lui dire qu'il me manque ou que j'ai envie de le voir, ça je ne sais pas le faire. Sydney, l'autre soir, à l'hôtel, Jarod m'a avoué être amoureux de moi, et je... Je n'ai pas su quoi lui dire. J'ai bien essayé… Pourquoi a-t-il fallu qu'il me le dise ? Est-ce que je suis censé lui répondre la même chose ?
- Parker, il n'y a pas de réponse universelle à cette question. Peut-être devriez-vous vous poser une autre question : qu'est-ce que votre cœur ressent réellement pour Jarod ?
- Ce que je ressens pour lui est indescriptible. Je n'avais jamais éprouvé ça auparavant. Je n'arrive même pas à l'expliquer d'ailleurs. Seulement, je ne sais pas comment lui dire. Je n'ai pas la même facilité que lui à mettre mon cœur à nu. Je ne sais pas si je serai prête un jour à lui dire que…
- Que vous l'aimez ? Faites confiance à votre intuition. Il est normal d'être incertaine et de ressentir de la peur lorsque l'amour frappe à sa porte. Mais rappelez-vous que c'est aussi une force qui peut transformer vos vies si vous vous permettez de le vivre entièrement.
- Mais comment Sydney ?
- Vous pouvez commencer par être honnête avec vous-même, Parker. La sincérité est souvent la clé lorsqu'il s'agit d'avouer son amour. Parlez-lui ouvertement. Dites-lui simplement ce que vous éprouvez, en utilisant vos propres mots. Ne vous préoccupez pas de ce qu'il attend de vous ou de ce que vous pensez devoir dire. Soyez vous-même, naturelle et authentique.
- Vous avez raison Sydney, je vais essayer... J'essaierai de lui parler, de lui ouvrir mon cœur.
- Vous savez, la vie est faite d'incertitudes, Parker. Il n'y a pas de garanties, mais vous devez suivre votre propre chemin et prendre le risque d'être vulnérable. Si vous partagez vos sentiments, vous pourriez tous les deux trouver un bonheur inimaginable. Et même si au bout du compte, cela ne fonctionnait pas entre vous, au moins vous aurez eu le courage d'exprimer vos émotions. Regardez, tous les deux, vous avez déjà fait le plus dur. Alors lancez-vous ! »
Maison Bellcrest, Avon, Ohio 36772
Dans une semi-pénombre, Jarod, dans sa chambre, était allongé sur son lit, les lettres de Mlle Parker posées sur ses genoux. Les enveloppes encore scellées révélaient les pensées de sa bien-aimée. Il souffla, se préparant ainsi à les ouvrir et à en découvrir ses sentiments intimes. Alors qu'il s'apprêtait à saisir l'une des enveloppes, un coup frappa à sa porte. Jarod releva les yeux, légèrement contrarié par cette interruption inattendue. La porte entrouverte laissait apparaître Emily. Intriguée, elle examinait la pièce du regard, remarquant la pile de courrier qu'il posa délicatement sur la table de chevet. Elle bascula sa tête sur le côté afin d'en lire l'expéditeur. Il fit signe à Emily de s'asseoir sur le bord du lit.
« Je n'aurai pas dû réagir comme ça tout à l'heure.
- Ne t'inquiète pas. J'ai l'habitude. Parker aussi a le sang chaud !
- Qu'est-ce que c'est que ces lettres ? Pourquoi sont-elles toujours fermées ?
- Ces lettres ? Ce sont celles que Mlle Parker m'a écrites dans sa jeunesse. Elles ne sont pas encore ouvertes parce que je n'ai appris leur existence que très récemment. Et puis avec tout ce qui s'est passé dernièrement, je n'ai pas eu le temps.
- Je vais te laisser les lire tranquillement.
- Viens, Emily. Faisons un petit tour dans le jardin, proposa-t-il. Il y a des choses dont j'aimerais te parler.
Intéressée, Emily acquiesça et se releva. Ils sortirent de la chambre, empruntant le petit couloir jusqu'à atteindre l'immense jardin. Ils s'installèrent sur un banc, aucun des deux n'osaient prononcer une seule parole.
- Emily, je voudrais que l'on clarifie certains points, commença-t-il, ses yeux bruns fixés ceux de sa sœur. Je tiens d'abord à m'excuser pour mon comportement passé. J'ai été égoïste, distant, méchant. Ce n'était pas à toi ni à Ethan de subir ma mauvaise humeur. C'était injuste de ma part. Et je regrette de t'avoir fait de la peine.
