Arthur était appuyé contre le cadran de sa fenêtre, regardant depuis là, les vastes jardins avec angoisse. Merlin était parti avec Guenièvre depuis un moment maintenant. Une heure au moins, peut-être plus. Qu'avait-il fait à Guenièvre ? Pourquoi l'absence de Merlin le pesait autant. Il n'avait qu'une envie c'était de sortir de cette pièce mais peu importe combien il s'efforçait d'ouvrir la porte elle ne cédait pas. Il soupçonnait son serviteur de l'avoir enfermé. Mais pourquoi ? Se doutait-il du mal qui l'atteignait. Arthur s'appuya un peu plus contre le mur de pierre froide. Ses jambes ne le portaient plus. La fatigue l'étreignait mais l'angoisse et la faim le maintenaient durement éveillé. Il avait tenté d'avaler la potion de Gaius mais après seulement une petite gorgée il avait eu l'impression de pouvoir rendre l'entièreté de son estomac, pourtant vide depuis longtemps. Il n'arrivait pas à croire que tout cela avait commencé il y a seulement deux jours alors qu'il avait le corps et l'énergie de celui qui ne mangeait plus depuis des mois. Dans son dos, il entendit le cliquetis du verrou de sa porte. Il savait donc pertinemment qui était celui qui rentrait sans même avoir à se retourner.
-Comment va-t-elle ?
-Gaius à dis qu'elle n'avait rien, qu'elle dormirai seulement un moment.
-C'est vraiment moi qui lui ai fait ça ? Arthur finit par se retourner face à Merlin qu'il n'avait jamais vu aussi nerveux de sa vie, malgré tout ce qu'ils avaient traversé ensemble.
-Non, c'est Morgane au travers de vous. Je vous déconseille de l'approcher de nouveau, ni elle, ni aucune femme de la cour pour le moment.
-Alors tu sais ce que j'ai ?
Merlin regarda Arthur dans les yeux, de la culpabilité plein le regard encore même qu'il n'avait rien fait.
-Oui.
-Alors qu'attends tu pour me le dire Merlin !
Le jeune sorcier baissa les yeux pleins de honte.
-Si je vais mourir dis le moi sans détour. Je m'y suis préparé depuis ces deux derniers jours.
-Morgane vous à changer en succube.
-Quoi ? Non c'est impossible. Mon père m'a parlé longuement de ses créatures pour me mettre en garde… Ce sont des femmes.
-Pas toutes.
Arthur dut s'adosser contre la fenêtre pour ne pas tomber. Son esprit filait à toute allure. Comment Morgane pouvait elle utiliser ce genre de méthode. N'était elle pas elle aussi une Pendragon ? N'avait il pas été élevé ensemble, les fondements de leurs éducation basé sur l'honneur ? Si, elle ne le savait que pertinemment et voilà pourquoi elle utilisait ce genre de sortilège. Pour le détruire et en cet instant il semblait qu'elle avait réussi. Il sentait une douleur immense dans sa poitrine. Une partie de son âme se déchirait…
-Je … Je ne comprends pas … Si je suis ce que tu dis … Alors pourquoi Guenièvre s'est senti mal …
-Les succubes rendent toujours les filles attractives malade pour les éloigner d'elles, ainsi elles peuvent avoir la main mise sur leur nourriture …
-Leur nourriture tu dis … Des hommes. Alors c'est ça ? Je vais mourir de faim a moins que je … Que je…
-Que vous ne le faisiez avec des hommes, oui.
Une larme roula sur la joue du jeune roi. Il plaqua sa main à sa bouche dans un cri inaudible qui perfora tout de même jusqu'au fondement de l'âme de Merlin. Le meurtrissait encore plus ce qu'il s'apprêtait à faire. Ce qu'il devait faire maintenant.
-Gaius à un remède pour que vous redeveniez un simple humain. Mais la confection de ce remède dure un mois entier, sans quoi il est inefficace.
-Un mois ? Crois tu vraiment que je puisse tenir jusque là ?
-Je vais être honnête avec vous Arthur, puisque c'est ce que vous désiriez plus tôt. Les prunelles de Merlin étaient résolues et brillaient d'une détermination fatale. Face à de tels yeux, Arthur ne dit mot, soudain terrifié.
-Si vous ne vous nourrissez pas, demain vous mourrez. Trois jours depuis l'infection. C'est tout ce qu'il faut. Mais vous n'allez pas mourir. Vous allez manger.
-Non… Murmura Arthur troublé. Non, pas même sous la contrainte. Plutôt mourir.
Merlin déglutit difficilement et se rapprocha un peu plus d'Arthur. Un pas à peine les séparait à présent.
-Vous rappelez vous ce que je vous ai promis hier ? Même s' il faut vous gaver de force Arthur, je ne vous laisserai pas mourir.