- J'accepte tes excuses, elle embrassa la joue du caméléon.
- Avant mon départ, tu m'avais demandé de te parler de moi, de Mlle Parker et de ma relation avec elle. C'est ce que je vais faire, maintenant. Peut-être qu'en écoutant ce que je vais te dire, tu réaliseras qu'il n'y a pas de moi sans elle. J'aimerai aussi que tu fasses l'effort de comprendre.
- Je t'écoute Jarod, mais je ne crois pas que je changerai d'avis sur elle.
- Bien. Alors laisse-moi te parler un peu d'elle. Tout d'abord, Mlle Parker est une enfant du Centre. Son existence toute entière est liée à lui. Elle a grandi entre ces quatre murs tout comme moi, il respira faisant une pause avant de poursuivre. Elle menait une vie aussi normale que possible et ce malgré les circonstances. Jusqu'à la mort de sa mère. Ça l'a complètement détruite. Et encore aujourd'hui, elle est hantée par sa disparition tragique et brutale. Les souvenirs et les questions sans réponses l'obsèdent. Ce n'est pas facile pour elle. Sa mère, Catherine Parker s'était donné pour mission de sauver les enfants du Centre, dont moi.
- Comment vous êtes-vous rencontrés ?
- Notre rencontre est un jour que je n'oublierai jamais. C'est le 7 octobre 1969 que j'ai fait sa connaissance lors d'une expérience sur la sexualité. On avait une dizaine d'années. Jusque-là, je n'avais jamais vu de fille et quand elle est apparue devant moi, je ne sais pas comment te l'expliquer, mais j'ai su que ma vie serait liée à elle. Tu sais, c'est elle qui m'a donné mon premier baiser.
- Tu étais attiré par elle ?
- Eh bien, c'est à cet âge que l'on comprend l'attirance que peuvent éprouver les garçons envers les filles. Elle était plutôt jolie et gentille. Elle m'a fait un drôle d'effet. Enfin, à la suite de cette simulation, elle venait me retrouver assez régulièrement. Peu à peu, au fil du temps, nous avons développé des sentiments l'un pour l'autre et partagé une amitié sincère et durable. Oui, on était les meilleurs amis du monde et on l'est toujours. Malheureusement, les années passaient et elle avait fini par s'éloigner du Centre et de moi-même. Pendant qu'elle parcourait le monde, moi, je l'attendais. Oui, j'attendais son retour, impatiemment. Après ses études, elle est revenue au Centre suivre la trace de son père, mais elle avait changé. Elle était devenue si différente de la petite fille que j'avais connue… il se releva pour faire quelques pas, regardant le bout de ses chaussures.
- Comment est-elle ?
- Elle est assez complexe. À première vue, elle peut sembler froide, méprisante, et dure, mais derrière cette apparence se cache une âme profondément sensible. Elle est imprévisible, toujours en mouvement, et il est difficile de prévoir ses réactions. Pourtant, une fois qu'on la connaît vraiment, on découvre une personne incroyablement douce, attachante, passionnée. Elle s'investit corps et âme dans tout ce qu'elle entreprend. Qu'il s'agisse de son travail, de ses relations ou de ses intérêts personnels, elle se donne entièrement, refusant de se contenter de la médiocrité. Son ambition la pousse à repousser les limites, à se dépasser constamment. Et lorsqu'elle laisse les autres entrer dans sa vie, elle se révèle être une amie loyale, prête à tout pour eux. Elle est une énigme fascinante, une toile d'araignée tissée de contradictions. Mais c'est précisément cette complexité qui la rend si captivante, si exceptionnelle.
- Jarod, tout ce que tu me dis est très joli, mais rien ne me prouve que cette femme ne finira pas par te trahir, un jour, elle se leva à son tour pour lui faire face.
- Ce que je crois, Emily, c'est que ça n'a rien avoir avec Mlle Parker. Alors dis-moi, c'est quoi le problème ?
- Tu veux savoir, c'est quoi le problème ? C'est toi, Jarod !
Jarod, étonné par la réponse cinglante de sa sœur, la regarda avec une expression quelque peu confuse et incompréhensible. Il avait espéré une conversation plus calme et constructive, mais Emily semblait bouillir d'une rage contenue. Elle était remplie de rancœur. Debout, devant lui, elle croisa les bras, ses yeux lançaient des éclairs de fureur. Il chercha à comprendre les raisons de son ressentiment envers lui.
- D'accord, Emily. Explique-moi ce que tu veux dire par "c'est toi, Jarod."
- Depuis ton retour, tout tourne autour de toi. Tout le monde est obsédé par toi, par tes talents, tes aventures. Le Centre qui est toujours à ta recherche, Mlle Parker et Sydney sont toujours à tes côtés. Et moi, dans tout ça ? Je me situe où moi ? Je me sens complètement délaissée, comme si je n'existais pas !
- Emily, je ne savais pas que tu te pensais ça. Tu dois comprendre que mon retour ne signifie pas que tu es moins importante. Je n'ai jamais voulu te faire sentir négligée ou oubliée.
- Ce n'est pas seulement maintenant, Jarod. Depuis que je suis née, il n'y en a eu que pour toi. « Jarod par-ci, Jarod par-là. Jarod où es-tu ? » Toi et seulement toi ! Alors que tu avais été enlevé, tu es toujours resté le centre de l'attention. Tu étais le prodige, le Caméléon, le petit garçon kidnappé. Celui que l'on pleurait chaque jour, chaque mois, chaque année. Et moi, j'étais là, dans ton ombre. J'ai toujours eu cette impression d'être une personne insignifiante, inférieure comparée à toi. De n'être personne tout comme toi ! À l'inverse de toi, je n'étais ni enlevé ni admiré ni recherché.
- Oui, je me rends compte que cela n'a pas dû être facile pour toi.
- Facile ? Je sais que pour toi ça a été dur, Jarod, mais dis-toi que nous non plus, nous n'avons pas eu la belle vie. J'ai mis ma vie en suspens pour vous retrouver toi et Ethan. Papa et maman ont passé la moitié de leur existence à te chercher et à te sauver des griffes du Centre alors quand tu vante les mérites de ceux qui t'ont arraché à ta famille, tu vois, je ne peux pas l'accepter. Je crois finalement que tu as eu plus de chance que moi. Parfois, être ta sœur est un rôle que j'ai du mal à assumer. Et aujourd'hui, il est temps que je passe à autre chose. Moi aussi, j'ai mes propres rêves, mes propres aspirations. Et j'en plus qu'assez de t'entendre me parler de Mlle Parker.
- Emily, sache que tu es une personne extraordinaire à part entière, indépendamment de ce que je suis ou de l'attention que je reçois et je te promets que je ferai de mon mieux pour te soutenir et te montrer que tu es importante pour moi. Je veux te voir réussir, réaliser tes rêves. Tu es bien plus qu'une ombre dans ma vie, tu es ma sœur.
- J'aimerais que tu ne sois jamais revenu dans nos vies. » lâcha-t-elle naturellement.
Maison de Mlle Parker 431 Mountain Spring Drive, Blue Cove, Delaware, 01991
Mlle Parker était rentrée chez elle depuis un petit moment déjà. Elle tournait en rond repensant à la conversation qu'elle avait eu avec Sydney plus tôt dans la journée. Elle marchait de long en large dans sa maison, le téléphone fermement en main, son regard était obnubilé par l'écran, hésitant entre deux options : soit appeler son amant soit attendre qu'il la contacte. D'un côté, elle ressentait un besoin pressant de parler à Jarod, de l'entendre, de sentir sa présence même à travers la voix au bout du fil. D'un autre côté, elle craignait de paraître trop vulnérable en le contactant en premier. Elle était Mlle Parker, après tout, une femme forte et indépendante et elle ne voulait pas donner l'impression d'être trop désespérée, même si elle l'était secrètement. Elle se demandait si Jarod pensait à elle. Elle se surprit à taper son numéro, prête à appuyer sur la touche d'appel, mais s'arrêta au dernier moment. L'incertitude s'empara d'elle. Et si Jarod ne répondait pas ou s'il semblait distant ? Alors, elle reposa son mobil, choisissant d'attendre encore un peu. Peut-être qu'il téléphonerait bientôt. Peut-être qu'il ressentait le même besoin de lui parler. Peut-être qu'il était en train de composer son numéro en ce moment même. Luttant contre l'envie de céder à ses pulsions et de joindre Jarod, elle s'installa dans un fauteuil, les mains crispées sur son téléphone attendant patiemment, les paupières closes. Les minutes avançaient lentement, tandis que finalement ses doigts agacés appuyaient sur la touche verte de son clavier. «Allô? » avait-elle dit, sa voix tremblait légèrement. Personne ! Elle pouvait presque entendre les battements de sa poitrine dans ses oreilles. Jarod, avait-il décroché ? Où était-ce juste un autre silence décevant ? Elle raccrocha déçue, mais soulagée refusant d'admettre à voix haute à quel point elle avait hâte d'entendre le son de sa voix. Cependant, son cœur était en conflit avec sa fierté, elle avait du mal à gérer l'absence de Jarod. Elle se sentait comme une adolescente éperdument amoureuse dont les hormones étaient en pleine ébullition, se tortillant les doigts d'anxiété à l'idée de lui avouer ses sentiments. Le bip de l'appareil se faisait entendre.