-Alors quoi ? Tu vas appeler tous mes chevalier pour qu'ils baisent leur roi ? Vas-tu m'humilier de la sorte ? Je mourrai avec honneur plutôt que de me souiller.
-Personne d'autre que Gaius et moi ne serons jamais au courant de ce qu'il se sera passé.
-Toi. Merlin ?
Merlin dévisagea son roi si bien que celui-ci comprit qu'il ne s'agissait pas d'une farce cette fois-ci. Son serviteur était on ne peut plus sérieux.
-Je ne te laisserai jamais me toucher. Le défia Arthur.
-Croyez-vous que vous êtes vraiment en mesure de m'arrêter dans l'état où vous êtes majesté ?
-Tu oserais ?
-Pour vous sauvez la vie, oui. Même si vous me haïssez à jamais par la suite. Même si vous me faites pendre haut et court dès que vous serez guérit. Rien ne m'arrêtera.
Pour appuyer son propos, il franchit le dernier pas qui le séparait de son roi, le pressant contre la fenêtre froide. Leurs visages à quelques centimètres l'un de l'autre.
-N'est ce pas vous sire qui trouviez mon odeur alléchante ? Comment est-elle à cet instant ?
Arthur serra les dents. C'est vrai. Il le sentait monter en lui, le désir. Mais il n'était pas faible et il refusait de s'y soumettre.
-Si je suis une succube tu mourras en à peine deux jours… Autant mourir pur. Et pour toi aussi Merlin, ne crois pas que je ne le ferai pas. Si tu me touches, je te ferai pendre.
-Je tiendrai bien plus que deux jours croyez moi, et vous aurez deux raisons de me pendre.
-Quoi ? Que veux-tu dire ?
-Si c'est moi qui suis là pour vous nourrir ce n'est pas un hasard. Si j'étais un simple mortel ne croyez- vous pas que j'aurais missionné Gauvain et Perceval et qui sais-je d'autres pour, ne serait-ce qu'avoir une faible chance de sortir de ce moi en vie?
-Mais tu ne les as pas prévenu ?
-Je n'ai prévenu personne. Pour la court vous avez une maladie contagieuse qui vous forcera à rester dans vos appartements.
-Pourquoi es-tu aussi sûr que tu ne mourras pas ?
Merlin rapprocha ses yeux de ceux d'Arthur. Et d'une étincelle, il vérouilla la porte derrière lui, tira tous les rideaux de la pièce et enflamma toutes les mèches des bougies. Face à ça, le roi resta figé de stupeur.
-T…Tu…
-Je suis un magicien Arthur. C'est pour cela que vous me ferez pendre officiellement. Voyez, comme ce sera facile pour vous.
-Co… Comment je n'ai pû rien voir .. Depuis.. Combien de temps?
-Je suis né ainsi. Je n'ai pas voulu le devenir. Je l'ai caché très longtemps. Et lorsque je suis arrivé ici je m'en suis servie pour sauver la vie d'un petit prince arrogant. Et je me suis senti utile enfin. J'ai réussi à me voir comme autre chose qu'un monstre. Dès lors, je me suis entièrement dévoué à votre survie. Et je ne compte pas m'arrêter.
Arthur le regardait sans rien comprendre. Comment ? Merlin était le symbole de la loyauté et de l'amitié tiré à son extrême. Comment pouvait -il être associé à quelque chose d'aussi maléfique que la magie…
Merlin saisit les poignées d'Arthur pour l'empêcher de le repousser et apposa ses lèvres sur les siennes. Tout le corps du jeune roi trembla à ce simple contact. Délicatement Merlin s'éloigna à demi du visage, toujours troublé, d'Arthur.
-Pourquoi .. Avoir donné ce goût là à tes lèvres, toi le magicien ? Questionna t'il avec dédain.
-Je n'ai donné aucun goût à mes lèvres.
-Alors pourquoi ont elles le goût de tout ce que je t'ai avoué vouloir manger ?
-De quoi parlez-vous ?
-De la rhubarbe, de la groseille et du caramel ! Commença à s'emporter Arthur que toutes ses révélations et sensations nouvelles avaient rendu à fleur de peau.
Merlin eut un faible sourire désolé pour lui. Les yeux pleins du désespoir d'avoir déçu la personne qu'il estimait le plus.
-Je suis tellement désolé Arthur.. Mais avec ce que vous venez de me dire je ne peux arrêter. C'est la seule chose à faire pour vous sauvez.
-Non. S'il te plaît… Merlin… Je t'en conjure …
Les larmes roulaient sur les joues du serviteur.
-Je ne peux pas vous écoutez monseigneur… S'il vous plaît …
La peur se lisait sur le visage du roi car il savait très bien la détermination dont était capable son fidèle acolyte. Les joues d'Arthur se mouillèrent aussi de larmes. Et c'est pleurant tous les deux la perte inévitable de l'autre, qu'ils s'embrassèrent.