« Quoi ?
- Salut, c'est moi. Tu m'as appelé ?
- Moi ? Non. C'est sans doute une mauvaise manipulation.
- Sans doute. Alors comment ça va ? il marchait le long du jardin.
- Oh, tu sais, la routine... La recherche du bébé, la traque d'un caméléon qui se fait plutôt rare, Lyle et Raines qui joue les apprentis sorciers… Rien de bien excitant, répondit-elle avec un léger sarcasme. Et toi ?
- Moi ? Oh, je suis toujours à la recherche de ma propre identité, essayant de réparer les torts que j'ai causés. Rien de bien facile non plus, il s'appuya contre un chêne.
- Alors nous sommes tous les deux des âmes en perdition, n'est-ce pas ?
- Oui, deux âmes en perdition qui se comprennent mutuellement, répliqua Jarod, essayant de faire preuve d'optimisme.
- Il y a une certaine consolation à savoir que nous ne sommes pas seuls dans ce chaos.
- Exactement. Et tu sais quoi ? sa voix était soudain teintée de malice. Je pense que nous devrions faire une pause et nous retrouver à l'hôtel de New-York. Juste toi et moi, un petit moment de répit. J'ai besoin de te voir.
- Ce week-end, j'ai quelque chose de prévu, rougissante, elle mentait.
- Ah ? Tu ne peux pas te décommander ?
- Hmmm, attend voir… Je ne sais pas, Jarod…. Peut-être que… D'accord. Mais fais attention, je pourrais être tentée de te révéler tous mes sombres secrets.
- Je les attends avec impatience, répondit-il d'un ton enjoué.
- Qu'est-ce qu'il se passe, Jarod ? elle reprit son sérieux.
- Je me suis trompé, Parker. Je croyais que ma famille serait heureuse de me revoir, que nous pourrions enfin recoller les morceaux et retrouver ce lien perdu. Et que l'on pourrait former à nouveau une vraie famille. Mais... cela ne s'est pas passé comme je l'espérais.
- Jarod, les relations familiales peuvent être compliquées. Elles sont souvent remplies de blessures et de ressentiments accumulés au fil du temps. Mais cela ne signifie pas que tout est perdu. Tu es un homme exceptionnel, et je suis convaincue que tu trouveras le moyen de te montrer à la hauteur et de réparer les torts.
- Oui, j'imagine.
- Écoute-moi, j'ai vu ta persévérance et ta capacité à changer la vie des autres. Si quelqu'un peut surmonter les obstacles familiaux, c'est bien toi. Tu as déjà gagné mon cœur, et je sais que tu peux gagner le leur aussi.
- Merci, Parker. C'est réconfortant de savoir que toi, tu crois en moi. Je vais trouver un moyen d'arranger les choses avec ma sœur. Nous en avons tous les deux besoin. On se revoit à New-York ?
- À New-York ! »
La conversation se termina, laissant Mlle Parker sur un petit nuage alors qu'elle raccrochait, elle ne pouvait s'empêcher d'afficher un sourire heureux sur son visage, une légère exaltation parcourra tout son être. L'idée de le retrouver à l'hôtel de New-York pour le week-end la comblait de joie. Elle se voyait déjà enfermés dans leur suite à faire l'amour toute une partie de la journée puis marchant dans les rues de la grande pomme, main dans la main, se fondant dans la foule tandis qu'ils s'échappaient de leur quotidien pour vivre des instants volés, intenses, passionnés et inoubliables. Elle s'imaginait riant tous les deux aux éclats, partageant des conversations complices. Le temps s'écoulait lentement jusqu'au jour du rendez-vous, mais chaque minute qui passait ne faisait qu'amplifier l'excitation qui bouillonnait en elle. Ainsi, les yeux fermés, Mlle Parker, se préparait à s'évader une fois de plus dans les bras de son caméléon.
